Chapitre 31

4 minutes de lecture

La reine des ténèbres et du printemps

Je bichonnai une dernière fois mes chères plantes avant de rejoindre la sale du trône où il était enchainé. J’avais une très bonne nouvelle à lui annoncer et je me réjouissait déjà de voir sa réaction.

Mes talons claquaient agréablement sur le carrelage d’une teinte bleu nuit du couloir. En passant devant une psyché, je m’arrêtai un instant pour m’admirer. Ma robe était faite d’une succession de voilage noir et or, qui laissait apercevoir ma peau diaphane. Elle épousait à la perfection ma silhouette et me mettait en valeur. Satisfaite de l’image que me renvoyai mon reflet, je continuai mon chemin jusqu’à atteindre deux battant fait d’un bois brut. Aucun ornement ne les habillait.

Je pénétrai dans la pièce. Elle était très grande et une grande cheminée l’a réchauffait. Il était en plein centre de la salle, maintenu par des chaînes spécialement conçues par Héphaïstos pour le garder emprisonné. Le poison que contenait les entraves l’empêchait d’opérer le moindre geste et cela le rendait complètement amorphe. Sa tête reposait sur sa poitrine nue, il semblait endormi.

D’une démarche sensuelle, je m’avançai jusqu’à lui et je passai mes ongles manucuré de rouge sur son torse ciselé.

—Mon chéri, je dois t’avouer un secret, lui susurrai-je au creux de l’oreille d’une voix aguicheuse.

Il ne me regarda pas et me répondit encore moins, on aurait dit que je n’existai pas. Or, je savais qu’il était éveillé. Agacée, je pinçai son menton entre mon pouce et mon index et lui relevai la tête.

—Tu ne veux pas savoir ce que j’ai à te révéler ?

—Non ! me répondit-il d’une voix lasse et à peine perceptible.

Mon si puissant époux était à ma merci. Mon père m’avait autorisé à le garder or d’état de nuire pour éviter tout intervention de sa part. Il nous avait trahi.

Il m’avait menti.

Il m’avait trompé.

Il devait être puni.

Cela faisait des jours qu’il était lié à son trône et je m’en délectai. Ne voyant aucune réaction de sa part, je décidai de jouer avec lui.

—Très bien, je ne te raconterai pas ce qu’il s’est passé avec ta fille, déclarai-je en faisant mine de m’en aller.

Il redressa le buste soudain alerte.

—Hestia ! Que lui avez-vous fait ? hurla-t-il.

Sa colère était telle, qu’une secousse sismique ébranla le palais souterrain. Des morceaux de roches vinrent s’échouer non loin de moi, me faisant reculer vers la sortie.

—Oh, ne te mets pas en colère mon amour, ricanai-je.

—Où est ma fille ? gronda-t-il d’un ton caverneux en essayant de se défaire de ses chaînes.

Ses yeux étaient devenus d’un noir abyssal et il s’échappait de son corps des flammèches rougeoyante.

—Père a envoyé L’aigle du Caucase pour l’assassiner, il est parvenu à tuer la nymphe et l’enfant, mais avec ta fille le pauvre a échoué, elle l’a littéralement massacré.

Un sourire fier et carnassier se dessina sur les lèvres d’Hadès, il était content que sa gamine ait vaincu le volatile, pourtant il allait vite déchanter.

—Hestia ne se laissera pas faire, crois-moi, vous allez vous mordre les doigts !

—J’ai fait enfermé la traitresse et son fils au Tartare, entendre leur gémissement de terreur et un réel plaisir.

—C’est moi le seigneur des enfers ! Ils doivent se rendre dans les champs Elysées, ils n’ont rien à faire dans cette prison ! Zéphyr n’a que cinq ans comment peux-tu être aussi cruelle ! s’offusqua-t-il.

—Elle a recueillie ta progéniture, elle doit payer pour cet affront ! le sermonnai-je.

—Tu n’as pas de cœur Perséphone, tu me dégoute.

La répulsion qu’afficha son visage fut comme un coup de poignard pour moi. Dire qu’il y avait de cela des années il affirmait qu’il m’aimait.

—Tu as gâché ma vie, et tu ose me dire que je suis inhumaine !

Lui crachai-je à la figure. Comment pouvait-il me considérer de la sorte, j’étais sa femme et par-dessus tout la fille du maitre des cieux, il me devait le respect.

—C’est toi qui a accepté de manger la grenade ! Je ne t’ai pas envouté, tu as choisi en âme et conscience !

—Tu m’as privé de la chaleur du soleil, de la douceur du vent et par-dessous tout, tu m’as arraché à ma mère.

—Parce que je t’aimais et je pensais que mes sentiments étaient partagés ! Où est passé la douce Corée, la jeune fille si belle et si attachante ?

Ses cheveux d’ébènes encadraient son visage aux traits nobles, il pensait m’adoucir avec ses belles paroles. Il se trompait.

—Tu l’as détruite ! Tu ne dois t’en prendre qu’à toi-même Hadès, tu es égoïste, fis-je d’un ton plein de fiel et d’amertume.

—Si le pouvoir ne t’étais pas monté à la tête, j’aurais élever Hestia ici avec toi.

Un rire cristallin s’échappa de ma gorge à l’entente de ses mots.

—Tu voulais que je m’occupe d’un bébé braillard, je n’aime pas les enfants, ils n’apportent que des problèmes, la preuve ta fille.

—Détache-moi et je promets de t’épargner ! me dit-il.

Son timbre fit vibrer le sol et les flammes dans l’âtre s’élevèrent en sifflant avec violence.

Téméraire, je m’approchai de lui en faisant semblant d’obéir à ses ordres. Avec vivacité, j’entrouvris le pendentif qui reposait contre ma peau, l’ouvrit et y trempait un ongle. Ce dernier devint noir et je le plongeais dans le bras de mon époux. Il s’égosilla, il essaya de me repousser, de briser ses fers, sans aucuns résultats. Le venin provenait d’une de mes plantes, cela le maintiendrait dans un état stone, entre conscience et inconscience.

—Zeus, va envoyer le lion de Némée pour enfin tuer ta fille.

Sur cette dernière information, je m’en allais en le laissant ainsi, seul et enchainé.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Selmarin 19 ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0