Chapitre 30

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Hestia

Le parc était gigantesque, il s’étendait sur des kilomètres. Arès nous invita à le suivre pour nous guider dans le labyrinthe de verdure jusqu’à sa maison. Je cheminai aux côtés d’Apollon et profitai de cet instant pour lui poser des questions.

—Quel est cet endroit ? le questionnai-je en contemplant la beauté des roses qui s’épanouissaient dans le jardin.

Apollon me sourit avec chaleur.

—Il s’agit d’une sorte de monde parallèle entre l’Olympe, la terre et l’enfer. Nous y avons tous une demeure, m’expliqua-t-il.

Si j’avais bien compris, l’univers était divisé en quatre dimensions. Je pensais qu’il n’y en avait que trois, le ciel, la terre, et le monde souterrain, j’en apprenais plus chaque jour.

—Oh, et qu’entendez-vous pas nous ? Ce monde a-t-il un nom ? ne pus-je m’empêcher d’ajouter, j’étais très curieuse et ma soif de savoir n’était jamais sustentée, surtout que ne connaissais pas bien les coutumes des olympiens.

Il m’adressa un clin d’œil enthousiaste.

—Je parle des autres Rois et Reines. Ce monde n’a pas vraiment de nom, nous le nommons juste la petite Olympe car il s’agit pour nous d’une représentation de la vraie et c’est un havre de paix, dans la noirceur qu’est devenue la vraie Olympe.

—Pourtant l’Olympe est censée représenter la lumière, fis-je remarquer.

—C’est vrai ! Autrefois, je ne la quittai jamais mais mon père l'a complètement détruite. Le palais où j’avais mes quartiers est à présent délabré, la forêt enchantée est devenue un repaire pour les monstres, ils tuent quiconque la traverse. Les enfers feraient figure de paradis à côté, rien n’est plus comme avant, tout a changé du jour au lendemain.

Son ton était triste, cela l’affectait de voir le déclin d’un monde censé être parfait.

—A cause d’une histoire de jalousie ? ajoutai-je en reprenant les paroles de la Reine des foyers.

Il hocha la tête et entreprit d’écarter une branche d’arbre qui obstruait le passage.

—Zeus n’a pas supporté que son peuple, tant les humains que les créatures magiques, se révolte contre lui. Il estimait que sa place sur le trône était légitime, après avoir terrassé son père Chonos et les Titans.

—Pourquoi les gens se sont-ils rebellés alors qu’il les a sauvés ? Il doit avoir fait quelque chose pour attiser leurs haines.

—C’est ça le problème, il ne faisait rien ! Des conflits éclataient, des gens mouraient de faim et il lui il restait sur son siège en or à profiter de l’opulence que lui conférait son statut.

Je haussai les sourcils, étonnée par ces révélations.

—Vous aussi vous n’avez pas levé le petit doigt pour aider le peuple. Si je me souviens bien de mes cours d’histoires mythologique, les Maitres et Maitresses sont souvent les instigateurs des guerres qui ont sévi sur terre.

—Tu es très perspicace petite fleur, pourtant ce que tu dis est vrai. Nous étions égoïstes et il a fallu que le seigneur des cieux nous prive de notre libre arbitre, de notre liberté, pour que nous ouvrions les yeux sur toute la misère que nous avions occasionnée.

—Est-ce pour cela que vous m’aidez? Pour vous racheter de votre comportement passé ?

Il passa une main nerveuse dans ses cheveux. Il était inhabituel pour moi, de le voir ainsi perdre sa belle assurance.

—Je t’aide parce que tu ne mérites pas de mourir et parce que je t’apprécie beaucoup, m’avoua-t-il d’un air fébrile.

—Ecoutez, je veux que les choses soient claires entre nous ! Je suis amoureuse de Danaos depuis toujours et rien ni personne ne me fera changer d’avis.

—Tu aimes ce crétin, s’exclama-t-il abasourdi.

—Oui ! Je sais qu’il n’est pas parfait, moi non plus d’ailleurs, néanmoins je ressens des fourmillements extraordinaires quand il est là. Il arrive toujours à me rendre le sourire et il est toujours la pour moi, pour me protéger.

Il était bizarre de me confier ainsi au seigneur qui incarnait la beauté masculine, car il ne supportait pas mon ami et qu’il avait des vues sur moi.

—Il ne te mérite pas ! Je pourrai te donner tellement plus que lui !

Je l’arrêtai en levant la main.

—C’est ainsi, vous devrez vous contenter de mon amitié.

—Tu es puissante Hestia, lui n’est qu’un simple mortel et toi tu es la princesse des Ténèbres.

—Gardez vos préjugés pour vous ! Ce n’est pas parce que mon père est un seigneur et le sien un humain que nous ne pouvons pas nous aimer, c’est absurde !

Je fulminai face à la bêtise de ses propos.

—Tu es destinée à accomplir de grandes choses, il ne fera que te freiner.

—Vous dites cela, parce que vous êtes jaloux, rien de plus !

—Je ne fais que pointer du doigt la triste réalité, gronda-t-il exaspéré.

Je pressai le pas afin de le distancer. Je ne pouvais pas rester une minute de plus avec lui, tant il m’énervait. Au loin, j’aperçu les tourelles de la demeure. Elle semblait immense. Mes amis avaient dû me distancer, sans que je ne le remarque, car ils n’étaient plus derrière moi. Apollon m’avait accaparé trop longtemps. Ce dernier ne lâcha pas l’affaire et il m’attira sous le couvert d’un arbre et me plaqua sur son écorce qui me mordit la peau. L’homme doux et attentionné avait fait place à l’homme violent et cruel.

—Lâchez-moi immédiatement ! criai-je en lui lançant un regard noir.

Ses yeux étaient réduits à deux fentes coléreuses et sa respiration s’était faite chaotique.

—Tu vas m’écouter avec attention chérie. Les sentiments que tu éprouves pour cet imbécile d’humain sont éphémères ! Tu as du mordant, mais je te trouves bien naïve avec lui, surtout qu’il semble s’être entiché de la nymphe des bois, il ricana et continua, il a sans doute raison, elle a des courbes voluptueuses et fait plus femme que toi. Tu ressembles à une gamine rachitique, susurra-t-il.

Je pinçai les lèvres et lui assenait une gifle retentissante pour m’avoir ainsi insulté.

—Vous êtes un animal !

Je tentai de m’échapper de son emprise, toutefois il agrippa ma nuque dans une poigne ferme et me serra contre son torse puissant. Je n’aurais peut être pas dû le suivre, la lueur de lubricité qui traversait ses pupilles dilatées m’effrayait. Une veine gonfla sur son front. Non bouches étaient à quelques centimètres l’une de l’autre et il était hors de question qu’il m’embrasse.

—hum, tu es sublime lorsque tu t’énerve, néanmoins il faudrait te remplumer un peu, me souffla-t-il à l’oreille. Accorde-moi un baiser et je te relâcherai. Tu me le dois bien, je t’ai sauvé la vie.

L’histoire recommençai, il agissait comme lors de notre première rencontre. Il était bipolaire ce n’était pas possible autrement.

—Vous êtes fou, ma parole !

—De toi oui, ma douce.

Il avança son visage vers moi et je détournai la tête juste à temps. Ses lèvres se posèrent sur ma joue et il la butina de baiser. J’essayai de le repousser, en vain, je n’avais pas assez de force.

Une odeur boisée et musquée me titilla les narines. Elle était très enivrante, j’inspirai à fond et plongeais mon nez dans le cou d’Apollon. Il sentait terriblement bon et je me lovai tout contre son buste ferme et brulant.

—C’est ça chérie, laisse-toi aller, ronronna-t-il en me caressant le dos.

Il était si beau, si viril, si…

— « Il t’ensorcelle, ressaisi-toi Hestia », m’invectiva ma conscience.

J’aurai dû m’en douter qu’il allait utiliser sa magie sur moi. Je secouai la tête pour me réveiller de la torpeur dans laquelle il m’avait plongé et lui envoyai un coup de genoux où ça faisait mal. Il se tordit de douleur et j’en profitait pour m’enfuir.

—Hestia, hurla-t-il furibond.

Je ne me retournai pas et couru jusque dans la maison d’Arès qui se profilait à l’horizon.

***

—Hestia, retenti la voix de Rallyeso.

—Je ne veux parler à personne, lui répondis-je d’un ton morose.

—Ma chérie, t’enfermer dans le mutisme ne servira à rien au contraire, il faut que tu exprime ce qui te pèse.

Après avoir semé Apollon, je m’était réfugiée dans la chambre que l’on m’avait attribué en ignorant tout le monde. Ils pensaient que je boudais comme une gamine capricieuse, alors que pas du tout. Je mettais le plus de distance possible entre moi et le seigneur bipolaire. Dire que je lui avait fait confiance, parce que j’avais oublié à quel point il était faux et manipulateur. Il m’avait bien berné avec ses belles paroles mielleuses.

Rallyeso s’assit au pied de mon lit et me demanda la mine inquiète :

—Que s’est-t-il passé hier avec Apollon ? Danaos ne te voyant pas revenir est parti à ta recherche et lorsqu’il est revenu il était furieux et il s’est enfermé dans sa chambre comme toi.

—Figure toi qu’Apollon ma plaqué contre un tronc d’arbre et qu’il a essayé de m’embrasser de force, parce que je lui ai annoncé qu’il n’y aurait jamais rien entre nous, sauf de l’amitié et que j’étais amoureuse de Danaos.

Ses yeux s’arrondirent de stupeur.

—Il a reproduit la même chose que l’autrefois. Je suis désolée Hestia, me dit-elle en m’effleura la joue avec ses doigts graciles.

—Monsieur est monté sur ses grands chevaux en me racontant des choses absurdes. Déjà que je ne suis pas vraiment bien en ce moment il faut qu’il en rajoute une couche, explosai-je.

Mon amie me rit dans ses bras et me serra fort contre sa poitrine pour m’apaiser et cela fonctionna. Elle avait un don.

—Ne fais attention ni à Apollon, ni à Danaos, concentre-toi simplement sur la mission que tu dois accomplir.

J’opinai du chef, cependant quelque chose me pesait encore sur le cœur.

—Est-ce qu’il y a un truc entre toi et Dano ? la questionnai-je d’une petite voix à peine audible.

Je me sentais pathétique de lui demander cela, néanmoins je devais savoir ce qu’il en était.

Elle secoua ses boucles rousses flamboyantes et ses opales s’ancrèrent à mes yeux vairons.

—Je te le jure Hestia, qu’il n’y a rien entre nous, sauf de l’amitié. C’est toi qu’il aime, n’en doute pas.

Je rougis un peu honteuse et surtout soulagée. Toute sa personne transpirait la vérité, elle ne m’avait pas trahi.

Je passai le reste de la journée avec elle, à me faire bichonner. Ce petit moment entre fille me fit beaucoup de bien et cela me rapprocha encore plus de mon amie. En fin de soirée, Arès vont me prévenir que mon entrainement commencerait demain. J’appréhendais un peu, mais cela me serait bénéfique pour accomplir ma prophétie.

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