Chapitre 11

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Les basses de la musique retentissaient dans toute la rue, faisant vibrer tout ce qui se trouvait aux alentours. C'était un pote satyre, mi-homme - mi-bouc, de Danaos qui lui avait prêté sa villa en échange d'un quelconque service. J'étais un peu anxieuse, car il y aurait beaucoup de créatures surnaturelles, et je n'avais pas trop l'habitude d'en côtoyer. En fait, j'avais surtout peur de croiser les jumeaux maudits, ils aimaient aller à des fêtes où il y avaient des nymphes, des centaures et d’autres créatures du même genre.

Je conduisais, parce que Rallyeso roulait comme une sauvage, je me demandais parfois comment elle avait fait pour avoir son permis. Après avoir fait trois fois le tour du pâté de maison, je trouvai enfin une espace pour me garer. Je me plaçai en parallèle avec la voiture derrière laquelle je voulais me parquer.

—Hestia, c'est trop étroit. Jamais ma Becky ne va rentrer là ! s'exclama Rallyeso en m'incendiant de ses émeraudes.

Et oui, Becky était le nom que mon amie avait attribué à sa Fiat, j'avais jamais compris le délire.

—Avec un créneau ça passe crème, fait moi confiance je suis une pro, la rassurai-je.

—Prétentieuse va ! Mais je te jure par le tartare, que si j'aperçois une cabosse ou une griffe tu seras de corvée de ménage pendant trois mois dans mon appartement.

—Oh mais madame la profiteuse ose me menacer, lui demandai-je en me tournant vers elle.
Elle secoua la tête et ses yeux s'illuminèrent, signe que ses pouvoirs n'étaient pas loin.

—Un avertissement, nuance.

Je m'esclaffais moqueuse. Rally n'était pas crédible pour un sou. Avec son visage clair en forme de cœur et ses taches de rousseurs, elle était tout sauf terrifiante. Adorable plutôt.

—Mho, tu es trop chou, j'ai envie de croquer ces jolies joues. Bon, trêve de plaisanterie, je dois faire ma manœuvre, on est en retard.

—Puf, à qui la faute hein, me fit remarquer Rally en haussant son sourcil droit.

Oui, c'était de ma faute parce que je m'étais amusée avec Zéphyr et je n'avais pas fait attention à ma coiffure qui s'était défaite. Rally avait dû tout recommencer et elle n'y était pas allée de main morte, les pinces s'enfonçaient dans mon crâne, tels des poignards tranchants.

Je lui tirai la langue et elle prit une moue boudeuse. Ensuite, je vérifiai bien dans les rétroviseurs, qu’il n’y avait personne et fis marche arrière en branquant le volant à fond, et voilà. C’était simple comme bonjour. Nous sortîmes du véhicule et je lui rendis ses clés.

—Tiens, j’ai pas pris de valise moi, me moquai-je en reluquant son immense sac. Je ne savais pas comment elle faisait pour s’y retrouver.

—Ce n’est pas juste, même quand je mets des talons de quinze centimètres, tu arrives encore à être plus grande que moi, déclara-t-elle en arborant une mine piteuse.

Je passai mon bras sous le sien et nous nous dirigeâmes nos pas vers le son qui résonnait dans toute la rue, faisant vibrer le trottoir.

—Tu as d’autres atouts que moi je n’ai pas Rally. C’est bien que l’on soit tous différents physiquement. T’imagine si tout le monde se ressemblait.

Elle papillonna des yeux d’horreur.

—Oh, c’est vrai, déjà que je déteste de voir quelqu’un porter les mêmes vêtements que moi, alors un visage et un corps identiques…Non merci, déclama-t-elle en frissonnant.

Je n’étais pas sereine. Je jetai des regards furtifs pour vérifier que personne ne nous épiait. La maison où la fête se déroulait se trouvait proche de la forêt, ses grands arbres semblaient nous dissuader de l’approcher. Je n’avais vraiment pas envie de recroiser Artémis, ni son frère Apollon, d’ailleurs. Depuis, ce maudit jour, j’avais comme un mauvais pressentiment, et je me méfiais beaucoup. Plus nous nous approchions de notre destination, plus la nervosité montait et plus mes pouvoirs grésillaient. Rallyeso en voyant mes mains crispées sur le cadeau de Danaos, me rassura.

—Ecoute-moi ma belle, tout va bien se passer. Je sais que tu es à fleur de peau, être entourée d’êtres magiques sera perturbant pour toi, mais tu vas surmonter cette anxiété.
Elle caressa avec délicatesse ma joue et ajouta :

—Je sais aussi que tu appréhende le face à face avec Danaos. Crois-moi sur parole, s’il ne t’appréciait pas, il ne t’aurait pas envoyé tous ces signaux.

Je hochais la tête galvanisée par son discours et déterminée. J’allais enfin déclarer ma flamme, à celui qui faisait bousculer tous mes sens.

***

—Who run the world? Girls!
—Who run the world? Girls!
—Who run the world? Girls!

Nous chantions à tue-tête, complètement survoltées par les paroles féministes et en dansant sur la piste improvisée au milieu des faisceaux des stroboscopes multicolores.
Du coin de l'œil, je vis Danaos se faire enlacer par une très belle nymphe. Ses longs cheveux cascadaient telle une rivière d'or dans son dos et sa robe noire moulait à la perfection ses courbes voluptueuses. Leur discussion semblait intéressante, puisque mon Dano souriait niaisement ! On aurait dit qu'ils sortaient ensemble, ils étaient magnifiques et parfaitement assortis. J'étais indubitablement jalouse ! Face à elle, je ressemblais à une gamine, ce qui me fit pousser un soupir de dépit. Impossible de rivaliser avec ELLE !

Bats- toi, hurla ma conscience, tu baisses les bras au premier obstacle rencontré !
—Je ne suis pas faible, stupide conscience, mais réaliste ! Comment veux-tu que Danaos porte son attention sur moi, avec une fille pareille à ses côtés ! Avec une ribambelle de vautours qui attendent que leur proie se lasse ! Il ne s'est même pas rendu compte de ma présence !

—Séduis-le !
—Ah ouais ! J'ai une tête de séductrice ?
— Imbécile ! Demande à ton amie croqueuse d'homme !

Je me serais frappé le front, si je n'avais pas été entourée d'autant de personnes. Je lançais un regard de Chat Potté à Rally qui, voyant où mon regard s'était porté, me proposa d'aller prendre des rafraîchissements. Je lui souriais avec gratitude, j'avais besoin de me poser un instant et de réfléchir à un plan d'attaque. Who run Danaos ? Hestiaaa !
Elle saisit mon poignet et me tira à sa suite. Arrivée au bar de la cuisine, elle nous commanda deux ambroisies, au satyre qui officiait comme serveur.

—Je ne bois pas d’alcool Rally !

Il valait mieux, sinon je risquais de devenir incontrôlable avec les pouvoirs qui sommeillaient en moi.

—Je sais, ma belle, mais ça c’est le nectar divin, il te donnera du courage, répondit-elle en me faisant un clin d’œil.

Le satyre revint avec nos boissons qu’il déposa devant nous.

—Voilà pour vous, mes beautés, dit-il charmeur, puis il s’adressa à moi :
—On ne s’est jamais rencontrés, je m’appelle Peter, annonça-t-il en me tendant la main que je serrai.

—Hestia, enchantée de faire ta connaissance Peter !

—Je suis plus que ravi, tu viens d’arriver ici ?
—Euh…, je me tournai vers Rally ne sachant pas quoi dire.
—C’est ma cousine qui vient d’arriver de France, tu n’as pas remarqué son accent ?
Ouf, sauvée ! Heureusement, je parlais français et j’aimais bien imiter leur accent, donc je n’aurai aucun problème pour jouer le rôle que m’avait attribué Rallyeso.

—Eh ben dis donc, elles sont sacrément jolies les nymphes françaises, dit-il en ma lançant un regard appuyé.

Je lui souris gênée, n’ayant pas l’habitude qu’un garçon me porte un quelconque intérêt, ça faisait bizarre.

—Pauvre Peter, mais Hestia craque pour Danaos, moi par contre, je suis libre !

Je failli m’étouffer avec la gorgée que j’étais en train d’avaler.

—Rally, tu avais promis ! Pas de drague aujourd’hui ! m’exclamai-je, en n’omettant pas d’ajouter une touche d’accent so frenchy.

—Oui, je rigole Hestia.

Elle fit un clin d’œil à Peter et pivota sur son siège afin d’embrasser du regard les couples enlacés. Une douce lumière bleue les illuminait apportant une ambiance romantique. Je terminai mon verre et me tournai également, sauf que je me figeai devant la scène à laquelle j’assistai : Dano les yeux dans les yeux avec la nymphe, dansait un slow sensuel ! Pourquoi ?

Rally me saisit par le menton et me fit face.

—Cesse de te torturer de la sorte et amuse toi ma chérie !

—Moi aussi je veux danser comme ça avec lui, mais c’est à peine s’il m’a remarqué, il est trop obnubilé par cette bombe, pleurnichai-je en désignant la sorcière qui avait envoûté mon Dano.

Peter qui avait suivit notre conversation, eut un rire léger.

—Rend le jaloux ma jolie ! S’il te voit avec un autre mâle, il deviendra fou de rage et tombera à tes pieds.

Bonne idée, me souffla ma conscience.

—Il a raison Hestia, il faut te trouver un cavalier !

Peter et Rally échangèrent un regard de connivence et se mirent à la recherche d’un individu de la gent masculine, capable de faire péter les plombs à Danaos. Mes pupilles vairons balayèrent la foule et furent happées par deux onyx profondes. Il venait d’entrer dans le salon et me dévisageait avec intensité. Je n’avais pas les mots pour décrire une telle perfection. Une mèche de sa chevelure ébène caressait son front, j’avais une folle envie d’y plonger les doigts, elle semblait si douce. L’étranger avança droit dans ma direction, indifférent aux autres. Je laissai échapper un souffle saccadé au travers de mes lèvres entrouvertes et me mis à prier.
Pitié, faites que ça ne soit pas un des rois divins !

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