3. Fantômes, cauchemars et moqueries

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Je parle à des fantômes et je résiste au sommeil tellement j'ai peur des cauchemars. Je n'en peux plus de hurler dans mes rêves en croyant que c'est réel alors que ça ne l'est pas. Alors j'écris, je lis, ou simplement j'attends, jusqu'à des heures tout bonnement indécentes. Personne ne viendra à mon secours pour me réveiller. Si je m'endors, c'est mes propres cris qui me réveilleront en plein milieu de la nuit. Je suis crevée tous les matins, je suis crevée toute la journée, mais le soir suivant c'est le même manège : je m'occupe jusqu'à ce que mes mains trembent d'épuisement et que ma tête tourne tellement je suis fatiguée. Ouais, c'est étrange n'est-ce pas ? Quand je suis fatiguée, j'ai envie de vomir et j'ai la tête qui va exploser. Comme si j'étais malade.

Je le suis peut-être ?

Ne me regardez pas comme ça.

Arrêtez de me dévisager. Je n'en peux plus qu'on me dévisage. Je ne comprends jamais ce que je fais de mal. Pourquoi tout le monde me regarde-t-il passer, les adultes avec un air choqué et les enfants en se foutant de ma gueule ? Il est temps que ça change, je n'en peux plus de leurs railleries. Ca fait mal au fond, même si j'essaye de me convaincre du contraire. Ils se chuchotent à l'oreille des conneries sur moi en me fixant de leurs yeux parfaits, et je ne comprends pas qu'elle merde j'ai encore pu faire juste devant leur nez pour qu'ils soient comme ça avec moi. C'est pour ça que je préfère rester isolée, mais bon, en même temps, dans le monde actuel, on est obligé de sortir au moins une fois de temps en temps. Et quand ça arrive.... eh bien il faut bien le supporter du mieux qu'on peut, serrer les dents et filer comme une flèche en espérant qu'on ne remarquera pas qu'ils se moquent de nous. Mais ça marche pas comme ça, et ça n'empêche pas de les entendre. J'ai tellement peur. J'ai pas peur de ce qu'ils pensent de moi. J'ai peur que ça se passe comme ça toute ma vie, que où que j'aille, ils soient encore et toujours sur mon chemin. En fait, j'aimerais juste comprendre. Comprendre ce qui est à ce point différent chez moi pour qu'ils aient une réaction si excessive.

J'évite les autres comme la peste, peut-être parce qu'ils sont la peste pour moi. Mais des fois, je craque, je ne me retiens plus, tout simplement parce que je n'y arrive pas. Des fois, j'ai tellement envie de pleurer que me mordre les joues jusqu'au sang ne suffit. Des fois, il faut que je passe ma colère efficacement et immédiatement. Et ces fois là, je n'ai alors d'autre cible que la cause de tout ça. Alors ces fois là, je me lève, j'oublie ma peur et je commence à parler. Je leur crache au visage toute ma haine et je reprends chacune de leurs insultes pour les retourner contre eux. Et encore... je me retiens, parce que sinon, je ne serais pas aussi polie.

Si je ne me retenais pas, j'aurais traité ces connards de fils de pute en pleine médiathèque, ceux-là même qui se fichaient ouvertement de ma gueule à deux mètres derrière moi, en parlant fort et en croyant que je n'entendais pas parce que j'avais des écouteurs dans les oreilles.

Si je ne me retenais pas, je serais allée directement vers ce groupe de filles snobinardes, au lieu de me planquer dans un coin de la piscine, pour aller détailler leur comportement en public, puis je serais repartie en ignorant les regards outrés et les commentaires parce que la colère, la haine et la violence de mes paroles m'auraient donné des ailes.

Si je m'écoutais, je serais allée tous les buter, je serais allée déverser sur tous ceux-là ma colère, ma violence, cette violence qui bouillonne en moi depuis tant d'années. Oui, je sais, je suis violente. Oui, je sais, je suis malade, je suis pas bien dans ma tête et je suis tellement dégénérée que je dois me retenir de cogner les personnes qui m'énervent. Mais on me laisse pas le choix. J'ai pas le choix parce qu'à force de retenir tout ce que je pense, à force de retenir tout ce que je vis à l'intérieur de moi, de ne rien en dire à personne, eh bien à force, j'explose. J'ai besoin d'exploser. Personne ne peut supporter une telle pression sans exploser. Alors oui, merde, à l'instant même où j'écris ce texte, je pleure, j'ai horriblement chaud tellement j'ai envie de balancer mon poingt dans l'ordinateur et je me balance d'avant en arrière comme ces gens qu'on voit dans les asiles. Oui, en ce moment même, j'ai mal et je pense à ce qui va encore m'arriver demain : toujours la même chose. Les moqueries, les regards.

Le jugement.

Si seulement j'avais le pouvoir de pulvériser ce monde, de le plonger dans le chaos, peut-être que ça me soulagerait enfin. Peut-être que ce niveau extrême de violence finirait enfin par me calmer pour un temps. Ouais, vous vous dites en ce moment que j'exagère. Croyez ce que vous voulez, je vous dit ce que je pense, ce que je suis : quelqu'un de foncièrement mauvais, qui a besoin d'extérioriser sa colère grandissante dans la destruction.

Inspire, expire, inspire, expire, inspire, expire. Fais ce qu'elle t'a dit, pense à des choses positives, atténue le tremblement de tes mains, occupe-toi l'esprit. Inspire, expire. Ne casse rien, ne réduit pas à néant tous les efforts que tu as faits. Il est trop tard pour faire marche arrière. Tu as fait ton choix, le choix de les protéger de ta souffrance à tout prix.

Ils ont fait leur choix, le choix de ne rien voir, même quand mes efforts sont imparfaits et que la situation devient évidente.

Inspire...

...expire.

Inspire...

...expire.

Inspire...

...expi...

insp...

...exp...

i...

...e...

...


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