Plus belle la vie ! (partie 1)

6 minutes de lecture

Petite fille, Lola ne se séparait jamais de Sophie sa poupée fétiche, véritable partenaire de jeu. Elle passait des heures, à lui parler, à la cajoler, à la gronder, à lui donner à manger, à la mettre au lit, comme le faisaient sa maman et toutes les mamans du monde. Mais ce que Lola aimait le plus, c’était l’habiller selon ses goûts et ses envies. Elle étalait alors sur le sol de sa chambre, les innombrables petits vêtements, les examinait avec attention de son regard enfantin puis les mariait entre eux avec harmonie jusqu’à obtenir l’effet qu’elle escomptait. Vêtue alors comme une princesse, Sophie défilait fièrement sous ses yeux ébahis.

Avec les années, Lola remplaça sa poupée. Espiègle, l’enfant se faufilait dans la chambre de sa mère. Les mains posées sur ses hanches, la bouche barbouillée de rouge, elle paradait devant le grand miroir de l’armoire dans des robes et des chaussures bien trop grandes pour elle.

À adolescence, le papillon sortit de sa chrysalide pour devenir une ravissante jeune fille toujours bien mise. Dans son quartier, tout le monde connaissait et appréciait Lola. Souriante, avenante, elle gratifiait toujours chacun d’un mot gentil ou ne manquait pas d’apporter son aide lorsqu’elle le pouvait. Elle faisait l’unanimité parmi les voisins. Mais surtout, elle était la fierté de sa mère.

Son engouement pour la mode, sa fraîcheur naturelle à aller vers les autres, son amour pour le contact humain l’emmenèrent à des études de Commerce. Mais malgré un Bac pro Commerce obtenu avec mention, aujourd’hui la jeune femme devait se contenter d’un emploi précaire… serveuse dans une grande chaine de fast-food. Et elle en avait marre de rentrer à la maison tous les soirs avec une odeur de graillon sur les vêtements. Mais il fallait bien payer les factures ! Cependant elle ne désespérait jamais… à 21 ans, elle avait toute la vie devant elle pour assouvir son rêve : travailler dans la mode.

Avec assiduité, Lola épluchait les petites annonces quotidiennement lorsqu’un beau jour, l’une d’elles attira son attention. S’armant de courage, elle se présenta à l’entretien et contre toute attente, elle fut retenue pour le poste.

La chance tournait enfin en sa faveur !

*****

La jeune femme souriait en se remémorant le chemin parcouru. Le précieux contrat bien en sécurité dans son sac à main, elle se dirigeait d'un pas joyeux, vers son petit appartement parisien. Bien sûr, pour l'instant ce n'était qu'un emploi de vendeuse en prêt à porter, rien de bien gratifiant mais la boutique de renom dans laquelle elle s’apprêtait à poser un orteil lui ouvrirait les portes et élargirait ses possibilités. En développant ses compétences, elle comptait gravir les échelons grâce à ses qualités dans ce domaine et à force d'un travail acharné... Qui sait ? Peut-être que d'ici un an ou deux voire trois maximum, elle pourrait prétendre à devenir responsable de sa propre boutique.

Son rêve depuis toujours !

Arrivée chez elle, Lola ôta avec soulagement ses escarpins puis troqua sa petite jupe noire et son chemisier de soie blanc contre une tenue plus confortable : un sweat-shirt dont l’inscription sur la poitrine « ça c’est fait ! » reflétait son enthousiasme, assorti à un pantalon de jogging rose pâle.

Après un hiver lugubre, un soleil printanier inondait la ville de ses bienfaits. Ces conditions météorologiques influaient sur le moral, l'humeur et le comportement des êtres humains. Ça... Lola le savait et le constatait chaque année. Elle ouvrit en grand la fenêtre, ferma les yeux et respira à pleins poumons. Elle ne pouvait rêver de meilleure saison pour débuter sa carrière professionnelle dans le domaine qu’elle affectionnait tant.

De retour dans le salon, la jeune femme plongea la main dans son sac à main afin de relire pour la énième fois, le précieux bout de papier. Elle n'en revenait toujours pas ! Il fallait qu'elle annonce la bonne nouvelle à Beth, sa meilleure amie. Surexcitée, elle vida le contenu de son sac sur le canapé, à la recherche de son portable.

Celle-ci décrocha à la deuxième sonnerie :

— Hello ma chérie ! J'attendais ton appel... Dis-moi vite !

— J'ai eu le poste, Beth ! s'exclama aussitôt Lola. À l'autre bout du fil, elle entendit une explosion de joie.

— Félicitations ! Je suis très heureuse pour toi.

Cela lui faisait chaud au cœur une telle sincérité. Les deux copines étaient liées d'une amitié sans faille depuis le collège. Et depuis elles partageaient tout, les bons moments comme les mauvais. À une époque, se souvint Lola, pour un stupide pari, elles avaient même partagé leurs petits amis... Les pauvres garçons n'avaient rien compris. Ça restait un de leur plus beau délire d'adolescentes.

— Dis-moi tout, continua Beth. Comment s'est passé l'entretien ? Tu commences quand ? Ta responsable est sympa ?

Lola ne se fit pas prier.

— Il y avait une dizaine de filles qui postulaient pour le poste et j'étais la dernière sur la liste. J'étais nerveuse, tu penses bien ! Enfin bref ! Pour l'occasion, j'avais particulièrement soigné mon apparence, j'avais misé sur un style sobre mais raffiné. J'étais professionnelle mais élégante, par contre tu aurais vu les autres postulantes… mama mia… le style Prada : elles en mettaient plein les yeux. J'ai bien failli faire demi-tour devant autant de sophistication de leur part, c'était comme si elles se préparaient à un défilé de haute couture. Je te laisse imaginer la manière dont elles me toisaient, perchées sur leurs dix centimètres de talons. Cependant lorsque mon tour est enfin arrivé, j'ai fait abstraction de tout ça. J’ai respiré un bon coup et je me suis jetée dans la bataille. Mon responsable, Monsieur Meyer, a commencé par m’expliquer qu’il cherchait une personne de confiance, peu importait l’expérience car il voulait la former à l’image de la boutique. Après avoir consulté mon CV, il m'a posé des tas de questions sur mes motivations à obtenir ce poste, auxquelles j'ai toutes répondues avec sincérité et de façon très naturelle. Son attitude patriarche et son ton avenant m’ont tout de suite mise à l'aise...

— Il est mignon ? la coupa Beth.

— Oui, assez ! La quarantaine je pense... très classe... un brun ténébreux, athlétique avec un sourire charmeur... vraiment rien à jeter et...

— Ben dis-donc, on dirait bien qu'il te plait beaucoup ce Monsieur Meyer ! la coupa derechef son amie, amusée.

— Que vas-tu chercher là, Beth ? Pas du tout mais si j'ai des yeux c'est fait pour m'en servir... D'ailleurs il est marié...

— Tu lui as demandé ?

— Non ! Bien sûr que non ! Tu es incorrigible... J'ai seulement vu qu'il portait une alliance, s'enflamma Lola.

— Tu démarres toujours au quart de tour, pouffa Beth. Désolée mais je n'ai pas pu m'empêcher de te taquiner... Ça marche à tous les coups !

— Gna, gna, gna ! C'est malin, petite folle ! Tu ne changeras jamais...

— Jamais ! C'est bien pour ça que tu m'aimes !

— C'est bien vrai ça ! Ton petit grain de folie me manquerait trop, concéda Lola, le sourire au bord des lèvres.

Les deux amies d'enfance avaient un caractère très différent. Autant Lola, avec les années, était devenue une jeune fille responsable, autant Beth était restée le feu follet de son adolescence mais cependant elle savait être sérieuse lorsqu'il le fallait.

— Sinon, pour satisfaire ta curiosité, je commence dans trois semaines. Avec la collection printemps/été, les filles sont débordées à la boutique, m'a-t-il dit. Avec une vendeuse supplémentaire, tout le monde sera satisfait lui expliqua Lola, très sérieuse. Ma tenue vestimentaire doit être irréprochable : pas de jupe courte, jugée trop vulgaire pour le prestige de la boutique, chaussures à talons plats interdits, coiffée soigneusement et maquillée avec discrétion. Je vais m'éclater ! conclut-elle, euphorique.

— Tu sais bien que je n'y connais rien en « chiffons » et je trouve que les escarpins siéent mieux à tes pieds plutôt qu'aux miens, plaisanta Beth. De toute façon, je suis certaine que tu seras parfaite. Tu vas tout déchirer ma belle !

— Merci, t'es vraiment chou !

— Je sais ! Je sais ! affirma celle-ci, la voix théâtrale. Mais dis-moi, c'est pas tout ça mais je serais d'avis de fêter l'évènement comme il se doit. Que dirais-tu d'une soirée de folie pour l'occasion ?

Beth ne perd pas le Nord, pensa Lola, elle est toujours encline à faire la fête.

— Excellente idée ! Que proposes-tu ? lui demanda-t-elle, enthousiaste.

— Je passe te prendre samedi, nous irons nous faire un bon petit resto entre filles et après nous pourrions rejoindre mon frère Lucas et sa bande de potes sur les pistes du Dancefloor. Ça te dit ou pas ?

Lucas avait deux ans de plus que Beth. Très protecteur avec sa sœur, il était également comme un grand frère pour Lola. Il était inséparable de Jules, Bastien et Renaud, ses trois copains depuis toujours.

— Génial ! Je suis partante ! Tu passes vers quelle heure ?

— 20h30 ? Ça te convient ? Et je m'occupe de tout, statua Beth.

— Ok ! À samedi alors, j'ai vraiment hâte d'y être ! Bisous ma chérie.

— À samedi ma belle. Bisous !

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Bel. A ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0