Chapitre XXIII : Réunion de famille

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En revenant, il ne vit pas Amanda, seul Orlando était encore là. Il lui fit signe afin qu'ils se rejoignent.

« Où est la Maître du Feu ? », demanda Loukas.

« Notre mère et Calice sont arrivés, la petite voulait lui montrer sa chambre et lui faire visiter le jardin un peu plus tard ».

« Et Maman ? Que fait-elle ? ».

« Elle va prier au temple d'Anava, je crois que quelque chose la perturbe. Sigurd lui a parlé aussi mais je n’ai pas pu savoir ce qu’ils s’étaient dit ». Un ombre passa sur le visage du souverain, bien vite remplacée par un sourire carnassier. « Dans tous les cas nous avons à faire. Omell arrivera bientôt, et je ferais bien un petit duel amical contre toi ».

« Je n'ai pas pris mes épées ! Tu ne comptes pas me laisser désarmé ? », objecta Loukas en faisant mine d'être vexé. « Notre cousin vient vraiment ? Je pensais que le front accaparait toute son attention ? ».

Orlando partit d'un rire sans joie. « Oui, la guerre le préoccupe beaucoup. Mais en apprenant que tu étais ici il a voulu faire le déplacement. Il n'a d'ailleurs sans doute pas dormi de la nuit pour faire le trajet. Et ne t’en fait pas, j'ai ce qu'il te faut ».

Il fit signe à son frère de le suivre jusqu'à une dépendance accolée aux remparts du château. Deux gardes discutaient devant l'entrée.

En voyant leur roi approcher, ils se mirent au garde à vous. Orlando leur fit signe de se mettre au repos.

« Bonjour soldats, je suis désolé de vous déranger pendant votre tour de garde, pouvons-nous emprunter vos glaives ? ». Il leur lança cette phrase avec un grand sourire, sachant parfaitement que de toute façon ils ne pouvaient pas lui refuser.

« Bien sûr mon roi ! Tenez ». Les soldats s’exécutèrent sans protester.

« Merci messieurs. Nous vous les rendons très vite, si vous voulez bien faire les arbitres ». Sur ses mots il se tourna vers Loukas et lui lança une lame.

Il attrapa l'arme en vol et la soupesa. « Plus lourde que les miennes », pensa-t-il avant d'esquiver d'un bond le premier coup d'Orlando, qui avait rapidement chargé.

« Pourquoi vouloir combattre ? », demanda le Maître alors que les épées s'entrechoquaient.

« Tu m'as dit que tu avais beaucoup combattu dans les terres infectées. Je veux voir comment tu te débrouilles ! ». Il se baissa, prit une poignée de gravier pour lui lancer à la figure avant de charger à nouveau.

Le dragonnier se mit à rire. Il envoya magiquement les graviers virevolter plus loin d'un simple revers de la main avant de parer, se retrouvant garde contre garde avec son frère.

« Hey ! Pas de magie ! » protesta se dernier.

« Tu veux voir comment je me débrouille, non ? Il serait idiot que je n'utilise pas mes atouts ! ». Il le repoussa et frappa plusieurs fois d'estoc.

Le duel s'éternisa. À présent, plusieurs dizaines de gardes les observaient, soit du haut des remparts, soit depuis la cour du château. Certains s'approchèrent et se permirent quelques invectives amicales, ainsi que des encouragements, souvent en faveur du souverain.

Alors que Loukas prenait le dessus, une troupe de cavaliers pénétra dans l'enceinte. Ces derniers ne chevauchaient nullement des chevaux, mais des sortes d'ours à dents de sabre. Très élancés, la plupart étaient gris ou marron, mais certains avaient le pelage noir.

« Des smilodons », pensa le jeune homme. « Je crois que notre cousin vient d'arriver ! », dit-il à son frère, avant que celui-ci ne décide de l'attaquer de nouveau. Il fit un signe de tête en direction des cavaliers.

Orlando sourit de plus belle. « Parfait ! Il va pouvoir constater que je domine ! ». Il bondit sur son frère, l'épée en avant.

Loukas para difficilement, ce qui le mit dans une position défensive assez précaire. Lors de l'assaut suivant, la lame du souverain trancha d'un coup sec les lanières de son vêtement et lui entailla l’épaule. Fendue en deux, la tunique gênait plus le dragonnier qu'autre chose. Il la retira.

Les acclamations laissèrent place à des murmures. Il se souvient alors qu'il avait de très visible cicatrices, et rougit.

Orlando ne vit que celle de son avant-bras, ainsi que celle dans sa nuque. Ses yeux exprimèrent son pardon.

« Il n’y a pas de mal », murmura Loukas.

« Je vois que vous vous amusez bien ! », leur lança une voix forte et caverneuse depuis la troupe de cavalier.

Un homme en armure complète faite en terrarium, chevauchant un immense smilodon beige, s'avança. Écartant les soldats à pieds, il pénétra dans le cercle où les deux frères s'affrontaient.

La bête renifla bruyamment, avant de laisser échapper un léger feulement. Il lécha ses babines avec sa grosse langue rosée, à l'apparence très râpeuse.

« Bonjour, Maître Omell », déclara Loukas. Il sentit un lien magique se tisser rapidement vers le cavalier. Ce lien avait l'odeur du quartz dans l'esprit du jeune homme. Chaque Maître possédait une odeur magique particulière, c'est pour cela qu'il reconnut son cousin. Lui-même avait apparemment une odeur de framboise très sucrée. Yann, lui, sentait la poussière et l’acier. Quant à Amanda, son odeur magique se rapprochait du bois brûlé.

« Bonjour, Maître Loukas ! ». Il retira son casque, découvrant son visage parfaitement rasé, ses yeux gris clair et sa mâchoire carrée. Ses cheveux grisonnants pendaient des deux côtés de sa tête, bien aplatis par son casque, et rendus collants par la transpiration.

Orlando l'apostropha. « Bienvenue, Omell ! Tu arrives à temps pour me voir vaincre

Loukas ! »

Ce dernier lui jeta un regard en coin, presque lassé par son ton condescendant.

Le cavalier éclata de rire. « Ce n'est pas étonnant ! Loukas n'est pas habitué à vos glaives grossiers ! Il combat avec finesse, lui ». Il décocha un clin d’œil au plus jeune de ses cousins, qui le lui rendit.

Les gardes se mirent à rire également. Orlando sourit, un petit peu agacé que le commandant des armées critique son propre matériel.

Le chef de guerre continua sa tirade, à présent qu'il avait l'attention de tout le monde.

« Je me demande si tu t'en sortiras aussi bien avec une arme plus lourde toi aussi ? Tiens, attrape ! ».

Il jeta une sorte de marteau de combat à deux mains aux pieds du souverain. Ce dernier hocha la tête, résolu à accepter le défi. Omell descendit de sa monture, confiant la bride à un autre soldat, puis il croisa les bras.

Loukas reporta son attention sur le combat, qui allait sans doute reprendre bientôt.

Orlando lui jeta son glaive pour prendre le marteau. Il semblait spécifiquement conçu pour réduire les membres en miettes.

Le jeune homme ramassa la deuxième épée, se relevant juste à temps pour éviter la tête de l'arme lourde qui fonçait vers lui.

« C'était moins une ». Il fit quelques moulinets avec ses armes, son style ambidextre n'était pas parfait, mais étant gaucher, il avait un léger avantage en duel. Sa main droite servirait de diversion pour les frappes de sa main dominante.

Il frappa plusieurs fois, toujours en restant mobile pour éviter les coups, ne tentant pas les parades contre une arme de ce genre.

Orlando avait tout de suite plus de mal. Il tenait l'arme à deux mains, ce qui ne manqua pas de faire réagir Omell.

« Tu sais que je tiens ce marteau d'une seule main, cousin ? » railla le chef de guerre.

« Si je prenais le temps d'être aussi musclé que toi, je n'aurais pas le temps de gérer notre royaume ! » répondit le souverain, déclenchant une vague d'acclamation dans l'assemblée de soldat.

Finalement le combat dura encore un bon quart d'heure. Les deux frères étant exténués, ils s'arrêtèrent sur un match nul, bien que sur la fin, Loukas avait pris le dessus. Les deux gardes reprirent leurs glaives auprès du Maître de la Terre, trempé de sueur, tandis que les autres reprenaient leurs postes respectifs.

Les deux frères se prirent par les épaules.

« Tu t'es bien battu », avoua Orlando.

« Je dois dire que toi aussi. Ton maître d'armes à toutes mes félicitations pour t'avoir maintenu en forme ».

« Je penserai à le remercier. Merci de ne pas avoir trop utilisé tes pouvoirs, sans ça, il est certain que j'aurais perdu depuis longtemps ».

« Je préfère être à armes égales contre toi », lui confia Loukas en lui donnant une grande claque dans le dos.

Omell les rejoignit.

« Alors mes cousins ? Je constate que vous êtes en forme ! ». Il leur prit chacun un bras, qu'il serra vigoureusement.

« Au passage, Calice a tout vu. Faites-lui donc un signe ! ». Il désigna une des fenêtres du château et les deux frères aperçurent l'enfant, agitant les bras pour qu'ils la voient. Amanda était à ses côtés, mais Loukas ne put pas voir son visage.

« Oh. Si elle raconte ça à sa mère, ça va barder pour moi », s'exclama Orlando en faisant un geste à sa fille.

Omell et Loukas pouffèrent, avant de s'enlacer.

« Ça fait si longtemps, Loukas ».

« Oui. Je suis content de te voir ». L'émotion était palpable, les deux hommes avaient un fort lien familial, mais également magique, puisqu’il partageait le rôle de Maître.

Orlando était ému également. « Venez, nous avons sans doute beaucoup de chose à nous dire, et des tas de sujets à aborder ». Il désigna la porte du château.

Omell acquiesça. Récupérant son marteau, il le posa sur son épaule et suivie ses petits cousins.

S'ensuivit une longue marche à travers le château. Le chef de guerre leur reporta un peu les nouvelles du front, mais sans rentrer dans les détails, il attendait visiblement que personne d'autre ne puisse les entendre.

Beaucoup de nobles étaient présents en pleine journée, bien qu'il ne soit pas encore dix heures. Le roi dut s'occuper d'en accueillir certains, mais globalement, ils purent avancer sans trop de soucis. Ils passèrent par de somptueuses pièces richement décorées, à d'autres beaucoup plus sobre.

Loukas ne savait pas vraiment où ils allaient, cela ne l'intéressait pas. Il écoutait les récits de son cousin. Cela faisait presque un an qu'il ne l'avait pas vu. Peut-être plus. Il avait pour lui une admiration certaine, et le tenait en haute estime.

Orlando ouvrit une porte, débouchant dans un petit salon.

« Installons-nous ici, je vais demander à un serviteur de nous apporter quelque chose à grignoter. Tu dois avoir faim Omell ? ».

« Je mangerais bien un morceau maintenant que tu proposes. Mais quelque chose de frugal, nous déjeunons dans moins de trois heures ».

« Tu sais comment est la cuisine à Moongarde », lui rappela le souverain.

Ils s'installèrent tranquillement.

« Tu n'es pas venu seul, Loukas ? Je sens une sorte de présence, c'est très énergique. Très chaud également ». Il fronça les sourcils. Tout comme Loukas, Omell était un Maître de la Terre. Son pouvoir s'était manifesté alors qu'il ne savait même pas marcher, cela commençait à dater, maintenant.

« Oui. Je suis venu avec Amanda, la nouvelle Maître du Feu, c'est sans doute son pouvoir que tu sens ». Il tenta de se concentrer pour le sentir également, mais ne put discerner qu'un écho léger. Cela le perturba. D'ordinaire il détectait plutôt bien sa compagne.

En tout cas, son cousin ne parut pas si surpris. Il s'exclama, « Ah, c'est donc ça ! On m'a mis au courant de son existence il y a une semaine à peine ! J'ai hâte de la rencontrer, comment est-elle ? ».

Une dizaine d'adjectif se bousculèrent dans l'esprit du jeune homme. Des adjectifs comme belle, resplendissante, incroyable, têtue, impulsive. Finalement il n'en choisit qu'un.

« Je dirais qu'elle est unique. Pour une Maître du Feu ».

« Pourtant tu n'en as jamais vu d'autre ? ».

« Disons qu'on m'a raconté comment étaient les précédents », commenta Loukas.

« Espérons qu'elle est un tempérament moins ardent que ses prédécesseurs, sinon j'ai bien peur qu'elle finisse comme eux ». Omell sourit tristement.

« Sinon, as-tu des détails à me donner concernant le front ? Maintenant que nous sommes isolés ? », demanda le jeune homme pour changer de sujet. Il n'aimait pas particulièrement le chemin qu'avait pris la discussion.

Le chef de guerre soupira. Cela en disait déjà beaucoup aux yeux de Loukas.

« C'est compliqué, tu sais. Les soldats sont de plus en plus éreintés. Ces monstres n'abandonnent jamais ! Nous nous sommes pris une attaque la semaine dernière ».

« Et ? », répondit-il, s'attendant à une suite.

« Ils avaient deux ogres ».

« Des ogres ?! ».

Omell hocha la tête. Loukas n'en revenait pas : les ogres venaient d'une terre très à l'est d'ici. Encore plus à l'est que le cœur des terres infectées. Ils n'étaient pas particulièrement maléfiques, mais avaient tout de même prêté allégeance aux forces obscures. Le plus gros problème à devoir les affronter étant qu'ils mesuraient près de dix mètres, et que leur peau était bien plus résistante que le simple cuir. Ils avaient, par ailleurs, une petite ressemblance faciale avec les orcs, ce qui leur donnait une allure porcine.

« En plus de leurs forces habituelles, bien sûr, comprenant des orcs, des gobelins, des hommes sauvages, mais aussi des spectres et d'autres esprits corrompus que je n'ai pas toujours pu identifier. Heureusement que les rangs de nos mages ont grossis dernièrement ».

« J'imagine qu'il y avait des nécromanciens, alors », supposa le garçon, la tête baissée, regardant ses bottes.

« Ouais. Fort heureusement, pas de démoniste cette fois-ci ».

« C'est déjà arrivé ? ».

Omell hocha de nouveau la tête.

« C'est beaucoup plus grave que je ne le pensais alors. Ça va bientôt commencer ».

Son cousin l'observa sans comprendre. Il leva les yeux, constatant son incrédulité.

« Ils deviennent puissant. Puissant et nombreux ».

« En effet. Mais nous sommes plus puissants », s'exclama le chef de guerre.

« Pour combien de temps ? » pensa le dragonnier. « J'ai vu beaucoup d'horreur dans les terres infectées. Des choses bien pire que les ogres ». Il ne partagea pas ses inquiétudes avec son parent, préférant ne pas le troubler davantage. Il devait en baver tous les jours aux abords des frontières du royaume.

« Tu as envoyé des éclaireurs sur les terres du royaume de la Foudre ? » demanda Loukas, par curiosité.

« Non, pas depuis un moment. Pourquoi ? ».

« Oh, pour rien, je suis curieux c’est tout », murmura le garçon.

Le silence s'installa. Orlando n'était toujours pas revenu. Le jeune homme trouva sa pour le moins étrange, les serviteurs ne devaient pourtant pas manquer dans le château.

« Je le ferai », finit par dire Omell.

« Quoi donc ? », questionna Loukas, qui était plongé dans ses pensées.

« Envoyer des éclaireurs au royaume de la Foudre. Je le ferai si tu me le demandes ». Il avait l'air très sérieux.

« Tu n'es pas obligé. J'ai vu de mes yeux ce qu'il y a là-bas. Je ne voudrais pas que tu perdes des hommes pour vérifier si cela a changé ».

« Alors j'irai moi-même ».

Loukas le regarda d'un air très grave. « Ne fais pas ça ».

« Pourquoi ? », protesta-t-il. « Qu'est-ce que tu as vu là-bas ? ». Sa voix se fit plus autoritaire.

Le dragonnier se braqua. « Je ne veux pas en parler. Mais n'y va pas. J'ai confiance en tes capacités, mais très franchement, ne met pas les pieds à Séclairis ».

« La capitale ? ».

« Oui ».

Omell baissa la tête. Son armure cliqueta contre l’accoudoir de son siège.

« D'accord, je te fais confiance, mais un jour il faudra que tu dises à quelqu'un ce qu'il y a dans cet endroit. Surtout si cela nous menace ».

Jusque à présent, Loukas n'avait parlé de ça qu'avec son cousin et son frère. Mais des choses terribles se passaient au royaume de la Foudre. Tout ce qu'il avait eu le courage de révéler, c'est qu'il ne fallait pas y aller. Les éclaireurs étaient tous morts à l'époque, lorsque son père les avait envoyés.

Le dragonnier passa le temps en racontant à son cousin les événements de la réunion au royaume du Feu. Ce dernier n'avait pas pu se libérer pour venir.

Ainsi il apprit pour Vinc, le Maître de l'Air disparu que tout le monde croyait mort. Il apprit pour l'offensive désespérée que voulais mener la reine Saràn. Ainsi que pour la curieuse plante absorbant l'énergie magique.

Ce dernier détail lui apparut comme très important, il se dépêcha de le noter sur un morceau de papier, qu'il fourra dans un recoin de son armure.

Cela faisait maintenant plus d'une heure que Orlando était parti, ce qui commença sérieusement à inquiéter Loukas. Il repensa à ce que Sigurd disait.

« Prendre les choses de manière détaché ». Il répéta la phrase à haute voix, sans remarquer le haussement de sourcil d'Omell.

« Comment ? ».

« Rien. Mais Orlando prend vraiment son temps, tu ne crois pas ? ».

Le chef de guerre haussa les épaules. « Il a sans doute été retenu pas une affaire urgente concernant le royaume ? ».

Le garçon ne fut pas tellement satisfait de cette réponse. Les paroles de l'archichaman résonnaient dans sa tête, à l'image d'une sombre prophétie. Il tenta plusieurs fois de repérer Amanda, sans succès. Son inquiétude était grandissante.

Le souverain arriva environ un quart d'heure après. Pendant que Loukas et Omell discutaient de tout et de rien. Le dragonnier avait véritablement l'air troublé.

« Me voilà, désolé de vous avoir fait attendre. Une affaire m'a retenue dehors un moment. Tout va bien ? ».

Omell lança un regard inquiet en direction de son plus jeune cousin. Suivant son regard, Orlando observa son frère, qui le fixait sans rien dire.

« Oui ça va. Quelle sorte d'affaire était-ce ? ». Il se rongea un ongle, dans l'attente de sa réponse.

Le roi ne répondit cependant pas tout de suite. Il avait aussi apporté un plateau, recouvert de biscuits fourrés à la viande et aux légumes. Il le posa sur une table basse et s'installa à côté de lui.

« Je suis allé chercher ça au passage, il est presque midi alors j'ai pensé que vous voudriez prendre un apéritif. Un serviteur et en route pour nous apporter de l'alcool ».

« Pourquoi tu ne réponds pas, Orlando ? ».

Ce dernier le dévisagea. Il était évident qu'il s'était passé quelque chose. Même Omell le présentait, il posa une main sur le manche de son marteau, sans doute pas habitude.

« Orlando ?! ».

« Promets-moi de ne pas t'énerver ».

« Non je ne promets rien du tout, maintenant dis-moi ce qui t'as retenu ! Je vois bien à ton attitude qu’il se passe quelque chose ! ».

Le souverain soupira. Il avala un biscuit en une bouchée, cherchant visiblement ses mots. Il avala et reporta son attention sur son frère.

« Les inquisiteurs sont ici ».

Loukas entendit cette phrase sans la comprendre. « Les inquisiteurs... ? ».

Orlando acquiesça d'un mouvement de tête léger. « Le templier est avec eux. Ils m'ont dit qu'ils avaient des questions à poser à Amanda ».

Il prit une profonde inspiration avant de reprendre. « Ils veulent te voir aussi ».

« Où sont-ils ? » demanda le garçon, totalement impassible. Son visage se ferma complètement alors qu'il réalisait pourquoi ils voulaient les voir tous les deux.

« Loukas. Qu'est-ce que tu as fait ? », questionna le roi sur un ton neutre. Il semblait choqué et sur la défensive.

« Où sont-ils ?! ». Le Maître de la Terre s'emporta. Il se leva, les poings serrés à s’en faire blanchir les phalanges.

Hésitant, Orlando répondit d'une voix faible. « Dans l'ancien bureau de père, je crois. Ils la questionnent depuis plus d'une heure et demie ».

Sans réfléchir Loukas sortit de la pièce pour traverser le château. L'ancien bureau de leur père était assez loin. Derrière lui, Omell lui cria, « Loukas ! Ne faits pas de bêtise ! ».

Il courut sur ses talons mais son armure lui donnait un handicap, il se fit donc rapidement distancer.

« Comment ai-je pu penser une minute que ça serait autre chose que ça ?! C'était tellement évident. Imbécile de Sigurd, ce n'est pas sur moi que cela tombe pour l'instant ! Et il veut que je prenne les choses de façon détachée ?! ».

Loukas continua de maudire l'archichaman pendant un moment, avant de penser à un moyen de tirer Amanda de cette situation.

En repérant un garde, il eut une idée. Une mauvaise idée, mais une idée quand même.

« Soldat ! J'ai besoin de votre glaive, maintenant ! ».

Le garde, qui ne faisait jusqu'à présent qu'une simple patrouille, se retrouva dépouillé de son arme, fourreau compris.

Loukas l'accrocha à sa ceinture et continua son chemin. Sans savoir pourquoi, il se mit à courir. Un profond sentiment d'inquiétude s’empara de lui lorsqu'il constata que son lien avec Amanda était faible depuis son entrée au château.

La magie les reliant se déliait lentement, il pouvait le sentir sans même fermer les yeux. Quelque chose était en train d’arriver. Amanda n’avait rien fait, lui non plus. Les inquisiteurs n’avaient pas la puissance nécessaire pour réduire un lien magique imperceptible à ce point-là, ils pouvaient seulement le détecter, à la limite, voire le camoufler pendant un bref instant.

Il y avait un intervenant extérieur, le garçon le sentait clairement maintenant.

« Anava, qu’est-ce que tu fabriques ? », murmura-t-il en parcourant les couloirs.

Il croisa rapidement les premiers inquisiteurs. Ils portaient tous un ensemble d’armure blanc et noir, si bien forgé qu’il était impossible de savoir s’il s’agissait d’homme ou de femme. Impossible également de voir leur peau ou leur visage sous leurs épais casques à cornes recourbées.

La plupart n’étaient pas armés, mais certains avaient des masses à une main, ornées de symboles représentant l’autorité.

Ils ne l’arrêtèrent pas, se contentant de l’observer alors qu’il avançait d’un pas déterminé.

« Ils sont là pour m’empêcher de ressortir. Ils ne doutent pas que je vais la chercher. C’est un bon piège » leur accorda le dragonnier.

Le bureau de son défunt père était en vue. L’appréhension l’étreignit alors qu’il allait ouvrir la porte.

« Je sens qu’une page de notre histoire va bientôt se tourner, en plus de cette poignée ».

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