Chapitre 4

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Il m'apparaissait évident que c'était de la drogue que Chase avait acheté dans cet entrepôt. Mais quelle drogue ? Peut-être était-ce simplement de la beuh, comme d'habitude ? Mais quelque chose dans la manière de se comporter de ces deux hommes me faisait dire que ce n'était pas aussi innocent...

Lors de la soirée chez Brendan, je restai pensive, répondant aux questions que l'on me posait, hochant la tête lorsqu'on me demandait mon avis et souriant quand l'occasion se présentait. Mais tout mon esprit était tourné ailleurs vers Chase. Je ne réagis même pas lorsque Trévor nous annonça son intention de nous présenter une fille qu'il avait rencontré cette année dans sa classe et qui était très sympa, une certaine Daphné Marsh.

Payton ne cessa de me lancer des regards inquiets et tenta même de me faire dire ce qui n'allait pas, mais je lui mentis en disant que j'étais simplement fatiguée. Avant même que minuit n'ait sonné, je décidai de rentrer, sourde aux protestations de mes amis qui ne comprenaient pas ce qu'il m'arrivait.

Arrivée dans ma chambre, je posai mon sac dans un coin et m'assis sur ma chaise de bureau, face aux photos qui me représentaient aux côtés de mes amis. Arrivée dans ma chambre, je posai mon sac dans un coin et m'assis sur ma chaise de bureau, face aux photos qui me représentaient aux côtés de mes amis. Je souris en saisissant une photo qui datait de l'anniversaire de mes dix ans, sur lequel j'enlaçais Brendan et Chase qui n'avaient pas l'air particulièrement transportés par ce geste de tendresse. Plusieurs autres nous montraient à différents âges et, à partir de la seconde, Payton, Clyde et Trévor nous avaient rejoints sur les photos.

Un poids commença à peser sur mon cœur et je détournai les yeux. Je me déshabillai pour ne plus garder que mes sous-vêtements avant de me glisser dans mes draps propres et frais, puis je fermai les yeux en essayant d'oublier l'image de Chase dans cet entrepôt.

Je dormis mal cette nuit-là. Je me réveillai toutes les heures et dû me retourner dans mon lit pendant plusieurs minutes avant de pouvoir refermer l'œil. Je fis un rêve qui hanta mes pensées pendant de longues semaines.

Je courrais en direction de la maison de Chase, mais, lorsque je la vis, elle était complètement différente. Elle semblait fondre comme si elle était faite de chocolat et ses murs étaient bariolés comme sur les anciennes télévisions. Toutes ces couleurs me firent mal aux yeux et j'essayai d'atteindre la porte à l'aveuglette. Lorsque je posai la main sur la poignée, elle s'effrita entre mes doigts, comme une plaquette de shit particulièrement friable. J'entendis alors Chase me crier.

  • Putain ! Halsey, c'était ma dernière !

Lorsque je levai les yeux, il n'était nulle part. J'entrai dans la maison en passant par la fenêtre ouverte et courus jusqu'à la chambre de Chase. Il était là, entouré de fumées diverses, le sol jonché de reste de drogues que je n'étais même pas sûre de savoir identifier. Il ne souriait pas. Il leva les yeux à mon approche et son regard était comme fou, alors il attrapa ma tête entre ses mains et me hurla.

  • Pourquoi tu n'as rien fait ? Dis-moi pourquoi!!

J'essayai de lui échapper en me débattant et en implorant son pardon, mais il continuait de pousser des cris de plus en plus inhumains, tandis que des larmes de sang s'échappaient de ses yeux. Soudain, il me lâcha et baissa la tête, reculant jusqu'à la fenêtre, d'où il se laissa tomber. Je poussai un cri d'effroi et me précipitai vers l'ouverture. Je le vis étendu sur le sol, les membres brisés.

Je me précipitai dans les escaliers jusqu'en bas. Cette fois, la porte d'entrée n'avait pas de poignée friable et elle me laissa sortir. Mais Chase n'était plus là. À la place, se tenait une petite fille aux cheveux cuivrés qui semblait attendre quelque chose. Je me reconnus lorsque j'avais une dizaine d'années. Elle tourna lentement son visage triste vers moi et demanda d'une voix fluette.

  • C'est vous qui faites du mal à Chase ?

Je me raidis, cette phrase évoquant un souvenir trop douloureux, et la sommai de se taire. Alors elle hurla que c'était ma faute, que j'avais tué son amoureux et qu'elle ne me le pardonnerait jamais. Puis elle disparut en courant.

Le paysage s'obscurcit alors jusqu'à ce que tout devienne noir. Même les larmes qui s'écoulaient de mes yeux n'étaient que flots d'encre. Une voix résonna dans l'obscurité.

  • Tu es revenu, Chase ?

Je cherchai d'où pouvait provenir la voix, mais je ne voyais rien.

  • Oui, je viens chercher la même chose qu'hier, répondait Chase.

Je vis sa silhouette apparaître et se diriger dans ma direction.

  • Tu as de quoi payer, gamin ? Demanda une autre voix sortie de nulle part.

Il acquiesça et me tendit un billet de cinquante euros. Je secouai la tête sans comprendre, mais il insista pour que je le prenne.

  • Non, Chase, non, répétai-je en pleurant.

  • Prends-le et donne moi ce que je suis venu chercher, me dit-il.

  • Je ne te donnerai rien, tu m'entends ? M'écriai-je entre deux sanglots.

  • Donne, répéta-t-il.

  • Arrête, arrête ! Hurlai-je.

  • Pourtant, tu étais d'accord hier, se défendit-il. Tu n'as rien dit, tu ne m'as pas dit d'arrêter.

Puis il disparut dans l'obscurité. Alors je me laissai tomber à genoux et je pleurai toutes les larmes de mon corps. Lorsque mes yeux se rouvrirent, j'étais de nouveau devant la maison de Chase. Seth et les parents de Chase se tenaient devant la porte. Ils pleuraient. Je me précipitai vers eux, mais ils m'ignorèrent. À cet instant, des pompiers sortirent de la maison, portant un brancard sur lequel était étendu un corps recouvert d'un drap. Je soulevai le tissu et poussai un cri d'horreur en découvrant Chase. Je m'éloignai en courant, répétant d'une voix brisée .

  • Ce n'est pas ma faute !

  • Tu as tué mon amoureux ! Criai la petite moi qui me poursuivait en me jetant des pierres.

Alors que je m'enfuyais, je passai à côté de Brendan et Payton qui discutaient. Le temps sembla ralentir et j'entendis Payton dire.

  • Elle savait, mais elle n'a rien dit...

  • C'est de sa faute si Chase est mort, ajouta Brendan.

Et il me lança un regard rempli de haine. Alors, je m'effondrai et c'est à cet instant que je m'éveillai en sueur, des larmes ruisselant sur mon visage, le cœur battant comme si je venais réellement de courir. J'essuyai mon visage du revers de la main et j'entendis frapper à ma porte, ce qui me fit sursauter. Ma mère pénétra dans ma chambre, un air inquiet sur le visage.

  • Tout va bien, Halsey ? Demanda-t-elle. Je t'ai entendue crier. Mais tu pleures !

Elle s'approcha de mon lit et s'assit à côté de moi, relevant une de mes mèches collée à ma joue par les larmes.

  • Tu as fait un cauchemar ?

  • Oui, mais ça va maintenant, la rassurai-je.

Je ne tenais pas particulièrement à expliquer les raisons de mon mauvais rêve à ma mère. Elle connaissait Brendan et Chase depuis des années et ne tarissait jamais d'éloges à leur sujet. Je ne voulais pas briser son illusion en lui racontant comment Chase occupait ses soirées.

  • Tu sais, il est bon de raconter ses mauvais rêves pour les effacer de son esprit, m'expliqua-t-elle. Tu ne veux pas me dire de quoi il retournait ?

  • J'apprenais que Chase et Brendan étaient morts dans un accident de voiture, inventai-je. Et c'était moi qui leur avais demandé de prendre la route.

Ma mère sourit d'un air compatissant et m'assura qu'il était normal que je me fasse du souci pour mes amis. Elle m'annonça en revanche que je n'avais rien à craindre puisqu'ils n'avaient pas encore leur permis. Ce qui était d'une logique implacable, mais quelque peu naïf malgré tout.

Elle se releva et me souhaita de me rendormir rapidement. Lorsqu'elle eut quitté ma chambre, je repris mon souffle et m'échinai à stopper les tremblements qui agitaient tout mon corps. Ce rêve m'avait convaincue d'une chose, je devais parler à Chase dès le lendemain et ne surtout pas laisser traîner cette affaire. S'il commençait vraiment à acheter de la drogue dure et à en prendre régulièrement, je devais l'aider tout de suite, car bientôt, ce serait trop tard. Forte de cette conviction, je me rendormis en imaginant de quelle façon, j'allais l'aborder.

À mon réveil, vers dix heures du matin, je vis sur mon portable que j'avais deux nouveaux messages. L'un était de Brendan qui s'inquiétait de mon départ soudain de la veille et souhaitait prendre de mes nouvelles. Il m'avait été envoyé à minuit passé de quelques minutes. Le second était de Payton et son contenu était similaire au précédent. Je les rassurai tous les deux en quelques mots, puis descendis prendre mon petit-déjeuner.

J'engloutis mon bol de céréales sous le regard interrogateur de ma mère puis remontai dans ma chambre enfiler une robe légère et des ballerines. J'attachai mes cheveux d'une manière anarchique mais élégante et soulignai mon regard de deux traits de crayon avant de redescendre en courant.

  • Je vais chez Chase ! Lançai-je à ma mère en sortant.

Je n'attendis même pas d'entendre sa réponse et claquai la porte. Puis je m'engageai sur le trottoir d'une démarche certaine. En arrivant devant la maison de Chase, je fus surprise de constater que la voiture de ses parents n'était pas dans l'allée, non plus que celle de Seth. Mon cœur commença à s'affoler et je songeai que j'arrivais peut-être déjà trop tard. C'est donc en proie à la panique que je frappai à la porte en bois sculpté de la villa.

Deux minutes s'écoulèrent sans qu'aucun bruit ne m'indique la présence de quelqu'un dans la maison, mais je n'abandonnai pas et écrasai le bouton de la sonnette trois fois de suite. Cette sonnette étant connue pour être particulièrement stridente, je ne l'utilisais en général qu'en dernier ressort. Si personne ne répondait cette fois-ci, je serais convaincue que la maison était vide.

Une fenêtre s'ouvrit au-dessus de ma tête, des volets grincèrent et je vis apparaître le visage endormi de Chase. Il frotta ses yeux agressés par la lumière puis, m'ayant aperçue, il grommela que ce n'était pas un heure pour venir déranger les gens. Il referma sa fenêtre et quelques secondes, plus tard, j'entendis le verrou de la porte s'actionner.

  • Qu'est que tu veux ? Demanda mon ami en s'effaçant pour me laisser entrer.

Maintenant que j'étais en face de lui, tout courage m'avait abandonné. Je m'assis sur le canapé confortable du salon et observai mes ongles sans émettre le moindre son, ce qui eut le don d'irriter Chase qui lança.

  • C'est pour rester assise ici que tu m'as réveillé ?

  • Euh, balbutiai-je, pas vraiment... En fait je voulais...

  • Si c'est par rapport à avant hier, je t'ai déjà dit que...

  • Non, cette fois, ça concerne hier!, dis-je en relevant la tête, plongeant mon regard dans le sien.

Il me regarda sans comprendre et cru bon de s'excuser pour ne pas être venu à la soirée chez Brendan . Je secouai la tête et précisai .

  • Rien à voir. Écoute, ça ne va pas sûrement te plaire, mais, après ce qui s'était passé avant hier, je me faisais du souci et... je t'ai suivi hier soir après que tu sois descendu du bus.

Je rougis et baissai la tête, pas assez vite cependant ne pas voir son visage durcit par la colère. Il enragea.

  • Non mais tu te prends pour qui ?

  • Pour ton amie ! J'avais peur pour toi Chase, je m'étais imaginé des trucs qui... J'avais peur pour toi Chase, je m'étais imaginé des trucs qui...

  • Et je peux savoir ce que c'est ?

  • Tu prends de la drogue. Et je ne te parle pas de l'herbe que tu prends avec les autres, mais d'une vraie drogue dure !

Il eut un sourire mauvais et ricana, donnant à ses traits une expression qui m'effraya encore plus que l'avant-veille.

  • Tu ne vas pas t'y mettre aussi, s'énerva-t-il. J'ai déjà assez avec mon frère sur le dos, alors lâche moi !

  • Tu t'entends parler, Chase ? M'indignai-je. Qui t'a fait toucher à ça ? Et d'abord qu'est ce que tu prends exactement ?

  • Rien ne m'oblige à te répondre. Donc tu vas gentiment rentrer chez toi et oublier ça, d'accord ?

Son ton s'était radouci, mais j'étais trop hors de moi pour y prêter une quelconque attention. Je me levai du canapé avec violence et approchai mon visage rongé par la colère et de chagrin de celui, sans expression de Chase.

  • Ah, tu ne veux pas me le dire, très bien ! Crachai-je entre mes dents.

Je me mis à courir et montai les marches deux à deux, fonçai au bout du couloir et pénétrai dans la chambre de Chase. Je claquai la porte derrière moi et tournai la clef dans la serrure. Quelques secondes, plus tard, je l'entendis tambouriner comme un forcené.

  • Ouvre Halsey ! Tu es chez moi au cas où tu l'aurais oublié !

  • Je n'ouvrirai que lorsque j'aurai trouvé ce que je cherche !

J'avais cru qu'il me faudrait tout retourner et chercher la cachette de son matos, mais il était bien en vue sur son bureau. Je vis un sachet de poudre blanche et une sorte de paille qui traînait juste à côté. C'était donc bien ce que je pensais.

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