Une Histoire de Ratés // 2

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Ses pas résonnaient bruyamment autour de lui. Il était encore tôt, et le soleil le devançait à son front : perlant tout juste à l'horizon du paysage. Eddie avait chaud, semblait en tension, mais continuait à courir aussi vite qu'il en était capable. Comme éprit dans une énergie inépuisable qu'il ne pouvait contrôler. Il était terriblement frustré, mais le pourquoi de son état le fit une nouvelle fois accélérer. Comme une peur inquiétante boostant ses réflexions ; qu'il fallait qu'il évacue à tout prix. Il ne courrait jamais habituellement. En tous cas, pas depuis les six derniers mois qui eurent précédé sa renaissance. Il n'avait revu aucun des ratés depuis leur séparation à Derry. Lui avait repris son boulot comme il se devait de le faire, reprenant également le court de sa relation maritale comme un honnête et bon citoyen. A une différence près : Il ne pouvait plus se forcer à y survivre. Il ne parvenait plus à faire face à son propre mensonge. Myra était devenue insupportable, son boulot lui plaisait ; mais le tout réuni lui paraissait bien amer. Il s'était donc mis à courir pour franchir le cap. Pour se défouler un peu, trouver des instants de répits. Au moins, il savait qu'elle ne lui demanderait jamais de l'accompagner. Un an que tout s'était produit, il se le répétait plusieurs fois depuis le début de la matinée. Il n'arrivait pas à le croire. Il avait passé vingt ans de sa vie assez facilement, ne pensant pas un seul instant à ces moments passés avec eux. Et là, il ne pouvait tenir à peine une demi-année. S'en fut presque dépitant. 

Il voyait souvent des articles de presses passés, notamment sur internet ou dans les journaux, des nouvelles concernant les membres du groupe. Mike quant à lui, faisait parvenir de ses nouveautés depuis son installation à Miami. Ils semblèrent tous si épanoui, Eddie en retira une mine sévère. Il bufflait violemment. Pour autant, il continua sur sa foulée et releva la tête vers son poignet. Cela faisait maintenant une bonne heure qu'il arpentait le petit chemin de goudron désert. Plongé dans l'aurore, il était toujours seul. La pensée de savoir comment il allait faire pour tenir la journée lui traversa l'esprit, mais il ne se pencha pas sur la question. Cette dernière le terrifiait. Et comme pour lui répondre, il accéléra une nouvelle fois. Cela ne la fit pas taire, mais il pouvait tout de même se concentrer davantage sur son effort physique.

- Eddie-Chou ? 

Il exultât une énième fois de dépit. Comment diable était-ce possible de l'énerver à ce point ? Sa femme s'avançait vers lui, son pas lui sembla encore plus lourd qu'à l'intitulé. Elle avait les yeux rougis, comme quotidiennement depuis les deux dernières semaines. Elle savait que son mari partait pour le weekend entier avec ses amis d'enfances. Tout ça, n'était pas prévu dans son programme. En tous cas, pas depuis les dix dernières années de leur relation conjugale. Elle en était malade. Et puis, elle avait bien senti que depuis son retour, Eddie n'était pas naturel. Ce n'était pas lui : Tout du moins pas pour elle. Elle ne bougeait plus, attendant patiemment une réponse de son mari à ses lamentations. Mais celui-ci ne fit rien, si ce ne fut la regarder. Puis il passa à côté d'elle, se dirigeant naturellement vers la salle de bain. Myra ne sut quoi répondre, quoi trouver à rétorquer, avant de brutalement éclater en sanglot. Elle sortait sa dernière carte, et Eddie ne put que se raidir. Il était incapable de bouger, à mesure que la jeune femme s'effondrait sur elle-même.

- Mon dieu, Eddie... Balbutia-t-elle entre ses doigts boudinés.

Eddie lui, ressenti un nouveau pincement au cœur. Mais ses gémissements lui firent aussitôt penser à ceux de sa propre-mère. Comme un mauvais flash. Ses poings se resserrèrent dans un mouvement rapide.

- Relève toi. Pour l'amour de dieu, Myra...

Il avait lâché sa complainte alors qu'il s'accommodait nonchalamment vers la grande douche. Il retira ses vêtements quasiment moites, avant de les jeter dans le petit panier à linge.

- Mais qu'est-ce qu'il t'arrive Eddie ? Je ne te reconnais plus... Sanglota-t-elle toujours.

- C'est peut-être ça le problème.

- Quoi... ? Comment ça, qu'est ce que tu veux dire ?

- Je pense que tu ne me connais pas, pas vraiment.

Elle se tût à cette réponse. Eddie la fixait droit dans les yeux, le regard étonnement sincère.

- Je... Je comprends rien Eddie...

- Laisse-moi me doucher Myra, s'il te plait. 

Étrangement, il n'eut aucun mal à fermer la porte devant elle. Son épouse était en état de choc, incapable de rétorquer. Mais Eddie se réjouissait en silence de la situation. Pour une fois, il avait réussi à lui faire fermer son clapet.

Mais ce ne fut qu'une fois rendu sous le jet d'eau puissant qu'il parvint davantage à se relaxer. Tout son corps lui semblait lasse, et tout cela n'avait en réalité rien à voir avec le sport qu'il pratiquait quotidiennement. Il avait tout bonnement l'impression d'être défoncé. Ou en tous cas, l'idée que ce dernier s'en faisait. Les petits cris embrouillés derrière la porte furent les seules nuisances qu'il percevait encore par moment. Coupant court à toutes autres événements extérieurs, il plongea finalement ses tympans sous la pomme de douche. Et inspira longuement. Il profita un court instant de la chaleur qui l'enveloppait ; parvenant sans grande victoire à dégourdir légèrement son dos crispé. Les yeux toujours clos, il fut rassuré de ne plus entendre son épouse traîner devant la porte. Myra était maintenant dans la cuisine, sachant impertinemment quoi faire. Ravalant plusieurs sanglots angoissés, elle était en cet instant-même tout le contraire de son mari. Ce dernier n'avait pas bougé depuis cinq minutes, statique. On aurait pu croire qu'il réfléchissait : mais lui-même ne put songer à quoi. La seule réflexion qui se maintenait dans son esprit, fut le temps qu'il fallait encore devoir patienter. Il était à peine huit heure trente, son départ ne se faisait pas avant dix-sept heures. Cette vérité lui éclatât une nouvelle fois au visage. Il ne pouvait se résigner : il était terriblement excité. Même beaucoup trop.

Ses paupières se rouvrirent finalement toutes deux machinalement, donnant accès à une vue imprenable sur le sud de son anatomie. Furieusement réveillé. Kaspbrak en fut lui-même surprit. Il n'avait depuis longtemps, jamais assisté à une gaule aussi sévère. Il objecta un son étranglé alors qu'il tâcha pendant quelques secondes à la faire disparaître. Mais bien vite, le contact de sa paume avec sa virilité lui fit parvenir un violent frisson. Une sensation qu'il ne pouvait se résoudre à ignorer. Le visage légèrement rougi par la chaleur de la pièce, il commença honteusement un mouvement significatif. Il ne pensait à aucune chose en particulier : Tout ce qui put par conséquent soulager son mental. Perdu dans sa rêverie, et à mesure que ses frictions se firent de plus en plus poussées sur la base de son sexe, il pensa nonchalamment à la présentatrice météo qu'il mâtait régulièrement devant le poste de télévision tous les soirs. Puis à la voisine de son pâté de maison, quelques rues plus loin. Elle avait l'habitude de sortir toujours bien habiller, affublée avec classe de jolies robes fendues. Ces dernières laissaient de ce fait entrevoir les longues jambes qu'elle possédait. Kaspbrak en tira une satisfaction puissante. Plusieurs potentielles conquêtes passèrent dans les filets de son esprit, sans forcément qu'il ne se penche plus sur l'une d'entres elles. Il se tenait fermement contre la paroi humide de la cabine, retirant un vrombissement alors qu'il accélérait la cadence. L'eau claquant sur son corps brûlant empêchait notamment ses gémissements de franchir le pas de la pièce. Et pendant qu'il fantasmait allègrement sur ses divers penchants, une nouvelle pensée s'incrusta discrètement dans son imaginaire.

- Je n'aurai jamais la force de me séparer de toi, Eds.

Eddie se figea soudainement. Il ne comprenait pas comment ce dernier pouvait s'inviter nonchalamment dans son plaisir solitaire. Mais il ne comprit aucunement pourquoi son pénis réagissait vivement à cette idée. Paumé, il bougea frénétiquement la tête, espérant pouvoir se reprendre. Il repensa une nouvelle fois à Mme Anderson qui déchargeait sa voiture quand elle rentrait des courses. Mais très vite, son inconscient repris furieusement le dessus. Il n'était maintenant plus du tout dans son petit quartier pavillonnaire, mais perdu dans les friches. Ses yeux étaient de nouveau fermés. Dans son ressenti, cet individu était fièrement prostré devant lui. A moitié baissé vers son visage, le regard le dévorant totalement. Kaspbrak laissa échapper un gémissement furieux, à défaut pour sa propre main de venir se comprimer nerveusement sur son gland découvert.

- Besoin d'aide ?

Dès-à-présent perdu dans son imaginaire, Eddie ne put que reprendre violemment sa masturbation. Dans sa tête, ce n'étaient plus ses doigts qui firent le boulot, mais bien Richie qui s'était immiscé avec lui, lui chuchotant plusieurs phrases abjectes à l'oreille alors qu'il l'astiquait chaleureusement. Action qui eut la décence de l'exciter toujours plus.

- Putain... 

Il s'étala un peu plus vers l'avant, dorénavant englouti par sa luxure. Il imaginait toujours la même scène se répétant, et son corps n'en avait jamais autant demandé. Il se serait probablement arrêté en y réfléchissant mieux, mais il ne pouvait se résigner à tout stopper. Le plaisir était trop intense. Et le visage de Tozier s'excitant sans pudeur sur ses réactions eut raison de sa volonté. Dans un râle assourdissant, il envoya soudainement la sauce. La traîné blanchâtre se déversa contre la grille en verre, s'immisçant dans l'eau limpide pour s'enfuir vers le siphon. Eddie lui ne bougeait à présent plus. Honteux ; mais agréablement surpris. Jamais une branlette ne s'était faite si dévastatrice, même si il s'efforça de ne pas réfléchir aux moyens nécessaires qui l'eurent engendrée.

Nerveusement, il compta rapidement les dernières affaires à emporter. Il n'en revenait pas : Il avait l'impression d'être un gamin attendant le départ imminant des vacances. Il était surexcité. Il rangea scrupuleusement plusieurs médicaments dans la poche intérieur de son sac, n'épargnant aucun détail. Myra n'avait pas bougé du pas de la porte, ses mains recroquevillées sur son abondante poitrine. Elle renifla une nouvelle fois bruyamment ; espérant parvenir à l'amadouer une énième fois. Mais Kaspbrak était inébranlable. Comme une dernière sentence la visant, il referma la grosse valise dans un calme indomptable.

- Je... Je ne pense pas que ce soit une bonne idée que tu y ailles mon chéri. Pour... Pour notre mariage je veux dire... Commença-t-elle alors, penaude.

- Si, au contraire. 

Le ton d'Eddie était si froid que Myra se crispa par réflexe. 

- Je pense que prendre mes distances quelques jours va me permettre de réfléchir. Et puis, j'ai besoin de les voir.

- Si jamais tu pars, j'en mourrai Edward...

Eddie releva le regard pour la première fois vers elle, alors qu'il s'attardait à embarquer ses bagages à côté de la literie.

- Me fait pas... Tu ne peux pas me faire ça. Conclut-elle.

L'époux lui, ne put rien répondre sur l'instant. Il se contenta de la toiser sévèrement. Son regard en devenu plus noir, la jeune femme laissa échapper un énième sanglot.

- Je ne suis pas ton enfant Myra. On est adulte, tu n'as pas à me materner comme-ça... C'est pas sein. Et... Je n'en veux tout simplement plus. 

Un long silence s'en suivi. La jeune femme parut comme s'écrouler. Sincèrement. Eddie lui respirait de façon saccadée. Il n'avait pas dit sa réponse de façon énervé, il ne l'était pas. Mais les réactions sur son corps firent penser totalement l'inverse. Il tremblait légèrement.

- Mon chéri, je... Je...

- On n'en reparle lundi soir. Termina-t-il, embarquant dans un mouvement le plus petit sac sur son dos.

Il ignora de ce fait les cris et pleurs de sa femme derrière lui lorsqu'il s'apprêtait à monter dans sa voiture. Il ne la regardait même plus, il ne voulait pas faire plus d'effort pour la journée. Ses pensées étaient-elles toutes tournées vers un seul but : Enfin pouvoir respirer. Et d'un bruissement de roue sur les petits graviers, il partit expressément. Laissant au passage une épouse inconsolable sur le perron de leur petite habitation pavillonnaire.

☽ ☾

Les propriétés devant lui, lui parurent inconsidérées. Il n'y en avait pas énormément, mais les terrains en eux-mêmes étaient tellement vaste qu'on aurait pu en caler une autre maison à chaque coup. Eddie en était perdu, la tête relevée. Il eut une pensée vertigineuse quand il se rendit compte que ce n'était que leur résidence secondaire. Depuis que Ben et Beverly s'étaient engagés ensembles ; leurs revenues avaient dû exploser les compteurs. Il arriva rapidement au lieu-dit du GPS. Entouré d'un simple champ de sapin, avec simplement une petite route bétonnée pour accès. Non loin semblait perler une maison un peu plus haut. Kaspbrak lui fut envoûté. Et rapidement, franchit les portes du grand portail qui lui faisait face. Toutes les voitures semblaient déjà arrivées. Et à en croire les discussions qui résonnaient un peu plus loin, ils devaient déjà être tous présent. Eddie en souri en se garant. Il était heureux qu'il ne soit pas le seul à ressentir cette puissante fureur à mesure que le bruit du moteur se stoppait. Il ne mit pas longtemps à descendre de la voiture, un sourire conséquent tapis aux coins des lèvres. Il en laissa ses affaires dans un premier temps. Incapable de se résonner pour paraître désinvolte, il accéda à l'énorme bâtisse. Puis, fut attiré naturellement par l'accès au jardin derrière. Il ne connaissait même pas l'habitation en question, ne savait pas en réalité où chercher : mais il courrait exactement dans la bonne direction. Soudainement, il eut enfin vu sur ce qu'il cherchait expressément. Trois personnes discutant autour d'une table, un verre à la main. Et il ne fallut pas plus de temps à la seule femme du petit groupe pour le voir également, avant de s'empresser de se lever.

- Nom de dieu d'bon dieu ! C'est Eddie !

Ce dernier ne put que lui renvoyer son sourire enchanté, sans forcément pouvoir faire autre chose. Les mains dans les poches, il resta penaud alors que son interlocutrice elle, se jeta violemment dans ses bras.

- J'suis tellement heureuse de te revoir...

- Et moi donc.

Il l'enlaçait à son tour ; le visage plongé dans ses cheveux roux. Il ferma les yeux inconsciemment à ce contact. Pendant ce temps ; la main de Bill s'écrasa nonchalamment sur sa tête baissée.

- Salut Eddie. Putain, c'est cool de te revoir mec.

- Plaisir partagé mon ami. Ponctua-t-il alors qu'il saluait Mike à son côté.

- Salut Docteur ! 

Ben était le seul qui n'avait pas bougé de place à son arrivée, le saluant de l'autre bout de la terrasse. Habillé d'un ridicule tablier et s'affublant d'un problème conséquent de barbecue plus ou moins bien géré. Kaspbrak le salua également, retirant un rictus amusé. Depuis qu'il l'avait rafistolé à ses treize ans, l'architecte prenait un malin plaisir à le surnommer ainsi. Eddie n'en eut rien dit. Cela lui convenait assez, il ne pouvait s'empêcher de se sentir intérieurement flatté. Ce dernier tourna finalement naturellement la tête. Il était heureux de les voir ; mais un membre manquait pas conséquent à l'appel. La mauvaise impression du souvenir de Stan lui traversa l'esprit, mais il effaça rapidement cette éventualité à mesure qu'on le drainait vers le petit salon de jardin. Celui-ci était par conséquent plein à ra-bord. Les boissons proposées n'avaient jamais été aussi diverses : à un point tel que Kaspbrak se demanda si il y avait déjà eu autant de choix dans la totalité des bars des Etats-Unis.

- Tiens, qu'est ce que tu veux boire mon chéri ?

Beverly semblait dans un état plus grave que le reste de la bande. Eddie s'en esclaffa légèrement avant d'opter pour une bière on ne peut plus classique. Cette dernière le toisa, avant d'une nouvelle fois s'approcher. Par conséquent, elle était bien de trop tactile.

- Mais... T'as maigri Edward ? Lança-t-elle finalement, horrifiée.

- Non. Enfin, non, j'crois pas...

Il profita de cette remarque pour regarder les courbes de son T-Shirt noir. Et effectivement, le sport intensif qu'il se forçait à faire depuis peu avait fini par le sculpter un peu plus. Le spaghetti du groupe à cet instant, ne paraissait plus aussi fin que cela.

- Tu... Tu te muscles ? Demanda-t-elle, hébétée.

- Cela s'appelle prendre soin de soi ma chère. Je cours, c'est tout...

- Bah moi je trouve ça bien. T'as moins la tête crispée, tu fais moins... Stressé.

- Merci Bill, c'est adorable.

Ce dernier lui retira un clin d'œil vif avant de se servir une nouvelle fois. Kaspbrak but quant à lui sa première gorgée, enfin un peu plus relaxé.

- Et puis, si c'est à quelqu'un de faire attention à son hygiène de vie, c'est pas nous. Ponctua Beverly, s'asseyant sans ménagement dans le grand fauteuil.

- Ah ouais, et à qui tu penses en disant ça ?

- Rien. Enfin, non, personne...

Elle était à moitié hilare, se cachant honteusement derrière son verre à moitié plein.

- Allez vas-y, crache le morceau.

- Mais, personne.

- Tu peux le dire ! C'est le seul qui ne va pas t'entendre... Broncha alors Mike, laissant échapper un soupir amusé. Il fit de nouveau rire la jeune femme au passage.

- Non mais... Non. Disons que c'est juste... C'est juste que c'est le plus...

- Pitié. Dites-moi que vous parlez pas de moi...

Ben s'était avancé vers le groupe, saluant par ailleurs d'une accolade rapide Kaspbrak assis à sa droite.

- Mais non. Pas toi...

- Elle a honte d'elle parce qu'elle bave sur ses amis quand ils ne sont pas là. Conclu sobrement Bill, irrésistiblement amusé des réactions de sa vieille amie.

- Mais n'importe quoi ! Je ne bave pas. Disons plus-tôt que, je... Je...

- Elle est très observatrice.

- Merci Eddie !

Kaspbrak lui retira un enlacement en gage de son soutien, chose qui la fit une nouvelle fois sourire. Ses joues étaient maintenant si rouges que la plupart des participants du groupe se demandèrent à combien de litres d'avance celle-ci pouvait bien en être rendue.

- Bon et sinon, en parlant de ça. Il est où notre gros ?

Beverly éclata de rire, avant de se reprendre bien maladroitement.

- J'en sais rien... Je sais pas ce qu'il branle. Il m'a rien envoyé depuis hier.

- Monsieur se fait désirer. C'est ça le problème avec les stars du Show Bizz.

- Tu bosses dans le cinéma trou d'balle...

- Justement, je sais de quoi j'parle ! Ponctua l'écrivain, levant son index face à lui.

- C'est un putain de connard d'avance de toute façon. Lança Kaspbrak, ne pouvant s'empêcher de laisser glisser un sourire sur sa bouche.

- Sans déconner, je l'adore cet enfoiré, mais il fait quand même chier... On est pas important à ce point ?

- Si tu savais ma p'tite Beverly, la vérité : Vous n'êtes qu'une belle bande de gros trous du cul. Et oui, et j'vous emmerdes du plus profond de mes couilles. Profitez, c'est sincère. Bande d'enculés. 

Tous les regards se tournèrent vers le même point, à l'exception du plus jeune qui se crispa par réflexe. Richie se tenait à l'entrée, les bras chargés de diverses choses. Amusé, il déposa ses bagages à ses pieds alors que la grande rousse se relevait. Comme enchantée, elle le prit dans les bras.

- Super, tu as apporté ta contribution, c'est trop mignon. Laissa-t-elle échapper alors qu'elle s'empressait de décharger son ami de ses affaires.

- Ouais, je sais. Ça mérite bien une turlutte non ?

- Ouais c'est ça, rendez-vous dans tes rêves Tozier.

- Ça coûte rien d'essayer...

Rapidement, le comique avait procédé à un tour de table. Eddie n'avait toujours pas croisé son regard, patientant sagement son tour. La bouteille de bière qu'il détenait entre ses doigts n'avait maintenant plus d'étiquette.

- Salut Eds.

Même si il semblait agir de manière habituel, Richie arpentait tout de même un foncier sourire. Debout et les mains dans les poches, il s'autorisa un bref baiser sur le front de son ami avant de se tourner une nouvelle fois vers l'auditoire.

- Au faite les tapettes, au lieu de critiquer mon poids : Bien que parfait soit-il... Si on parlait de ton état d'ébriété Bev ?

Cette dernière ne put que s'offusquer, sans même arriver à lui tenir tête. Et ce ne fut pas le reste de la bande qui opposèrent une quelconque critique.

- Elle me tanne depuis hier pour s'en prendre une... Répliqua Ben dans son coin, s'enfournant dans sa chaise au moment où celle-ci la toisa d'une manière menaçante.

- Eh, mais n'importe quoi ! Je ne suis pas plus saoule que vous...

- Bah ! Tu parles...

- Tu peux t'accrocher pour faire mieux Marsh.

Tozier s'était affublé d'une chaise, se plaçant bien évidement contre le bar, entre Kaspbrak et Hanlon. Gratifié d'un rictus amusé, il la fixait d'un air de défi.

- Tu veux parier ?

- Je te mets ta pâtée quand tu veux princesse. D'ailleurs, j'vais prendre les devants. Apparemment, j'ai pas mal de retard à rattraper. Conclut le comédien, s'accommodant d'une bouteille de Jack à ses côtés.

- Sérieusement, on a vingt ans aujourd'hui ou quoi ?

- Exact Hanlon.

Richie tapota fièrement le haut de la bière en face de lui, faisant éjecter son liquide par la force du coup. Kaspbrak resserra la sienne au même moment, surprit.

- Putain, Rich' !

- Fallait être plus speed.

Puis, Richie se tourna vers le cadet de la troupe, se stoppant. La bouteille toujours dans la main, il trinqua avec son ami, d'une façon bien plus calme.

- Content de te revoir Eddie. T'es toujours aussi mignon au faite... Conclut-il, buvant une gorgée sans en décrocher son attention.

- Bordel Rich'...

- Oh c'est bon Mike, tu casses les couilles. Et puis, tu sais bien. Moi, les formes phalliques qui expulsent comme-ça, ça m'excite.

- C'est peut-être pour ça que c'est bien qu't'écrives pas tes propres blagues...

- Je suis un connard, d'accord, mais j'ai des sentiments Ben.

Ce dernier réfuta un léger rire, cessant tout nouveau resservie de la part de sa fiancée sur son flanc droit.

- Vraiment, toi ? 

- Ta femme me doit une pipe. Je ne ferais pas le malin si j'étais toi...

Ben n'eut pas à répliquer sur l'instant. Tozier s'était bloqué, le visage humide et collant. Kaspbrak lui, avait simplement hoqueter un son par surprise. Mike s'était relevé, échappant de bel à l'attaque. Et devant eux, les visages étaient concentrés sur la boisson désormais vide de la jeune femme.

- Marsh...

- Réfléchis-bien avant de parler Trashmouth.

Elle était hilare, et se resservit naturellement. Tozier lui aussi riait. Mais son rire ne résonnait que de sadisme. Il tourna plusieurs fois la tête, dès-à-présent un peu plus plié, les deux coudes sur les genoux.

- Tu as une belle piscine Marsh. 

Ce fut la seule réponse qu'il éleva. Avant d'aussitôt bondir de sa chaise, tel un animal chassant sa proie. Sans difficulté, il parvenu rapidement à la prendre sur une épaule. Et se dirigea nonchalamment un peu plus vers le fond du jardin.

- Non, laisse-moi merde ! Déconne pas, c'est pas des vêtements qui vont dans l'eau...

- Sérieusement. Tu t'écoutes Bev avant de parler ? Répliqua son assaillant dans un rire attristé.

- Non mais sérieux Richie, arrête ! Lâche-moi s'il te plait...

- Faut que je sèche maintenant, je suis trempé de bière. Connasse. 

Et sans même qu'elle puisse lui répondre, son corps entier se retrouva plongé dans une eau tempérée. Lui, l'avait accompagné. L'emmenant sans conteste dans sa course. Les autres n'avaient toujours pas bougé, s'esclaffant de dépit.

- J'en reviens pas... Laissa échapper Bill dans un soupir amusé.

- Je pense que ces deux-là vont nous donner du fil à retorde ce week-end.

- J'ai l'impression d'avoir quinze-ans. Rétorqua Mike, enchanté par l'idée elle-même.

- T'es pas le seul à le voir comme-ça. 

L'attention était forcément captée par les deux amis à quelques pas. Elle lui retira une frappe sévère quand celui-ci se redressa hors de l'eau. Action qui fut automatiquement déclencheur d'une nouvelle attaque. Tous ne purent alors qu'abdiquer leurs dires silencieusement, mais tous y semblèrent en quelque sorte, incroyablement soulagés. Kaspbrak n'avait pas décroché de la grande piscine. Et sans conteste, commença nonchalamment à foncièrement mater le grand comique. Le temps de quelques secondes, mais assez pour le faire soudainement paniquer. Le temps qu'il se reprenne, Richie s'était réaffublé à sa place sans le moindre sentiment à parant. Il lui échangea un regard, que l'autre ne put supporter. Sans rien enchaîner, il trinqua une énième fois avec son amie qui s'était rassise, verte.

- J'avais raison... C'est une belle piscine. 

Un nouveau regard assassin vint le fusiller, à défaut de sa part de n'en retirer aucun usage.

- Eds ? Tu n'as pas sorti tes bagages, je me trompe ?

Ce dernier tourna son attention de la bière présente entre ses mains, levant un sourcil à la question.

- Comment tu peux savoir...

- Allez, viens trou de fion ! On va s'trouvez la meilleure chambre avant ces abrutis. Déclara le comédien, pointant du doigts les deux amis concernés.

- Quoi, pourquoi c'est vous deux qui choisiriez ?

- Eh attends, comment t'en déduis qui va dans quelle chambre ?

- J'm'en fous, j'suis le plus rapide. Allez Eds bordel, bouge toi l'cul ! 

Et avant même que l'écrivain puisse faire grand-chose, son ami était déjà à parcourir la maison vide. Sous les yeux ahuris de Kaspbrak qui n'avait lui, rien compris. Il n'eut cependant pas le temps d'y réfléchir plus. Tozier grondait d'une voix faussement impatiente alors qu'il se trouvait dans l'allée. Eddie résigné, ne put que se lever.

- Sympa ta bagnole... Le vrai bon père de famille. Lançait Richie, le temps qu'il s'acquitte du dernier bagage présent dans le coffre.

- Ferme-là avec tes réflexions.

- Eddie. Regarde bordel... Une Range Rover.

Kaspbrak ne put que souffler d'exaspération, même si ces remarques moqueuses lui avaient étrangement manqué.

- J't'en pose des questions...

- Non, mais moi si par contre. Là, ça craint.

Eddie ne répondit pas cette fois-là. Pour seule action, il prit en mains trois de ses valises, laissant la dernière pour le grand brun dans un regard appuyé.

- Eh Eddie, t'as prévu de déménager ici ou quoi ? Rigola son interlocuteur, montant le sac sur ses épaules.

- On ne sait jamais.

- Tu me dépites. 

Kaspbrak ravala un rictus amusé. Il le savait qu'il avait pris par conséquent bien de trop. Mais coutumier de ce système, il n'aurait su s'accommoder au stricte nécessaire. Richie bufflait derrière lui, certains que le plus jeune avait dû lui laisser le plus lourd pour s'en défaire. Il n'en eut cependant rien dis à l'instant où ils franchirent le grand corridor de l'étage.

Aucun des deux amis ne purent dire quoi que ce soit. La bâtisse était bien de trop énorme, même beaucoup plus grande que l'appartement spacieux de Tozier. Pour sa part, Eddie ne put que s'extasier encore plus.

- Hey, Eds ! J'ai trouvé notre palace... 

Ce fut une grande chambre, séparé par une lucarne majestueuse à son centre : Faisant de la grande pièce deux endroits bien distincts. De petits meubles disposés firent penser à un coin salon, en plus du grand lit à la toute droite. Elle possédait également une salle de bain à la grandeur vertigineuse.

- Bordel de merde... Ne put s'empêcher de souffler Eddie, à mesure que son regard se perdit au niveau des diverses décorations.

Richie quant à lui, s'efforçait d'en regarder chaque recoin. Il n'avait beau rien dire, il était complètement impressionné par le ressort de l'habitation. Puis finalement, il se prostra devant la grande fenêtre. Les mains dans les poches et immobile, il resta-là devant cette vue imprenable un bon bout de temps. Il ne bronchait pas.

- J'aurai dû épouser Beverly.

Son ami laissa échapper un sobriquet, alors que l'aîné fit revenir son attention sur lui. Il était venu prendre place à ses côtés, fixant d'une expression ravie les autres participants de ces retrouvailles, toujours installés à l'extérieur.

- Elle a pas trop de seins à ton gout ?

- C'est pas un problème ça. Je n'aurai qu'à la prendre par derrière, et ce sera tout comme.

- Toujours aussi inventif.

Eddie n'avait toujours pas bougé face aux faibles rayons de soleil qui perlaient à l'horizon. Son ami s'était lui retourné, s'accoudant au rebord de la fenêtre. Un sourire discret naquit sur la pointe de ses lèvres.

- Eds... Dis-moi. C'est toujours okay entre nous deux ? Demanda-t-il après quelques instants de réflexions.

Il se tordait nerveusement les doigts, apeuré à l'idée de la réponse. Mais Eddie n'en eut rien dis, se décalant naturellement vers lui. Il semblait toujours aussi serein, chose qui rassura par conséquent son aîné.

- Richie. Peut importe ce que tu es, ou ce que tu ressens. On est pote. Commença ce dernier sans même se rapprocher. On l'a toujours été, et je n'ai pas l'intention de tirer un trait sur tout ça. Rien a changé depuis la dernière fois. Arrête de te stigmatiser...

Tozier ne répliqua rien cette fois-là. Seule une expression de gratitude inondait son visage, et ce fut toujours sans un mot qu'il le prit finalement entre ses bras. Eddie ne broncha pas, et accepta l'accolade. Il ne remarqua pas le comédien souffler contre son épaule, à présent totalement rassuré. Ce dernier ne put que déposer sa main sur le dos de son acolyte ; s'accommodant à une légère inspection. Celui-ci était aussi lisse qu'il devait l'être. L'autre en éprouva une satisfaction grandissante.

- Merci Eddie.

Ils s'étaient tous deux relâchés, se toisant d'un regard complice. Le cadet de la situation lui retira un rictus amusé à l'instant où il le décoiffa nonchalamment, comme pour mettre fin de manière correcte à la discussion. L'autre s'en était décalé, ramenant leurs sacs dans le petit coin salon. Eddie ne bougea qu'un instant plus-tard. Son regard n'avait pas décroché du plus vieux qui s'affairait pour redescendre voir le groupe.

- Attends, Rich' ?

Ce dernier se bloqua instinctivement, subitement un peu plus peureux. Eddie le toisait, mal à l'aise, avant de s'avancer légèrement. Son interlocuteur ne put que se crisper davantage.

- Pourquoi... Pourquoi avoir attendu si longtemps pour le dire ?

- Eh bien... ça aurait été gênant... balbutia Tozier. J'aurai pas su comment te l'avouer...

- Non, pas ça. Coupa tout bonnement Kaspbrak, se rapprochant encore un peu plus.

Le comédien ne put répondre, perdu dans son incompréhension. Dans le même temps, le plus jeune s'était encore un peu plus rapproché.

- Ton, ton homosexualité, je veux dire... Pourquoi ne pas nous l'avoir dit ?

Il ne voulait pas forcement le mettre dans l'embarras, mais cette question lui brûlait les lèvres. L'autre se frotta nerveusement le crâne à l'idée de la réponse et se décala machinalement vers l'arrière. Il mit plusieurs secondes à trouver ses mots.

- Ah ça... Bah, j'ai pensé que...

Sa bouche était pâteuse ; il eut énormément de mal à articuler. Il n'avait que très rarement culpabilisé sur sa sexualité de lui-même. Mais l'avouer aux autres était une toute autre paire de manche. Mais Kaspbrak n'en démordait pas ; soutenant son regard à présent livide. Tozier le sut, il n'aurait pu lui en réchapper.

- Je voulais pas que vous me voyez autrement, je pense. J'avais peur de votre réaction, même si ça peut paraître con. C'était les années 90... Être homo voulait souvent dire, crever du sida. Et je ne voulais pas que vous me voyiez comme un pervers ou j'sais pas quoi encore...

- T'es déjà un pervers, et on t'aime quand même. Richie, quel gâchis... T'aurais pas dû te faire autant de mal pour ça. On s'en balance de ce que tu préfères.

- Merci Eds, c'est cool... 

Une simple poignée de main vint finalement conclure l'affaire. Richie s'était de nouveau repris, possédant une essence de lui-même indestructible. Il se tourna vers le couloir d'un mouvement serein.

- Bon écoute, c'est pas que je n'aime pas faire la causette avec toi, mais j'ai à faire... Commença-t-il alors qu'il s'éclipsait de la pièce, Kaspbrak sur ses talons. Je dois rattraper Bev. Et vu le temps qu'on a passé ici, j'ai encore plus à boire.

- Fait gaffe à ton pauvre foie quand même. Tu n'as plus vingt ans, je te signale...

- Tu connais pas mon organisme. J'suis un professionnel, c'est du sérieux. 

Il courut alors le long du couloir, essayant dans le même temps une glissade le long de la rambarde d'escalier. Action par conséquente ratée. L'autre ne put que s'en esclaffer, les avant-bras sévèrement plaqués contre le début de celle-ci.

- Je ne veux aucune remarque Edward. Conclut-il, arpentant dans le même temps le couloir qui menait aux cris divers résonnant dans la grande cour.

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