Chapitre 2 : L'affaire EAGLES (- Partie 1)

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Il était trois heures du matin passé. Du moins c’est ce qui était affiché sur le réveil du Président Georges Flint. Il dormait paisiblement aux côtés de sa femme, sous sa couette bien chaude. C’était un homme qui était déjà assez âgé, il avait passé la soixantaine d’année depuis déjà bien longtemps. Mais il occupait le poste de président de Palandria à merveille. Cela faisait déjà plus d’une quinzaine d’année qu’il occupait se poste et les palandriens semblaient toujours avoir autant confiance en lui. L’économie ne s’était pas aussi bien portée depuis des décennies avant que Flint arrive au pouvoir. Il avait fait reconstruire des maisons, des écoles et mêmes des hôpitaux après les terribles catastrophes naturelles qui avaient secoué le pays, notamment une tempête d’une violence inouïe. Il se préparait à tout type d’attaque venant du ciel, ou de la terre. Georges Flint était très croyant. Il croyait en le fait qu’il y avait un Dieu et un Diable, qu’enfer et paradis coexistaient sans jamais se rencontrer et que les actions que l’on avait sur terre décideraient de notre sort pour l’éternité. Était-il plus sage de vivre sans folie et rester au ciel toute l’éternité ou bien de vivre avec folie et de connaître souffrances et tortures dans les Enfers ? Telle était le genre de question que se posait Georges Flint tous les jours ans jamais trouvé de réponse. La nuit était paisible, il n’y avait pas de vent, rien. Rien n’aurait pu présager que la nuit serait mouvementée pour Georges Flint. Un coup de téléphone retentit ce qui eu pour effet d’immédiatement réveiller Flint.

« Allô ? Ah c’est vous Wallas, que se passe-t-il ? (Il marqua un temps d’arrêt, écoutant tout ce que lui disait Wallas, hochant la tête à tout ce que lui disait son correspondant au bout du fil). J’arrive tout de suite. », dit-il sur un ton paniqué avant de raccrocher le téléphone.

Il s’habilla assez rapidement et sortit de sa chambre. Il dévala les escaliers et prit sa voiture de service, son chauffeur l’attendait déjà avec un café qu’il lui donna. Il monta ensuite dans la voiture, échangea un peu avec son chauffeur et ils partirent tous les deux.

« Est-ce que c’est vrai, Doug ? demanda Flint. Ou ce n’est qu’une blague ?

-J’ai bien peur que tout cela ne soit vrai, Monsieur. Vous comprendrez plus rapidement quand vous serez sur le terrain. »

Le trajet paru interminable, pourtant il ne dura que dix minutes. Mais ce fut suffisant pour que Flint réfléchisse, et se répète dans sa tête que cela ne serait peut-être pas arrivé s’il n’avait pas été président. Mais, bien entendu, c’était faux. Ce serait arrivé un jour où l’autre, probablement.

Il se rappela de cette époque lointaine, très lointaine, où il n’était qu’un homme parmi tant d’autres, qu’un enfant parmi les enfants. Il avait toujours grandi dans la capitale de Palandria, Edenalia, qui tenait son nom du Jardin d’Eden. C’était une sorte de paradis sur terre, du moins c’est ce que le nom laissait entendre. Il a vécu une enfance très normale, en tout points mais il a toujours eu cette ambition de devenir plus fort, de se démarquer par rapport aux autres enfants. C’était chose faite désormais, on pouvait le dire. Edenalia était très belle de nuit, c’était une ville très fleurie, avec beaucoup de parc, ce qui faisait que les gens s’y sentaient plutôt bien. Le fleuve Ève passait au milieu de la capitale et séparait ainsi les quartiers qui étaient eux-mêmes reliés par des ponts. Au centre de la ville se trouvait la maison de Flint, l’endroit où se déroulait toutes les actions importantes qui décidaient du futur de Palandria. Mais ce n’était pas là que se déroulait l’action importante cette nuit-là. Au loin, dans une immense maison, la voiture de Flint s’arrêta. Il y avait déjà plusieurs voitures sur place, beaucoup étaient des policiers, des pompiers et même les pompes funèbres étaient présentes. Il y avait un brouhaha général, de panique pour certains, et pour d’autres de curiosité. Quand Flint sortit, les curieux comprirent que quelque chose de grave était arrivé. La porte d’entrée était bien gardée afin que personne ne puisse rentrer. À l’intérieur, tout était fracassé sur le sol, les tableaux étaient déchiquetés et il y avait une odeur nauséabonde qui se dégageait de la cuisine.

« J’imagine que c’est par là ? » demanda Flint au policier qui se trouvait à ses côtés.

Ce dernier acquiesça et Flint se dirigea dans la cuisine.

Le lendemain matin, Palandria se réveilla, sans savoir ce qu’il s’était passé la nuit précédente. Chacun se leva, sans insouciance et répéta les habitudes qu’ils avaient déjà pris depuis de nombreuses années. Ceux qui travaillaient partaient travailler, emprunter le tramway ou le métro qui était à chaque fois blindé et où l’on ne pouvait respirer et ceux qui ne travaillaient pas s’occupaient comme ils le pouvaient, amenant d’abord leurs enfants à l’école puis en cherchant du travail ou en pratiquant des activités diverses et variée comme du sport.

Mélania Saert était dans la première catégorie. C’était une femme d’affaire très connue dans son domaine et très respectée. Elle vendait des produits de luxe et, par conséquent, elle se devait elle-même de porter des vêtements de luxe, de boire du champagne et de porter un sac dont le prix ferait frémir ceux qui peine à vivre avec leur salaire. Elle avait 35 ans et occupait déjà son poste depuis plusieurs années. Elle était mariée à celui qui était son patron, Marin Saert. Certains diront qu’elle ne l’a épousé que pour gravir les échelons dans la société plus rapidement. Peu étaient ceux qui ne résistaient pas à la séductrice Mélania de toute manière. S’ils disaient ça c’était plus par jalousie qu’autre chose et les hommes n’attendaient qu’une chose ; qu’elle trompe son mari avec l’un deux. Mais ce n’était pas comme ça qu’était Mélania. C’était une femme assez simple finalement qui connaissait ses atouts majeurs. Elle avait toutes les cartes en main pour devenir quelqu’un et c’est ce qu’elle était devenue. Néanmoins, elle s’était retrouvée avec deux enfants en bas-âge dont elle devait s’occuper tous les jours sans relâche et qu’elle aimait plus que tout au monde. Son mari étant son patron, elle pouvait se permettre d’arriver en retard en les amenant à l’école. De toute façon, elle n’aurait pas de réduction de salaire, ç’aurait été bête pour lui. Ce jour-là, Mélania effectua sa routine habituelle et s’en alla sur son lieu de travail. La radio de sa voiture ne fonctionnait pas, du moins c’est ce qu’elle croyait. Elle entendait un ultrason infini, ce qui fit qu’elle dû couper sa radio très rapidement. En réalité, c’étaient les radios qui diffusaient cet ultrason, ce n’était pas un bug. Il n’y avait aucune radio qui était à l’œuvre ce jour-là. Quand elle arriva sur son lieu de travail, elle trouva tout le monde regardant la télé et ne disant pas le moindre mot. Sur l’écran de télévision se trouvait le Président Georges Flint, prêt à faire un discours.

« Qu’est-ce qu’il se passe ? demanda Mélania d’une voix faible.

-Toutes les chaînes diffusent la même chose. J’espère que ce n’est pas trop grave, lui répondit Kan, l’un de ses collègues de bureau.

-Pas trop grave ? s’exclama Sam, un autre collègue de Mélania. Regardez mieux, ils ont mis un titre à l’interview. »

Et en effet, il y avait une bande sur l’écran de télévision qui annonçait de quoi l’interview allait parler. Une ambiance silencieuse et pesante régna dans la salle. Ce qui arrivait était plus que sérieux.

Klaus Vapery était loin d’avoir la vie que menait Mélania. C’était un homme seul, qui n’avait jamais eu de femmes ni d’enfants. Il se trouvait être un ancien policier qui avait été blessé un jour lors d’une intervention, ce qui lui a fait perdre l’usage de ses deux jambes. Depuis ce jour, Klaus passe ses journées dans le bar en bas de chez lui, à boire des bières. C’était un alcoolique. Dans son fauteuil roulant il n’était plus d’une grande utilité car il ne pouvait plus aller sur le terrain comme avant. Il était réduit à un travail de bureau. Et il avait perdu toute envie d’être policier ; ce job lui avait coûté ses jambes. Tous les jours il se remémore ce qu’il a vécu, essaye de refaire le scénario de ce jour fatidique, se disant que si cela c’était passé autrement il aurait peut-être encore ses jambes à l’heure qu’il est. Mais ce n’était qu’aggraver son état mental et chaque fois qu’il se disait ça il s’était promis à lui-même de prendre un cul-sec dans l’espoir d’oublier ses malheurs. Ce jour-là, il alla dans son bar, comme à son habitude et prit une chaise à sa table habituelle. Le chef de l’établissement le connaissait bien, il savait ce que Klaus commandait tous les jours et à quelle heure il arrivait. Il lui apportait immédiatement sa commande et Klaus la réglait dans la foulée, après avoir échangé un peu les nouvelles du jour. Or, ce jour-là, rien n’arriva à lui directement après son entrée. Klaus, dans sa bulle, sachant quelles étaient ses habitudes, ne remarqua même pas ce qu’il se passait dans le bar. Tout le monde était attroupé autour de la télévision, d’un air silencieux. Une fois de plus, Flint était à l’écran, prêt à parler. Klaus se rapprocha de ses amis de bistrot, voulant savoir ce qu’il se passait.

« Qu’est-ce que ce bon vieux Flint a à nous raconter ? s’exclama-t-il avec une voix très grave.

-C’est sur toutes les chaînes, dans les journaux. Pas à la radio, pour une raison que j’ignore, mais tout le monde ne parle que de ça, répondit Axel, le barman.

-Qu’est-ce qu’il se passe ? Je n’ai rien entendu en venant ici, avoua Klaus.

-Le premier ministre s’est fait assassiné chez lui cette nuit, Klaus. Frank Eagles est mort. »

Klaus écarquilla les yeux. Il n’y croyait pas. Plusieurs années auparavant, Klaus et Frank Eagles avaient travaillé ensemble. Il était d’ailleurs l’un des seuls à avoir voulu lui donner une nouvelle chance après qu’il ait perdu l’usage de ses deux jambes. C’était son ami, mais il était mort.

Miles Mustang entra peu après Flint dans la maison d’Eagles. Il était nouveau à ce poste, il était très jeune, à peine la vingtaine. Mais il était d’une rare intelligence, ce qui avait fait que Flint l’avait assez rapidement repéré pour le nommer conseiller. Il comptait faire de lui le prochain président de Palandria. Du moins, c’est ce qui serait prévu par le futur, vu que maintenant le Premier Ministre était mort. A Palandria on ne vote pas pour le prochain président. C’est le président en fonction qui décide de son successeur qui sera son premier ministre durant son mandat. Pour l’instant il n’y avait donc plus de successeur à la tête du pays. C’est en cela que l’affaire était grave. Si Flint venait à mourir alors le pays se trouverait sans chef d’État. L’affaire était sans précédent, jamais un Premier Ministre n’avait été tué. La situation était inédite et les solutions manquaient. Ce qui était sûr, c’est que Mustang était là pour protéger le Président, le temps de trouver le coupable. Mustang se dirigea immédiatement dans la cuisine après être entré. Flint y était déjà. Il contempla alors la scène, que dis-je, le massacre. Mustang en eut la nausée.

« Soyez fort, fiston. », lui dit Flint en lui donnant une tape sur l’épaule sans jamais détourner une seule fois le regard du corps sans vie du Premier Ministre.

Par terre se trouvait le cadavre de Frank Eagles, complètement défiguré comme si on lui avait mangé le visage, les bras écartés et déchiquetés, et les jambes alignées, assez épargnées sauf au niveau des pieds que l’on avait sûrement essayé de manger également. Un cannibale, peut-être ? Le carrelage de la cuisine était blanc. Mustang le savait parce qu’il était déjà venu dans cette maison auparavant. S’il n’était jamais venu il n’aurait pas pu le deviner. Il y avait une marre de sang sur le sol et personne ne pouvait s’approcher du corps tant que la police scientifique n’avait pas pris toutes les infos nécessaires à la scène de crime. Mustang, regardant la scène encore et encore s’en alla en courant et parti vomir dans le jardin. Ça le répugnait. Flint sortit quelques minutes après lui, calmement et alla le voir alors que son conseiller était blanc comme un linge.

« Je comprends ce que ça fait, j’ai eu la même réaction à ma première scène de crime, bien qu’elle fut moins violente.

-Comment quelqu’un peut infliger de telles choses à un être humain ? demanda Mustang, faible. Qui serait assez horrible pour faire ça ?

-Je ne sais pas. Mais j’espère qu’il sait qu’on est prêts à le faire payer. » dit Flint, regardant au loin, très calmement.

La police scientifique était en train d’examiner la scène, de prendre toutes les photos nécessaires. Au même moment, une dame arriva, elle était assez âgée. Elle se dirigea vers Flint. La dame marchait avec une canne et un policier l’aida à avancer.

« Colette De Termors, dit-elle en tendant sa main à Flint. C’est un honneur de vous rencontrer.

-Madame, il ne faut pas rester là, il y a eu un crime et…

-Je sais, coupa-t-elle. Je suis venue vous informer que j’ai vu le coupable sortir de la maison. Du moins je crois. »

Flint était sur l’estrade, derrière son pupitre. Des centaines de journalistes se trouvaient devant lui, les flashs des appareils photo l’aveuglait. Tout le pays était posté derrière son écran de télévision, attendant patiemment ce qu’allait dire Flint, bien qu’ils connaissaient déjà le sujet du discours. Le président tremblait. C’était la première fois que cela lui arrivait. Il se retenait de pleurer. Il ne fallait pas qu’il pleure, pas devant tout son peuple, pas en direct à la télévision. Cela aurait été la preuve d’une faiblesse et il préférait mourir plutôt que de devoir se rabaisser. Le pays s’était tut, pendant plusieurs minutes. Tout ce qui importait, c’était Flint.

« Bonjour à tous. Je tiens d’abord à préciser que ceci n’était pas prévu dans mon emploi du temps et que j’aurais préféré ne pas le faire si cela n’avait tenu qu’à moi. Malheureusement, la vie est faite de plusieurs éléments qui, mis bout à bout, créent des choses horribles pour nous et pour notre société. Car désormais il est impossible de revenir en arrière. On ne peut pas changer ce qui est arrivé, c’est impossible. Et j’aimerais que l’on garde cela bien tous à l’esprit. Cette nuit, alors que rien ne semblait présager qu’une ignominie comme j’en ai rarement vu allait arriver, le Premier Ministre, mon ami et collègue Frank Eagles a été assassiné dans sa cuisine. Nous ne savons toujours pas ce qui a provoqué la mort car beaucoup trop d’hypothèses sont à notre disposition. C’est probablement la scène de crime la plus horrible que j’ai vu de toute ma vie. Mais je ne suis pas là pour parler de ça. Frank Eagles est mort, et la vie ne sera plus jamais la même sans lui. Frank était un homme bon, l’un des meilleurs que j’ai connus. Il avait le cœur sur la main, c’était quelqu’un qui savait donner aux autres. Il ne méritait pas de connaître un tel destin. Frank, tu nous manqueras, mais sache que nous ne t’oublierons pas. Jamais. Et je pense, mes chers citoyens, que c’est ce que Frank voudrait. Il voudrait que l’on se rappelle de lui, mais que l’on ne soit pas triste de sa mort. Bien sûr, ça restera impossible, je ne peux feindre d’être heureux dans de telles circonstances. Ce sont probablement les heures les plus sombres qu’a connu Palandria. C’est pourquoi je ne m’attarderais pas très longtemps avec vous. Hier, je suis allé sur le lieu du crime et j’ai pu constater les dégâts créés. Je ne vais pas vous mentir, nous avons probablement affaire à un fou qui réitèrera sûrement l’opération. Je veux que tout le monde soit assez vigilant, que chacun d’entre vous ne prenne pas trop de risques dans les jours qui suivent. Notre tueur est toujours en liberté. Mais je vous promets solennellement que votre gouvernement trouvera l’auteur de ce massacre. La voisine de Frank est venue s’adresser à moi hier. Elle m’a certifié avoir vu le criminel sortir de la maison. Je vous donne la description qu’elle m’a elle-même donné. C’était un homme, ou un mâle comme elle a aimé l’appeler, très grand, très poilu dont le regard était terrifiant. Quand elle m’en a parlé elle avait encore des frissons qui parcourait tout son corps. Si vous voyez un homme de cette description qui était à Edenalia ce soir-là, merci de nous le faire parvenir. Justice sera faite. Je m’engage à exécuter cet assassin ici-même, en direct à la télévision devant vous tous, qu’il comprenne alors qu’elle est la vraie souffrance. Une récompense de plusieurs millions d’euros attend quiconque me trouve cet homme. Merci à tous. »

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