Samedi 12 juin 1841

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Samedi 12 juin 1841

   « Une longue année a passé depuis que le ‘Magellan’ a sombré. L’hiver, sous ces latitudes, est glacial. Le plus clair de mes journées : me poster devant un feu de branches que j’attise à l’aide d’une vieille planche. Parfois je remplis les pages de dessins. Heureusement mon plumier m’a rejoint, il était plein de crayons à la pointe finement taillée. Aujourd’hui le ciel est clair, tout dans des nuances de gris. De perle au zénith, souris en s’éloignant vers l’horizon. De hauts rochers, couleur de pain brûlé, encadrent la baie. Ce sont de magnifiques sentinelles qui, le plus souvent, me protègent des vents dominants qui cinglent le visage et projettent sur le corps des grains de sable piquants comme des têtes d’épingles. La vue est sans limite et, peut-être, pourrais-je apercevoir d’autres terres si je possédais la longue-vue avec laquelle le Capitaine Kristansen scrutait le paysage, pensant y découvrir une merveille, peut-être une des princesses qui peuplaient les ‘Mille et Une Nuits’. Qu’est-il devenu le Capitaine ? A-t-il confié son corps à la mer ? C’est bien là le destin d’un Marin, ce me semble !

    La mer est calme, apaisée comme après une tempête. Quelques minces radeaux d’écume viennent du grand large, font leurs clapotis et meurent sur le rivage en se mêlant aux pierres noires qui semblent les attendre. Pas de bruit sauf, à intervalles réguliers, les cris aigus des sternes. De temps à autre, des guillemots à miroir se laissent apercevoir tout au bout de la grève avec leurs pattes couleur de corail, leurs plumes noires qu’éclaire une tache blanche au centre des ailes. Tout ceci serait un Paradis si je n’étais un naufragé, si j’avais un compagnon ou une compagne avec lesquels je ferais le tour de l’île à la recherche du moindre indice de vie humaine. Il faut dire, depuis mon arrivée sur Jan Mayen, je me suis limité à l’exploration aux alentours immédiats du lieu où la mer m’a déposé. Le rivage de cailloux couleur de bitume, la parenthèse de rochers plus clairs qui entourent l’anse, le plateau désert qui domine la mer. Parfois, au loin, j’aperçois le cône fumant des volcans, des nuées de cendre grise s’en échappent que le vent disperse vers les hautes altitudes. »

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