Tensions

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Quand la mort rôde,
Mais que le pouvoir de la haute,
Nous force à rester immobile,
Que faire pour éviter la débile ?

- Avez-vous enfin trouvé quelque chose ? demanda le Seigneur et Maître des Traqueurs. Sans information, nous servons absolument à rien!

Nirk était furieux, gesticulait férocement et tous ses interlocuteurs n’osaient faire le moindre mouvement : tous craignaient de devenir la cible de sa colère. Même Fléchère qui le côtoyait régulièrement n’osait dire le moindre mot. En vingt ans, elle l’avait rarement vu aussi mécontent. Même lorsque les chevaliers étaient devenus maitres de Richetère, il avait accepté les choses avec juste grincement de dents. La situation devait être pire qu’elle le croyait… Dans une pièce cachée de la plupart, l’homme grisonnant avait assemblé une vingtaine de Traqueurs. Chacun avec son style, il aurait été difficile de leur trouver un point commun à l’exception du regard : il y avait toujours une dureté dans celui-ci, le froid de quelqu’un qui sait qu’il risque de commettre l’irréparable à n’importe quel moment. La pièce n’avait pas de fenêtre, seulement éclairée par une torche, et une seule table, à l’allure de bureau en ce jour, trônait dans la pièce.

- Fléchère! Interloqua Nirk soudainement. As-tu trouvé quelque chose de nouveau?

Il y avait quelques jours, c’était Fléchère qui avait découvert l’attaque sur le Prince, mais elle n’avait pas de bonnes nouvelles pour son supérieur :

- Malheureusement, non, Maitre. Toutes les crapules de la cité se cachent, se taisent et disparaissent. On pourrait pratiquement assumer que quelqu’un fait le ménage dans la ville.

- Par rapport à nos informateurs habituels? demanda l’homme grisonnant.

- C’est comme je disais… commença Fléchère. Plusieurs ont été assassinés, les rares que j’ai trouvés ont tellement peur de parler qu’ils préféraient mourir que d’avouer quoi que ce soit. Les informateurs assassinés ont été tués d’une manière excessivement horrible, comme si on les avait torturés pendant des jours. Je ne peux blâmer ceux qui refusent de parler : mourir de cette façon... Plusieurs de nos informateurs ont disparu : soit ils sont morts, soit ils se cachent par crainte de mourir.

- Notre ennemi efface toute trace possible, résuma Nirk.

Fléchère hocha son acquiescement lentement. Elle était déçue de n’avoir rien de plus à ajouter et elle comprenait l’état de son Maître : l’attente de trouver quelque chose pour arrêter cette menace devenait interminable. Le moindre petit indice serait le bienvenu! Tout le monde était sur les nerfs se demandant quand la prochaine attaque aurait lieu, alors que personne ne savait encore si le Prince était toujours sain et sauf… Définitivement, elle comprenait l’état de son maitre. Le silence prit place dans la pièce : personne n’avait rien à ajouter. Ils n’avaient trouvé aucune piste. Rien pour la Traque…

Soudainement, faisant sursauter tous les Traqueurs, la porte de la pièce s’ouvrit. Tous s’apprêtèrent à réagir quand ils reconnurent la silhouette. Reprenant leur calme, ils restèrent tous sur leur garde, prêt à réagir, sauf Nirk. Celui-ci semblait sur le point d’exploser : il tremblait sur place. Baisant sa capuche, le nouveau venu révéla son crâne chauve et les traits défigurés de son visage : des marques de brûlure mélangées à ce qui semblait être des morsures de… bêtes? Augure avait terrifié plus qu’un apprenti dans sa carrière. Fléchère se souvenait d’avoir fait des cauchemars plus jeunes… Comme à son habitude, Augure passa directement à l’important :

- J’ai des nouvelles du Prince.

Tous dans la salle retenaient leur souffle en attendant la suite. Enfin, ils allaient avoir de l’information. Toutefois, Fléchère se demandait si elle désirait vraiment savoir… De mauvaises nouvelles ruineraient le moral et la fierté de l’Ordre… Fébrile, elle écoutait Augure qui continua en fixant Nirk :

- Le Prince est en vie, mais sa garde a été presque décimée. C’est par de la chance pure qu’il y a des survivants.

Dans un premier temps, il y eut un soupir de soulagement dans la pièce, mais ce fut suivi par de longues intonations d’horreur. L’ennemi avait dû être bien préparé pour cette attaque… Vingt hommes de la garde royale, pour la plupart des vétérans, un garde du corps surentrainé et trois Traqueurs presque entièrement décimés!? Leur ennemi s’était bien préparé pour cette attaque… Le pire? Fléchère avait très rarement entendu Augure parler de chance. C’était même un mot qu’il abhorrait : tout apprenti qui osait lui parler de chance finissait avec un sermon et une vilaine migraine… Elle ne s’en souvenait que trop bien et elle constatait : cet ennemi s’était trop bien préparé pour … Fléchère était sous le choc et elle regarda Nirk : celui-ci semblait sur le point de chanceler en essayant de parler. Se reprenant finalement, il demanda le regard implorant :

- Pour Disçart?

- Il est en vie, déclara Augure avec un regard noir, mais je dois te parler. Tout le monde, dehors!

Tous les Traqueurs obtempèrent avec un brin de zèle, si ce n’était de bonnes volontés. Ils auraient tous aimé en savoir plus. Malheureusement, Augure était connu pour faire des secrets. Il fallait vivre avec... Fléchère suivit le mouvement, contente au moins de savoir que Disçart était aussi en vie. Elle aurait mal pris d’entendre que l’apprenti de Nirk, qu’elle connaissait mieux que bien des Traqueurs, était mort en défendant le Prince. Alors qu’elle était la dernière à sortir, Augure la retient : il voulait qu’elle soit témoin de la discussion. Ça lui éviterait d’avoir à se répéter. L’atmosphère chuta encore quand les trois furent seuls. Augure semblait furieux et Nirk ne semblait pas dans un bien meilleur état. Les deux avaient l’air de vouloir s’affronter dans un duel devant les yeux de la cadette. Ce qui ne serait certainement pas très très beau… Nirk commença :

- De quoi veux-tu me parler?

- De l’affection paternelle que tu as pour ton apprenti, répondit Augure.

- Quel est le problème avec cela? demanda le Maître de l’Ordre. Tu sais parfaitement que je l’éduque et que je l’élève pratiquement depuis que nous l’avons trouvé. Je ne crois pas que cela surprend quelqu’un.

- Il t’importe tellement, rétorqua son second, que tu ne m’as même pas demandé l’état du Prince ou de savoir qui d’autres a survécu! Ce qui t’importe uniquement, c’est la sécurité de ton pupille!

Nirk ne répondit pas immédiatement. Il détourna son regard de son opposant, fixant le mur. Il semblait réfléchir au propos d’Augure. Du moins, s’il ne le faisait pas, Fléchère, elle, réfléchissait dessus. Elle étouffait dans la pièce, se demandant violemment ce qu’elle faisait ici. Elle connaissait Nirk depuis des années, mais en même temps, elle constatait qu’elle ne le connaissait pas vraiment finalement. Elle l’avait toujours vu comme un maître juste et équitable envers tous, mais Augure n’avait pas tort : elle ne se souvenait pas de l’avoir déjà vu avoir une telle préférence pour un seul Traqueur. C’était anormal et Augure soulevait un bon point. Pourtant, elle comprenait Nirk : dans toutes les personnes parties avec le Prince, le seul qu’elle connaissait vraiment était Disçart. Elle avait été soulagée d’entendre qu’il avait survécu, mais en même temps, elle était un peu honteuse : pour le royaume, il n’était qu’un serviteur. Le Prince primait. Elle se sentait déchirée par ces pensées. Nirk concéda à moitié le point :

- Tu as peut-être raison. Je tiens peut-être trop à mon apprenti…

- Nirk! Apostropha Augure. Tu en oublies notre mission et tu négliges tes devoirs. Tu n’es pas présent pour les autres Traqueurs présentement alors qu’ils ont besoin de compter sur leur guide en ce moment.

- Je… Je… Je… Bégaya pendant quelques secondes Nirk avant de concéder, tu as raison. Je ne suis pas entièrement présent pour l’Ordre. Son bien-être pèse beaucoup dans mon esprit.

- Je suis le porteur de mauvaises nouvelles, déclara le chauve, mais Disçart est un Traqueur comme un autre. Il n’est pas plus important! Sylvar et Ronar sont morts, mais cela ne semble pas t’intéresser.

- Les deux? Demanda Nirk les yeux écarquillés par la surprise. Nous avons perdu deux Traqueurs dans l’embuscade?

- Exactement, mon ami, répondit Augure, Disçart, Rangis, Galen et George sont les seuls à avoir survécu, et ce par une ironie du sort.

Fléchère était aussi surprise que son ainé. Bien que Sylvar et Ronar n’étaient pas de l’élite, ils restaient des membres de l’Ordre. Des individus formés pour traquer, chasser, et tuer tout ce qui était possible. Alors… Que ce groupuscule réussisse à les abattre… Qui était-il? En fait, en y pensant un peu plus, comment Disçart avait-il survécu? Nirk se posait la même question :

- Que s’est-il passé, Augure?

- La troupe de notre Prince a rencontré un ennemi vicieux prêt à tout pour vaincre, déclara l’interloqué lugubrement. Celui-ci a rassemblé une quarantaine ou cinquantaine d’hommes dans la Forêt de Sanranine.

- Ce qui n’aurait pas dû être un problème, coupa une Fléchère incrédule. Pour des soldats expérimentés et des Traqueurs, cela n’aurait pu être aussi désastreux. Un combat difficile, mais loin d’être impossible pour la troupe royale.

Nirk acquiesça d’un hochement de tête, mais le regard d’Augure se durcit encore. Il détestait se faire couper. En réponse, il fixa de mécontentement sa cadette en croisant ses bras. Ce ne fut pas très long : incapable de supporter son regard, Fléchère baissa les yeux, mal à l’aise. Comme quand elle était plus jeune… Le chauve continua de mauvaise humeur :

- Comme j’allais dire, ces combattants, pour la plupart n’ayant aucune expérience de combats, n’ont pas été une véritable menace. C'est ce qu’ils ont amené avec eux qui l’a été. Je ne sais toujours pas comment ils ont fait ou même comment c’est possible, mais ils l’ont fait. Notre ennemi, que nous sommes incapables de trouver, a amené deux bêtes de sang…

Nirk semblait être sur le point de suffoquer et Fléchère en perdit le souffle. Son cœur battait la chamade et des frissons parcouraient son épiderme. Elle en avait déjà rencontré… des Bêtes de sang… des monstres sanglants qui tuaient sans cesse par instinct et qui dévoraient tout ce qui était possible. Rien ne les arrêtait… Absolument rien… Tout ce sang… Ses morts… Nirk parla, ramenant Fléchère dans le présent :

- Et il y a des survivants à cette attaque? Une seule Bête de sang aurait pu massacrer la troupe du Prince, mais deux? J’ai de la difficulté à te croire...

- J’ai dit que c’était par une ironie du sort qu’il y a des survivants, rappela Augure que Nirk écoutait avec une attention débordante. De ce que Victor m’a expliqué, car ce vieux renard a eu vent de l’embuscade à temps, Ronar et Sylvar ont affronté le premier avec la moitié de la garde, retenant la première vague d’attaquants pour permettre au Prince de fuir. Ils ont tous été massacrés par la Bête. Seul George a survécu et parce que Victor est arrivé à temps pour le sauver. C’est lui qui a achevé la première.

- Je n’en suis pas surpris, hocha Nirk de la tête. Le vieil homme a toujours été et est encore particulièrement puissant et rusé, mais si la première Bête était seule contre Sylvar et Ronar, où était la seconde?

- Embusqué à attendre le Prince en fuite, déclara simplement Augure.

- Ils se sont retrouvés seuls contre l’un de ses monstres, murmura Nirk en parlant de Disçart, Galen, Rangis et du reste de sa troupe.

- Exact, répondit Augure, et ils n’auraient pas dû survivre. Victor n’a pas pu m’expliquer tous les détails, puisqu’il les a trouvés qu’après l’attaque, mais il laisse sous-entendre que la « chose » qui « existe » dans Disçart a anéanti la Bête : le corps de celle-ci est introuvable. Seuls les témoignages du trio et des corps permettent de savoir qu’ils ont été attaqués.

- Es-tu bien en train de me dire que Disçart a perdu le contrôle et que c’est cette chose qui les a sauvés?

Augure acquiesça lentement et Nirk ne continua pas. Fléchère ne l’avait jamais vu aussi désemparé. Pourtant, elle le comprenait si bien: elle l’était tout autant! Un apprenti avait survécu, alors que des guerriers de l’Ordre avaient été anéantis par ces monstres! Le pire? Par cette chose! Par cette chose qui était censée être connue que d’une poignée! Elle comprenait un peu mieux sa présence présentement. Elle n’allait pas poser de questions! Nirk était tellement sous le choc qu’il faillit s’écrouler. Il ne s’effondra pas, mais il eut besoin de se retenir après la table pour rester debout. Les jambes de la cadette n’allaient pas extrêmement mieux que celle de son aîné… Nirk demanda :

- Par les Dieux…est-ce qu’il y a d’autres informations que j’aurais besoin de savoir, Augure?

- À l’exception du fait que Victor va veiller sur le Prince à partir de maintenant, répondit Augure, je ne crois pas avoir rien oublié.

- Quelle est la condition de Disçart? Demanda Nirk qui eut le droit à un froncement de sourcils d’Augure avant d’ajouter, et de celle du Prince, de son Protecteur et du Capitaine?

- Le Capitaine et le Protecteur ont reçu plusieurs blessures, expliqua Augure en ayant l’air un peu moins fâché, mais ils devraient s’en remettre rapidement. On ne sait pas, par contre, s’ils vont garder des marques. Le Prince est intact, qu’en soient remerciés les Dieux. Pour Disçart, je n’ai pas grandes informations. Victor l’a retrouvé inconscient, mais indemne.

Nirk hocha de la tête, mais son souci était évident. Fléchère le comprenait trop bien : en temps normal, Disçart devrait être exécuté, mais depuis sa découverte par Nirk, il était un cas particulier. Elle ne savait pas quoi penser et elle regarda le visage d’Augure. Pour une fois, il ne semblait plus aussi dur : il semblait usé par les âges et les soucis. Il ajouta en mettant une main sur l’épaule de son supérieur :

- Victor est avec lui et il s’assurera que tout va bien. Tu ne l’as pas abandonné et l’Ordre non plus. Aie confiance…

Nirk et Augure se regardèrent un long moment. Le désespoir du premier était évident. Son âme même semblait crier son inquiétude. Fléchère ne pouvait pas voir le visage d’Augure, mais elle était certaine que, aussi menaçant soit-il, il essayait d’être rassurant.

* * *

Plusieurs heures plus tard, dans les rues de Fornom, Fléchère ne pouvait s’empêcher de penser à ce qui s’était passé. Nirk avait toujours été une figure forte dans l’Ordre. Un meneur, un chef et un guerrier exemplaire. Aucun Traqueur n’avait jamais de reproches à lui faire. Il était apprécié et écouté. Toutefois, son état d’esprit présent était anormal. Elle espérait qu’il allait redevenir lui-même rapidement. Il risquait de perdre la confiance de l’Ordre… Fléchère ne faisait pas particulièrement attention où elle marchait, se laissant guider par son instinct, ses pensées lui volant toute sa concentration. Elle était soucieuse pour son maître et pour Disçart. L’avenir du second était impossible à prévoir et s’il lui arrivait quelque chose, le premier risquait de ne jamais s’en remettre.

Soudainement, après avoir tourné dans une ruelle, elle remarqua qu’elle était suivie. Deux types encapuchonnés qui respiraient tout, sauf les bonnes intentions. Elle continua d’avancer comme si de rien n’était, mais subtilement, elle s’émergea dans la lumière au sommet de sa montagne. Elle faisait attention pour rester discrète, retenant les vents et les nuages magiques de s’éloigner. Elle ne voulait pas faire la même erreur que la dernière fois. Elle entendait le pas des hommes approchés derrière elle : ils étaient sur le point de passer à l’action. La femme était un peu inquiète : étaient-ils que deux ou d’autres larrons se cachaient près d’elle? L’anxiété montait en elle, exactement comme le calme avant l’orage. En même temps, l’excitation du combat montait en elle. Tout allait se passer en quelques secondes… Qui allait sortir gagnant? Elle ou ses pauvres rustres agressifs?

Comme elle s’y attendait, deux silhouettes masculines lui bloquèrent le chemin devant elle, alors que les deux autres faisaient de même en arrière. Ça allait commencer… Une cinquième personne se faufila entre les nouveaux vus. Elle semblait beaucoup plus petite et menue que les colosses autour d’elle, mais le manque de lumière n’aidait pas la Traqueuse a mieux identifié ses cibles. Patiemment, elle attendait le premier mouvement… Soudainement, la dernière venue commença à parler d’une voix sensuelle et féminine:

- Bonsoir, ma douce coccinelle. Aurais-tu l’amabilité de passer quelque temps en ma compagnie? J’aimerais avoir une longue, mais longue discussion, avec toi.

Bien que son interlocutrice roulât langoureusement les mots dans sa bouche, il y avait une sorte d’imposition dans chacun d’entre eux. « Les hommes doivent rouler à ses pieds… », pensa en un éclair Fléchère juste avant de répondre :

- Malheureusement, la coccinelle doit partir à la rencontre d’autres horizons. Je n’ai pas le temps pour une longue discussion.

- Je t’en prie, ma fière coccinelle, continua son interlocutrice, nous pourrions profiter d’un petit moment de détente où que tu le souhaites pour discuter. Nous avons beaucoup plus en commun que tu pourrais le croire…

- J’en doute, répondit la subordonnée de Nirk, et j’ai fait mon choix : je ne vous accompagnerais pas, vous et vos hommes.

- Mais tu n’as pas vraiment le choix, ma farouche coccinelle, expliqua la voix sensuelle. Mes chers amis t’escorteront à mon agréable logis… que tu le veuilles ou non.

- Je ne crois pas, répliqua la Traqueuse en déchainant son pouvoir.

Comme elle avait fait si souvent, le pouvoir explosa autour d’elle et un puissant vent claqua dans la ruelle. Le pouvoir s’enroulait autour d’elle, dessinant dans l’air les schémas qu’elle aimait tant. Alors que ses ennemis faisaient un premier pas, les premiers projectiles sortirent de la tempête. De la tempête d’énergie, ce qui pouvait être de grands carreaux ou de petites flèches s’échappaient à vive allure ne visant rien en particulier. Une tempête de projectiles sans cible précise s’abattit sur les assaillants de Fléchère. Un premier, trop surpris pour réagir, se retrouva empalé par plusieurs projectiles. Un autre se retrouva avec un pieu dans la jambe, mais il réussit à se cacher avant que ce soit pire. Deux autres n’eurent que des égratignures. Or, la femme qui semblait mener les quatre hommes fut blessée par plusieurs projectiles, mais elle réussit à s’enfuir en boitant lourdement en criant quelque chose que la Traqueuse ne comprit pas. Ce n’était pas bien grave : deux adversaires de moins, un autre blessé, plus que deux à finir. « Je ne suis pas la gardienne de l’Est sans raison », pensa Fléchère avec un sursaut d’arrogance.

Doucement, le vent se calma et la pluie de projectiles cessa avec. La puissante femme eut un moment de faiblesse momentanément : cette utilisation du pouvoir la fatiguait toujours autant. Elle eut à se reprendre rapidement : les deux derniers belligérants l’assaillirent sans lui laisser beaucoup de temps pour respirer. Retirant ses courtes lames de ses fourreaux cachés, elle accueillit férocement ses adversaires. Le premier, énorme, défiguré et presque édenté maniait une massue maladroitement. Esquivant un premier coup, Fléchère avait l’impression d’affronter un ignoble ivrogne. Cependant, le second se trouva beaucoup plus expérimenté, l’empêchant de frapper son partenaire en la pressant de moulinets de sa belle épée. Ils n’étaient nullement du même niveau. Seule, la puissante femme aurait surement eu le dessus sur le second, mais, à cause de son complice, aussi maladroit qu’il était, elle n’arrivait pas à contre-attaquer.

Soudainement, l’ivrogne fit l’erreur qu’elle avait besoin. Alors que le guerrier expérimenté l’attaquait, l’ivrogne fit de même, créant un beau désordre que Fléchère profita. Le second guerrier perdit l’équilibre pendant que son partenaire s’effondra. Utilisant le désordre, la guerrière transperça le cœur de l’épéiste mouvement rapide. Sans attendre que l’Ivrogne reprenne ses esprits, Fléchère l’acheva à son tour. Regardant autour d’elle à la recherche d’une menace, la Traqueuse remarqua les dommages qu’elle avait causés. Les murs étaient couverts d’égratignures, de crevasses, de trous et même des fenêtres avaient explosé sous l’assaut de projectiles. Elle avait causé beaucoup de dommages... Sur ce sol de terres battues couvert de petits cailloux et de débris, deux traces de sang s’enfuyaient des directions différentes : l’une menait à un corps vautré sur au sol, un pieu dans la jambe et un autre dans le ventre. Il n’était plus tout à fait en vie et le peu qui en restait s’évaporait avec le sang qui coulait à flots. Si ce n’était par la perte de sang, sa blessure au ventre l’achèverait. En fermant les yeux et en expirant longuement, elle abrégea les souffrances du malheureux. Elle aurait pu finir avec une prière aux Dieux, mais elle doutait qu’ils l’entendent : l’Ordre était trop sans merci pour lui permettre de croire en la présence divine.

Oubliant presque immédiatement le mort, elle retourna son attention à sa tâche et elle suivit la seconde trace de sang. La chef de ses adversaires n’avait pris le temps d’arrêter ses blessures de saigner. Une grave erreur qui conduisit Fléchère vers leur repère à travers un dédale formé par les ruelles de la cité. En chemin, extrêmement discrète, elle croisa beaucoup de personnes. Il semblait être des « gros bras » : des hommes de main surveillant quiconque osait s’approcher un tant soit peu. Plus d’une fois, elle dut faire appel à sa magie pour pouvoir éviter ses sentinelles. En temps normal, elle aurait préféré les éviter, mais elle craignait trop de perdre la trace de sa cible pour faire montre de grande prudence. Finalement, s’arrangeant pour tous les contourner sans se faire voir, elle arriva finalement devant un petit bâtiment à l’allure plus que délavé. On aurait dit un ancien entrepôt délavé où personne n’avait mis les pieds depuis longtemps : les volets semblaient vouloir abandonner, les planches luttaient pour récupérer leur liberté et le toit semblait épuisé par le poids des années. Aucune lumière ne filtrait des ouvertures, mais en s’approchant doucement, elle pouvait entendre un énorme remue-ménage. Des échanges pouvaient s’entendre à travers des autres bruits. Une voix féminine s’imposait souvent. Une voix que Fléchère reconnue. Cette voix suave disait :

- Vite! Vite! Il faut être parti au plus vite. Si les dagues du Roi nous trouvent, nous allons perdre notre avantage. Dépêchez!

Fléchère ne put s’empêcher de sourire. Il avait enfin trouvé leur proie. Le temps de la Traque était arrivé!

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