Tempête

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Un monstre dit un jour,
À un héros de toujours :
« Vous ne pouvez comprendre cette peur,
Celle d’être responsable de sa douleur ».

Chevauchant à vive allure dans les bois comme jamais il avait chevauché, Disçart était dévoré par une terrible entité vicieuse qui l’empêchait de réfléchir clairement. Il voyait à peine les arbres qu’il passait à une vitesse effrayante, vitesse qui risquait d’amocher son cheval à tout instant. Les arbres, les racines et les pierres s’entassaient autour de l’étroit sentier qu’avait emprunté le Prince. Les yeux du jeune Traqueur étaient partout à la fois, s’assurant de l’emplacement des siens devant lui et observant tout autour de lui à la recherche de l’ennemi. Il sentait leur présence et la peur était à deux doigts de le submerger : il se sentait dévoré dedl’intérieur. Il était sur le point de paniqué! La seule chose qui lui permettait de garder son peu de contrôle était son devoir et ses gens. Il devait les protéger, coûte que coûte, peu importe ce qui arrivait. « Même contre des Bêtes de sang? » murmura une petite voix dans sa tête. La peur étreignit encore plus le jeune homme, agrippant douloureusement son cœur : aucune personne de sensée n’affronterait de tels monstres. Encore moins de personnes sensées essayeraient d’en contrôler une. C’était censé être impossible! Pourtant, quelqu’un l’avait fait! Le pire possible leur arrivait...

Soudainement, un homme masqué s’interposa devant lui. Une cagoule sur la tête et vêtu de haillons, l’homme était armé d’une pique de qualité. Ce dernier point intrigua Disçart, mais il n’avait pas le temps d’y penser. D’un geste rapide et à la dernière seconde, il fit dévier son cheval d’un coup fatal et prenant au dépourvu son adversaire, il lui planta sa lame dans le coup d’un seul mouvement. Or, sans même s’arrêter, Disçart repartit à la poursuite de ses camarades. Il avait pris l’arrière garde de sa propre initiative, dissuadant autant que possible ses ennemis. Il réussissait très bien, trop bien. Tellement bien qu’il se faisait distancer par ses camarades. Craignant de les perdre, il essayait d’accélérer sa monture allant déjà à une vitesse dangereuse. Sa peur continuait de croître et des vibrations se mirent à pulser en lui de plus en plus fort. Elle résonnait en harmonie avec sa peur. Elle lui donnait l’impression de lui offrir une façon de soulager sa peur.

Disçart n’avait pas le temps pour ces étrangetés : trois hommes semblables au précédent venaient de sortir des bois le forçant à s’arrêter. Au moment qu’il craignait de perdre de vue ses amis, il les vit s’arrêter aussi. Sa frayeur augmenta encore. Le pire venait-il d’arriver? Non! il ne devait rien leur arriver! Cependant, un obstacle lui barrait le chemin. Les trois hommes armés de piques semblaient décidés à ne pas bouger. Les yeux de Disçart changèrent : de bêtes affolées, ils devinrent de glace. Il avait besoin du pouvoir. En son cœur, sur l’île, dans le sanctuaire au centre, il attrapa le pouvoir et il le tira violemment. Le pouvoir intégra son corps si rapidement et si férocement, le jeune Traqueur se sentit écrasé par un poids énorme. En même temps, une douce sensation de contrôle s’empara de lui. Il n’avait jamais tant canalisé… La sensation était… grisante? Il n’avait pas le temps pour cela! Les trois hommes le chargèrent d’un même mouvement, visant sa monture en premier. Instinctivement, il canalisa la magie et une image inconsciemment se fit dans sa tête. D’une vitesse effrayante, il se mit à filer les files de pouvoir pour créer trois têtes de flèches devant lui. Elles étaient de la grosseur d’un point, d’une légère teinte mauve et aussi acérées que la plus coupante des lames. S’envolant devant lui, elles perforèrent chacune la tête des trois hommes, ressortant de l’autre côté de leurs têtes, entrainant giclement de sang, morceaux de crâne et petits lambeaux de cervelles.

Sa monture renâcla devant une telle scène, mais Disçart ne lui laissa pas le temps d’avoir peur. Il la poussa le plus possible dans le sentier à la poursuite de ses amis, espérant de tout cœur qu’ils étaient encore intacts. Pour la première fois, il sentit les tremblements de son cheval. Chaque respiration semblait plus difficile que la dernière et même son souffle devenait difficile à écouter. Celle-ci était sur le point de lâcher prise et elle ne continuait que de courir que par pure volonté. Disçart en eut un pincement au cœur. La pauvre bête ne survivrait surement pas. Secouant sa tête des ses pensées tristes, il retourna son attention devant lui. Une seule silhouette était à l’horizon. Il ne savait où étaient partis les autres, mais plus personne ne s’interposait plus. Plus il s’approchait, plus il distinguait la figure devant lui. C’était le Prince, figé complètement. Il avait pratiquement l’air d’une statue. Devant lui, une nouvelle clairière semblait s’ouvrir. Et des bruits de combats pouvaient s’entendre. Soudainement, la monture du Prince se cabra, projetant son cavalier au sol. Ce dernier ne sembla rien tenter pour maitriser sa monture, il était sans aucune réaction, sa tête fixant la scène devant lui.

S’approchant à toute allure, Disçart sauta en bas de sa monture, lâchant son épée et s’agenouillant à côté du Prince pour voir son état. Le cheval du Traqueur s’écroula en même temps un peu plus loin, mais son maître n’avait d’yeux que pour le visage de son suzerain. L’expression de son visage se grava dans la tête de Disçart à jamais. Tellement mangée par la terreur qu’il était presque impossible à reconnaitre : la bouche arrêtée sur un cri, les yeux tellement écarquillés qu’ils semblaient à tout moment vouloir s’éjecter et même son corps tremblait. Disçart dut appeler le Prince plusieurs fois, sa voix remplie d’anxiété, avant que celui ne réagisse. S’agrippant de toutes ses forces à son ami, il le supplia de terreur :

- Sauve les Diss! Sauve les Diss! Sauve les… je ne pe…

Tournant son regard enfin son regard dans la clairière, le Traqueur vit la raison de cet état, et sa propre terreur augmenta encore. Un carnage! Une autre Bête de sang s’y trouvait, tout aussi blanche et couverte de sang que la première. Ses mâchoires déchiquetaient la chaire de ses compagnons, les laissant mourir dans d’atroces agonies les uns après les autres. Plusieurs corps étaient difficilement reconnaissables tant les griffes et les mâchoires avaient fait ravages : des morceaux manquaient, d’autres n’étaient que bouillis sans forme et certains n’étaient que des restes d’os et d’hémoglobines imbibant le sol de sang. D’autres hommes masqués se battaient dans la clairière contre les derniers gardes du Prince encore debout. La panique submergeait Disçart. Son groupe s’était séparé d’avec Ronar et Silvar, les laissant retenir l’ennemi pour éviter que le Prince se fasse blesser. Ils étaient partis avec un peu moins d’une dizaine de soldats… À peine deux tenaient encore debout avec Galen et ils étaient salement amochés. Seul Galen semblait intact, mais son armure était bossée de partout. Il maniait sa hache avec une férocité telle que de nombreux corps se trouvaient à ses pieds. Il ne restait que peu d’ennemis, moins d’une demi-douzaine entouraient Galen, mais c’était sans compter la Bête de sang.

Finissant de mâcher sa dernière victime, elle se précipita sur un homme du roi d’une trentaine d’années et barbu. Il évita un premier temps les coups, évitant de justesse les pâtes de la bête sans être capable de faire autre chose. Elle était trop rapide. Le dernier soldat, Sagard reconnut Disçart, voulut se précipiter à son aide, mais au moment d’essayer d’embrocher le monstre, il se fit lui-même embrocher par un des vils masqués qui avait délaissé Galen quelques secondes. Celui-ci ne pouvait rien faire : les quatre hommes l’attaquaient sans relâche, l’empêchant de relâcher son attention. Même d’où il était, Disçart put voir le dernier souffle du jeune Sagard. À ce moment, ses émotions submergèrent ses dernières digues et il se précipita sur le salaud qui avait tué Sagard sans même reprendre son épée. Doucement, le jeune Traqueur perdait le contrôle sans perdre celui sur sa magie.

L’homme masqué se tourna vers lui et il voulut le transpercer de sa lance. Disçart évita le coup, se précipitant sur son adversaire. Au moment de le percuter, une décharge de magie s’élança de son corps et son ennemi mourut sur le coup. Le jeune homme n’avait aucune idée de ce qu’il avait fait et il n’en était même pas curieux. Il ne faisait que suivre les échos dans sa tête qui devenaient de plus en plus forts. Regardant autour de lui, Disçart put voir Galen qui affrontaient toujours les hommes autour de lui, moins un. L’un d’eux se trouvait maintenant au sol, une blessure béante au niveau des côtes. Un bruit mat et puissant fit tourner le regard de Disçart, c’était le corps du trentenaire qui venait de frapper un arbre, mourant sous la force du coup. Son corps venait de briser sous l’impact.

Or, la Bête se tourna vers Galen, qui avait encore abattu un autre homme, et elle se précipita sur sa prochaine victime. Celle-ci remarqua la charge et elle essaya de la maintenir par de grands moulinets avec sa hache. Ceci sembla ne rien faire à la bête qui prit un des coups, emprisonnant la hache dans sa chaire. D’un coup de ce qui pouvait sembler être un bras, elle défonça l’armure de Galen, armure qui avait résisté tout ce temps. Le coup renversa le volumineux homme, lui laissant quelques traces sur le torse. Disçart se précipita sur la bête complètement paniquée. Elle était sur le point de tuer son ami! Il n’avait plus de contrôle sur lui-même, l’écho s’étant transformé en un léger murmure. Un murmure lui dictant ses actions. La voix savait ce qu’il devait faire pour survivre… encore une fois… Alors qu’il chargeait, une décharge magique, comme une sorte d’éclair noire, retient l’attention de la créature qui oublia momentanément sa proie, décharge assez puissante qui tua sur le coup les deux derniers hommes masqués. Elle se tourna vers Disçart se préparant à le déchiqueter comme les autres.

Celui-ci ne comprenait plus rien. Il ne comprenait pas la raison qu’il se précipitait à sa mort prochaine quand il ne pouvait rien faire. Il ne comprenait pas pourquoi des larmes lui perlaient aux yeux. Il ne comprenait pas pourquoi il pouvait puiser de plus en plus de pouvoir. Il ne comprenait pas pourquoi il ne fuyait pas. Il ne comprenait pas pourquoi il devait affronter des Bêtes de sang. Il ne comprenait pas pourquoi la vie était si cruelle. Devant la folie qu’il l’étreignait, le murmure prit de plus en plus de place. Elle prenait toute la place, alors même qu’il allait affronter cette chose ignoble. Elle lui demanda :

- Désires-tu arrêter d’avoir peur, petit homme? Désires-tu avoir le pouvoir d’éliminer tout obstacle petit homme? Désires-tu avoir tout contrôle sur ta vie, petit homme?

Alors même qu’il évitait les premiers coups de la créature, Disçart répondit au murmure :

- Oui, je veux avoir la force… je veux la force de tout affronter. Je ne veux pas mourir ici. Je ne veux pas mourir sans avoir rien fait qui mérite d’être reconnu…

- Si tu désires vivre encore, répondit la voix, laisse-moi t’aider! Je peux t’offrir tout ce que tu désires, petit homme. Pour cela, tu dois me laisser une place!

- Fais ce qui te plait! répondit Disçart, des larmes perlant de ses yeux. Tout ce que je veux, c’est de pouvoir vivre!

- Alors soit! s’exclama la voix.

Alors même qu’il reculait devant l’assaut du monstre, une sensation étrange submergea Disçart : il avait l’impression qu’une force essaya de « tasser » son esprit de son corps. Il se sentait entrainé dans l’inconscience. Or, un coup de patte de la créature faillit lui ouvrir le ventre s’il n’avait pas agi par réflexe et reculé d’un bon. Disçart ne comprenait pas. Il affronta la sensation de toutes ses forces. Malheureusement, il n’était pas assez fort. La sensation écrasait son esprit et un violent mal de tête le prenait, alors que la Bête le poursuivait. La douleur engourdissait ses réflexes et des égratignures lui couvrirent le corps rapidement. Elle était sur le point de le mettre en pièce! Se concentrant sur celle-ci, il était incapable de combattre la sensation dans sa tête. Celle-ci en profita… Avant de sombrer dans l’inconscience, la dernière chose qu’il remarqua fut un rire de satisfaction dans sa tête. L’écho semblait ravi.

* * *

Rangis se souvenait à peine de la traversé de la forêt : ce n’était qu’un ensemble d’images floues, de verdures, d’arbres, d’hommes et de corps. Galen chevauchait devant lui et le reste des soldats l’entourait d’un puissant cercle protecteur. Quiconque s’approchait tombait rapidement. Disçart s’était laissé rapidement distancé, protégeant leur arrière férocement. Le Prince avait voulu l’arrêter. Il avait peur pour son ami, mais il était incapable de parler. Tout cela n’avait aucun sens. Des créatures de légendes, des bandits et une attaque sur une route qui aurait dû rester méconnue. « Comment? Pourquoi? Comment… » essaya-t-il de raisonner. Il était désorienté et son corps refusait de lui obéir. Il n’était qu’un pantin brisé que ses hommes trainaient avec eux. Il ne pouvait rien faire et tout son monde risquait sa peau pour le protégé… Il était leur suzerain. N’avait-il pas la mission de les protéger? Et pourtant…

Or, lorsqu’il arriva dans la clairière, tout espoir s’évanouit de son âme. Tous ses gens allaient périr… Sous le ciel menaçant qui perçait dans la clairière, l’ennemi les attendait. Sa troupe était tombée dans le piège encore une fois et il risquait d’être définitif. Une dizaine d’hommes les attendaient armés de piques et de lances. Ils étaient placés en demi-cercle à une bonne distance du centre. À cet endroit, il se trouvait une autre Bête de sang. Son corps décharné perlait des larmes de sang de sa peau d’une blancheur cadavérique. Ses yeux blancs et vides, tels deux gros œufs malades, regardaient ses prochaines proies et ses canines difformes semblaient créer un rictus monstrueux. Tout espoir s’envolait du Prince. Ses neuf hommes ne pourraient pas vaincre cela. Aucune personne avec lui ne pourrait affronter cela… Rangis ne désirait que fuir et il voulait leur ordonner : « fuyez, tout est perdu! Fuyez qu’au moins un survive ». Le Prince désirait de tout cœur leur dire, mais aucun son ne pouvait sortir de sa gorge étranglée. Sa peur ne le lâchait nullement. Il était incapable de ne pas regarder la Bête. Au contraire de son vœu, il attendit l’un de ses hommes:

- Protégeons le Prince à tout prix! La moitié d’entre nous distrairont la Bête, alors que le reste s’occupera des hommes armés. Mon Prince, fuyez! Nous les retiendrons le temps que la menace parte.

Sans attendre de réponses, les neuf hommes chargèrent, sautant de leurs chevaux pour être plus efficaces. Rapidement, les bruits du combat résonnèrent dans l’air. Galen et quatre hommes chargeant les humains belliqueux, tandis que le reste distrayait la bête. Les premiers corps tombèrent rapidement. La bête était tellement imprévisible qu’elle pouvait charger ses propres alliés, emportant avec elle ennemis comme amis qui se trouvaient dans son chemin. Dans son armure complète, Galen ne faisait qu’une bouchée de ses adversaires. Alors que le chant de la mort s’imposait dans ce chaos, le désespoir du Prince grandissait : tous allaient mourir pour lui! Et lui, le prince, il ne pouvait rien faire... Des larmes se mirent à couler de ses yeux. Il était tellement impuissant... Les cadavres s’accumulaient peu à peu sur le sol, gorgeant la terre de sang. Toute cette scène finit par venir à bout du mental de la monture de Rangis : le pauvre animal n’en pouvait plus. Il se cabra et son cavalier y réagit à peine : sa terreur lui ligotait le moindre muscle, la moindre fibre de son corps. Le spectacle en était toujours aussi terrifiant. Le monstre semblait invincible. Sa vitesse était suffisante pour mettre à mal n’importes quels vétérans et leurs attaques n’avaient presque aucun effet. Chaque blessure se refermait si vite... À peine le combat avait-il commencé et déjà, il ne restait que Galen, Sagard et Ivain. La Bête ne leur laissait aucune chance.

Soudainement, Disçart apparut dans son champ de vision. Il l’avait complètement oublié! Celui-ci semblait l’appeler, mais pour une raison inconnue, aucun son ne parvenait au prince. Pourtant, un espoir naissait en lui. Une très, très, faible lumière, mais il y avait une possibilité. S’agrippant férocement à son ami, il le supplia, sa voix résonnant de tout son désespoir :

- Sauve les Diss! Sauve les Diss! Sauve les… je ne pe…

« Je ne peux rien faire », fini le Prince mentalement, incapable d’en dire plus. Lorsque le regard de son ami se tourna vers la carrière, Rangis y vit de la terreur et la lumière flétrie. Même Disçart n’y voyait pas d’espoir… Or, au moment que le beau jeune homme terrifié espérait que son ami s’enfuit et qu’au moins lui survive, il le vit se précipiter sans arme sur l’ennemi. Dans sa course, le Prince remarqua une étrangeté : une sorte de fumé ou d’aura menaçante émanait du Traqueur. Noir comme des cendres, elle enveloppait peu à peu celui-ci, le rendant de plus en plus difficile à cerner. Sans comprendre plus, le Prince vit son ami percuter un des hommes cagoulés qui venait de transpercer Sagard et le belligérant ne se releva jamais de l’impact. Un son mat s’entendit: Ivain venait de mourir en percutant l’arbre... Alors, Disçart se tourna vers la Bête. Elle venait de renverser Galen, lui ouvrant le bide de son armure. Le cœur du prince s’étreignit davantage. « Pas Galen aussi… »

Or, avant que la Bête puisse l’achever, une puissante décharge magique, tel un éclair noir, la percuta elle et les derniers hommes debout, résonnant de sa puissance. Disçart venait de capter son attention et d’éliminer les autres menaces. Rangis remarqua que son aura grandissait encore. Les yeux écarquillés d’émotions, il pouvait voir que la fumée noire avait pris la forme de deux grandes ailes et qu’elle recouvrait une bonne partie de son corps. Disçart avait de moins en moins l’air humain. Rangis n’aurait jamais cru pouvoir avoir encore plus peur : son ami était en train de devenir quelque chose de… quelque chose de… quelque chose… La Bête, rage de douleurs, sauta sur son ami, cherchant à l’atteindre de ses griffes. Or, ce Disçart difforme agissait étrangement. Il esquivait chaque coup, mais c’était toujours in extrémiste. Il ne semblait ni concentré ni présent. Soudainement, les ombres grandir et l’attitude de son ami se transforma. Il s’avança vers la Bête, ses yeux glaciaux d’un désir de destructions. Tant que la Bête s’arrêta, presque hésitante. Deux lames noires et floues se matérialisèrent dans les mains de Disçart. Rangis aurait bien été incapable de dire de ce qu’elles fussent faites : de brumes? D’ombres? De magies? Le Prince n’en avait même pas la moindre idée.

Tout à coup, le combat commença lorsque la Bête chargea. Elle percuta de plein fouet Disçart qui dût reculer pour ne pas se faire renverser. Alors que tous les autres avaient été aplatis par l’attaque, le traqueur bougea seulement de quelques pas, prenant ses distances pour la suite. L’échange de coup commença et aucun des deux protagonistes ne sembla plus vouloir reculer. Chaque coup touchait leur cible. Or, alors que les lames noires semblaient faire souffrir le monstre qui gémissait à chaque coup, ses blessures ne guérissant plus instantanément, les coups de griffes de la Bête ne faisaient aucun dommage. L’aura de Disçart semblait prendre chaque coup, se dispersant quelques secondes pour revenir ensuite. Or, il y avait plus. Rangis remarqua que les mains du monstre, ou ce qu’on pourrait qualifier de mains, étaient boursouflés, encore plus difformes et elles perdaient beaucoup plus de sang continuellement. Elle se blessait en essayant de toucher son ennemi. Bouchebbé, Rangis vit la Bête produire un puissant hurlement. Elle semblait souffrir : son corps était couvert de blessure…

Dans une tentative désespérée, elle chargea son adversaire et elle l’étreignit, cherchant à lui mordre le cou. Encore une fois, l’ombre de Disçart ne bougea pas, se laissant étreindre. La Bête produit un effort inhumain en hurlant à nouveau, mais rapidement, ce hurlement de colère se transforma en un puissant couinement de douleur. L’aura de Disçart « brulait » la créature! Doucement, telle une caresse, Disçart entoura ses bras autour du corps immonde, ses « ailes » suivant le mouvement. Peu à peu, la fumée entoura la Bête et lui devint indiscernable. Pourtant, son couinement grandit encore plus et Rangis sut que ce dernier ne quitterait jamais sa mémoire. La Bête produisit un tel cri de désespoir, rempli de tellement de douleurs et de peurs, qu’il blessait quiconque l’attendait.

Soudainement, il n’y eut plus aucun bruit et les ombres s’évaporèrent autour des deux protagonistes. Du moins, où il y aurait dû y avoir deux protagonistes. Alors que Disçart s’effondrait, retrouvant son apparence, la Bête de sang avait disparu. Il ne restait absolument plus rien devant le jeune Traqueur. Si ce n’était de la scène de cauchemar autour d’eux, des corps déchiquetés, du sang et du laboure des griffes dans la terre, la Bête aurait pu ne jamais exister.

Sous le choc, Rangis eut besoin de plusieurs minutes avant de réagir. Cet enfer venait de finir, il était encore en vie et il y avait une possibilité qu’il ne fût pas le seul! Il ne savait s’il devait croire à un miracle, mais ça ne devait pas en être loin. Il était en vie, par les dieux! Il avait de la difficulté à le croire. Reprenant rapidement conscience du décor autour de lui, il alla auprès des divers corps pour savoir qui était toujours en vie. Il prit soin d’éviter celui de Disçart : il n’était pas encore prêt à faire face à la réalité de son ami. Il vit que presque tout le monde était mort. Il n’y avait que Galen encore en vie et il restait Disçart à confirmer. Le premier avait reçu une blessure assez superficielle au ventre : des égratignures qui guériraient sans trop de problèmes. Son armure l’avait surement sauvé du pire. Par contre, il semblait s'être évanoui en tombant. Encore une fois, par la chance des Dieux, il était en vie et Galen aussi. Il ne restait qu’à examiner Disçart. Que s’était-il passé, bordel? Comment… Une migraine naissait alors qu’il cherchait à comprendre les derniers évènements. Ça n’avait aucun sens pour lui…

Au moment de laisser Galen, du bruit se fit entendre dans la forêt : craquement de branches, buissons qu’on dérange, feuilles qui sifflent, cliquetis d’armures et quelques jurons bien sentis. La panique submergea d’un coup Rangis qui s’écroula sur le sol, imaginant le pire. Il était sur le point de perdre le contrôle de sa vessie quand il reconnut les hommes qui sortirent de la forêt. L’incompréhension la plus totale s’empara du Prince et ses tempes se mirent à vibrer : d’autres survivants? Des alliés? On ne l’avait pas abandonné? Disçart et… et cette chose… les Bêtes de sang…

Dans la clairière venait de rentrer un George qui tenait difficilement sur son cheval, une dizaine de soldats royaux fortement armés dont il n’avait aucun souvenir et un homme qu’il avait souvent vu. Rangis n’aurait pas cru voir se visage prochainement, mais pour une fois, il n’en était pas fâché. Ce visage ridé, encadré de longs cheveux gris bouclés, sans la moindre ombre de barbe, avec cette sérénité continuelle semblant parfois déplacée et cette grosse bosse comme nez. De ce vieil homme se dégageait une impression d’expérience de sa sagesse. La voix qui l’accompagnait témoignait de son vieil âge. Or, Rangis ne l’aurait jamais sous-estimé pour autant. En voyant le Prince, George et les autres soldats royaux eurent des exclamations de soulagements : l’héritier du roi était toujours en vie. Cependant, le reste de la scène fut plus difficile à regarder. Plusieurs corps étaient dans un sal état et l’endroit baignait de sang.

Le vieil homme s’avança sans aucune hésitation, marchant entre le corps, les examinant à peine pour voir s’il était en vie. Il s’arrêta quelques seconds près de Disçart, s’agenouillant même. Il le tâta et il dévisagea du regard. Quand il fut satisfait, lâchant un micro soupir, il vint s’accroupir auprès du Prince. Celui-ci réagit difficilement et ne put que lâcher un peu pathétiquement :

- Vic… Vic… Victor? Que… Que faites-vous là?

- Malheureusement, j’arrive en retard pour sauver la troupe de mon Prince de ce piège. Je suis juste soulagé de voir que Sa Majesté est toujours vivante et que son Protecteur a survécu, n’est-ce pas?

Son regard dévia rapidement sur Galen pour revenir sur celui de Rangis qui acquiesça à la question. Victor sembla se détendre un peu de la réponse. Il ajouta :

- Maître Nirk sera content d’entendre que son apprenti ne s’est pas fait tuer bêtement ou qu’il ne soit pas arrivé pire. Ce ne fut pas un complet désastre au moins.

Le Prince voulut répondre à l’homme devant lui, mais il ne le laissa pas faire. Il donnait déjà des ordres aux hommes autour de lui et en se tournant vers l’héritier royal :

- Nous reparlerons de tout cela plus tard. Vous devez avoir des questions et j’en ai aussi, mais l’important est que vous vous reposiez maintenant. Le reste n’est plus aussi important. Vous n’êtes pas seul, mon cher Prince…

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