Prochaine Génération

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Pour continuer une tradition,
Il faut enseigner ces façons,
À ceux qui nous relèveront,
Lorsque les étoiles nous enterreront.

De la neige jusqu’aux genoux sous les sombres gris nuages, il marchait depuis des heures et des heures. Il avançait sur le flanc de la montagne, le vent au visage, un vent glacial que rien ne bloquait. Or, s’il avait pris le temps, il aurait pu admirer le paysage des valons et du duché à l’horizon. Il n’avait pas encore trouvé la moindre nouvelle trace, ce qui l’héritait terriblement. Sa mission allait être un complet échec s’il avait perdu la bête et il n’aurait pas le privilège d’aller en ville... Ce privilège, il le voulait ! Il y avait trop de temps qu’il n’avait pas été en ville et la Forteresse commençait à être si petite. Soudainement, une voix s’adressa à lui, lui rappelant qu’il n’était malheureusement pas seul. Cette voix de femme lui rappela :

- On a perdu la créature, Edouard?

- Non, non, répondit l’interloqué. Surement que si on continue, on devrait finir par tomber dessus.

- Nous aurions dû prendre le chemin de droite, exprima une seconde voix féminine amère.

- Et nous ne serions surement pas plus avancés, répondit Edouard agacé.

- Et pourquoi pas le chemin central? demanda une troisième voix féminine et stridente.

Le jeune homme ne répondit que par un soupir de découragement. L’idée elle-même aurait été la plus mauvaise. Un silence s’installa entre les membres du groupe, chacun étant plus agacé par ce calvaire et cette obligation d’être dans cette équipe préchoisie. Elles étaient tellement pénibles… La voix stridente se répéta et une voix masculine se fit attendre. Calme et sereine, elle tenta d’adoucir les esprits :

- Allons, allons, groupe. Nous devions prendre l’un des trois chemins sans savoir si nous prendrions le bon. Et je te rappelle, Féona, que le chemin central était l’idée la moins plaisante : les parois de la montagne nous auraient encadrés, limitant nos mouvements et faisant de nous des proies parfaites pour quiconque. On s’est peut-être trompé de chemin, mais on ne pouvait savoir.

Edouard se retourna finalement, observant sa troupe. Son ami, Jora, se tenait derrière lui et il restait positif même à travers l’épreuve. S’il n’avait pas été là, Edouard aurait surement abandonné les trois femmes. Elles s’étaient opposées tout le long de l’épreuve… Celles-ci étaient très différentes les unes des autres. Féona, celle à la voix stridente, était une petite femme aux courts cheveux blonds. Un peu ronde, elle gardait de suffisamment belles formes pour être quelque peu attirante. Elle portait une épée courte qu’elle ne savait probablement pas manier selon le jeune homme. Selena, la première voix, était plus grande, moins que Edouard, et elle était une belle femme. De longs cheveux bruns, un corps svelte avec de sublimes courbes, de beaux yeux miels, un nez en bec d’oiseau, un visage au trait coupé et des taches de rousseurs pour agrémenter le tout. Elle portait plusieurs lames et quand elle prenait son air farouche, un air qu’adorait et craignait Edouard, elle avait l’air d’une furie sanglante. La troisième, Frida, était un peu plus grande que Selena, des cheveux auburn, un corps tout aussi intéressant que la précédente, les yeux pers, un nez crochu et un visage carré. Armée de sa lance et son bouclier, elle avait toute l’air d’une valkyrie.

Les deux dernières, Selena et Frida, étaient d’attirantes femmes et dans d’autres circonstances, Edouard aurait aimé essayer de jouer un peu avec elles. Le soir, elles lui donnaient des images… Il en frémissait encore. Il n’aurait pas renié, mais absolument pas, quelques caresses pendant ce voyage. Féona, bien qu’elle ne fût pas déplaisante, pouvait tellement l’énerver. Sa simple présence était un irritant, irritant qui l’empêchait quelque peu de se rapprocher de deux autres demoiselles. Il en avait parlé plusieurs fois avec Jora, mais celui-ci le rappelait toujours à l’ordre. Séduire des femmes pendant des missions n’était pas éthiquement correct. Il pouvait être d’un ennui ! Qu’il avait hâte que cette tâche soit terminée et pouvoir passer à d'autres choses! Il se retourna pour continuer à avancer, mais Frida l’arrêta. Elle disait:

- On aurait quand même dû prendre l’autre chemin comme j’avais proposé.

- On s’en fout, répondit Edouard en se retournant à moitié. Et vous pourriez vous taire, la bête doit pouvoir nous entendre à des lieux à la ronde aux bruits qu’on fait.

Edouard continua d’avancer, mais il sentit des regards noirs se braquer sur son dos. Il fit comme si de rien n’était, mais il n’oubliait pas que les femmes dans son Ordre pouvaient être dangereuses. Un peu mal à l’aise, il continua d’avancer, attentif aux moindres détails. Il voulait trouver la bête et la neige devrait avoir, à un moment, des traces de celle-ci. Qu'elle vive en bas de la montagne était illogique! Sinon, la battue des villageois et des soldats du roi aurait dû permettre de trouver quelque chose. Or, la créature échappait à toute investigation. Edouard trouvait cela logique de la chercher à un endroit où personne ne cherchait : la montagne. Des pas lourds se rapprochèrent de lui et il se retourna à moitié : Jora venait s’installer à ses côtés. Il était un homme mince à la fine musculature. Un large front ressortait sous ses cheveux très courts blonds. Un nez aquilin pointait sur son visage souriant. Or, ce sourire cachait un incroyable manieur de dagues. Celui-ci lui parla tout bas :

- Edouard, peux-tu essayer de ne pas te les mettre à dos, s’il te plait? Cela ne nous aidera en rien.

- Mais qu’elles acceptent la décision, commença le jeune homme de mauvaise humeur. Le chemin des hauteurs était l’idée la plus logique. Tout le monde était d’accord. Peut-on vivre avec maintenant?

- Je sais bien, répondit Jora en souriant, mais ça aidera en rien de les rendre furieuses.

Edouard soupira et il acquiesça qu’il ferait un effort. « Si elles étaient un peu plus ouvertes d’esprit aussi, ça aiderait », pensa brièvement Edouard. Des images se formèrent dans son esprit et un sourire s’esquissa sur son visage. « Ah! si seulement… » continua-t-il pour lui-même, souriant de plus en plus. Cela faisait une semaine que son équipe traquait une bête, surement un gros ogre aux dégâts qu’il laissait. Pourtant, il n’avait toujours pas réussi à le trouver. Ceux-ci n’étaient pas particulièrement doués pour se cacher ni pour fuir. Edouard trouvait cela un peu étrange. Or, il chassa cette pensée facilement et il pensa aux auberges de Luxfodel. Il avait hâte d’avoir une chope de bière et ... Il fut chassé de ses pensées par Frida qui l’interpella :

- Edouard? On devrait s’en retourner. On n’est pas équipé pour continuer longtemps dans la neige.

- Comme ça, t’as froid? demanda Edouard malicieux. Je ne pensais pas que le belle Frida se laisserait avoir par un peu de neige.

- Elle a raison, appuya Selena le regard noir. On risque de grosses engelures si on continue. Surtout qu’on n’a absolument rien trouvé, autant rebrousser chemin.

- C’est sûr qu’en abandonnant à moitié… commença Edouard, on ne trouvera jamais rien.

- Mais j’ai déjà froid, se plaignit Féona.

- On peut surement encore continuer un peu, commenta le jeune homme avec un petit geste de la main, nous sommes des Traqueurs. Nous sommes surement capables de subir un peu de neige. Un peu de vigueur!

Or, les trois jeunes femmes n’étaient plus d’accord pour continuer et les quatre se mirent à se disputer. Elles voulaient s’en retourner et tenter un autre chemin. Edouard ne voulait pas perdre une chance. Alors que la discussion commençait de s’envenimer, Jora essaya d’abord de calmer les protagonistes, mais il était incapable d’intervenir. Chacun enterrait l’autre, empêchant quiconque de se faire entendre. Soudainement, il attira l’attention d’Edouard. Celui, déjà en de fort mauvaises dispositions, répondit agressivement :

- Qu’est-ce que tu veux?

Jora ne répondit pas et il n’eut que le temps de pointer quelque chose du doigt avant que le chaos s’installe. Deux formes massives sautèrent sur leur attroupement du sommet. Plus haute que le plus grand des hommes, près de deux mètres et cinq, elles étaient extrêmement larges, près d’une fois et demi la largeur d’un homme. Leurs habillements recouvraient surtout le torse et les jambes, laissant voir des bras nus caractérisés par des peaux brunes, craquelées et sales, qui semblaient aussi épaisses qu’une armure. Et leur visage n’avait rien d’humain. Carré, celui-ci n’avait que deux grosses fentes comme nez et des trous pour les oreilles. De petits yeux dépourvus de sourcils se trouvaient au-dessus de l’appareil nasal et une bouche immense sans lèvres fissurait le bas. Les deux créatures étaient armées de gourdins rudimentaires Edouard ne put s’empêcher de décliner leurs noms :

- Des Parmogres…

En regardant autour de lui, il vit qu’ils étaient tous sains et saufs. Par réflexe, ils avaient évité le pire. Ces monstres avaient l’air stupide, ce qui était le cas, mais en contrepartie, ils étaient d’une férocité redoutable. Edouard était soulagé de ne pas avoir encore perdu quelqu’un, mais il devait intervenir rapidement. Il vit Frida se précipiter sur l’un des parmogres, Selena restant derrière immobile. Il les sentait canaliser le pouvoir : l’une d’entre elles dégageait une sérénité glacée, alors que l’autre semblait brûlante. Féona s’était écroulée et elle ne bougeait pas. Soudainement, Jora retient son attention :

- Distrais le Parmogre pendant que je prépare quelque chose!

- Je ferai ce que je peux, répondit Edouard mi-sérieux, mi-espiègle en tirant sa lame.

Il se précipita sur le second parmogre. Or, en courant, son esprit se précipita vers le centre de son pouvoir. Dans une ville vide de toute personne, il évitait toute distraction pour aller rejoindre l’estrade où il canalisa le pouvoir. Il sentait Jora faire de même, calme et serein, mais il canalisait beaucoup plus que ce qu’Edouard avait l’intention de faire. À une vitesse effrayante, son tissage fut terminé. Sans attendre, celui-ci fut sur le Parmogre et le combat s’engagea. Le monstre chercha à l’écraser de son énorme bâton, mais le jeune homme n’eut même pas à s’en inquiéter. La créature frappa deux mètres trop à la gauche de sa cible. En souriant, celle-ci profita de la confusion du hideux et il frappa de toutes ses forces le même bras. Le coup aurait pu décapiter un homme sur place! Or, la lame ne s’enfonça même pas au tiers du bras... « Il semblerait qu’il soit solide » pensa brièvement Edouard, mi-figue, mi-raisin. Toute sa force suffisant à peine à blesser la créature, le combat risquait d’être difficile…

L’adversaire lâcha un gémissement de douleur et il tenta encore de frapper sa cible. Or, il la manqua encore de beaucoup. Le sort d’Edouard marchait très bien. Après encore quelques vaines tentatives, le Parmogre changea de tactique : il se mit à balayer la zone devant lui. Edouard faillit s’envoler au premier coup : ses réflexes le sauvèrent au dernier moment d’une frappe. La créature ne se déplaçait pas, mais Edouard était incapable de s’en approcher. Les mouvements de ses bras rendaient toute approche presque impossible. Ainsi, le jeune Traqueur observait le mouvement de son ennemi et quand il voyait une ouverture, il se précipitait, abattant son épée sur les bras massifs du monstre. Celui-ci n’avait pas de grosses blessures, mais de nombreuses coupures le vidaient de son sang. Ce sang qui entachait la neige immaculée. Bientôt, les combattants se battirent sur une molle neige rouge globuleuse qui entravait de plus en plus les mouvements d’Edouard.

Le second combat se déroulait différemment. Frida, de sa lance et de son bouclier, affrontait férocement son Parmogre. Elle l’attaquait de féroces estocs qui perçaient la peau épaisse du monstre. Celui-ci répliquait férocement, mais elle était capable de dévier les coups grâce à son bouclier ou de les éviter à la dernière seconde grâce à Selena : son pouvoir avait fabriqué plusieurs fortes lames de glaces et celles-ci harcelaient le monstre, le dérangeant beaucoup dans son duel. Ses lames laissaient de légères entailles, mais la douleur héritait énormément le Parmogre. Or, celui-ci, dans sa rage montante, prit au dépourvu Frida et il lui asséna un puissant revers de main. Le coup l’envoya valser, mais a la dernière seconde avant l’impact, un bouclier de glace s’était interposé, limitant les dégâts avant de se fracasser en morceaux. Ainsi, Frida se releva vivement, se précipitant dans un cri à l’encontre du Parmogre.

Soudainement, le premier Parmogre sembla reprendre ses esprits et il frappa directement Edouard. Celui réussit dans une roulade à esquiver la créature, mais celle-ci le chargeait déjà, le forçant en défensive. Le moindre faux pas et il aurait, lui aussi, droit un vol plané. Un vol qui le laisserait surement démembré ou en partie... « Quelle fin déplaisante! » pensa rapidement le jeune homme. Esquivant, et esquivant, il avait beaucoup de difficultés à contre-attaquer. Or, alors que le Parmogre allait pour lui asséner un coup décisif, celui-ci s’effondra. Trois lances de pierres dépassaient de son dos, trois lances qui se désintégrèrent peu à peu. Edouard regardait Jora : souriant, le souffle difficile et la posture basse, il semblait content de son effet. En se tournant de l’autre côté, Edouard put voir Frida asséner le coup final à son propre Parmogre.

Ils avaient réussi et ils étaient tous en entier! Edouard soupira de soulagement et il se permit de sourire. Ils avaient vaincu! Or, la scène n’était pas belle à voir. Il y avait du sang partout, le liquide vermeil qui se mélangeait à la neige et qui la faisait fondre. Les deux cadavres étaient couverts de blessures et du sang s’échappait encore de leur corps. Frida et Edouard étaient couverts du sang de leurs ennemis, mais ils avaient survécu. Jora s’exprima sa joie le premier :

- On a réussi, groupe. On a vaincu deux Parmogres, ha! ha!

- Nous avons vaincu, répondit Edouard avec une petite posture héroïque.

Il la relâcha rapidement : ses muscles étaient trop douloureux. Les deux autres combattantes lui répondirent par l’affirmatif et des sourires. Ils étaient fiers d’eux, leur regard brillant d’un bel éclat. Or, Féona se releva enfin et elle s’approcha timidement. Personne ne lui accorda un regard. Sa lâcheté était connue, mais cela ne l’excusait pas. Tout aussi timide que son approche, elle demanda:

- Est-ce qu’il y en a l’un d’entre vous qui êtes blessés?

Selena lui répondit qu’il y avait Frida : celle-ci avait une entaille au niveau de la tempe et plusieurs égratignures. Féona se précipita dessus, se mettant à la soigner immédiatement, canalisant un pouvoir au relent d’amertume et de peur. Même d’où il était, Edouard pouvait voir la beauté de cette magie : un pouvoir qui pouvait faire disparaitre n’importe quelle blessure. Cette capacité atténuait son dégout pour la lâcheté de Féona. Elle pouvait se rendre un peu utile au moins. Après cette action et que tout le monde se soit rapproché de lui, Edouard proposa malicieusement :

- Nous pourrions nous éloigner de ce bain de sang et retourner en bas de la montagne. Après tout, nous avons eu nos proies grâce à mon chemin, autant sans retourner maintenant.

Il reçut un regard noir de Frida et de Selena d’un même mouvement. Elles étaient parfaitement synchronisées...Trop! Edouard en eut un mouvement de recul, mais leur expression changea rapidement : des sourires éclairaient leurs jolies bouches. Frida laissa tomber :

- Tu as gagné pour cette fois. Autant admettre notre défaite.

Selena acquiesça, mais Edouard remarqua un détail différant entre les deux : Selena semblait faire un effort pour lui sourire, mais ses yeux étaient glacials comme sa magie. Le jeune homme soupira intérieurement : il éviterait de s'essayer à gagner les faveurs de Selena et peut-être de Frida aussi. Son regard tomba sur Féona et tout désir s’envola. Il avait hâte d’être rentré. Ainsi, le groupe reparti sur ses pas en laissant les corps aux charognards. Edouard trouvait qu’il faisait froid finalement et de toute façon, il n’avait pas d’outils pour enterrer ses énormes cadavres répugnants et pestilentiels. Ainsi, autant les laisser à d’autres. Jora vint marcher à côté d’Edouard pour lui parler :

- J’espère que tu n’as aucune intention libidineuse envers nos collègues, Ed?

- Moi? commença l’interloqué faisant semblant d’être offensé. Jamais je n’aurais de telles pensées envers mes partenaires! Euh… sauf à l’exception de… Mais ce n’est pas important! Je n’oserais courtiser de belles dames en mission.

- Peu importe, répondit Jora en souriant, ça te regarde rendu là, mais je voulais juste te prévenir : si tu t’essayes, tu risques de finir avec une dague entre les côtes ou pire. Selena ne veut rien de toi.

- Elle pourrait être surprise, je possède de merveilleuses qualités, mais… commença Edouard qui ne put finir.

- Et Frida soutient son amie, le coupa Jora.

- Elles n’ont vraiment aucun sens de l’humour! s’exclama le jeune homme dépité.

- Tu te consoleras en ville, réconforta Jora en souriant. C’est toujours mieux que de finir dans le fin fond d’un fausset par imprudence.

Edourard acquiesça promptement. Il n’en avait aucune envie. Ainsi, le retour de la montagne se fit dans le silence : le groupe était épuisé et las de leur tâche. Il avait hâte d’être de retour chez eux. Dans le mutisme du retour, Edouard ne pouvait s’empêcher de penser que tout cela serait bien plus agréable si seulement il avait pu avoir quelques caresses…

* * *

Dans une salle obscure, seulement éclairée par une chandelle, deux hommes discutaient entre eux. L’endroit était saturé d’humidité, la moisissure mangeait la pierre des murs et on pouvait entendre le clapotis des habitants de l’endroit qui se déplaçait. L’endroit n’inspirait aucune confiance. Un lieu parfait pour de sinistres secrets.

- Comment se passe les préparations ? demandant un homme en armure scintillante.

Celui-ci, bien que de taille et de grosseur moyenne, avait une posture qui imposait le respect même s’il était jeune. Imberbe, les cheveux au-dessus des épaules, il avait un visage noble. Son regard noir ployait l’échine d’hommes à l’allure bien plus costaud que lui, tel son interlocuteur présent. Celui-ci lui répondit :

- Tout se passe comme prévu, sir. Le plan devrait se dérouler sans aucune embûche. Le royaume de Libragne devrait tomber au moment prévu.

L’homme qui parlait était gigantesque. Tout en muscle et en chair, il avait de nombreux tatous sur le corps. Des lignes et des bandes qui allaient dans tous les sens sans vraiment de sens. Le colosse était le seul à savoir leur signification. Il portait des bandes de cuirs sur le torse, laissant une grande partie de sa peau exposée, et un pantalon de cuir. Son visage était découvert et il laissait voir la face d’une brute : carrée et chauve, elle n’exprimait aucune empathie. Il était terrifiant comme homme, mais son interlocuteur l’était encore bien plus. Il aurait tellement aimé être ailleurs actuellement. Le seigneur devant lui dégageait une telle aura de danger que tous les sens du colosse explosaient de peur en le voyant. Ce dernier reprit :

- J’espère bien. Je serais déçu si ce n’était pas le cas. Je veux que ce royaume tombe et que son roi tombe : ils n’ont que trop défié le destin.

* * *

Nirk se trouvait dans une petite salle sombre austère sans fenêtre. Seule une table trainait au milieu de la pièce avec trois chaises miteuses que l’homme grisonnant n’aurait pas eu entièrement confiance. Il était en colère avec les évènements précédents. Il était certain de savoir qui s’en était pris aux cinq gaillards et dans quelle intention : miner le Roi et faire comprendre à tous que personne n’était à l’abri d’eux. Ce groupe n’arrêtait pas de leur filer entre les doigts depuis des mois. Leurs actions étaient tellement précises et calculées, l’Ordre n’arrivait jamais à réagir à temps. Et leur discrétion était remarquable! Jamais rien ne filtrait sur d’eux! Nirk n’avait même pas un nom ou une idée de leur véritable but. Il était furieux de cette ignorance et maintenant, c’était Disçart et Rangis qui payaient à cause d’eux! Il en était certain : c’était trop similaire à d’autres cas et aucun Traqueur n’avait réussi à trouver qui et pourquoi.

Dans la pièce, il se trouvait une jeune femme avec lui, un peu plus que la mi-vingtaine. Les cheveux blonds, ne dépassant pas les épaules, encadrant un visage déterminé, elle attendait que Nirk s’intéresse à elle. Elle n’était pas particulièrement attirante : son corps manquant de forme et le sérieux de son visage ne faisaient pas tourner les têtes, mais elle était jolie avec ses yeux bleus. En fait, ce qui faisait fuir le galant, c’était son attitude : déterminer, directe et dure. Plus ils insistaient, plus ils risquaient de se faire rabrouer durement. Pauvres garçons… Même à cela, c’était l’un des meilleurs éléments de l’Ordre. Nirk avait une complète confiance en elle. Il l’interpella. Elle avait assez attendu. Il commença :

- Comme tu le sais, notre ennemi a encore frappé. Contre le Trône cette fois-ci. Le Roi a ordonné que nous trouvions les responsables. L’auberge de la Rose épineuse est notre première cible. Deux ou trois Traqueurs s’en occuperont.

- Quel est mon rôle, Maitre? demanda la femme.

- Pour l’Auberge? Interloqua rapidement Nirk, absolument rien. C’est une perte de temps. Comme toutes les dernières fois, nous n’allons surement rien trouver. Que d’obscures informations et des témoignages flous. Notre ennemi devient de plus en plus arrogant. Il est temps que l’Ordre au complet focalise son attention sur eux. Des messagers sont déjà partis pour les Éléments de la Tempête pour changer leur priorité.

- Quelle est cette priorité exactement? demanda son interlocutrice.

- Trouver et éliminer par tous les moyens la menace! répondit Nirk violemment. Ton rôle est de trouver et d’éliminer ce groupe dans le duché de l’Est. Commence par la capitale et tous les moyens sont permis! Je compte sur toi, Fléchère!

Celle-ci acquiesça par une révérence.

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