Chapitre 3. Rencontre avec les Dudulliniens.

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(Point de vue d'Énokiera.)

Lorsque Kiera est venu me réveiller j'ai fait comme si j'avais oublié notre conversation houleuse de la veille. Quand Evan s'est levé, je lui ai donné des fruits. Après avoir repris des forces, j'ai dit que nous partions et il s'est empressé de remballer ses affaires.

— J'ai pris ma décision, je t'emmène chez moi. Ça te dit ?

Il ne me répond même pas. Il se contente de démonter sa tente. Je monte dans un arbre pour me repérer et tenter d'apercevoir un groupe de Chalves, animaux à six pattes et à dos plat, amical et pratique pour servir de monture. Ça n'a rien donné. Peut-être si je me réfère à Kiera, sa course dans le ciel peut m'aider. Oui ! Quand je suis née il était juste en face de chez nous. Il faut donc que nous marchions en le suivant. Evan a terminé de faire ses bagages. Je le rejoins avant qu'il ne s'inquiète. Je me mets à siffler. D'abord aigu puis de plus en plus grave. C'est le seul moyen d'attirer un Chalves. Je siffle deux fois. Avant que je siffle une troisième fois, deux têtes identiques percent un fourré orange et leurs corps suivent puis deux magnifiques Chalves viennent vers nous. J'aide Evan à monter l'un de ces derniers puis je lui lance son gros sac. Je grimpe à mon tour sur un dos lisse et plat. Je claque une fois des doigts, deux fois dans mes paumes et une fois avec ma langue. Nos montures se mettent en route. Régulièrement je jette un coup d'œil vers le ciel pour savoir si nous somme sur la bonne route. Leur six pattes font qu'ils sont très stables, on ne risque pas de tomber, malgré leur dos lisse. Evan se débrouille bien. Il regarde autour de lui avec l'émerveillement d'un enfant. Nous cavalons longuement.

Soudain, il plonge sa main dans sa veste et en sort un téléphone. Tout aussi soudainement, ce dernier se met à vibrer. Affolé, il me demande si l'on peut s'arrêter. D'un sifflement impérieux je fais stopper les Chalves. Ces animaux sont bien obéissants ! Mon compagnon semble avoir une discussion mouvementée avec l'objet noir de communication. Il se fâche puis redescend d'un ton, parfois, il me regarde puis reparle avec entrain. Je ne comprends pas ce qu'il dit. Il parle trop vite, le Français, la Langue Universelle, n'est pas ma langue maternelle et comme j'ai appris toute seule, il m'est parfois difficile de comprendre ce qu'il dit. Je ne saisis même pas les grandes lignes de ce qu'il raconte. Heureusement pour moi, sa monture ne tient pas en place et s'avance vers son compagnon. Comme il est plus proche de moi j'essaye de comprendre ce qu'il dit. Il me décrit à la personne à qui il parle. Face à la réponse inaudible de son interlocuteur, ses yeux s'écarquillent, il jure des mots que je ne répéterais pas. Puis il raccroche. Les traits de son visage sont tendus. Redoutant sa colère, je fais avancer nos bêtes, sans lui parler.

Nous ne sommes pas allés assez vite. En effet, Kiera débute sa descente derrière l'horizon. Je n'ai pas de repères avec Kophino, surtout que c'est la nuit. Nous devons nous reposer. Pas question de retourner dormir dans sa tente ! Je lui dis que nous n'avons pas le temps, que nous serons plus en sécurité dans les arbres. D'autant plus que les arbres rouges et noirs qui nous entourent sont des Spinnos, arbres solides et toxiques pour les animaux.

Ne sachant pas comment l'arbre va interpréter la présence d'Evan je lui prépare une plateforme. C'est aussi pour sa sécurité, je ne veux pas qu'il tombe et qu'il meure. Quant à moi je me couche à plat ventre sur une grosse branche, et je croise mes mains et mes jambes autour de celle-ci. Je sais, par expérience, que je ne tomberais pas. Le nombre de fois ou je me suis fâchée avec ma mère et que je suis partie dormir sur un arbre, je ne suis jamais tombée. L'arbre s'est habitué à Evan et l'a laissé tranquille. Je n'arrive pas à dormir. J'ai changé de branche en me disant que ça m'aiderai mais j'ai juste failli réveiller mon ami. De nouveau perchée sur branche, guettant le sommeil, je m'occupe en le regardant dormir. Il est si paisible, presque beau, quand son corps se repose. Doucement, pour ne pas vouloir le réveiller encore une fois, je saute pour m'agripper à une branche au-dessus de lui. Mes bras me tirent et me font mal, j'ai été trop vite ! Mes pieds ne font aucun bruit en touchant la plateforme en bois. J'avais pris soin de retirer mes colliers avant de sauter, car, n'ayant pas mes mains de disponibles pour les retenir de tinter, ils auraient fait du bruit, trop de bruit. Je m'allonge près de lui pour avoir le loisir de le contempler à ma guise. Malheureusement le sommeil choisit cet instant pour me faire plonger dans son néant rempli de rêves. Je n'ai pas le temps de le maudire pour m'avoir fait endormir à côté de lui. Mes rêves me calment par leur douceur et leur longueur. Je ne ressens pas le froid qui navigue, habile, entre les feuilles de notre cachette. Après cette nuit reposante ce ne sont pas les rayons perçants de Kiera qui m'éveillent. Un chatouillement incessant sur ma joue me fait reprendre conscience et me sort de mon paisible rêve, abritant oiseaux, cascades d'eau avec des poissons scintillants. Le chatouillement ne s'est pas arrêté et me fait frissonner, malgré l'absence de froid. Je sens quelque chose m'envelopper, c'est doux, c'est chaud. Agréable. Je consens à ouvrir mes paupières. Surprise, mes doigts se resserrent sur mon arme. Je me rends compte que c'est Evan qui, avec le bout de ses doigts, qui me caresse de la tempe au menton. Il a mis sa veste sur moi, croyant que j'avais froid. Il me tend mes colliers. En riant il me dit :

— Hey, détends-toi, c'est toi qui es venue là, au départ t'étais là-haut. Te fâche pas après moi, tu avais l'air si heureuse.

_ Je ne te gronderais pas, j'ai juste eu peur. J'avais oublié que je m'étais couchée à côté de toi. Endormi tu étais si paisible, moi qui n'arrivais pas à trouver le sommeil.

_ Allez viens, on doit partir.

_ Tu es pressé ? Peut-être qu'ils vont te condamner. Tu ne les connais pas. Moi-même j'ignore leur réaction.

_ Je ne disais pas ça pour eux, c'est nos...

J'ai entendu un bruit. Je l'interromps :

_ Chut ! Tais-toi !

Je penche la tête, mon oreille droite vers le ciel, la gauche vers le sol. Seul l'un de mon peuple peut monter dans un Spinnos, or j'ai entendu des feuilles bouger à proximité. Pour confirmer mes pensées je prononce bien distinctement :

— Iuq tse-al ? Ej sius Énokiera ! Zednoper !

J'ai parlé en Shadès et si je traduis en Français cela donne précisément : Qui est-là ? Je suis Énokiera ! Répondez !

Peu après une voix grave me répond :

— Énokiera ! Ej sius Arkanir ! Ut se elues ? No stiateiuqni ! Ej xuep rinev ?

(Énokiera ! Je suis Arkanir ! Tu es seule ? On s'inquiétait ! Je peux venir ?)

_ Iuo. Ej en sius sap elues, ctse Evan.

(Oui. Je ne suis pas seule, c'est Evan.)

Je perçois presque aussitôt un bruit derrière mon ami. C'est Arkanir, homme bleu clair rayé de blanc aux cheveux vert clair. S'il bouge l'index Evan meurt, pulvérisé, et il y a de grandes probabilités que j'y passe aussi. Je lance deux ordres, l'un pour Evan, l'autre pour Arkanir :

_ Baisse-toi ! En erit sap !

(Ne tire pas !)

J'ouvre ma bouche et montre ma langue pointue, c'est un signe de mécontentement.

_ Arkanir elucer ! En erit sap ! En erit sap !

(Arkanir recule ! Ne tire pas ! Ne tire pas !)

Il contient peu à peu sa rage. Evan est vivant et moi aussi. Pas question de me laisser abattre pour si peu. Je sais qu'Arkanir voyait son futur avec moi et je l'ai blessé en étant avec Evan. De toute manière je n'ai conclu aucun engagement avec les deux. Il est parti à ma recherche voyant que je ne revenais pas. Avec un ton agressif il me demande de quoi nous parlions. Je lui réponds sèchement que nous décidions de l'heure de notre départ pour rejoindre le village. Il s'exclame en Shadès, toujours :

—Quoi ! Tu comptais le ramener chez nous ? Vraiment ?

_ Oui. Ça te pose un problème ?

_ Non, non. Hum tu ne parlais pas Shadès non ?
_Non. Je parlais Français. La Langue Universelle (L.U.).

_ Hum. fit-il septique.

Lui bien sûr ne pratique pas la L.U., ainsi qu'une bonne partie du village Dudullinien, il sait que je l'ai apprise. D'une voix hésitante mais ferme il m'interroge :

— Ut lsemia ?

(Tu l'aimes ?)

Ce à quoi je réplique d'un ton angélique :

_ Iuq ?

(Qui ?)

Il souffle, agacé. Puis il le pointe du doigt. Encore plus agacé quand je ne daigne de regarder la direction de son doigt que je sais pertinemment pointé sur ce cher Evan qui, assurément ne doit rien comprendre à nos échanges.

C'est donc en criant qu'il s'exclame :

_ LUI ! Qui d'autre ?

Cette fois je me tais. Il est très énervé, est à deux doigts de pulvériser Evan et certainement moi avec. Pour la deuxième fois. Ensuite comme pour se montrer digne de moi, il siffle trois fois, alors que je m'apprêtais à le faire à le faire. Je ne pense pas passer le restant de ma vie avec Arkanir, mais ce dernier est prévoyant. En plus de les avoir appelés avant moi, à sa hanche (recouverte de fourrure en l'honneur de son premier animal tué de sa main pour nous défendre) il y a quatre bourses, deux d'eau et deux de nourriture. Pour le retour. Mon retour avec lui. C'était sans compter Evan dont il ne connaissait pas l'existence. Pauvre Arkanir. Nous grimpons sur les trois dos plats et lisses des Chalves appelés par notre guide. Je sais que, désormais, il n'aura pas d'estime ni de compassion envers mon ami Terrien. Réagir de cette façon est stupide. Je ne vais pas m'apitoyer sur son sort. Arkanir semble impatient d'arriver, il espère qu'Evan soit jugé et tué. Pour lui montrer que je suis indépendante je me cale sur l'allure du Chalves de mon ami. Je lui demande ce qu'il voulait me dire avant que je ne l'interrompe.

— Je voulais que l'on se dépêche car les, les... ça. Avaient disparus. C'est quoi leurs noms ?

_ Ce sont des Chalves. Ils avaient peut-être disparus mais je les aurais rappelés. Il ne fallait pas que tu t'inquiètes !

_ Oh, je...

_ Énokiera ! Ctse is tnasserts dnauq ec ntse sap ud Shadès.

(Énokiera ! C'est si stressant quand ce n'est pas du Shadès.)

Arkanir nous a interrompus. Si, très jeune, je n'avais pas appris à me contrôler, je crois qu'il serait déjà mort. Plusieurs fois. J'ai envie de l'étrangler.

—Tu es si stupide ! Tu ne peux donc pas me laisser tranquille ?!

_ De quel droit me parles-tu ainsi ? Tu m'appartiens !

_ Non. Non ! Je ne t'appartiens PAS !

_ Iouqroup ? Iouqroup ut ecnoner ed lermettemda ?

Il se fait plus insistant. Il est curieux. Il me demande pourquoi ? Pourquoi je renonce de l'admettre ?

Je m'adresse à Evan :

— Laisse tomber Evan. Je crois bien qu'il ne t'apprécie pas. Pour le simple fait que nous nous parlons et qu'il ne comprend pas.

_ Pas grave. Au fond, je le comprends. sourit-il.

Après un instant de réflexion il poursuit :

_ Je suis un étranger pour lui. Il ne me connaît pas. Et tu passes plus de temps avec moi qu'avec lui. Il est... hum... jaloux.

_ Jaloux ? Tu crois ?

_ Oh, oui, je le vois dans ses yeux, la façon dont il te regarde.

Je me retourne pour regarder Arkanir.

_ Iouq ? Iouqruop em sexif ut isnia ?

(Quoi ? Pourquoi me fixes-tu ainsi ?)

À cet instant ce n'est pas une lueur de jalousie qui étincelle dans ses yeux, mais une lueur assassine, cruelle, défiante. J'ai peur de l'homme qu'Arkanir est devenu. Mes sourcils blancs, inquiets, se froncent. J'ai hâte d'être à la maison de serrer ma mère dans mes bras. Je n'en peux plus de cette tension. Pour être tranquille, j'agrippe la branche qui est presque au-dessus de moi. Je commence mon ascension vers le sommet de cet arbre majestueux et solide. Il faut que j'aille dans les branches les plus hautes pour qu'ils ne me voient pas. Il est fort possible qu'Arkanir cherche à tuer Evan en mon absence. J'aperçois le ciel bleu, sans nuages, j'y suis presque. Je vois notre Arbre. Il est le maître de la forêt.

Quelque chose cloche. D'habitude l'Arbre est encerclé de volatiles venus de toute la planète. Il n'y a pas un piaillement. Rien que le bruit du vent. Un cri. Mon prénom, hurlé en cœur par deux voix graves. Evan. Arkanir. Il y a vraiment quelque chose qui ne vas pas. Arkanir sait que je sais me débrouiller seule, m'appeler n'est pas dans sa nature. Qu'Evan soit inquiet je peux le comprendre. Quitte à me prendre des bleus, il faut à tout prix que je descende d'ici. Je prends mon courage à deux mains et je saute. Le corps droit, comme un piquet, pour réduire la surface où l'on peut me blesser. Je lève mes bras au-dessus de ma tête. Des feuilles et des brindilles s'accrochent dans mes cheveux. Ma chute est longue.

Ma course s'arrête, non pas au sol mais avant. Mes pieds ont brutalement atterri sur une grosse branche, mais comme je ne m'y attendais pas, mes pieds ont glissés et je suis tombée à la verticale le ventre vers le sol. Je m'arrête pour de bon quand une branche, plus basse me percute le ventre (enfin je percute la branche...). Sous le choc je reste sonnée et pliée en deux, essayant de récupérer mon souffle, coupé par la brutalité de l'impact. Je n'entends même plus les garçons m'appeler tellement j'ai mal. Heureusement il n'y a pas d'os dans le ventre sinon ils seraient en mille morceaux mais c'est la même douleur que je ressens. Pendant quatorze cycles de soleil je ne pourrais pas rire. Je tousse mais ça n'arrange pas les choses. J'ai un goût âpre et amer dans la bouche. Je touche ma bouche avec mon index et le lève au niveau de mes yeux. Il liquide brun colore mon doigt vert. Mon sang. Par Horchystus ! Mon ventre a pris un tel coup que j'en saigne, mon état doit être grave. Ce n'était pas une bonne idée de sauter ainsi. Des points de lumière me couvrent les yeux. Je sens des bras me prendre pour me soulever. Erreur. Bouger est la pire des choses. Mon malaise augmente, empire. Mon monde s'écroule. Un néant de couleur verte m'entoure. Suis-je partie ? Vais-je retrouver ou rejoindre ce père inconnu ? Vais-je retrouver les anciens ? Que m'arrive-t-il ? Mon cœur bat de plus en plus vite dans ma poitrine droite et je transpire. Je respire fort. J'ai entendu un son, une voix je crois. Je voudrais me retourner mais je ne peux pas. Je suis... comme si j'étais... immobilisée, bloquée. Tiens, voilà que je me mets à pleurer. J'ai envie de crier mais je ne le fais pas. Pourquoi le ferais-je ? Maman... tu me manques. Aide-moi ! Je t'en prie ! Fais cesser tout ça ! Ah, enfin. Mon rythme cardiaque décélère petit à petit en symbiose avec ma respiration. Quand ils se sont calmés et qu'ils ont retrouvé leur normalité, ma transpiration aussi cesse. Mes larmes se tarissent enfin. Je me sens de nouveau bien. Finalement ce lieu est reposant. Je ferme les yeux, me plongeant dans le décor. J'ai l'impression de planer. Je frissonne mais je n'ai pas froid, de toute façon ici, il n'y a pas de vent, pas d'air. Je ne sais pas comment je respire. Je suis toujours sur le dos incapable de me tourner. Petit à petit, les yeux toujours clos, des choses me touchent. Je me redresse en sursaut et j'ouvre les yeux.

À ma grande, très grande surprise, je ne vois pas de vert. Je connais, c'est ma chambre ! Ce que j'ai cru agressif n'était que mon lit feuillu. Je ris d'avoir cru que mon lit était dangereux. La première erreur fatale de mon existence. La douleur a repris lors de mon rire. Elle s'est très légèrement estompée mais je n'aurais pas dû rire. Je le savais, je l'avais dit ! Que je suis bête parfois. Mais attends ! Si je suis chez moi, où est Evan ? Peut-être que cette aventure n'existe pas et j'ai rêvé, peut-être j'ai couru, je suis tombée et fin de l'histoire. Il faut que j'en aie le cœur net. En grimaçant je me mets debout et j'avance lentement vers l'encadrement de ce qui nous sert de porte. Je marche doucement en m'appuyant là où je peux.

Une femme à la peau rose-violacée accourt vers moi, je la reconnais entre mille ; ma mère. Elle me fait un câlin, presque à m'étouffer et en Shadès elle me murmure qu'elle m'aime. Je la prends par les épaules et je la repousse doucement. Je l'observe de haut en bas. Très bien elle est en pleine forme. Ma mère a une santé fragile contrairement à moi. Au moindre problème elle peut se rendre malade. C'est ce que l'on appelle l'amour d'une mère. Quelqu'un appelle ma mère toujours en Shadès.

— Rahy, est-ce que ta fille est en état de se déplacer ?

_ Ça dépend. Où doit-elle aller ?

_ Elle doit aller voir les anciens pour parler de l'étranger. Arkanir y est déjà. Ils l'attendent.

Le messager, dont je ne saurais pas reconnaître la voix pour l'identifier, part en courant. S'il y a bien une autre chose que je déteste c'est que l'on parle de moi, alors que je suis présente, à une autre personne. Rahy plisse les yeux et ses lèvres se pincent. Elle me lance, alors que j'ignore la raison de ce regard.

— Jeune fille, ne cherche pas à échapper à ton destin. Capable ou non, quitte à te déposer là-bas, tu iras à ce Conseil.

Je ne prends même pas la peine de la contester, ou d'échafauder des plans pour m'échapper. De toute façon je suis physiquement incapable de les mettre en œuvre. Je ne vois pas arriver Chlo et Manuro, je ne vois pas non plus qu'ils ont un brancard. Rahy a pensé à tout. Inquiète, elle secoue sa main devant mes yeux, pour me faire revenir à la réalité. Enfin, plutôt pour que je m'allonge sur ce maudit brancard qui me mènera aux Anciens. Par Horchystus ! Je ne suis pas dans une position favorable. À cause d'Evan. Ce n'est pas vraiment de sa faute. Pendant le trajet, pourtant court, je me reprends à somnoler. Ce qui me réveille, ce sont les manques de délicatesse de mes porteurs ce qui me tiraille le ventre. J'ai une tâche violette qui tire sur le noir, sur mon ventre. C'est terriblement moche. Et ça fait mal. L'Arbre qui garde et purifie notre eau est creux.

L'Arbre est gigantesque et énorme et c'est en lui que se tient le Conseil. Le pont menant à l'Arbre vient d'être refait. Sans doute pendant mon absence. Quand Chlo et Manuro marchent dessus le bois ne craque pas. L'intérieur de l'Arbre est toujours aussi sombre. Pendant un moment je ne distingue que l'obscurité. En premier je distingue les cinq silhouettes des Anciens. Ma meilleure amie, Watie, m'aide à m'asseoir. Elle fait attention et va doucement si bien que je n'ai pas mal. Sur chaque siège du Conseil un symbole est dessiné : une goutte pour l'eau ; une planète pour la terre ; une flamme pour le feu ; des traits pour le vent (l'air) et des étoiles dans un sablier pour l'espace et le temps. Chaque élément qui permet de vivre et créer la vie. Le Conseil attend que je sois prête. Puis en Shadès bien sûr puisque je suis la seule à comprendre et parler le Français, la plus sage et ancienne du Conseil s'adresse à moi.

— Énokiera, tu avais notre confiance pour cette mission d'exploration. En tant que porte-parole du Conseil des Anciens tu seras punie pour la faute suivante : avoir ramené un étranger qui, avant de rentrer ici t'a frappée jusqu'à en perdre connaissance. Arkanir a juré de nous dire la vérité. Qu'as-tu à dire pour ta défense ?

Je suis choquée par ses propos. Jamais Evan ne m'a frappée c'est moi qui suis tombée. C'est ce que je décide d'expliquer.

_ Sauf votre respect, Ancienne, cette plaie que j'ai sur le ventre n'est pas due à une agression. J'ai juste voulu repérer l'endroit en montant dans un arbre. J'ai été trop vite et j'ai glissé, atterrissant sur une branche. Si j'avais vraiment été violentée mon ventre ne serait pas le seul abîmé.

_ Pourquoi mens-tu ? Pourquoi le protèges-tu ?

_ S'il m'avait frappée, pourquoi mentirais-je, au contraire, je voudrais sa mort. Mais s'il est innocent alors, oui je le protège puisque tout ça n'est qu'une manipulation d'Arkanir pour me garder pour lui et voir mourir Evan !

_ Qui est Evan ?

_ L'homme que j'ai ramené.

_ Il a donc un prénom.

_ Pourquoi vous ne réagissez pas à ce que j'ai dit ?

Elle m'ignora. Elle appela Watie et lui dit quelque chose à l'oreille. Mon amie sort de la salle. Je la regarde s'en aller. Peut-être qu'elle m'aurait crue et aidée mais non. Finalement elle revient mais accompagnée... d'Evan ! Je souris, il me renvoie mon sourire. Ses sourcils sont froncés. Il ne doit pas comprendre ce qui se passe vu qu'il ne comprend pas notre langue. Le pauvre. Les heures qu'il a passées ici ont dues être dures.

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