Chapitre Huit.

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8. Petites confessions.

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(Point de vue Jace.)

Allongé sur mon lit, je songe à ce mois d’octobre qui touche à sa fin, et tous les évènements qu’il a apportés. Même si je suis moins impacté que mes deux amies, ça ne m’empêche pas d’en être témoin et aussi — légèrement — victime. J’essaie de ne rien laisser paraitre, d’être le mec serein, mais plus on avance, plus le stress monte. Je sais que nous nous sommes promis de tout nous dire, mais je ne peux pas. Cela viendrait à enfreindre beaucoup trop de règles et mettrait en péril, un équilibre déjà imparfait. Il faut que le temps fasse son effet, et les choses s’ordonneront d’elles-mêmes. Enfin je l’espère. Je dois retenir que cette fois, je dois avoir confiance au futur, et que je me sers des erreurs passées, pour ne pas les laisser se reproduire. Même si je déteste cette situation d’entre-deux. Coraline l’a déjà fait remarquer, il y a quinze jours, et j’essaie de cacher mes problèmes sous la plaisanterie, mais j’ai peur qu’au bout d’un moment, ma couverture se grille. Opaline m’en voudra certainement à mort. Mais si le plan échoue, elle oubliera, comme toujours. L’amertume vient me cueillir et la nostalgie aussi. Plus le temps passe et plus le secret pèse lourd. Mais je n’ai pas d’autre choix.

Je regarde l’heure sur la montre autour de mon poignet et décide de me lever et me préparer. Je dois rejoindre les gars à la salle de sport. Gregor a annulé l’entrainement d’aujourd’hui, mais je sais qu’il risque d’en caler un dans la semaine. J’espère que ce ne sera pas mercredi soir, je risque de ne pas être au meilleur de ma forme ce soir-là. Et je vais devoir garder l’œil ouvert, je sens que les choses commencent seulement à bouger et que beaucoup de catastrophes sont encore à prévoir. Je suis rodé à présent. Je passe prendre une douche rapide, boire un café — même si Opaline m’enguelerait pour cela — et rejoins la salle d’un pas tranquille. J’en profite pour regarder la ville qui me semble bien calme pour un samedi après-midi. Il faut avouer que le temps ne donne pas vraiment envie de quitter la chaleur d’un appartement, mais quand même. L’hiver n’est pas encore arrivé, que je le redoute déjà. J’espère qu’il sera plus doux que l’année dernière, que nous éviterons les un mètre de neige, mais je sais que je rêve. Les terres de Freihet sont loin d’êtres clémentes, et Fordommer ce n’est pas mieux. Peut-être que j’irais voir ma grand-mère avant l’hiver. Il faudrait aussi que je l’appelle plus souvent. Elle n’est plus toute jeune, mais c’est une véritable force de la nature. Elle doit tenir cela de son caractère bien trempé. Je souris et entre dans la salle quasiment déserte. Lévy et Ryk ne sont pas encore arrivés et je crains qu’ils me fassent faux bond. Avec eux ce ne serait pas étonnant. Mais à peine ai-je déposé mon sac dans mon casier, que je les vois passer la porte. Comme quoi, la vie réserve ses surprises.

Ils traînent presque les pieds jusqu’à moi et me saluent d’un signe de tête.

— Allez les gars, elle est où votre motivation ? lancé-je vivement.

— Restée à l’appart’, répond Ryk.

— Idem, renchérit Lévy.

— Vous êtes sérieux ? demandé-je en haussant un sourcil.

— C’est de ta faute, reprend Ryk. On avait un week-end pénard et t’as tout gâché, râle-t-il.

— T’es sérieux ? On va se dépenser, discuter et ensuite je vous invite à boire un verre, ajouté-je.

— Alors là, ça change la donne, sourit Lévy.

Je secoue la tête et souris avant de me diriger vers les tapis de courses.

— Et votre semaine, elle était comment ? questionné-je en posant ma bouteille d’eau et allumant la machine.

— Relativement… ennuyeuse, déclare Ryk de mauvaise humeur.

— Qu’est-ce qu’il se passe ? Tu t’es levé du pied gauche ou quoi ? m’agacé-je.

— On va dire ça, annonce-t-il énigmatique.

— Bon et toi Lévy ?

— Rien de bien particulier… Je me sens en pleine forme, mais j’ai juste la flemme…

— Bravo ! me moqué-je. On y va ou vous voulez faire les larves toute la soirée ?

Nous démarrons notre échauffement tranquillement et peu à peu l’ambiance taquine s’installe entre nous. Ah ! Ces deux-là, si je ne les force pas à sortir, ils passeraient leurs existences bloquées chez eux. Après je n’ai rien contre ce mode de vie, mais malheureusement je suis trop impliqué pour les laisser devenir casanier. J’agis pour eux.

***

— Alors les gars, je vous sers quoi ce soir ? questionne Joy de sa voix fluette.

— Comme d’habitude, s’il te plaît, décidé-je doucement.

— C’est noté, sourit-elle en s’éloignant vers le bar.

— Tes amies ont encore l’intention de nous rejoindre ? demande Lévy moqueur.

— Honnêtement, je ne pense pas, Cora, ça se pourrait, mais Ope sûrement pas, affirmé-je.

— Elle a quoi d’ailleurs cette fille ? interroge Ryk.

— Elle n’est pas sociale, c’est tout, déclaré-je.

— Non, reprend Ryk. Nous on n’est pas social, elle, elle est bizarre, conclut-il.

— Hé ! Je ne te permets pas de parler d’elle comme ça, tu ne la connais même pas, grondé-je.

— Pas besoin de la connaitre, ça se voit tout de suite, argumente-t-il.

— Ryk, fais attention à ce que tu dis, le mis-je en garde.

— Quoi ? Lévy aussi s’en est rendu compte, reprend-il arrogant.

— Me mêlez pas à vos histoires, déclare le jeune homme.

— Il se passe quoi là Ryk ? T’as tes règles ? m’énervé-je.

— Quoi ? J’ai plus le droit de m’exprimer maintenant ? Surtout si cela touche à ta petite copine ? renchérit-il.

— Ryk, ferme là avant que mon poing n’atterrisse dans ta gueule, m’emporté-je.

— Du calme, les mecs, on est tranquillement dans un bar, vous voulez vraiment que ça se termine mal ? coupe Lévy.

— Ce n’est pas de ma faute si Jace est susceptible.

— Ce n’est pas de ma faute si Ryk est un vrai connard.

Joy arrive et dépose nos boissons sur la table. Elle sourit et fait un clin d’œil à Ryk, qui l’ignore superbement. Une fois qu’elle s’éloigne, j’avale une gorgée de bière.

— En fait Ryk n’est pas un connard, c’est juste qu’il n’a pas tiré un coup depuis longtemps, enchaîné-je.

— Normal, Opaline n’est pas restée assez pour cela, renchérit-il.

Je me lève et cogne mon poing sur la table, attirant des regards curieux vers nous.

— Ne t’avises même pas d’essayer, tu m’entends ? le menacé-je.

— Sinon quoi ? me défie-t-il.

— Sinon tu ne risques pas de revoir un jour la couleur de la lune, l’avertis-je.

Lévy passe une main sur son front d’agacement, tandis que Ryk et moi, nous ne nous lâchons pas des yeux. Je sais qu’il faut que j’évite de la pousser à bout, qu’il traverse une phase difficile, mais je n’ignore pas que son comportement dépasse les limites. Parfois il arrive qu’on se taquine, mais maintenant c’est différent. Je peux lire son regard, contrastant de celui que je connais par cœur. Un petit sourire en coin nait sur ses lèvres, ce qui augmente mon irritation.

— Donc on n’a pas le droit de toucher à la belle Opaline ? reprend-il en insistant bien sur son prénom.

— Ryk, commence Lévy, arrête.

— Je demande juste… fait-il innocemment.

— Non, interromps-je. Elle a bien assez à gérer sans qu’en plus tu t’en mêles… conclus-je.

Mes lèvres s’étirent de défi, mais il détourne le regard pour boire son whisky. Ma tension redescend légèrement, mais je demeure sur mes gardes. Si son instinct se réveille, je dois être prêt à répliquer. Je sais que je n’ai pas à m’interposer dans leurs vies respectives, mais je me dois de veiller un minimum. Et dans tous les cas, même si Ryk est beaucoup plus en muscle que moi, je sais que je reste le plus fort de nous deux. Le passé l’a déjà prouvé.

— Cora semble très sympathique, commence Lévy calmement.

— Elle l’est, elle est joyeuse, elle met du soleil dans nos journées, repris-je en buvant ma bière.

— On dirait le jour et la nuit, tes deux amies, rit Lévy.

— Tu n’imagines même pas à quel point, marmonné-je. C’est assez comique d’ailleurs, repris-je plus haut.

— Pourquoi ? s’intéresse Ryk.

— Parce qu’elles s’obligent presque mutuellement à se mettre sur la même longueur d’onde… Lorsque l’une n’est pas en forme, l’autre prend le relais… Et pour Ope, cela relève du défi, expliqué-je.

— Tu sais, quand tu nous as présentés à elles, j’ai été surpris par ta meilleure amie… commence Lévy. Je ne veux pas relancer le sujet Opaline, s’excuse-t-il, mais c’est vrai que lorsque tu nous en parles, on ne la voit pas comme ça, conclut-il.

— Si Ope apprend que je vous ai avoué des choses sur elle, elle va me tuer, murmuré-je. Elle… hésité-je en passant une main dans ma nuque, elle a énormément de mal à faire confiance, vous connaissez de réputation le village d’où je viens, alors imaginez dans quelle atmosphère elle a été élevée, expliqué-je. J’ai toujours été le seul à ne pas la juger, et…

— Et ? reprit Ryk en haussant un sourcil.

— Rien, dis-je en secouant la tête. Ope, c’est une fille qui demande du temps pour briser ses barrières, mais elle en vaut le coup, conclus-je avec un sourire.

Ryk semble méditer au-dessus de son verre, Lévy regarde la salle d’un œil perdu et je finis le mien.

— Avec un ami comme toi, elle ne peut qu’être super, avoue Ryk.

— Ce n’est pas ce que tu disais tout à l’heure, haussé-je un sourcil.

— Il n’y a que les cons qui ne changent pas d’avis… rit-il.

La vibration de mon téléphone attire nos regards et je suis surpris de voir le nom de l’expéditeur.

— Un meilleur plan ? taquine Lévy.

— C’est Ope, annoncé-je en le déverrouillant pour lire le message. En effet les gars, désolé de vous abandonner, mais ma meilleure amie a eu une envie de crêpe et m’invite à les déguster avec elle, ris-je.

— Je peux venir ? demande Lévy.

— Hors de question, je regarde la réponse avant de sourire.

— Quoi ? renchérit Ryk.

— Cora apporte une bouteille de cidre et d’aquavit, donc passez une bonne nuit, la mienne va être excellente, dis-je comme un gamin en me levant.

J’ai à peine le temps de sortir du bar, que mes deux amis sont déjà sur mes talons.

— Allez vieux, ne nous laisse pas en chien comme ça, commence Lévy. J’te signale que c’est toi qui nous as forcés à bouger aujourd’hui, tu ne peux pas nous lâcher maintenant ! râle-t-il.

— Oh que si ! Les crêpes d’Ope sont à se damner, je vendrai un rein pour en manger, alors oui je suis un vrai connard et je vous abandonne pour ça, ris-je.

— T’es un vrai enfoiré, se marre Ryk.

— C’est maintenant que tu le vois ? m’amusé-je.

— J’ai faim, se plaint Lévy. On a grignoté un pauvre sandwich après notre séance, s’il te plaît, demande-lui, supplie-t-il.

— T’es malade ? Je ne tiens pas à revivre la scène d’il y a quasi un mois, m’arrêté-je pour le regarder.

— Ouais t’as pas tort… Alors, demande-lui si tu ne peux pas en prendre pour nous ? tente-t-il.

— Tu n’abandonneras pas, pas vrai ? questionné-je en haussant un sourcil.

— Non, avoue-t-il avec un petit sourire.

— Venez, je vais voir ce que je peux faire…

J’accélère le pas et nous arrivons rapidement devant l’immeuble de chez Opaline. Celle-ci est au balcon, une cigarette à la main et regarde vers nous.

— Je m’en doutais ! T’as même pas pris le temps de répondre ! hurle-t-elle.

— J’aurais perdu de précieuses minutes à écrire ! me justifié-je. T’as l’intention de me laisser monter ou bien on va crier dans la rue jusqu’à ce que les voisins se plaignent ? me moqué-je.

— Ça dépend… Tu m’offres quoi en échange ? s’amuse-t-elle.

— Ma présence ? tenté-je.

— Et tes amis, ils vont rester là aussi ?

— Ils aimeraient savoir si tu pouvais, commencé-je.

— Hors de question ! m’interrompt-elle.

— Ope ! Laisse-moi finir ! dis-je en la voyant entrer. Ils ne veulent pas venir chez toi, repris-je en apercevant sa tête. Ils désirent juste une ou deux crêpes !

— J’aurais bien aimé un verre d’Aquavit, murmure Lévy.

— Moi aussi, renchérit Ryk.

— Oh ! dit Opaline surprise. D’accord, mais je ne les invite pas à entrer, c’est clair ?

— Limpide ! crie Ryk.

Même sans voir le visage de ma meilleure amie, je devine qu’elle lève les yeux au ciel. Nous nous avançons vers la porte qu’elle déverrouille et montons les trois étages tranquillement.

— Elle a peur qu’on la dévalise ? se moque Ryk au deuxième palier.

— Je vous l’ai dit, Ope est très… Secrète, tenté-je.

— Sauvage, j’aurais dit, reprend Ryk.

— La ferme, balancé-je en souriant.

Nous arrivons devant la porte qui s’ouvre à la volée et faisant face à Opaline. Celle-ci sourit timidement et hésite à venir me prendre dans ses bras, mais j’ai à peine le temps de lui faire un signe, qu’elle se blottit contre moi.

— Cora a apporté l’Aquavit, on a commencé sans toi, rit-elle.

— Tu as bu combien de verre ? questionné-je en sentant l’odeur de l’alcool émaner d’entre ses lèvres.

— Deux, glousse-t-elle.

— Cinq, corrige Cora dans son dos.

— Chuuut, ne fallait pas le dire rho, bougonne ma meilleure amie.

— Je m’en serais rendu compte, murmuré-je.

— Maieuh non, hésite-t-elle. Tu viens ? On va r’garder un film.

Si je ne la retiens pas contre moi, je suis persuadé qu’elle tombera sur les fesses, tellement l’alcool l’imbibe. Je souris à cette idée, mais resserre ma prise sur elle afin que cela ne se produise pas.

— Et nos crêpes, intervient Lévy dans mon dos.

— Ah ! C’est vrai, j’avais oublié que t’avais amené des pique-assiettes avec toi, commence Opaline.

— Ope, tu arrêtes de boire pour ce soir, décidé-je.

— T’es pas mon père, j’fais c’que j’veux, déclare-t-elle en s’éloignant. Je n’aurais pas dû t’inviter finalement.

Elle se tient à la porte pour entrer dans l’appartement avant de ressortir avec un plat plein de crêpes.

— Faudra me rendre l’assiette, dit-elle en leur tendant.

— T’en as cuisiné combien de kilos ? la regardé-je.

— J’ai peut-être abusé sur les quantités, rougit-elle.

J’entends Ryk rire doucement dans mon dos et Lévy lève les yeux au ciel.

— Finalement, elle est assez drôle, murmure Ryk.

— Ouais, ben profites-en bien, parce que demain ça va être très différent, râlé-je.

Je l’observe s’amuser avec Cora et souris. Je ne peux m’empêcher de la trouver radieuse à cet instant et me dire qu’elle devrait toujours être comme ça. Si insouciante et ouverte, riant à gorge déployée sans avoir peur des regards sur elle. Je la connais depuis de nombreuses années, mais c’est peut-être la première fois que je perçois chez elle ce côté si magnétique. Et le pire c’est qu’elle est incapable de le voir. Ce constat me mine un peu le moral. J’aimerais qu’elle se voie comme moi ou Cora la regardons, peut-être qu’elle comprendrait. Mais chaque chose en son temps, il faut déjà que je me prépare mentalement à demain et sa gueule de bois. Cela risque d’être comique d’ailleurs. Enfin, une fois la crise de nerfs passée. Je salue mes amis, qui rient de ma meilleure amie et me dépêche de l’aider à entrer avant qu’elle me tue pour l’avoir laissée se ridiculiser encore plus longtemps. Et je sais d’avance que notre soirée est loin d’être finie.

***

Hello!

Voici donc le chapitre Huit, et Opaline est plutôt drôle dans ce chapitre :')

Qu'avez vous comme remarque à faire? Est-ce toujours aussi bien? Qu'est-ce que vous aimeriez voir un peu plus?

J'attends vos réactions avec hâte!

Bises,Nana.

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