Chapitre VII. La Destinée manifeste deuxième partie

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Odette, la brioche alsacienne, servit le thé à madame Baxter, un Earl Grey infusé trop longtemps. Elle l’avait accompagnée de petits gâteaux à la cannelle. La patronne porta le breuvage à sa bouche. Elle grimaça, fit remarquer :

— C’est presque ça, le thé, vous apprendrez à le faire à force de persévérance, heureusement vos pâtisseries sont un régal, merci Bunny euh… Odette, excusez-moi ! Je suis préoccupée…

— Ne vous inquiétez pas madame, appelez-moi Bun ou Bunny si ça vous fait plaisir, mon petit ami m’a surnommée kouglof, je vous en ferai du kouglof si vous voulez. J’avais peur de faire trop cuire mes bredele, j’ai laissé trop infuser… Ce sont des gâteaux que l’on confectionne pour la Noël chez nous, mais moi j’en fais toute l’année, je suis un peu gourmande, les hommes aiment bien les filles gourmandes, elles savent cuisiner, c’est important pour un homme le ventre…

— Bien ! Odette ! Vos bredele sont délicieux, vous êtes pardonnée ! La cuisine c’est moi qui la fais habituellement ! Je ne vous ai pas embauchée pour la table, mais je verrai, vous avez l’air de vous y connaître ! En attendant, laissez le thé et les gâteaux sur le guéridon, je me servirai si j’en désire encore, merci ! Pour l’heure, allez espionner nos jeunes gens, soyez discrète, ne les dérangez pas. Vous viendrez m’en tenir informée ensuite… Je serai généreuse avec vous ! Allez maintenant !

Bunny s’éclipsa alors. Elle n’aimait pas cette femme, elle la trouvait grossière, mal élevée et manipulatrice, mais elle avait besoin de travailler pour vivre et cette place n’était pas mauvaise, elle avait subi des maîtres bien pires, en Alsace et à Fribourg de l’autre côté du Rhin. Elle ne fera pas ce métier toute son existence, bientôt elle se marierait elle aussi. Son fiancé, un grand blond qu’elle surnommait Bretzell, était la seule personne qui avait le droit de l’appeler « Brioche ».

Elle fit beaucoup trop de bruit en montant les escaliers, elle n’aurait pas pu les surprendre.

La porte de la chambre de Maureen n’était pas fermée à clé et ce qu’elle y vit remua son cœur de gentille fille de la campagne. Ils étaient assis sur le lit, sagement enlacés Maureen pleurait à chaudes larmes sur l’épaule de son compagnon.

Brioche toussota, le fit sursauter, entra sans y être invitée et chuchota pour pas que sa patronne entende ce qu’elle avait à dire

— Excusez-moi de m’introduire comme cela, mais je voulais vous parler, mais pas ici, pas maintenant, je termine mon service à huit heures, accompagnez-moi, j’habite une chambre minuscule pas très loin, je vous présenterai mon ami Hans ! Nous allons nous marier bientôtNous voulons aller à l’ouest nous aussi, nous avons préparé le voyage, Hans conduira la charrette. Soyez discrets je ne veux pas perdre ma place ! Oh et puis je m’en fous, la noce, c’est dimanche !Alors, c’est d’accord, huit heures, je claquerai la porte un peu plus fort qu’habituellement en sortant vous patienterez quelques minutes, je vous attendrai à l’angle de la rue.

Elle sortit de la pièce, son petit doigt boudiné sur ses lèvres de gourmande disait chut ! Elle descendit aussi sec faire son rapport à la veuve en espérant que cette dernière tienne sa promesse, de toute façon elle et Hans avaient fait et refait le compte, ils avaient assez économisé.

Samedi, elle lui rendra le tablier, elle confectionnera, pour le thé de 4 heures, un kougloff à tomber par terre et lui en donnera la recette. Elle n’aimait pas se fâcher avec les gens, on ne pouvait jamais deviner ce que la vie prévoyait comme mauvais coups, il valait mieux toujours protéger ses arrières. Elle ne savait pas la chance qu’elle avait cette petite cruche de Maureen. Elle aurait aimé profiter de la gentillesse d’une tante Aby elle aussi.

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