XVIII

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Mes yeux s’ouvrent difficilement, cherchant une stimulation incertaine qui pourrait les ouvrir enfin. Quelle déception de retrouver ma petite prison sale et humide et un parfum de vieux sang qui accable ma faim. Je suis affamée.

L’ennui me frappe encore aujourd’hui. Le vide, la faim et la soif dansent ensemble pour me torturer et le pire dans ce beau mélange : la solitude.

Je ne suis qu’une magnifique carcasse inerte dans son silence. Je ne suis qu’une avec l’obscurité qui m’enveloppe, elle me fait jouir seule, me permet de ne rien voir du désastre qui m’attend.

On ne m’a même pas attachée. Cela m’aurait procurée une distraction particulière : tenter de briser mes liens ou mes chaînes. Mon mari n’a vraiment aucun cœur pour me priver de ça.

Quel ennui mortel.

Je dérive dans la fadaise la plus profonde.

Quelle humiliation que cette folie qui me prend soit aussi peu amusante. Puis cet échec, ne pas réussir à le tuer une fois pour toute, je l’avais pourtant au creux de ma main, je pressais son cou.

Mais je sais qu’il me veut. Oh oui mon chéri, tu me désires tant. Il veut me posséder toute entière ! Me pénétrer encore et encore ! Reviens !

Mes hurlements de rage, dans les ténèbres, n’attigeront pas la douce lumière de la Lune, cette nuit.

Mon bourreau m’aurait-il abandonnée ?

Cela fait combien de temps que je ne l’ai pas vu tenter par tous les moyens, de me faire sien, de me soumettre. Je crie ton nom, t’implore de revenir pour que je ne termine pas seule, mourir avec tant de faiblesse et de rancœur.

« Reviens, mon horrible amour. Si je dois mourir, alors ce sera avec toi. »

***

Je ne sais plus ce que je fais ici. Ma peau se colle à mes os comme si elle devait les dévorer. Mon visage me tire, scellant ma faible bouche. Mon corps sec et misérable vit encore dans la plus lacérante douleur. Puis, je me nourris de ma propre chair pour vivifier mon enveloppe charnelle d’elle-même.

J’ai faim.

Doucement, j’incise de mes griffes meurtrières, le peu de chair qui couvre encore mes cuisses. Un liquide chaud vient caresser mes doigts, les invitant à se servir. Je me laisse envoûter par le précieux nectar que je porte à mes lèvres asséchées. Il se déverse dans ma gorge, m’arrachant un cri de plaisir suprême.

Puis j’empoche la viande que j’ai préalablement découpée, croque à pleines dents pour laisser le jus qui s’en extrait me noyer. J’arrache alors la bouchée première au reste de mon cadavre, mes dents pressent la chair morte avec vigueur, la vie regagne mon corps tout entier dans ce rituel.

Une fois mon repas terminé, je retrouve la froideur du sol pour sombrer dans un sommeil noir.

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