Départ

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Les jours passèrent, se succèdant avec une folle rapidité. Puis un jour tout changea... Nous étions début novembre, il faisait gris et le crachin se déposait sur le bonnet de laine enfoncé sur ma tête. Le froid était mordant et mes mains gelées peinaient à tenir la fourche. Cette journée ressemblait à n'importe quelle autre journée d'hiver sous l'occupation, pourtant rien ne serait plus jamais comme avant. Cela faisait déjà plus de quatre ans que la guerre avait commencé, quatre années difficiles avec son lot de joies et de peines.
A peine rentrée dans la cours de la ferme je sentais déjà la différence, malgré le froid l'air était pesant. Tout le monde s'agitait, une véritable fourmilière. Je n'eu pas le temps de déposer ma fourche qu'une main m'empoigna par le poignet. Ludwig m'attira derrière la ferme, à l'abri des regards. Il semblait devenu complètement fou, se passant inlassablement la main dans les cheveux, enfonçant ses doigts dans son cuir chevelu.
- Ludwig, qu'est-ce qui se passe...? S'il te plait parle moi.
Il se retourna et me regarda, ses yeux étaient remplis de douleur.
- L'Allemagne demande l'armistice...
Intérieurement mon coeur fit un bond de joie avant de se fendre.
- Ca veut dire que je pars Madeleine, les troupes se retirent de France.
J'avais compris bien avant qu'il ne le dise, mais ces mots dans sa bouche me firent l'effet d'un coup de poing. Ma gorge se sera et mes lèvres devinrent sèches. Je n'arrivais plus à le regarder, aussi je fixais un point, le plus loin possible vers l'horizon. Quant au grand amour de ma vie il se gardait les mains de douleur. Puis il s'approcha de moi en deux enjambées me me pressa fort contre sa poitrine.
- Je n'ai pas dis mon dernier mot Madeleine, crois moi.
Il déposa un chaste baiser sur mon front puis s'en alla, me laissant seule, là, derrière la ferme.
Je n'eu pas l'occasion de le revoir avant son départ, tout se passa si vite. En l'espace d'un instant la grande cours, jadis occupée par les tentes, était vide. Comme si la guerre n'avait jamais eu lieu, maman pellait les pommes de terres attablée dans la cuisine, Georges était je ne sais où. Seul papa manquait à l'appel, et rien ni personne ne pourrait changer cela. Je ne suis certainement pas le genre de fille à pleurer pour un homme, mais là c'était beaucoup plus que ce que mon petit coeur pouvait en supporter. Un sanglot m'échappa et je portais une main à ma bouche pour en étouffer le son. Tandis que mes yeux se fermaient, les larmes dévalaient mes joues. J'aurais voulue hurler, crier tout ce que mes poumons pouvais. Le feu qui me consumait de l'intérieur me faisait si mal!
- Mady...
Je me jetais dans les bras de mon frère, comme si ma vie même en dépendait. Je m'agrippais à ses épaules comme à une bouée de sauvetage et lui m'enlacait de son unique bras.
- Il est temps de rentrer.
- Non, je n'y arriverais pas Georges, c'est au dessus de mes forces.
Il redressa mon visage, la paume de sa main sur ma joue essuyant les sillons glacés laissé par mes larmes.
- Tu es bien plus forte que tu ne le penses Mady. Je ne te demande pas de l'oublier, juste d'être patiente. Les choses s'arrangeront tu verras, cette situation ne durera pas toujours.
Je savais qu'il avait raison, mais la douleur de l'instant présent, l'abandon de l'homme que j'aimais tout ça semblait me ronger peu à peu.

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