Inquiète

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Le soleil, perçant sous mes paupières closes, me réveille. Je m'étire de tout mon long et entre-ouvre les yeux. Je sursaute.

- Bonjour Madeleine.

- Bonjour Ludwig...

Je me retourne pour cacher mon visage encore bouffi de sommeil et pousse un grognement.

- Pourquoi tu te cache?

Je gémis en moi-même.

- Tu sais que c'est quand-même un peu flippant ?

- Quoi? Qu'est-ce que tu trouves flippant ?

Je me retourne et me redresse sur les avants-bras.

- Tu me regarde en train de dormir! Ça fait peur quand-même !

Il éclate de rire et quelque chose brûle en moi. Il reprends doucement son sérieux.

-Tu es tellement belle quand tu dors...

Je plonge ma tête dans la paille.

-Non, ne recommence pas à te cacher.

Il enfonce un doigt dans mes côtes et je fais un bond ce qui semble beaucoup l'amuser puisqu'il recommence aussitôt. Bizarrement je n'oses pas vraiment le toucher, comme si cela rendait notre histoire encore plus réel. Pourtant je me prends vite au jeu et cela se termine en hurlements incontrôlables.

Lorsque nous quittons la grange quelques soldats Allemands nous regarde d'une drôle de façon. Je me rends compte soudainement de quoi cela a l'air. Nous sortons de la grange ensemble au petit matin, nos cheveux remplis de brins de mailles. Je rougis jusqu'au oreilles.

Chacun vaque à ses occupations, Ludwig à ses devoirs, moi à mes volailles. Je n'ai plus jamais dessiné de propagande anti-Allemands depuis le dernier incident et étrangement cela ne me manque pas. Sûrement parce que je sais que cela le vexerait. Notre situation est des plus étranges, je lui ai dis que je l'aime et pourtant quelque chose me retiens de le lui dire à nouveau, une sorte de pudeur que je ne me connaissais pas. Pourtant c'est bien cela que je ressens, de l'amour. Pas un simple béguin, pas un coup de foudre, non mais un amour profond et réfléchis, une sorte d'immense tendresse. On ne peut pas dire que j'ai déjà ressentis un vide affectif, pourtant je me demande comment j'ai pu vivre avant lui, comment j'ai pu vivre avant l'amour. Ça me paraît inconcevable de vivre sans lui et c'est ce qui me fais le plus peur. Parce que je ne vois vraiment pas comment cette histoire va se terminer si ce n'est dans les larmes.

Alors que je m'occupe de changer la litière des lapins je reçois une visite à laquelle je m'attendais un peu.

- Madeleine?

- Ne t'inquiètes pas maman, je sais très bien ce que je fais.

Elle pousse un long gémissement. Je me retourne pour lui faire face. Son visage est inquiet, et je remarque les rides qui strient son front.

- Justement Madeleine, j'ai peur que tu ne sache pas vraiment dans quoi tu as mis les pieds. Qu'espères-tu au juste tirer de cette relation?

Pourquoi faut-il qu'elle appuie là où ça fait mal...?

- Je préfère vivre l'amour de ma vie pendant le temps qu'il nous reste plutôt que de ne jamais le connaître.

- Alors tu penses l'aimer...

Sa remarque me blesse par les mots choisis. Elle secoue la tête, navrée.

- Qu'est-ce que tu ressens exactement.

Aborder ce sujet avec ma mère ne m'aurais pas dérangé autrefois, mais aujourd'hui les choses sont différentes, tout est tellement compliqué et délicat. Oui je suis amoureuse d'un Allemand, est-ce un si grand crime ?

- Je vois... écoute je comprends que tu n'ai pas envie d'en parler. Mais sais tu au moins pourquoi tu l'aimes ?

- Oui, je sais pour quelles raisons et elles sont nombreuses.

Elle pousse un profond soupir.

- Bon, j'espère simplement que tu ne cours pas à toutes jambes vers le désastre. Je t'en supplie sois prudente, ne fais rien que tu pourrais regretter par la suite d'accord ?

Pour toute réponse je m'efforce de la prendre dans mes bras.

Les jours se ressemblent tous plus ou moins, nous essayons de nous réserver du temps avec Ludwig, pour apprendre à mieux nous connaître. Pour cela on a même inventé un petit jeu. On choisi un thème et l'autre fois deviner entre plusieurs choix celui que l'on préfère. Par exemple je vais lui demander comment je préfère me divertir. En lisant, en dessinant, ou en cuisinant. Sans même s'en rendre compte nous en apprenons beaucoup l'un sur l'autre. Je chérie ces petits moments d'intimités que nous avons l'un avec l'autre.

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