Chapitre 9

16 minutes de lecture

Voilà trois jours que je n'ai aucune nouvelle. Le retour de la fête s'est fait dans une ambiance plutôt sereine. Enfin, en ce qui nous concerne, moi et Annais. Stéphane, c'était une autre histoire. Dès son réveil, il a voulu plier les tentes et rentrer, sans même rester boire un café. J'étais de toute façon assez crevé pour les suivre et passer un dimanche dans mon canapé à enchaîner des films.

À peine si j'ai jeté un coup d'œil vers la fenêtre de la voisine. Hier, la reprise du boulot s'est faite sans rien à signaler. Je n'ai pas réussi à savoir si Mélanie a renouvelé sa pause aux toilettes. Je suis apparemment moins chanceux que la semaine dernière... ou plus soucieux.

Hier et aujourd'hui, je n'ai eu qu'une chose en tête: Annais. Ou plutôt Stéphane. A-t-il parlé à sa femme de ce que nous avons échangé samedi soir? Est-ce qu'il s'en souvient, déjà? J'espère pour lui. Vraiment. Peut-être même que le simple fait de le lui dire débloquera quelque chose et qu'il réussira à prendre son pied? Qui sait? C'est peut-être pour ça qu'Annais ne m'appelle pas.

De mon côté, j'aurais pu aller la voir chez elle pendant le travail. Mais je n'ai pas osé. Si Stéphane lui a parlé, alors ils doivent avoir besoin de temps pour réfléchir. Et après tout! Autant Annais se sert de moi pour assouvir des besoins physiques trop pressants, autant moi je ne l'avais pas attendue pour le faire!

C'est donc avec naturel et avec l'intention de me reprendre et arrêter d'être obnubilé par Annais que je fais demi-tour, quelques secondes après avoir croisé ma jeune voisine. Habillée en écolière, sa poitrine prête à jaillir du chemisier choisi exprès une taille en-dessous, je n'ai pas pu m'empêcher de me rappeler qu'elle aimait apparemment se faire filmer. Et cette tenue sent à plein nez la mise en scène. Peut-être va-t-elle rejoindre Amandine, en plus.

J'avoue être impressionné par cette jeune femme. Elle est sapée comme une actrice de porno qui se rend sur un tournage - voire qui y serait déjà! - et elle l'assume la tête haute. Il n'y a pas un homme qui ne s'attarde sur sa poitrine. Beaucoup se permettent même des regards très appuyés, ou quelques remarques en passant. Même quelques femmes ne peuvent s'empêcher de la reluquer, mais la plupart la jugent clairement de façon négative. Une salope qui participe à faire de la femme un objet sexuel. Elles ne voient pas - et beaucoup des hommes non plus - ce que moi je vois: une jeune femme assez sûre d'elle, assez en harmonie avec sa féminité, pour pouvoir jouer de son image sans en être rabaissée à l'état d'objet. C'est elle qui choisit, elle qui joue. D'ailleurs, personne ne s'y trompe: elle n'a pas à subir plus que quelques remarques peut-être, mais rien qu'elle ne puisse supporter. Dans cette tenue, avec le dos bien droit, le regard hautain, c'est elle qui approche.

Elle est tellement dans son rôle qu'à plusieurs reprises, je regarde alentour pour voir si sa copine n'est pas en train de filmer de loin. Mais elle n'est pas là. Elle l'attend dans un coin du parc où j'avais retrouvé Annais quelques jours plus tôt. Je garde bien mes distances, pour ne pas me faire repérer. Ce n'est pas chose facile car en ce mardi soir, il n'y a pas grand-monde dans le coin. Je remarque que son amie filme déjà son arrivée et au bout de quelques secondes, je me rends compte qu'on pourra m'apercevoir au loin, derrière. Pourvu que je ne me retrouve pas sur Youporn! Faisant comme si de rien n'était, je prends le chemin sur la gauche, alors qu'elles sont sur celui de droite.

Je ralentis drastiquement le pas, les lunettes de soleil me permettent de jeter des coups d'œil vers elles de façon plus discrète. Près d'un arbre, ma voisine prend quelques poses suggestives, soulevant même rapidement sa jupe devant la caméra. Je crois que je bande et je me félicite d'être allé bosser en jean! Je stoppe net ma progression alors que je les vois s'enfouir dans les buissons. Ceux-là donnent sur une partie boisée du parc. "La forêt en ville" se vantait la mairie il y a quelques années, avant d'accepter d'en raser une partie sous la pression de promoteurs immobiliers aux arguments apparemment bien plus convaincants que la santé des poumons des électeurs.

J'hésite un instant. Les suivre? Tourner en rond en attendant qu'elles ressortent de là? Rentrer? C'est mon instinct qui répond pour moi. Mon imagination m'envoie déjà des images pleines de langues et de mains, et de doigts maculés de cyprine. Je rejoins donc l'endroit où elles ont disparu, m'imaginant pouvoir me branler en les matant, planqué derrière les buissons. À ma grande surprise, après quelques pas parmi les broussailles sans rien entendre ni voir de mes deux jeunes débauchées, je tombe sur un petit chemin.

Visiblement, il n'a pas été tracé par une quelconque machine. C'est à force de piétinements que ce passage existe. Je regarde à droite, puis à gauche. Je décide finalement de tenter ma chance à droite. Après une vingtaine de mètres et un virage sur la gauche, je bloque ma progression en voyant un couple d'hommes nus allongés sur des serviettes aux pieds d'un arbre. C'est quoi ce délire? Si près d'un endroit public? Il y a même des jeux pour enfants, dans ce parc! J'essaye de faire comme si de rien n'était et passe à côté en les saluant. Ils sentent forcément ma gêne et me sourient en coin avant de se mettre à s'embrasser de façon à ce que je puisse bien les voir.

Mais plus que gêné, je suis excité. Je n'avais jamais soupçonné l'existence d'un tel lieu par ici. Je m'enfonce plus loin dans le bois, parcours je ne sais combien de mètres, exactement. Cinquante, cent? Peut-être plus. Je me retrouve face à un embranchement. J'hésite un instant en tendant l'oreille, puis entends des rires apparemment féminins qui viennent de ma droite. Elles ne semblent pas être bien loin, alors j'avance doucement, à l'affût. Mais dès le premier virage sur la gauche, je stoppe net et reste en retrait, presque caché.

En plein milieu du chemin, je retrouve ma voisine et son amie. Cette dernière tient toujours son portable comme une caméra. L'autre me tourne le dos, à genoux devant deux hommes qui ont baissé pantalon et caleçon. Elle en suce un goulûment, cognant son visage contre le bas-ventre poilu de l'homme gémissant de plaisir. L'autre, elle le branle vigoureusement. Lorsqu'elle remonte sa bouche le long de la verge tendue qu'elle a avalée en entier pour reprendre son souffle, elle lève la tête vers eux et leur dit en ricanant:

-- Je vais vous vider les couilles. Je veux votre foutre sur ma gueule de petite salope.

Son amie se met à rire, lançant aux deux hommes:

-- Vous me l'avez excitée, messieurs... Va falloir assumer, maintenant!

La bouche de ma blonde de voisine change de sexe et se met à le pomper comme une furie alors que l'autre la filme avec une envie qui dégouline de ses yeux. À tel point que je m'attends à chaque instant la voir poser son téléphone pour se mettre à se masturber devant la scène. Chose que je pourrais bien faire, en sentant la raideur dans mon pantalon.

Pourtant, je ne fais pas un geste. Je reste bouche bée devant ce spectacle que j'ai vu cent fois, mais jamais dans un tel endroit. C'est surtout que cette fois, je ne sais pas si je dois les laisser ou aller participer. Bien que je n’aie pas vraiment envie d'être filmé, l'idée de me faire sucer par cette demoiselle est plus que tentante. Mais c'est ma voisine, et une amie d'Amandine. Je devrais peut-être faire demi-tour. Je n'aurais peut-être même pas dû la suivre.

Lorsque le gars qu'elle suce commence à se crisper, je reste là à regarder, comme subjugué. Elle place son visage souriant devant la queue dressée qu'elle branle des deux mains, délaissant l'autre homme un instant, qui se caresse doucement pour garder sa tension.

-- Vas-y, crache tout, lui lance-t-elle deux secondes avant qu'il ne pose sa main sur les siennes et dirige bien son sexe pour exaucer son vœu.

D'où je suis, je peux voir le jet de foutre voler dans les airs et s'écraser sur ses cheveux et son visage. Elle semble heureuse, aux anges. Tout comme son amie, qui n'en rate pas une miette. Le deuxième homme s'approche à son tour du visage de ma voisine en s'astiquant frénétiquement et son sperme coule mollement de son gland aux joues enflammées de la blonde. Il frappe quelques fois sa verge sur sa langue tendue pour lui offrir les dernières gouttes en râlant de plaisir.

Dès qu'il a terminé, la voisine se relève et se dirige vers la camerawoman pour l'embrasser à pleine bouche. Elle ne s'arrête pas de filmer, immortalisant leur baiser spermatique. Qui dure. Les deux hommes m'ont enfin repéré mais ne disent rien, préférant regarder les deux jeunes femmes échanger de longues lapées de foutre en se tortillant l'une contre l'autre.

Moment magique malheureusement brisé par la sonnerie de mon portable. Lorsqu'elles se tournent vers moi, je me rends compte que mon érection déforme largement mon pantalon, que j'ai les joues en feu, de grosses gouttes de sueur qui perlent sur ma barbe de huit jours et le souffle presque haletant. Bon Dieu ce qu'elles m'ont excité!

Je sors mon téléphone de ma poche avec leurs sourires en coin posés sur moi. La voisine m'a reconnu, j'en suis persuadé. Sa copine lui lèche la joue pour récolter du sperme et elle ne me quitte pas des yeux. Je me mords la lèvre inférieure et finis par réussir à baisser les yeux sur le message, de la part de Stéphane: "T'es chez toi? On aimerait passer discuter d'un truc".

Alors, il lui a tout dit. Par réflexe, je repose les yeux sur les deux demoiselles. Les hommes ont disparu et elles me font signe de les rejoindre avec un air assez proche de deux succubes prêtes à damner mon âme. Mais je ne peux pas faire attendre Stéphane. Une idée me traverse l'esprit et me calme d'un coup. Si Annais lui avait tout avoué, pour nous deux? Je sens une goutte de sueur couler le long de ma tempe droite et je lui réponds que je serai là dans vingt minutes. Mais quand je m'apprête à ranger mon portable dans ma poche, les deux harpies son arrivées près de moi. La brune ne filme plus. Elle me tâte l'entre-jambe et me sourit, alors que ma voisine pose sa main sur mon torse.

-- Alors voisin? On aime bien les petites jeunes? me sort-elle comme si elle avait 16 ans.

Il me faut prendre une grande inspiration. La main de son amie serre ma verge gorgée de sang. Je sais qu'elle est bien plus que majeure, malgré son accoutrement qui pourrait en effet laisser penser qu'elle est une jeune lycéenne.

-- Une autre fois avec plaisir, dis-je avec autant de difficulté que de regrets. Mais là, je dois vraiment y aller.

Rassemblant toute ma volonté, je me retourne et commence à filer dans le sens inverse.

-- Je me lève tôt tous les jeudis matin! me lance-t-elle.

Je m'arrête net, comprenant que l'ombre à la fenêtre était elle. Je reste une seconde dos à elles, puis ricane en me retournant. Sa copine a déjà plongé sa main sous sa jupe, son visage dans le cou en train de la lécher. La blonde, elle, me fixe en souriant, tenant la brune par la taille. Elle pense me révéler quelque chose. Elle ne sait pas que je l’avais surprise.

-- La prochaine fois, traverse la rue, alors... Un coup de main est toujours le bienvenu, lui dis-je en imitant une branlette.

Elles éclatent toutes les deux de rire, et je fais de même en reprenant la route. L'excitation de cet échange ne me quitte qu'une fois arrivé chez moi. Il se pourrait bien que d'ici peu, la voisine vienne sonner chez moi, que je la baise, peut-être même avec sa copine qui semble aimer regarder. Et peut-être qu'Amandine suivra. Rien que cette idée me rend dingue d'envie. Je suis obligé, avant de sortir du bois, de caler mon érection sous la ceinture de mon pantalon pour la camoufler. Je marche avec des images de leurs corps mêlés au mien. Dans tous les sens, pendant des heures.

Mais lorsque je referme la porte de mon appartement, mes craintes reviennent et ont l'effet d'une douche froide. Dans moins de cinq minutes, Stéphane sera là. Tout seul? Et s'il venait me mettre sur la gueule pour avoir baisé sa femme? Fébrilement, je reprends mon portable et vérifie son texto. Non, il a dit "on". Ils viennent donc tous les deux.

Je suis perdu. Pourquoi ils viendraient me parler ensemble des histoires de cul dans leur couple? Non, ça n'a aucun sens. Pour évacuer toutes ces questions, je me mets à épousseter le canapé, sortir des verres pour un apéro, vérifier qu'il y a des bières au frais. Puis épousseter le canapé.

Au moment où la sonnette retentit, je me rends compte que je suis comme le jour où j'étais convoqué chez la CPE après avoir été chopé à voler une bouteille de whisky un mercredi après-midi au lycée, alors que j'étais interne. Je fais toutefois de mon mieux pour ne rien montrer quand j'ouvre la porte sur un Stéphane apparemment aussi stressé que moi, et une Annais tendue... mais qui me sourit rapidement en coin au moment de me faire la bise.

Je les fais s'asseoir sur le canapé et leur sert une bière chacun avant de leur demander ce qui les amène. Je remarque qu'ils se tiennent la main, et que Stéphane la serre fort.

-- Tu sais que tu es notre meilleur pote, Julien, commence-t-il avec le regard fuyant.

-- Et réciproquement, lui réponds-je hésitant, sachant qu'il va y avoir un "mais".

-- Je n'aurais jamais avoué à quelqu'un d'autre ce que je t'ai dit l'autre soir. Et sans toi, j'aurais encore laissé la situation s'envenimer.

Mon regard va de l'un à l'autre. Stéphane est très mal à l'aise, mais le fait de commencer à parler le détend. Annais lui tient la main et le fixe avec un sourire aux lèvres, détendue à son tour de le voir parler. Il semblerait qu'ils aient travaillé ensemble ce moment et qu'elle soit contente que tout se passe jusqu'à présent comme prévu. Pour ma part, j'ai la bouche sèche. J'attrape ma bière et en boit une bonne gorgée alors qu'il continue:

-- Grâce à toi, mon pote, j'ai eu le courage d'en parler avec Annais. Et c'est toi qui avais raison. Elle m'a troué le cul!

Ils ricanent tous les deux, Annais se met à rougir en me lançant un regard de braise que je n'arrive pourtant pas à soutenir.

-- Comme tu l'as dit, c'est quelque chose de moi qu'elle avait accepté. Et son amour pour moi n'en était pas moins grand. Je crois même pouvoir dire qu'on s'aime encore plus après ça. Parce qu'il n'y a plus de non-dit entre nous.

Annais acquiesce, un sourire légèrement crispé aux lèvres. Mais quand ses yeux se posent sur Stéphane, je vois la fierté au fond d'elle. Et je dois bien avouer une chose: à partir de là, je sais que tout va bien se passer. Que je n'ai qu'à écouter Stéphane et que tout le monde finira par être heureux.

-- Et quand il n'y a plus de non-dit, on peut vraiment tout se dire. Alors on s'est tout dit. Tout, rajoute-t-il en me fixant avec un léger air accusateur.

Il marque une pause, ses yeux clairs qui percent les miens. Je déglutis difficilement mais en arrière-plan, je vois le sourire encourageant d'Annais. Alors je me lance:

-- J'ai jamais voulu te faire de mal, Stéphane, je... À aucun moment, j'ai voulu autre chose que...

-- Je voulais te l'entendre dire, me coupe-t-il. Comme ça, il n'y a plus de non-dit entre nous non plus. Et c'est important qu'il n'y ait plus jamais de non-dit entre nous.

-- Tu... Tu ne m’en veux pas? lui demande-je en fronçant les sourcils.

Là, il prend comme un coup dans le bide. Mais il me sourit finalement en me répondant:

-- Je t'en ai voulu, mec... J'ai même voulu venir te défoncer. Mais c'est comme je t'ai dit, on s'est vraiment tout dit. Et il s'avère que sur ce point-là, je n'ai jamais comblé celle que j'aime de tout mon cœur. Et si elle a pu, par amour pour moi, supporter cette frustration sans se plaindre, sans rien me reprocher, je dois bien lui rendre la pareille, non?

-- Je... suppose, oui, lui dis-je en plissant les yeux.

-- C'est pour ça que vous pouvez continuer.

Je reste à le regarder. Mon cerveau en plein bug, essayant de comprendre où est le piège. Il attend que je réponde par l'affirmative pour me sauter au cou? Mes yeux se braquent sur Annais qui me sourit en se mordillant la lèvre inférieure, puis revient sur Stéphane qui me semble si sérieux. Trop sérieux pour être vrai? Je ne sais pas, je ne sais plus. J'ai l'impression de me mettre à suer à grosses gouttes. Il ne peut y avoir qu'un piège. Il ne peut pas avoir passé l'éponge sur le fait que j'ai baisé sa femme dans son dos. J'ouvre la bouche pour essayer de répondre quelque chose mais il me coupe la parole. Et j'avoue que ça me rassure:

-- Malgré tout ce que je ne comprends pas dans ta façon de vivre, Julien, il y a une chose qui fait que tu es resté mon meilleur pote. C'est qu'il n'y a jamais une seule nana à qui tu as manqué de respect, même devant moi, quand tu me racontais tes aventures. Tu as toujours été honnête. Et c'est pour ça que si ma femme doit avoir un amant, je... on veut que ce soit toi. Tu acceptes?

Ma mâchoire inférieure m'en tombe. Mes yeux s'ouvrent grands sur Stéphane qui me sourit de toutes ses dents. Annais vient coller son visage au sien et ils me regardent tous les deux. J'ai l'impression d'avoir deux Chats Pottés devant moi, qui me font le coup des yeux mouillés.

-- Vous êtes sérieux? leur demande-je avant de répondre. Je veux dire... Tu veux vraiment que je...

-- Comble ma femme sexuellement, finit Stéphane. J'en suis incapable et tu es sûrement celui qui fera ça le mieux, au-delà du fait que je sais que ça ne changera rien entre nous. Tu l'as déjà prouvé. Mais je veux qu'on se mette d'accord sur une chose avant: aucun non-dit. Si je commençais à être jaloux, je vous le dirais, et si les sentiments commençaient à se mêler à cette situation, vous me le diriez aussi. Je pourrai accepter de partager son corps, mais pas son cœur.

Je ne suis pas sûr de moi, mais j'ai l'impression que les larmes commencent à couler de mes yeux. Putain, Stéphane, Annais. Comment j'ai pu mériter de tels amis? L'amour dont ils font preuve l'un pour l'autre est juste...

Je comprends, tout d'un coup. Dans cette démonstration d'humanité, d'amour partagé et d'acceptation l'un de l'autre, je comprends pourquoi je suis toujours célibataire. Je les ai toujours pris pour exemple et me suis toujours attendu à vivre la même chose qu'eux. Mais c'est impossible. Il n'y a qu'eux pour pouvoir vivre ça d'une manière aussi intense. Et aujourd'hui, ils me demandent de faire partie intégrante de cette équation harmonique.

-- Je... J'accepte, lui dis-je.

Aussitôt, il se jette sur moi. Pendant une demi-seconde, j'ai le réflexe de lever les bras pour me défendre. Il me prend dans ses bras et me serre fort. Je lui rends son étreinte et regarde Annais sur le canapé qui me couvre d'un regard enflammé. Elle est excitée. Je le sens dans ma chair. Je suis presque sûr qu'elle mouille et cette pensée est à deux doigts de me faire bander alors que je serre mon meilleur pote contre moi.

-- Je savais que je pouvais compter sur toi, me lance-t-il en retournant à sa place, les yeux embrumés.

-- Stéphane, je... Pourquoi tu me demandes ça?

J'avoue être entre deux. D'un côté, je suis heureux parce que baiser avec Annais, c'est quelque chose, et je sais que nous pourrons pousser la luxure assez loin, ensemble. Plus loin que tout ce que j'ai déjà fait. D'un autre côté, j'ai peur. Peur de me perdre dans cette histoire et de perdre leur amitié. Sa réponse, pourtant, est sans appel:

-- Parce que quelque part, je suis étonné que vous ayez attendu si longtemps. Annais a des besoins que je ne peux satisfaire, et vous vous êtes plu depuis le premier jour. Je me suis mis des œillères et votre amour pour moi vous a empêché pendant de longues années de passer à l'acte. T'es mon meilleur pote, Julien. Je sais que tout se passera bien, avec toi.

-- Je ne sais pas quoi te dire, Stéphane.

-- Il n'y a rien à dire, me répond-il en se levant, après avoir descendu sa bière d'un trait.

Annais se lève avec lui et ils s'embrassent, de la même manière que je les ai vus faire mille fois. Avec tendresse et amour. Il lui caresse la joue en souriant puis se tourne vers moi:

-- On n'a pris qu'une voiture, tu pourras la ramener?

Assis sur mon fauteuil, je n'arrive qu'à hocher la tête.

-- Je t'aime, mon amour, lui dit Annais.

-- Je t'aime tellement, moi aussi, lui répond-il en la serrant contre lui.

Lorsqu'il referme la porte derrière lui, j'ai l'impression de me réveiller d'un rêve. J'attrape ma bière et la vide alors qu'Annais me regarde, son sourire en coin sur les lèvres. Je m'affale dans le fauteuil et lâche un soupir d'aise:

-- Je ne suis pas en train de rêver, là?

-- Non, Julien, me dit-elle en se trémoussant jusqu'à moi. Tu es mon amant officiel et je veux fêter ça. Rattraper toutes ces années de frustration. Être la débauchée que j'ai toujours rêvé d'être. Avec toi. Et surtout, sans aucun mensonge.

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