Chapitre 4

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Mickaël allait le samedi en ville avec ses amis et en arrivant près de la grenette, il avait cru… Non, il avait vu, cette Fille. Il s’était figé mais en se retournant elle n’était plus là. Il se frotta les yeux, voilà qu’il rêvait éveiller maintenant, il entendit Samira qui l’appelait :

- Mika ! Qu’est-ce tu fous ?

- J’arrive…

Mickaël rejoignit ses amis, Samiael fronça les sourcils en le voyant,

- Eh ! Ca va ? s’inquiéta-t-il.

- Ouais, t’inquiète, lui répondit le jeune homme en se forçant à sourire.

- Bah je ne sais pas tu tire une tête zarb… continua-t-il, on dirait que t’a vu un fantôme ! lâcha-t-il avec un rire.

- Je suis juste fatigué. J’ai mal dormi… commença-t-il

- Encore un cauchemar ? lui demanda Samira en lui coupant la parole.

Il acquiesça et Samira lui fit un sourire compatissent.

- Bon on y va ? Sinon on aura jamais assez du week-end pour faire tout ce que les profs nous ont demandé, dit finalement Samiael.

Ils passèrent la journée dans les rues de Sallanches à acheter différents livres, tant pour leur cours que pour eux-mêmes et faire un peu de lèche vitrine. Il faut dire que Sallanches n’était pas une très grande ville outre, un Cache-cache et des magasins de vêtements indépendants pour adultes ou franchement vieillots, il n’y avait que peu de chose à faire surtout pour les garçons. Ils avaient réussi à convaincre Samira d’aller boire un coup au bowling à côté du cinéma avant de rentrer chez eux, et en avaient du coup profité pour faire une partie.

En fin d’après-midi en rentrant chez lui, Mickaël trouva sa mère allongée sur le canapé. Inquiet, il s’approcha d’elle et vit qu’elle dormait. Rassuré, il la couvrit de peur qu’elle prenne froid et il se tourna pour aller dans sa chambre, quand il l’entendit dire d’une voix endormie,

- Mickaël ? C’est toi ?

- Oui maman, dors. Je m’occupe de tout ce soir, répondit-il doucement.

Il l’entendit se rallonger et son souffle redevenir régulier. Se dirigeant vers sa chambre, il vit sa petite sœur sortir de la sienne et courir vers lui en le voyant. Mickaël l’attrapa alors qu’elle lui sautait dessus et l’embrassa affectueusement.

- Alors p’tit ange, c’était bien chez ta copine ? demandai-t-il d’un ton paternel.

- Oui ! On a fait plein de choses et on a mangé du gâteau au chocolat, répondit-elle de sa petite voix cristalline. Mickaël sourit, amusé en la posant au sol, il en a fallait peu pour ravir sa sœur, quelques jeux et des sucreries et le tour était jouer.

- Fait pas trop de bruit maman dort dans le salon dac ?

Elle hocha la tête et retourna dans sa chambre. Il entra alors dans la sienne et soupira. Faut vraiment que je fasse le ménage, ça devient urgent là… pensa-t-il en observant le capharnaüm qui y régnait. Il posa son sac sur le bureau ou du moins au-dessus des choses qui étaient entassés là. Il ramassa toutes les affaires qui trainaient et rangea sa chambre pendant au moins une bonne heure. Il se recula jusqu’à la porte en soufflant et sourit. Bah voilà, c’est beaucoup mieux comme ça. Il regarda son réveil : 18h30. Je vais aller faire à manger moi…serait peut-être temps… se dit-il tout en sortant de sa chambre. Il alla dans la cuisine en prenant garde à ne pas faire de bruit et prépara le repas. Sa mère se réveilla quelques minutes plus tard et vint l’aider. Ils dînèrent en famille, se racontant leur journée, surtout Eléana qui du haut de ses dix ans étaient déjà une véritable pipelette. Une fois le dîner terminé, ils regardèrent un film, ce soir-là il passait LOL, film qu’adorait leur mère. Une fois le film terminé chacun alla se préparer pour dormir.

Une fois seul dans sa chambre, Mickaël fixa le plafond appréhendant le moment où il s’endormirait… Finalement aux alentours de minuit après avoir longuement lutté pour ne pas s’endormir, il finit par sombrer dans le sommeil.

Il fut réveillé par sa petite sœur qui frappait à la porte. Il soupira mais qu’est-ce que se passe encore… se demanda-t-il en se levant de son lit, se frottant les yeux, il ouvrit la porte à sa sœur.

- Mickaël, vient vite ! dit-elle comme paniquée.

- Qu’est-ce qui se passe ? dit-il d’une voix encore ensommeillé. Elle dit seulement un mot, mais ce simple mot suffi à tout lui faire comprendre et le réveiller comme si on lui avait versé un seau d’eau glacé sur la tête.

- Papa… commença-t-elle.

- Il est où ? dit-il d’une voix froide.

- Dans le salon…Il…, Mickaël la coupa alors, et posa ses mains sur les épaules de sa petite sœur.

- Chut, et maman ? ajouta-t-il

- Elle dort encore je crois…, il l’arrêta à nouveau.

- D’accord, surtout ne la réveille pas, va te recoucher.

Elle hocha la tête et retourna dans sa chambre. Mickaël enfila rapidement un sweet par-dessus son jogging et regarda l’heure : 7h30. Mais qu’est-ce qu’il vient faire ici à cette heure ? Il sortit de sa chambre et se dirigea vers le salon. Il le vit, assis dans le canapé comme si de rien n’était. Comme si rien ne s’était passé. Les souvenirs de cette journée resurgirent alors telle une gifle. Comme si tout ne s’était passé qu’hier et pas huit ans plus tôt.

Il rentrait de l’école, il était heureux de choses insouciantes qu’avaient les enfants de dix ans. La mère de Samira le posa à la maison comme chaque jour depuis que Samiael, Samira et lui avaient commencé l’école. En ouvrant la porte, il appela sa mère pour la prévenir qu’il était là, mais personne ne répondit. Il en déduisit qu’elle devait soit être au parc avec Eléana, soit sorties faire une course. Il commença à s’installer dans le salon quand il vit sur le sol quelques petites taches brillantes, visqueuses et rouges. Interloqué, il remonta la piste pensant que le chat qui à cette époque était toujours en vie, s’était blessé quelque part. Arrivant dans la cuisine il vit son père :

- Papa ?

Son père se retourna, ses yeux étaient comme fous, en le voyant il se précipita sur son fils. Il l’attrapa par les épaules, le soulevant avant de le claquer contre la porte du frigo. Etant à hauteur du visage de son père, Mickaël entrevit par-dessus l’épaule de celui-ci, sa mère recroquevillée sur elle-même le poignet et une partie du visage en sang. Son père continuait à le battre malgré ses cris de douleurs.

- Papa ! Tu me fais mal arrête…

Ses sanglots à moitié étouffés semblaient le réjouir…

Chassant tous ses souvenirs, il serra les poings, essayant de se calmer. Il dit d’une voix qu’il souhaitait neutre mais qui produisit plutôt l’effet de rage contenue :

- Qu’est-ce que tu fais là ? Son père se tourna vers lui, le regarda et mit quelques secondes à le reconnaître.

- Mickaël ?

Le jeune homme lui jeta un regard noir et répéta sa question :

- Qu’est-ce que tu fais là ?

- J’ai le droit de voir mes enfants non ? dit-il d’une voix doucereuse.

- Non, le juge t’a interdit de t’approcher de nous. Va-t’en, lança l’adolescent d’une voix froide.

- Le juge comme tu dis, est revenu sur sa décision, j’ai le droit de vous voir une fois toute les deux semaines, répondit-il d’un ton teinté d’humour.

- J’en ai rien à faire. On ne veut plus te voir, jamais ! C’est claire non ? déclara Mickaël d’un ton agressif.

- Toi peut-être, mais ta sœur elle a besoin d’un père. Tout comme toi d’ailleurs, finit-il par lâcher avec une voix qui semblait chercher à le convaincre.

- Non ! Tu ne t’approches pas de moi ! Ni d’Eléana, ni même de maman ! Sors de cette maison tout de suite ! finit par crier Mickaël hors de lui.

Son père prit un air peiné, à croire qu’il regrettait ce qu’il avait fait, mais Mickaël ne se laissa pas berner par ses expressions ; il n’avait plus dix ans. Son géniteur murmura un vague au revoir et sortit sans laisser aucune trace. Mickaël se précipita à sa suite pour fermer la porte à clé et respira soudain normalement, se rendant compte que pendant toute la discussion il n’avait presque pas respiré. Il retourna dans la pièce principale et se laissa choir sur le canapé, posant sa tête dans ses mains, laissant la pression redescendre tout en se demandant comment sa mère avait-elle pu aimer cet homme ? Il savait qu’on ne maîtrisait pas ses sentiments. Pourtant alors même qu’il la battait, se mit à battre leur fils, elle avait continué de l’aimer ! Il avait fallu qu’elle finisse à l’hôpital avec Eléana qui n’avait même pas trois ans, pour qu’elle comprenne enfin !

Une fois calmé, il se leva pour aller voir sa sœur, après avoir frappé quelque coup discret, il entra dans la chambre et s’assit près d’elle,

- Ca va ?

- Oui… dit la fillette d’une petite voix qui n’avait rien de convaincant.

- Ne t’inquiète plus, il est parti... Mais Eléa… Comment est-il entré ?

- Bah… J’avais envie de pipi… Du coup je suis allé aux toilettes et ça a toqué à la porte, donc je suis allé ouvrir… Et… J’ai vu que c’était lui et il a poussé pour ouvrir avant que je puisse refermer du coup je me suis sauvé pour te prévenir…

- Comment tu as pu ouvrir à un inconnu ? On te l’a assez répété… dit-il d’une voix pleine de reproches.

- Je sais mais… Je ne l’ai pas reconnu tout de suite…

- Tu étais trop petite pour te rappeler de lui Eléana, dit Mickaël en se demandant comment elle avait fait pour savoir que l’homme qu’elle voyait pour la première fois était leur père.

- Je sais mais… J’ai fouillé dans les albums photos l’autre jour et j’ai vu des photos de lui… C’est comme ça que je l’ai reconnu.

- Je vois… il soupira, puis prit sa sœur dans ses bras, c’est pas grave, dit-il finalement, tu ne pouvais pas savoir mais la prochaine fois n’ouvre pas, surtout pas à ces heures-là.

- Mais je pensais que c’était important comme il est tôt…

- Justement, on n’ouvre pas lorsque c’est tôt p’tit ange. Si c’était important, la personne aurait appeler sur le fixe avant de venir à la maison ou maman serait déjà debout.

La fillette hocha la tête, elle avait un peu honte de s’être conduite ainsi. Mais elle avait aussi eu très peur, elle n’avait que peu de souvenir de son père, mais du peu dont elle se souvenait… elle préférait l’oublier. La douleur et l’hôpital pendant de long mois après qu’il les ait frappées sa mère et elle... Elle se souvenait très bien de cela et c’était suffisant pour qu’elle ne veuille plus voir son père. Elle sentit son frère la serrer fort contre lui.

- Ça va aller ? demanda-t-il après un moment. Eléana hocha la tête.

Mickaël observa sa sœur avant de l’embrasser sur le front puis de retourner dans sa chambre. Il observa son réveil, trop intrigué par le peu de luminosité qu’il voyait au dehors. 5h00. Il se frotta les yeux, pensant rêver, mais le réveil afficha simplement 5h01. Voilà que le sommeil et la panique lui avait fait avoir une hallucination sur l’heure. Il secoua la tête en soupirant. Quelle personne avec un minimum de bon sens venait aussi tôt dans la journée ? Puis il se rappela que son père était tout sauf quelqu’un de censé. Il se recoucha espérant retrouver le sommeil. En repensant à son début de nuit… Il se rendit compte que pour la première fois depuis des mois, il n’avait pas rêvé. Cela le surprit un peu, pourquoi n’avait-il pas rêvé ? Parce qu’il avait repousser le sommeil aussi longtemps que possible ? Ou parce qu’il n’en n’avait pas eu le temps ? Après tout il ne s’était endormi que cinq heures plus tôt.

Peu de temps après s’être recouché, Mickaël entendit de légers coups frapper à sa porte.

- Entre, dit-il doucement.

Sa sœur les yeux pleins de larmes, ouvrit et passa la tête pas l’embrasure.

- Je peux me recoucher avec toi ? J’ai peur, lui demanda-t-elle d’une petite voix.

- Viens-là, dit-il un sourire compatissant aux lèvres.

Il lui ouvrit la couverture et la laissa se glisser dans le lit, puis l’enveloppant de ses bras, il la rassura,

- T’inquiète pas, il ne reviendra plus, murmura-t-il.

Eléana qui jusque là semblait vraiment effrayée se détendit et se blottissant contre son frère, se rendormit. Comme si le simple fait de savoir son frère là, chasserait toutes les mauvais souvenirs qui tentaient de se rappeler à elle. Mickaël finit par se rendormir peu de temps après, enveloppé de la légère odeur sucrée du shampoing de sa petite sœur, espérant que la suite de ce dimanche se passerait mieux qu’il n’avait commencé.

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