Au Palais bleu

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A chaque fin de matinée, Mérytamon fuyait les murs du Palais Bleu. Elle ne trouvait pas sa place dans le harem du Pharaon. Ella appartenait aux enfants du Kep par sa naissance, une des filles de Pharaon, une princesse de sang pur. Son titre de Princesse royale la distinguait des autres enfants, soit adoptifs, soit dignitaires. Mais la jeune fille aurait voulu qu’il en soit autrement.

La jeune princesse, âgée de dix-sept ans cohabitait avec ses frères et sœurs mais aussi avec les enfants d’Isis-Nofret, la seconde épouse du maître des deux terres. Son père.

À l’intérieur de ce lieu, ils étaient éduqués. Tous les matins, un grand scribe, Ahmosê leur apprenait l’écriture des Dieux, le traçage des hiéroglyphes, leur lecture. Et l’après midi, tandis que les Princes apprenaient les arts de la guerre, les princesses, elles apprenaient la musique, la danse et l’art du tissage.

Mais Mérytamon rêvait d’une autre vie. Observatrice, contemplative, elle aimait dessiner, reproduire ce qu’elle voyait. Près de son bassin rose, comme elle le nommait intérieurement, elle se sentait si bien. Libérée des chaînes dorées de son statut de princesse royale, elle redevenait la petite fille chérie de son père qui lui avait fait découvrir tout cela en lui répétant que « cette nature était un don des Dieux et des Déesses ». Et elle n’aimait qu’une chose : dessiner pour eux, pour garder en mémoire cette merveilleuse nature et capturer des moments de vies pour qui resteraient à jamais dans l’esprit des hommes. Elle répétait sans cesse à tous et à elle-même

« Dessiner c’est donner vie à ce qui nous entoure »

Mais, elle le savait, ce n’était pas digne d’une princesse de son rang.

Fille du grand pharaon Ramsès II et de la grande épouse royale, Néfertari, la vie ne l’avait pas chérie dans sa jeune enfance. Souvent affaiblie par les maladies et les miasmes, elle avait passé ses huit premières années à l’intérieur du Palais Royal, où le Pharaon la protégeait. Puis, déclarée guérie par le médecin personnel du monarque Chabti, elle rejoignit sa grande fratrie dans le harem. Mais, elle n’avait jamais réussi à trouver sa place. Elle se sentait si différente d’eux, enfin, surtout d’elles, car ses sœurs et demi-sœurs étaient, à ses yeux, si futiles. Elles n’avaient qu’un objectif : devenir de bonnes princesses et se marier pour fonder une belle famille.

C’était le devoir de toutes les femmes en Égypte mais pas celui de la « petite princesse », surnom que toute sa famille lui avait attribué.

Tout en respirant les odeurs des rosiers qui longeaient le chemin dallé de pierres, Mérytamon arriva à la mare. Sa palette en main, elle s’assit sur l’herbe.

Enfin libre, pensa t-elle.

Un joli sourire se dessina sur ses lèvres. Heureuse et enjouée d’être en ces lieux, elle observa cette nature qu’elle chérissait tant comme son Père. Des souvenirs refirent surface : elle se revoyait enfant avec lui. Il lui avait appris les noms des plantes, des animaux et lui offrit son premier lotus, rose. C’est là aussi qu’avec sa mère, elle apprit la musique, l’écoute et le chant. Elle regrettait tellement ses années où elle était simplement Elle et non la princesse qu’elle devait devenir.

Elle voulait juste dessiner, observait et créer…

Elle observa de longues minutes les ibis sacrés qui chassaient les insectes à la surface de l’eau, dont elle aimait en regarder les différentes nuances. Les fleurs de lotus s’épanouissaient sous la chaleur de l’astre lumineux. Cette fleur, symbole de renaissance, une fleur qu’elle aimait pour sa simplicité, sa beauté. Elle respira et toujours armée de son joli sourire, elle décida de dessiner la mare en elle-même.

Elle sortit de sa palette, une feuille de papyrus, qu’elle cala sous ses fesses pour ne pas qu’elle s’envole et s’amusa à mélanger du vert avec du blanc, puis du bleu pour obtenir toutes ces nuances qu’elle percevait. Enfin, elle se lança.

Dessiner pour créer

Dessiner pour laisser une trace

Dessiner pour l’éternité.

« Contempler, dessiner, rêver » elle répéta ses trois mots à voix haute avant d’être surprise par cette voix qui s’adressa à elle :

—Bonjour petite princesse.

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