Une surprise de taille.

Une météorite s’écrasant au milieu de la petite cuisine n’aurait pas plus étonné les deux enfants qui ne savaient plus que dire ni surtout que penser. La vieille sorcière était-elle réellement folle comme les deux enfants avaient tendance à le penser ?

Pourtant elle ne cessait d’énoncer des vérités : elle avait bel et bien capté les cauchemars de Laetitia. Elle connaissait son prénom. Elle connaissait l’existence du Yéti bien qu’habitant en permanence dans la montagne il lui était fort possible à un moment ou à un autre d’avoir été confrontée à la créature. Mais tout de même ! Cette histoire qu’elle essayait de leur faire avaler était pour le moins incroyable. Et que signifiait cette phrase plus que mystérieuse : Le Yéti ou moi c’est du pareil au même ? Que sous entendait-elle par là?

La curiosité des enfants l’emportait désormais sur leur désir de redescendre ainsi que leurs remords vis à vis de l’inquiétude des parents de Quentin et des professeurs de Laetitia. Ce fut la sorcière qui les remit face à leurs responsabilités.

- Je vous donnerai plus d’explications tout à l’heure. A moins que Laetitia ne le découvre par elle-même. En attendant vous allez terminer votre repas. Ensuite vous passerez une bonne nuit de sommeil avant de redescendre au village demain matin.

- Ah non ! Pas question ! Explosa Quentin, cette fois vous en avez trop dit ou pas assez ! Si vous ne voulez pas que nous vous prenions pour une folle vous devez nous expliquer ce que vous avez voulu dire et …

Le garçon n’eut pas le temps de terminer sa phrase les mots s’étranglèrent dans sa gorge. Quant à Laetitia, sa surprise fut telle qu’elle manqua de perdre connaissance. En effet, le visage de la sorcière était en train de se métamorphoser. Il se couvrait de poils. Ses mains s’allongeaient et des griffes acérées poussaient au bout de ses doigts…

La vieille femme s’enfuit précipitamment hors de la maison, Quentin à ses trousses. Malgré sa terreur le jeune garçon put constater qu’en quelques secondes la métamorphose avait été totale. Ce n’était plus une sorcière mais le Yéti qui s’enfonçait dans le blizzard en poussant des hurlements féroces !

Le jeune garçon rentra dans la maison où il retrouva Laetitia blanche comme un linge et tremblant de tous ses membres. Il lui réclama de plus amples explications au sujet du prétendu don évoqué par la vieille sorcière mais la fillette ne put lui répondre.

- Que veux-tu que je te dise ? Je ne comprends rien à cette histoire ! C’est vrai que j’ai fait des cauchemars. Des cauchemars très bizarres. C’est étrange aussi qu’elle connaisse mon prénom. Mais pour le reste je ne vois pas de quoi elle veut parler. Tu ne peux pas imaginer ce que j’ai eu peur en voyant son visage se couvrir de poils…

- Et encore ! Toi tu n’as pas vu la métamorphose totale en Yéti! Je peux t’assurer que j’en ai eu un coup au cœur. J’ai l’impression de me trouver dans un de tes cauchemars. Et je t’assure que j’aimerais pouvoir me réveiller très vite.

Je ne te cache pas que je ne suis vraiment pas à l’aise. Imagine un peu que le monstre qu’elle est devenue revienne nous dévorer.

Quentin ne parvenait plus à cacher son inquiétude même pour rassurer sa jeune amie. A la grande surprise du jeune garçon ce fut celle-ci qui tenta de le rassurer.

- Je ne pense pas qu’elle nous ferait du mal. Elle est trop gentille. Assura Laetitia.

- Trop gentille ! Mais qu’en sais-tu ? On est arrivé chez elle Dieu seul sait comment ! Mais c’était après avoir rencontré le Yéti dans la montagne. Ensuite elle vient nous porter à manger tout en nous expliquant qu’elle est une sorcière et que tu as un certain don. Mais qui prouve qu’elle n’est pas réellement une sorcière et qu’elle ne nous ait pas fait boire du lait empoisonné ? Ou qu’elle n’y ait pas rajouté un philtre maléfique ?

Il commençait à paniquer sérieusement, Quentin…

- Arrête ! Là tu exagères !

- Ah j’exagère ! Se fâcha le garçon. J’exagère ! Mais après nous avoir expliqué qu’elle était une sorcière, tout à coup, elle se transforme en Yéti ! Ensuite elle s’enfuit en poussant des hurlements de bête féroce ! Mais c’est moi qui exagère ! On nage en plein délire ici ! Mais qu’est ce qui m’a pris de vouloir à tout prix t’emmener skier ? Quel idiot je suis!

- Calmes-toi Quentin ! Temporisa Laetitia. Je suis sûre et certaine qu’elle n’est pas dangereuse. Je le sens. Si c’était le cas, elle ne nous aurait jamais expliqué tout cela.

- Tu le sens ? Fulmina Quentin. Tu le sens ! Et comment le sens tu ? C’est ton fameux don qui te fait sentir cela ?

- Je n’en sais rien ! Mais à mon sens si elle avait voulu nous dévorer elle ne nous aurait pas ramenés ici bien au chaud dans un lit. Elle nous aurait plutôt dévorés ou tués tout de suite. »

- Si tu le dis ! N’empêche que j’ai le sentiment de me retrouver dans un film de science fiction. Comment est-ce que le Yéti cloné par les laboratoires du gouvernement pour lesquels travaille mon père a pu se transformer en une vieille femme, qui elle même se métamorphose en Yéti… C’est une véritable histoire de fous ! Si on me la racontait je répondrais que cela n’a aucun sens !

- Il s’agit peut-être d’un autre Yéti. Objecta la petite fille.

- Non ! Impossible ! Répliqua Quentin avec force. Il ne peut y avoir deux créatures semblables mais avec des origines différentes dans le même coin. Ce serait une coïncidence invraisemblable. Je ne peux pas y croire.

- De toutes manières on ne trouvera jamais la solution du mystère tous seuls. Alors nous ferions mieux de nous reposer un peu. Je suis morte de fatigue. Demain la sorcière reviendra et nous expliquera la réalité des choses j’en suis sûre. Affirma sagement Laetitia en s’allongeant sur son lit.

- Moi je ne pourrai pas dormir ! Je suis bien trop nerveux pour cela. Repose-toi si tu veux moi je fais le guet…

Il n’avait pas fini sa phrase que Laetitia dont les yeux se fermaient tous seuls s’endormait déjà. Malgré son souhait de rester éveillé Quentin sentait également la torpeur l’envahir… Assis sur sa chaise le jeune garçon lutta un moment contre le sommeil qui s’emparait de lui.

Au moment où il allait sombrer à son tour la porte de la maison s’ouvrit avec fracas. Une silhouette pénétra dans la pièce entraînant avec elle un tourbillon de neige et de vent qui s’engouffra dans la petite maison.

Il faisait sombre car le feu s’éteignait faute d’avoir été alimenté. Quentin s’éveilla en sursaut et dans son demi-sommeil, il songea que cette fois c’était bien fini. Le Yéti était revenu fou de rage afin de leur faire un sort à tous les deux…