Chapitre 1

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La femme hurla. Il profita de sa surprise pour attraper la lampe de chevet, et l’assommer avec. Quand elle reprit connaissance quelques secondes plus tard, il l’avait déjà déshabillée et finissait de la ligoter. Elle commença à pleurer, il la bâillonna avec ses sous-vêtements. Que faire maintenant ? Il était sûrement trop tard pour revenir en arrière, il n’avait plus le choix. Elle devait mourir. Le plus tôt serait le mieux.

Il alla dans la cuisine, prit un couteau, puis voulut retourner dans le salon mais ses jambes le lâchèrent d’un coup. Il s’effondra sur le sol. Était-il vraiment capable de le faire ? N’y avait-il pas un autre moyen de s’assurer de son silence ? Les mots qu’elle lui avait jeté à la figure la veille lui revinrent à l’esprit. Elle savait tout, et elle n’hésiterait pas à le dénoncer. Il inspira profondément, ferma les yeux et s’imagina ce qu’il se passerait lorsqu’il serait arrêté et enfermé. Le procès, les médias, sûrement la prison à vie. Il ne pourrait le supporter.

Il se releva d’un coup, reprit le couteau et, d’un pas décidé, se voulant sûr de lui, retourna près d’elle. Elle essayait de détacher ses liens, et avait déjà réussi à se défaire de son bâillon. Lorsqu’elle le vit arriver, elle regarda le couteau, sembla penser un instant qu’il n’oserait pas le faire, mais ensuite elle croisa son regard, et cessa de bouger. Plus rien ne pourrait l’aider. Elle continua de le fixer, lui demanda de lui faire confiance. Elle ne dirait rien à personne, elle s’enfuirait le plus loin possible, il n’avait rien à craindre.Il s’avança. Elle commença à le supplier. Il se rapprochait toujours. Il leva le bras, et alors qu’il fermait les yeux pour ne plus avoir à supporter son regard il l’entendit murmurer « Cody je t’en supplie… Je ne dirai rien, fais-moi confiance. Cody je t’aime toujours. Pense aux enfants, s’il te plaît… » Puis elle cria, comme il ne l’avait jamais entendu crier auparavant. Quand il rouvrit les yeux, le couteau lui transperçait la gorge. Il y avait du sang partout. Mais elle le regardait encore.

- Hmm hmm…

Je sursaute et me retourne. Alix.

- Je peux t’aider ?

- Je suis désolée, je ne voulais pas me montrer indiscrète. C’est juste qu’il est tard et que j’ai vu de la lumière alors…

- Bah… Ce n’est pas bien grave. Mais la prochaine fois, fais un peu plus de bruit, j’ai frôlé la crise cardiaque !

Elle sourit et pointe mon ordinateur du doigt :

- Ça avance bien ?

- Je fais ce que je peux. J’approche de la fin, mais, vois-tu, il est difficile d’écrire tant qu’on ne sait pas ce qu’on souhaite écrire.

- Peut-être qu’un peu de repos vous soufflerait quelques idées…

- Tu l’as dit, soufflé-je à mon tour.

Je me tais quelques secondes, puis reprends mes esprits.

- Bonne nuit, Alix.

Elle comprend que je lui donne congé. Elle acquiesce et sort. Je relis ce que j’ai écrit et décide qu’elle a sûrement raison, une bonne nuit me fera du bien. J’éteins mon ordinateur et me couche. Une minute après, je m’endors de ce sommeil si lourd qu’il nous empêche de rêver.

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Il est près de quatorze heures lorsque j’émerge. Je descends à la cuisine, il n’y a personne. Après avoir déjeuné, je me remets au travail. Je retourne dans ma chambre et m’assieds à mon bureau. Ma tête se vide d’un coup. Rien, absolument rien, le vide total. J’essaye de toutes mes forces mais il n’y a rien à faire, je n’ai aucune idée de la suite à écrire. Je me lève en jurant et vais prendre une douche. Peut-être qu’une balade… J’hésite plusieurs minutes, pesant le pour et le contre. Finalement, la peur de ne pas savoir quoi écrire me reprend, je prends mon manteau et sors. Je marche depuis un bon moment déjà lorsqu’une femme me hèle.

- Excusez-moi, monsieur ! Je vous suis depuis quelques instants, je… je suis désolée de vous déranger ainsi mais… Pfiou ! Bon, je me lance. Vous êtes Lucas André !

- Euh… Oui, c’est bien moi, en effet.

- Oh mon Dieu ! crie-t-elle en couvrant sa bouche et son nez de ses mains, puis elle semble regretter sa réaction et tente de se maîtriser. Je suis une grande fan, vraiment, j’ai… j’ai tout lu de vous. Je sais qu’on doit vous le dire très souvent, mais, croyez-moi, j’admire énormément votre travail…

Puis elle doit s’arrêter pour reprendre son souffle.

- Oh non, malheureusement on ne me le dit pas aussi souvent que vous le pensez ! lui réponds-je, avec un sourire l’invitant à continuer

Elle me sourit en retour et me tend la main.

- Héloïse, enchantée de vous rencontrer.

- Eh bien, chère Héloïse, tout le plaisir est pour moi.

Et je ne mens absolument pas. Petite, brune, la quarantaine, elle fait partie de ces femmes qu’on remarque, et qui le savent. Habillée d’une manière simple mais élégante, de longues boucles tombant sur ses épaules, elle est discrètement maquillée. Totalement mon genre.

- Dites-moi, j’imagine que vous avez un emploi du temps surchargé…

Elle vient de me surprendre dans la rue, errant, le regard vide.

- … et vous avez sûrement quelqu’un qui vous attend chez vous…

Il est de notoriété publique que je suis célibataire.

- … mais je serais ravie de vous payer un verre, un de ces jours.

- Ravie, dites-vous ? J’aime ravir les belles femmes.

Elle me sourit plus intensément encore, la bouche entr’ouverte, pendue à mes lèvres. Elles le sont toutes.

- Que diriez-vous de sortir avec moi ce soir ?

Elle me semble surprise, mais je me demande si elle ne fait pas semblant.

- Ce soir ? Et moi qui pensais qu’il fallait réserver plusieurs mois à l’avance !

Nous rions tous deux, puis elle sort un bout de papier de son sac à main, et après avoir écrit son adresse dessus, me le tend.

- Je vous attends pour vingt heures, me lance-t-elle en même temps qu’un clin d’œil, et elle s’éloigne, non sans regarder par-dessus son épaule au bout de quelques mètres.

À peine suis-je rentré que le téléphone sonne.

- Ici Lucas.

- Monsieur André, c’est Alix. Je voulais vous prévenir que je ne pourrai pas préparer le dîner ce soir, je dois assister à un cours qui va se terminer tard, et j’irai ensuite dormir chez une amie.

- Ce n’est pas un problème. De toute manière, j’avais prévu de manger à l’extérieur ce soir.

- À l’ext… commence-t-elle, mais elle s’interrompt et, après une demi-seconde de réflexion, semble juger que cela ne la regarde pas. D’accord, très bien. Je vous souhaite une bonne soirée, nous nous verrons demain.

- Merci Alix, bonsoir.

Je raccroche. Décidément, le destin est de mon côté aujourd’hui ! J’aurai la maison pour moi seul pendant toute la nuit. Peut-être que ce soir, enfin, j’y arriverai. Cette Héloïse me semble tout à fait envisageable…

Je monte dans ma chambre et j'essaie de nouveau d’écrire. Le néant, encore une fois. J’abats mon poing sur le bureau. Pourquoi je n'y arrive pas ? Qu’est-ce qui a changé depuis hier ? Depuis la semaine dernière, le mois dernier ? Depuis mon dernier roman ? Je connais la réponse, mais n’ose la formuler. Ce soir, je me rassure. Après cette nuit, tout ira bien.

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