Journée de deuil…

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Malgré la joie, les surprises et le bonheur de la veille, cette journée promet d’être difficile, tout le monde le sait, mais personne ne le montre et on me laisse tranquille. Cette absence de prévenance à mon encontre me fait le plus grand bien, j’ai besoin de vivre mon jour de deuil dans ma bulle, à ma façon, de me prouver que je peux surmonter ce moment difficile sans l’aide de personne grâce aux progrès que j’ai fait cet été, avec les armes qui m’ont été données, tout en les sachant là en cas de besoin.

Nous prenons le petit déjeuner en famille, puis, après avoir rassemblé nos affaires et chargé la voiture, nous partons tous les cinq rendre visite à Cécilia. J’ai choisi de ne pas acheter de bouquet pour fleurir sa tombe, mais de réaliser un bouquet avec ce que nous avions pu ramasser en forêt, branches de pins, de buis, de cade…

Nous retrouvons Hélène et Thaïs sur place, la douleur est intense lorsque nous nous enlaçons, mes larmes coulent encore, et nous tentons de nous réconforter comme nous le pouvons.

Après quelques mots bienveillants, mes parents, mon frère et Charlène prennent leur distance, nous laissant tous les trois autour de sa dernière demeure. Tandis qu’Hélène parle avec sa fille, nous restons en retrait avec Thaïs.

- Merci Lou… Merci de continuer à venir la voir, de pas l’avoir oubliée…

- Je risque pas de l’oublier… Elle restera dans mes souvenirs, pour toute la vie…

- Je pensais pas que t’étais comme ça… Que tu lui resterais fidèle… Même si t’as trouvé quelqu’un d’autre...

- Elle a changé ma vie… Elle m’a aidé à retrouver confiance en moi… Si naturelle, si spontanée… C’est pas parce que Charlene partage ma vie maintenant que du jour au lendemain je vais oublier Cécilia, et même, elle partage mon deuil. Merci de veiller sur Hélène aussi…

- C’est un peu comme une deuxième maman pour moi, elle s’est occupée de moi pendant des années quand mes parents étaient en voyage d’affaires. On était comme deux sœurs avec Cess… C’est dur aujourd’hui… Pour toutes les deux… Alors que toi t’as l’air d’aller tellement bien…

- Ça n' a pas été facile pour moi aussi… Dépression, tentative de suicide, alcool, drogue, mais j’ai trouvé la bonne personne pour me sortir de là… J’ai rencontré des gens super grâce à elle, ses parents, Magali, une psy du centre, et le séjour là-bas m’a fait du bien, ça m’a sorti de ma routine, changé les idées, même si j’ai beaucoup pensé à Cécilia, j’ai souvent parlé avec elle, et puis on a mis un nom sur mes difficultés à remonter la pente et trouvé des remèdes… Si tu veux je peux voir avec Chou pour qu’elle t'aide...

- Putain, j’immaginais pas… T’as eu la chance de la rencontrer, moi j’arrive à trouver personne… Dès qu’on se rapproche, je me sens obligée de fuir, j’ai peur de m’attacher et qu’il se passe quelque chose de grave… Si seulement t’avais pas coupé les ponts…

- J’ai pas eu le choix… J’avais besoin de me détacher de tout ce qui me rattachait à elle, j'aurais pas tenu le coup si j'étais resté proche de vous,… Ça m'empêchait pas d'être là tous les samedis, jusqu'à cet été, depuis, je viens moins souvent, et pourtant on habite pas très loin…

- Allez les jeunes, on va pas se morfondre pendant des heures, on a déjà assez pleuré comme ça, vous pensez pas?…

- Bien parlé Hélène… Je suis content de te l’entendre dire. On va continuer à tenir le coup, à essayer de garder le sourire, tous les trois, pour Cécilia.

- Merci Loulou… Ça me fait du bien d’entendre ces mots… Je vous promets, à tous les trois, de retrouver le sourire, d’aller mieux... Et Thaïs, tu vas faire la même chose…

- Si vous avez besoin, n’hésitez pas à nous appeler, Charlène pourra essayer de vous aider.

Après avoir versé nos dernières larmes sur sa tombe, nous nous enlaçons une dernière fois et nous séparons, pendant qu’elles quittent le cimetière, je reste ici, m’assois sur la pierre glacée.

'Coucou ma puce. pour être franc, je me suis vraiment forcé à venir ce matin… J’avais pas envie… Pas envie de me souvenir de ce qu’il s'est passé… Pas envie de fêter cet anniversaire… Mais tu vois… Je suis quand même là… Je suis venu pour toi, pour Hélène et Thaïs aussi… Je suis content de les avoir retrouvées… Tu me manques mon étoile.... Tellement… Même si je vais mieux, même si tout se passe vraiment bien, y’a un vide à mes côtés, y’aura toujours un vide...'

J’aimerai rester ici maintenant, passer ma journée à lui parler, mais nous sommes attendus chez Patrick et Caro en début d'après-midi.

Si j’ai essayé de donner le change au cimetière, lorsque nous nous retrouvons dans la voiture, sur la route des vacances, je m’effondre, mes nerfs lâchent et nous sommes obligés de nous arrêter sur le bord de la route pour que je me calme.

- Mon cœur… Tout va bien… Allez… Respire, calmement… Rappelle-toi ce que je t’ai dit cet été: laisse les souvenirs venir, laisse les larmes couler. Essaye juste de te rappeler du bonheur que tu as ressenti à ces moment-là… Concentre-toi sur le positif… Il faut que tu gardes, enfouis au fond de toi, les mauvais moments du passé… Que tu te fixes sur les bons souvenirs… Mais surtout, laisse couler les larmes quand elles viennent, ne lutte pas…

- Je lutte pas…. J’ai pas la force… Aujourd'hui… J'essaie de penser aux moments de bonheur, aux souvenirs positifs.... Mais la tristesse est plus forte…

- Regarde le chemin que tu as parcouru depuis un an, regarde notre vie aujourd’hui, c’est grâce à elle… Si rien de tout ça ne s’était passé, si ça se trouve vous vous seriez séparés, fâchés, au bout de quelques mois… Là au moins vous êtes toujours en bons termes… Pour l’éternité…

- T’as presque raison… Mais on serait toujours ensemble....

- T’en est certain? Tu parierais quoi là-dessus? Deux mois c’est bien, mais c’est pas une vie entière… Et nous? Ça compte pas?

- Bien sûr que ça compte… Tu le sais très bien… C’est compliqué de pas savoir, je me dis que ça aurait pu durer, mais comme tu dis, je suis sûr de rien… Mais j’aime croire à une issue positive…

- Je te comprends… Mais tu dois tourner la page de votre histoire, continuer à penser à elle, continuer à aller la voir, mais n’invente pas la suite...

Je m’étais promis d’arriver à gérer, mais je me rends compte que c’est beaucoup plus difficile que ce que je croyais, je pensais être guéri mais je me rends compte qu’il me reste encore du chemin à parcourir, et je pense que ce séjour au grand air me fera le plus grand bien.

Après être arrivé à me calmer, nous reprenons la route, je scrute le paysage, admire les sommets enneigés, illuminés par les rayons du soleil, repense aux journées passées en station, à mes cours de ski, à mes premières descentes, à cette sensation de glisse, de liberté. Je sais que les jours qui viennent, le programme est établi, et que nous profiterons des pistes à volonté.

Je pense aussi au coup de fil de Patrick, l’avant-veille et aux surprises qu’il réserve à sa fille adorée.

Toutes ces pensées plutôt joyeuses me remontent un peu le moral, m’aident à me sentir mieux et à oublier ma peine.

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