Octobre 2010

7 minutes de lecture

Le mardi suivant, la chose dont je ne pensais pas être possible s’est déroulée avant même que je n’aperçoive l’ombre de ce qui allait suivre.

Je suis dans ma chambre, avachie sur mon lit, à écrire des poèmes, comme d’habitude. Allons savoir pourquoi, en ce moment je ne suis décidée qu’à cela. Mes parents me disent tout le temps que c’est inutile, que je ne fais jamais rien d’utile à la maison, que je ne sais faire que les choses qui n’intéressent pas les gens. Mais le jour où je serai publiée, ils verront que ce que j’ai fait est utile, que je peux changer les choses à ma façon, et que je peux faire rêver moi aussi. Ecrire, ça a toujours été mon truc, et ce, depuis que je sais tenir un crayon à la main. C’est toujours ce que j’ai aimé faire.

Ma première histoire remonte à mes 8 ans. J’étais en CE2 et j’avais commencé à écrire une petite histoire avec un petit vampire. Tout le monde me demandait quand est-ce que la suite arriverait, et j’étais très heureuse de ce que j’accomplissais. Aujourd’hui, peu de monde savent de quoi est fait mon univers, de quoi sont faites mes passions car plus personne ne s’intéresse à moi désormais. Donc peu de monde connait l’existence de mes écris que je garde secret. Et pourtant, c’est la chose que j’aime le plus faire au monde. Quand j’écris, je me sens libre, un nouveau monde s’ouvre à moi, un monde dont je suis la maitresse et où je peux faire ce qu’il me plait, même les choses les plus improbables.

Je reçois alors un texto qui dérange mes ébats artistiques. Aujourd’hui, Alexandre a fait la tête toute la journée. Il a dit à Anaïs et à Yolanda pourquoi. Mais avec moi, il a gardé le silence. Je n’ai pas compris pourquoi, je n’ai rien fait de mal ou rien qui n’ait pu lui déplaire. Même si je ne me sens pas du tout proche d’Alexandre, j’ai finalement réussi à l’accepter tel qu’il est en tant qu’ami. Mais je déteste quand il fait ça, quand il me rend aussi inutile et quand il me le fait sentir sans aucun scrupule.

J’ai deux oreilles pour écouter, une langue pour conseiller. Mais comme tout le monde, il doit penser que je ne suis qu’une gamine inutile. Et bien, qu’il se débrouille sans moi si c’est ce dont il a envie.

« Réfléchir … Sa me réussi pas »

Je faillis m’étrangler en voyant toutes ces fautes d’orthographes en simplement quelques mots. Je ne supporte pas de voir notre langue française ainsi bafouée. Je lui réponds :

« Pourquoi tu me fais la tête ? Tu peux me le dire et me faire confiance tu sais… »

« Pk jte le dirai ? Surtout ke sa ne conserne ke moi. »

Puis, avant que je n’aie le temps de répondre, je reçois un autre sms de sa part plutôt étrange.

« Je pense a d chose. Ou plutôt a des personne. Le problème, c ke je n’arive pa a m’exprimer kan je ve lui dire des chose ke jai sur le cœur. Alor je me tai en espérant kel comprene ce que je recen san kel me rejette Je supose ke sa doit etre incompréhensible ce que je viens d’écrire. »

Aussitôt, je lui réponds :

« J’ai besoin d’un traducteur en effet. »

« Je suis amoureu »

« Ah … De moi ? »

« Oui »

Je ne sais pas trop quoi dire alors je ne dis rien. Je reste ainsi dans le silence, laissant ma feuille de papier blanche devant mon choc. Je suis terriblement touchée par ces quelques mots que nous venons d’échanger. Jamais avant cela quelqu’un ne m’avait aimé. Jamais personne ne m’avait dit qu’il m’aimait ni qu’il était amoureux de moi, ni rien du tout. Et ça me fait une sacrée drôle de sensation tout à coup. Avant même que je n’ai le temps de me remettre de ce choc, il me renvoi un autre message.

« Je suis dsl »

Mais pourquoi est-il désolé de m’avoir avoué son amour ? Je trouve même ça très courageux de sa part, plus courageux que moi en tout cas. Et puis … C’est une occasion géniale de changer de vie pour moi. De passer enfin à autre chose. Une occasion en or pour me faire cesser de croire en une histoire d’amour impossible avec Maxence. Alors je reprends le fil de la discussion avant qu’il ne se mette à pleurer, pensant que je ne veuille pas de lui. Même s’il m’insupporte complètement, peut être que c’est le seul moyen pour moi de me sauver, et d’être heureuse.

« Pourquoi être désolé ? »

« Je c pa. Par peur que tu me rejette ».

Je réfléchis à ce que je dois lui dire. Pour moi. Pour lui. Je ne l’aime pas vraiment, mais au fil du temps, mes sentiments évolueront, c’est une certitude. Comment ne pas aimer quelqu’un qui nous aime ?

« Oh non ! Ne sois pas désolé. Et si … Moi aussi je t’aimais ? »

Je me mords la langue, ce mensonge me donne envie d’exploser de rire, c’est tellement improbable ! Moi, aimer Alexandre ? Je ne sais pas si un jour ça pourrait être vraiment possible. Mais s’il me rend heureuse, pourquoi pas ?

Moi, Alexandre … Alexandre, moi … J’ai déjà bien du mal à m’y faire, alors je ne sais pas comment je pourrais m’y faire par la suite. Je ne sais pas ce qui m’a prit de lui dire que moi aussi je ressentais de l’amour pour lui, mais dans tout les cas, je sais une chose. C’est que je suis incapable de lui faire du mal à lui comme je suis incapable de faire du mal à tous le monde autour de moi. Alors non seulement, l’aimer me donnera l’occasion d’oublier Maxence, mais aussi l’occasion de le rendre heureux un petit peu.

Je vais avoir un petit ami. Un vrai. C’est que je passais dans la cour des grands. Enfin … Déjà !

D’une seconde à l’autre, je reçois à nouveau un message beaucoup plus joyeux à lire que les précédents :

« Heu … Ouai ! Mais jte le demanderai en personne. Même si je c pa kommen je vais my prendre »

Puis j’éteins mon portable, je ne veux plus lui parler. Je ne crois pas ce que je viens de dire. Je ne crois pas non plus ce qu’Alexandre m’a dit. Et s’il se fout complètement de moi ? Et si son amour n’est pas vraiment sincère ? Et si, et si … Des si, j’en mets partout. Je ne sais pas comment je vais m’y prendre pour m’endormir ce soir.

Il faut que je le dise à quelqu’un, il faut que j’en parle. Je ne peux pas garder ça pour moi, ça bouillonne bien trop en moi. Il faut absolument que ma langue se libère. J’ai besoin de conseils, j’ai besoin de savoir comment m’y prendre, j’ai besoin de savoir que ce n’est pas tout à fait mal la façon dont je viens d’agir. Mais qui peut bien me dire les choses que j’ai besoin d’entendre ? Qui peut m’écouter d’une oreille attentive sans souffler et sans grogner ? A mère ? Non, ma mère ne m’écoute pas, je suis presque inexistante à ces yeux, je me demande même si je suis sa fille parfois … A Anaïs ? Non. Elle ne me suivrait pas vraiment sur ce terrain là. A Laura ? Oh non, les histoires d’amour n’existent pas pour elle. Alors à qui ?

Le bruit de l’eau qui glougloute me fait sortir de mon état de choc. Ma sœur, mais oui bien sûr. Qui pourrait mieux recueillir mes paroles que ma petite sœur ?

Discrètement, j’entre dans la salle de bain où j’y trouve Emy qui se déshabille. Aucune pudeur entre sœur, c’est ça la règle entre nous deux… Elle n’a beau avoir que 10 ans, elle semble bien plus mature que son âge. Et même si on se dispute bien souvent, on se partage toutes les choses les plus croustillantes de notre vie.

-J’ai un petit copain. Je lui annonce.

Je la vois faire les gros yeux à travers le miroir, puis elle se met à sauter partout. Là en revanche on dirait une grande gamine qui fait le singe.

-C’est qui ? C’est qui ? C’est qui ?

-Alexandre. J’ai déjà dut t’en parler auparavant.

Elle me dit que c’est génial, qu’elle espère me voir plus heureuse et moins ronchonne à l’avenir. Elle me fait rappeler Maxence aussi. Dans le petit bonheur que j’essais de me former, il est toujours là, malgré moi. Une boule se forme dans ma gorge car malgré la demande peu romantique d’Alexandre, mes sentiments pour Maxence n’ont toujours pas changé. Ce n’est pas d’Alexandre dont je rêve la nuit. Mais toujours du même spécimen. Je crois que j’aurais beau faire tout ce que je veux, mes sentiments pour Maxence ne changeront jamais.

J’appréhende d’être à demain. Je n’ose même pas m’imaginer ce qu’il va me faire, ni ce qu’il va me dire. Je n’ose pas… Notre prochaine entrevue me stresse à mort. Je n’ai pas envie de le voir. C’est mon copain, et plus loin il se tient de moi, mieux je me sens.

J’essais de me rassurer en me disant que demain c’est encore loin. Qu’il me reste encore de longues heures pour me préparer mentalement à notre rencontre. Mais je ne suis plus dupe de moi-même. Et comme prévu, le sommeil ne me gagne pas …

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