Général Alessander

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Tout à coup, la porte s’ouvre sur une belle fille rousse, vêtue d’une robe chic et d’un masque, mais tenant une épée maculée de sang. Elle a enlevé ses hauts talons pour être plus stable durant le combat. Derrière elle, les corps des gardes sont plongés dans une mare de sang. Dans ses yeux bleus, brille une colère aussi froide que la neige qui picote la peau.

Alessander ne s’est jamais senti aussi effrayé : la mort vient d’arriver pour lui. N'acceptant pas son destin, il prend son courage à deux mains, affiche un sourire un peu trop forcé et dit sur un ton enjoué :

- Miss Gwenda ! Comment allez-vous ?

- Oui, très bien, répond-elle avec sarcasme. J'ai passé un très bon voyage !

- Rebroussez chemin, ordonne l'empereur, j’ai mon général avec moi, qui a suivi une formation militaire.

Sans qu'il s'y attende, Gwenda tend son épée vers lui :

- Moi aussi, j’ai suivi une formation militaire sinon, je n’aurais pas battu les gardes devant la porte. Et je ne partirai pas avant d’avoir réglé un compte avec lui !

Les deux hommes restent silencieux et immobiles. Le général déplace ses yeux de droite à gauche. L'empereur s’apprête à dire un mot quand Gwenda reprend :

- Cet homme a tué l'un de vos soldats. C'est lui qui a tué Sir Gauvain.

- Quoi ? Moi ? Pourquoi l'aurais-je tué ? C'était un grand homme ! s'exclame-t-il, nerveux.

- Le général ne ferait jamais une chose pareille, répond l'empereur, surtout pas à un de ses soldats.

- Forcément, vous défendez votre général pour continuer votre guerre de conquête.

- Pourquoi ne serait-ce pas toi qui l'aies tué ? suggère Alessander. Puisqu'après mes renseignements, tu es une espionne.

L'empereur écarquille des yeux, perdu.

- Oui, une espionne ! Cette fille a tué des Mousquetaires au Royaume des Francs et compte maintenant vous assassiner ! raconte-t-il à l'empereur. Cette rousse s'appelle Gwenda !

D'un geste vif, il enlève son masque pour découvrir son visage qui s’est affiché dans tous les journaux. Elle n'a pas vu ce geste venir, si rapide en plus !

- Elle a réussi à passer le filtre et elle s'est passée pour une non-mage ! Tant d'années de mensonge... Maintenant, j'ai vu clair dans son jeu. Elle compte entraîner la chute de l'Empire pour que les mages prennent le pouvoir et exterminent tous les non-mages !

- Sortez d’ici avant que je vous tranche la gorge, ordonne-t-elle à Arthur III, sur un ton sec et froid.

Arthur III court vers la sortie, les membres tout tremblants. Ses pas se meurent dans le couloir. Seule à seul, Gwenda et Alessander s’observent. Le silence est aussi pesant que des funérailles. Le général commence :

- Je n’ai pas tué Sir Gauvain.

- Si, vous l'avez tué ! Et apparemment, vous aviez l'intention de me tuer aussi. Pourquoi ?

- Si j'avais l'intention de te tuer, je l'aurais fait déjà ! Ah ! Vous seriez devenue une très bonne militaire si le destin ne s'était pas mêlé, commente le général. Vous seriez envoyée sur Niflheim pour participer à l'extermination des sauvages, comme l'a fait votre ami Gauvain.

- Pardon ? Comment ça "comme l'a fait votre ami Gauvain" ?

- Vous n'êtes pas au courant ? Votre ancien maître est allé sur Niflheim pour participer à une mission d'extermination. Ces sauvages gênaient l'extension de la civilisation alors, on a enlevé les mauvaises herbes.

Gauvain lui a-t-il menti ?

- Vous mentez, dit Gwenda, incrédule, il est parti en mission de reconnaissance !

- En mission de reconnaissance ?! s'esclaffe-t-il de rire. Pas du tout ! Oh... Vous a-t-il caché la vérité ?

Gwenda ne répond pas. "Apparemment, si."

- On dirait que, oui. Pourquoi vous a-t-il menti ? N'est-ce pas une fierté d'éradiquer le mal pour défendre son peuple ? Pourquoi en avait-il honte ? On dirait qu'il vous cachait quelque chose qui pourrait vous faire du mal.

Non, ce n'est pas possible ! Il ne lui cachait rien du tout !

- Pourquoi, à votre avis ? Pourquoi a-t-il insisté pour que je l'envoie sur Nidaheim ? Pourquoi vous a-t-il chouchouté ?

Non, ce n'est pas possible...

- Vous a-t-il parlé des sauvages qu'il a rencontré dans leurs villages ? Ils ressemblaient en tout point à des Morganiens mais en plus grands, en plus forts et en plus endurants. Mes soldats me racontaient qu'aucune flèche ne pouvait les atteindre, comme s'il y avait une armure à la place d'une peau. Notre rapidité ne valait rien face à leur robustesse. En plus, différemment des autres peuples, ils savaient apprivoiser des animaux sauvages, qui les accompagnaient durant les combats ; on n'a jamais rien vu de tel ! On a dû adopter la guerre rapide. Mes soldats allaient dans leurs villages les nuits et ils massacraient tous les civils jusqu'au dernier. Gauvain était parmi eux.

Gwenda est devenue horrifiée. “Gauvain a participé à ce genre de massacre ? Il a tué des civils ? Comme moi sur Alfheim ?”

- Pourquoi cette mine sombre, Miss Gwenda ?

Elle ne répond pas, trop occupée par ses pensées.

- Vous n'aviez pas de nom à l'orphelinat. Une fois qu'il vous a adopté, Gauvain vous a nommé Gwenda. Pourquoi ce nom ? Ce nom n'est pas draculien, vous savez. Il est mort à cent soixante-et-un ans donc il a vécu durant l'Ere du règne d'Odin. Par conséquent, il a voyagé sur Odin et sur Morgana. Il a appris à parler le svègue et le breton. Votre nom viendrait-il de l'une de ces langues ?

- Qu'est-ce que ça a à voir avec mon nom ?! s'énerve-t-elle. N'étions-nous pas en train de parler de Gauvain et de son passé ?!

- Ouh ! Vous devriez être très en colère... Et perdue. Voudriez-vous savoir pourquoi je l'ai tué ? Gauvain était très proche de l'empereur Arthur. Personne ne se serait douté de sa trahison envers son ami l'empereur. J'ai prévenu l'empereur qu'il protégeait une magicienne mais il ne me croyait pas. Alors, j'ai mis un plan pour l'assassiner en secret. J'ai appelé les Mousquetaires pour l'assassiner. J'avais besoin de leurs légendaires compétences pour traquer Gauvain et toi. Cela ne m'a pas pris longtemps à le convaincre de partir du Royaume des Francs car apparemment, ce Mousquetaire souhaitait lui-aussi sa mort. Je lui ai promis de l’argent pour le récompenser.

- Pourquoi les Mousquetaires ? Pourquoi ne pas appeler un mercenaire ou alors, un assassin professionnel !

- Sir Gauvain, durant sa jeunesse, habitait au Royaume des Francs, comme vous le savez déjà. Mais ce que vous ne savez pas, c'est qu'il avait des problèmes avec les autorités. Il aimait défier les Mousquetaires. Suite à un malentendu avec eux, il a été contraint de quitter le pays. En engageant les Mousquetaires, j'espérais que la police de Londine les accuse, à cause d’une vieille querelle entre eux. Aussi, il n'y aurait pas de mariage entre Louise XV et le prince Charles, car n’oublions pas : les Mousquetaires sont les Soldats de la Rein-Lune !

- Donc, les Mousquetaires sont vos boucs émissaires, conclue-t-elle, et ils ne se doutent de rien.

- Oui, ils ont foncé tête baissée dans mon piège ! Les Francs sont connus pour être de bons hypocrites, mais dès qu’on les propose un marché sournois, ils sont aussi naïfs que des enfants de cinq ans !

Elle remarque qu'il pose sa main sur le bureau de l'empereur. Il la met derrière son dos. “Il tient quelque chose dans sa main.” pense-t-elle.

- Normalement, le tireur aurait dû vous avoir mais cet imbécile vous a raté. Ce qui m'amène à vous tuer ici même. L'empereur croira que je l'ai défendu. Personne ne saura la vérité !

Tout à coup, il fonce sur elle. Par réflexe, elle fait un pas en avant et plante son épée sous son sternum. Il gémit. Immobile, il lâche le couteau. Du sang coule abondamment de sa bouche. Elle enlève son arme de son corps. Une tache rouge grossit au centre de sa chemise blanche.

Il la regarde, effrayé. Malgré tous ses efforts, le destin s’est réalisé. Le loup est venu et a pris sa vie. La voix de l’empereur Arthur III se répète dans sa tête : “certaines choses vous dépassent”. En fin de compte, il avait raison : tout ne peut pas être contrôlé à moins d’être un dieu. Vaincu, il s'agenouille devant la Mort, avant de tomber sur son ventre, comme s’il tombait au fond d’un gouffre infernal.

Un marais de sang se répand autour de son corps. Déboussolée et tremblante, Gwenda est clouée sur place, en train d’observer le corps du général et son épée maculée de son sang. Elle ne voulait pas le tuer contrairement à lui qui souhaitait garder le secret sombre pour toujours. Il ne lui a pas laissé le choix ! C'était elle ou lui ! Malgré toutes ces justifications, elle ne peut s’empêcher de se sentir coupable. Bien sûr, elle voulait se venger de la mort de Gauvain. Au fond d’elle, elle souhaitait sa mort, mais grâce à Yvie, elle a réussi à calmer ses ardeurs. Pourtant, à cause d’un imprévu, elle l’a tué non seulement par réflexe mais aussi par colère. Désormais, elle va devoir fuir car l'empereur voudra venger la mort du général de son armée, comme elle l'a fait pour son ami Gauvain.

Tout à coup, une voix familière la prend par surprise :

- Tu as tué mon père ?!

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