Les loups

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Tout à coup, Gwenda mord son oreille droite. Il pousse un cri à faire vibrer les tympans. Il recule en plaquant sa main sur son oreille qui laisse échapper un flot de sang. Il pleure. Tous ses amis observent le liquide rouge couler, choqués. Ils fixent leur regard sur elle. Les lèvres de la fille sont rouge sang. Elle crache quelque chose. Cette chose tombe par terre... C'est un bout de l'oreille droite! Quelques-uns vomissent ce qu'ils ont avalé tout à l'heure : poulet, pain et bière. D'autres ont seulement une grosse nausée.

- C'est qui, cette folle ?! demande l'un d'eux, horrifié.

- En tout cas, on peut dire qu'elle a une sacrée mâchoire !

- Qu'on la batte ! crache le chef qui n'a qu'une seule oreille désormais. Qu'on fasse comprendre à cette chienne qu'il ne faut pas dire "non" à un homme !

Ils vont vers Gwenda pour la prendre par les bras. "Au moins, c'est mieux que de se faire violer", pense-t-elle. "Mais... Qu'est-ce qu'on va me faire, en fait ?" Elle crie :

- Lâchez-moi !

Ils attachent ses pieds avec une corde. Puis, ils prennent un bandana pour couvrir sa bouche.

- Attention, tu as vu ce qu'elle a fait à notre chef, tout à l'heure ? dit l'un à l'autre.

- Oui, j'ai vu. (Il s'adresse à elle.) Eh ! Sérieux, t'es quoi au juste ? Une mutante ?

Elle ne répond pas. Son regard est noir, presque sauvage.

- Ok...

- En tout cas, je n'ai pas envie qu'elle me morde ! Vas-y, toi !

Il s’approche d'elle. Juste pour s'amuser, Gwenda claque avec ses dents pour faire semblant de le mordre. Par réflexe, il recule. Elle a presque envie de rire en voyant sa tête ! Elle a un grand sourire aux lèvres.

- Poule mouillée ! dit-elle, moqueuse.

Ils sont pétrifiés. Ils tremblent.

- Franchement, vous avez vraiment peur de moi ?! s'exclame-t-elle. Vous vous croyez civilisés ? Pourtant, vous ne savez pas retenir vos pulsions de mâle ! Quand vous croisez une jolie femme, vous n'hésitez pas à la violer. En fait, vous êtes pires que des animaux ! Vous êtes des monstres !

Soudain, elle reçoit une grosse claque. L'autre encourage son ami :

- Vas-y ! Frappe-la de toute tes forces ! Je vais chercher le fouet.

Avant qu'il ne lève sa main pour lui donner une autre claque, une voix s'élève :

- Eh ! Regardez ce que j'ai attrapé !

La prisonnière ouvre grand les yeux. L'un des bandits tient le corps d'une louve noire. Elle reconnaît Louna grâce au croissant de lune sur son œil. Du sang coule de la gorge. Le cœur battant, Gwenda crie de rage et se met à pleurer.

Les autres l’observent, interrogateurs. Elle est pliée sur elle-même, les épaules voûtés. Sa frange cache ses yeux humides. L'un d'eux s'approche d'elle tout doucement. Au moment où il pose sa main sur son épaule, la fille rousse le repousse et s'emporte :

- CREVEZ-TOUS, BANDES D'ENFOIRÉS !!!

Sa voix fait trembler le feu de camp qui crépite. Les oiseaux perchés sur les arbres d'alentour s'envolent tout de suite. Le bruit de leurs ailes brise le silence nocturne. Puis, le silence retombe. Tout le monde, dont Gwenda, est immobile, comme si la mort était en route. La prisonnière a ressenti une aura, chaude comme la braise, se dégager d'elle-même. Son énergie s'est vite propagée dans les environs quand elle a souhaité leur mort. Comme les braconniers, elle a peur.

- Tu as senti le vent ?

- Ouais.

Tout à coup, un hurlement se fait entendre au loin. Tout le monde sursaute. C'est celui d'un loup. Il est sinistre. Tous les hommes tremblent comme des feuilles. D'autres hurlements viennent, comme un orchestre.

Le silence retombe. Personne ne dit un mot. Gwenda a l'étrange intuition que quelque chose de terrible va venir. Malgré cette ambiance pesante, le chef s'exclame :

- Oh ! Ce n'est rien ! Ce sont juste des hurlements de loups ! Ils vont commencer leur chasse, comme d'hab !

Tous les autres le regardent, incrédules. Soudain, un cri s'élève de la forêt. L'un des deux qui sont à côté d’elle dit :

- C'est Edouard. Il a sûrement oublié de laver ses mains pleines de piment avant d'aller faire ses besoins.

Gwenda a presque envie de rire mais ce n'est pas le bon moment. Elle sait qu'il est arrivé quelque chose à cet Edouard ! Il faut qu'elle parte ! Mais comment ?! En rampant par terre comme un ver de terre ?!

Un homme part voir Edouard. Un nouveau cri s'élève. Il ne revient pas.

- Oh ! Merde ! s'exclame un des braconniers.

Les deux qui entourent la rousse partent. Les hommes courent avec leurs arbalètes. Elle se retrouve seule. "C'est le moment de partir !" se dit-elle, ayant retrouvé l'espoir de la liberté. Elle rampe le plus vite possible vers la forêt. Il se peut que ces prédateurs ne soient pas loin mais elle préfère se frotter à des animaux plutôt qu'à des violeurs. Autant être déchiquetée en rondelles que d'être touchée par un homme !

Tout à coup, elle voit deux gros yeux dorés devant elle ! C'est un loup gris. Il a le regard méchant. En voyant cet animal énorme, elle se sent faible. Elle n'a ni d'arme pour se défendre, ni ses jambes pour courir ! Elle est morte, déjà !

Elle ferme les yeux. Elle attend patiemment son heure arriver. Son cœur bat comme une horloge. Boum ! Boum ! Boum ! Le prédateur s'approche d'elle tout doucement. Ses pas s'entendent à peine. Plus il est près d'elle, plus son cœur devient fort. Elle a envie de craquer mais hors de question qu'elle montre sa faiblesse ! Il faut qu'elle soit brave jusqu'à la mort, comme une chevalière !

Le loup passe à côté d'elle. "Quoi ?!" pense-t-elle, étonnée. Elle ouvre les yeux. Oui, il l’a bien épargné ! "Pourquoi ?!" se demande-t-elle encore, incrédule. L'animal s'éloigne d'elle, apparemment concentré sur une autre proie. C'est un homme qui tient une arbalète. En entendant ses pas, l’homme se retourne mais avant qu’il n’agisse, le loup saute sur lui pour l'égorger.

Gwenda détourne son regard : elle n'a pas envie de regarder le spectacle, bien qu'elle ait l'habitude des morts. Elle entend les plaintes de la victime et le grognement du fauve. Puis, le silence. Le canidé s'éloigne du corps pour tuer une autre proie. Elle se dit : "Ils ne veulent même pas manger. Ils les tuent seulement. Pourquoi ?" Puis, d'autres cris. Tous les bandits meurent dans la forêt.

Un couteau est tombé à côté du corps. Elle rampe jusqu'à cette arme. Arrivée à son niveau, elle l'attrape et coupe les liens qui unissent ses mains.

Silence. Tous les bandits sont morts. Soudain, deux yeux dorés l'observent. Gwenda devient pétrifiée. Le loup s'approche d'elle mais sans être agressif comme il l'a été tout à l'heure... Comme s'il n'avait rien à craindre d'elle ! Elle n'arrive pas à croire ça ! Terrifiée et en colère, elle s'exclame :

- Vas-t-en ! Je ne veux plus te voir ! T'en as assez fait aujourd'hui !

Le loup prend peur et retourne vers les ténèbres sylvestres. Gwenda tremble. Elle enlève la corde qui attache ses pieds. Elle se met debout. Elle cherche quelque chose pour faire apparaître une lumière. Elle trouve une lanterne qui est posée par terre, sous une tente. Ensuite, elle trouve un briquet et elle allume la bougie qui se trouve dans l'objet. À partir de là, de la lumière jaune orangé apparaît et brise les ténèbres. Après, elle trouve son épée dans un coffre. Elle entre dans la forêt.

Ce qu'elle voit la terrifie. Des corps contiennent des traces de morsure. Alors que les bandits sont morts, elle, elle est vivante ! Personne n'a survécu à l'attaque sauf elle ! Prise de nausée, elle s'agenouille.

Face à tout ce massacre, elle ne se trouve pas normale. Pourquoi est-elle encore vivante ? Elle se sent coupable. Elle sait que c'est bête de penser ça : elle ne les a pas tués. Mais juste avant le massacre, elle a prononcé une phrase, qui s'est répandue dans toute la forêt jusqu'aux loups qui ont attaqué le camp juste après. Elle a senti une énergie émaner d'elle, sombre et menaçante. Et le loup... Il a passé à côté d'elle comme si elle n'était pas une menace...

Elle regarde ses mains. Elles sont sales, pleines de terre. Son pouls s'accélère. Elle les essuie sur ses jambes, dégoutée. En pensant subitement à son amie la louve, elle croise ses bras et pleure.

- Pardon, Louna... Je n'ai pas pu te protéger. Je suis douée pour tuer, pas pour protéger... Tous mes amis meurent alors que moi...

Ses larmes coulent abondamment. Pendant ce temps, des silhouettes menaçantes s'approchent d'elle. Gwenda ne se rend pas compte de leur présence, trop occupée à pleurer la mort de son amie.

Soudain, une bombe à gaz atterrit devant elle. Elle sursaute. Le gaz s'échappe et l'enveloppe. Elle tousse. Ça a une odeur immonde ! Le sommeil la gagne et elle tombe.

Le noir.

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