C'est le début du combat épique entre Gwenda et Cazanotz. Elle évite son attaque. Puis, une autre. Elle attaque mais l'autre l'esquive d'une vitesse impressionnante. La guerrière essaie de le toucher au moins une fois mais rien à faire : il est trop rapide ! Elle fait un coup latéral. Il recule.

- Ce doit être difficile de ne pas savoir d'où on vient. Je suis sûr que tout ce qui t'arrive te rend perdue et anxieuse.

- Bon, vous m'avez emmené ici pour un brin de causette ou pour me tuer ?! s'énerve-t-elle.

Coup vertical esquivé.

- Dis-moi : t'es-tu déjà demandée qui tu es ?

- Si mais ça m'est égal !

Elle donne deux coups mais il esquive et va derrière elle pour l'attaquer par derrière. Elle l’évite.

- Pourquoi continuer à croire que tu n'as pas de pouvoirs magiques ? C'est évident : tu en as.

Il réussit à toucher sa jambe mais sans pour autant la faire tomber.

- Mais qu'insinuez-vous par là ?! Je vous ai déjà dit que je n'étais pas une magicienne ! Qu'on arrête avec cette histoire !

- Alors, explique-moi le coup du loup.

- C'était juste un hasard ! Rien de plus ! Ils ont senti l'odeur du sang de mouton et ils sont venus !

- Ah oui ? Pourtant, tu les as appelés. Enfin, je crois. Tu as souhaité qu'ils viennent et ils sont venus.

- Mais pourquoi vous parlez de ça ?! Depuis tout à l'heure, vous parlez ! Ce n'est pas très convaincant quand on se bat !

Il la pousse. Après sa chute, elle se relève.

- Tu as grandi parmi les non mages ? Cela explique pourquoi tu n'es pas au courant de ce que tu es. Tu n'as jamais su ta véritable nature... Ou à moins que tu l'aies toujours su et que tu n'as jamais voulu l'admettre.

- Taisez-vous !

Elle réussit à toucher son épaule. Il siffle en retournant dans les ténèbres.

- Vous vous cachez maintenant ?! Espèce de lâche !

- Je sens ta peur.

Elle se tourne vers la provenance de la voix.

- Qu'as-tu peur ?

Elle se retourne. "Purée ! Où est-il ?!"

- De l'ombre ? Oui, bien sûr. Sinon, tu ne resterais pas toujours dans le cercle de lumière durant le combat. Quand je te poussais, tu t'arrangeais toujours pour rester au milieu du cercle.

- Taisez-vous !

- Quoi d'autre ? Des araignées, des souris, des serpents ?

- Ha ! Ha ! Très drôle !

- Non, vu ta réaction, tu n'as pas peur de ces bêtes-là. Mmh... Laisse-moi réfléchir... De la vérité.

- Quelle vérité ?!

- Savoir qui tu es.

- Ah ! Très drôle !

- Non, ce n'est pas ta nature qui te fait peur. Mmh... Ce sont les autres, n'est-ce pas ? Tu as peur du rejet, alors tu te caches en entrant dans la masse. Tu essaies d'oublier ta différence pour te sentir comme les autres, mais d'un jour ou l'autre, ton passé te rattrape.

"Sérieux ? Il me manipule ou quoi ?!" pense-t-elle.

- Mais vous racontez n'importe quoi ! Je rêve, là !

- Ouh ! Elle s'énerve !

- Je suis énervée depuis tout à l'heure, donc, ne cherchez pas la petite bête !

Elle se retourne et fait un mouvement latéral avec son épée. Pourtant, elle reçoit un coup d'aile sur le dos. Elle est envoyée en avant et chute du rocher de deux mètres de hauteur et se retrouve dans les ténèbres. En arrivant au sol, une vive douleur traverse son épaule gauche. Elle ne tient plus son arme... Qui est derrière elle. Casanotz pose ses pieds sur le sol.

- Oh ! Pauvre petit créature... Pourquoi te battre ? Tu es aussi faible qu'un agneau égaré de son troupeau.

Elle se tourne vers lui. Il est encore plus menaçant dans l'ombre avec ses gros yeux luisants. Il marche pas à pas vers elle.

- Tu es faible. Tu as peur du noir. Tu n'assumes pas ce que tu es.

Elle saisit la manche de son épée.

- Abandonne : je suis plus fort que toi, plus rapide que toi. Je vais te manger.

Elle prend son courage à deux mains et parle :

- Oui, c'est vrai.

Il s'arrête net devant elle, surpris.

- Je n'ai ni d'aile, ni de dents pointues, ni de griffes. Je ne pourrai jamais être aussi rapide que les Draculiens, ni voir dans le noir. Je ne serai jamais comme eux car je suis née différente et je mourrai différente. J'ai peur du noir, de l'enfermement et du rejet. Je n'ai jamais assumé ce que je suis réellement car les non-mages haïssent les gens dotés de magie. Pour eux, nous sommes des monstres venus tout droit des Enfers... L'incarnation du mal absolu. Ils se croient mieux que nous mais ils ne le sont pas en réalité. Ils nous tuent comme du bétail. Même une bête sauvage n'éprouverait pas ce plaisir. Ce sont eux les monstres. Vous avez raison sur tous les points sauf un.

Il fronce les sourcils.

- Je ne suis pas un agneau.

Elle plante son épée dans son cœur. Aucun son ne sort de la gorge de Cazanotz. La gagnante le regarde de façon impassible.

- Voulez-vous savoir qui je suis ? Je m'appelle Gwenda et vous feriez mieux de ne pas l'oublier dans les Enfers.

Il s’affale sur le dos. Elle observe le corps de son adversaire. Ses yeux perdent la vie. De la bave sort de sa bouche. Elle reprend son arme pendant que les chiropiens poussent des cris de frustration.

Elle court à l'aveugle. Un hybride la frappe à la tête. Elle tombe sur ses genoux et se relève. Elle reste sur place, en train d'attendre qu'un autre arrive vers elle. L’un d’eux apparaît en ouvrant ses pieds de chauve-souris. Elle réussit à le mettre à terre en lacérant une aile. Elle enfonce son arme dans son abdomen. Un deuxième arrive. Elle le tue en en coupant ses jambes. Puis un troisième. Un quatrième...

Tout à coup, elle reçoit un coup au visage. Elle atterrit sur son dos. Elle est soudain encerclée par des dizaines de chiropiens, qui souhaitent venger la mort de leur roi. Tous ces yeux immondes s'approchent d'elle, prêtes à lui arracher les entrailles. Elle est fichue !

Soudain, une lumière aveuglante brise les ténèbres. Les chiropiens la fuient en sifflant de rage et de terreur. Gwenda protège elle-aussi ses yeux, maintenant habitués à voir dans l'obscurité. Elle se demande d'où vient cette lumière blanche qui vient de lui sauver la vie.

Curieuse, elle ouvre légèrement son œil droit. Elle voit une silhouette courir vers elle. Elle empoigne fortement sa main et hurle :

- Suis-moi !

Sans réfléchir, Gwenda obéit. Elle se lève et la suit. Ses yeux se mettent longtemps à s'adapter à la lumière blanche pour voir que c'est une femme blonde qui la guide. Elle a un bandeau rouge qui cache ses oreilles et elle est habillée avec des vêtements en cuir noir. Elle a aussi un arc autour de sa poitrine et un carquois accroché à sa ceinture.

L’étoile blanche repousse les chiropiens. Elle éclaire leur chemin jusqu'à la sortie bleuâtre qui se trouve au fond de la grotte. Le cœur battant, elles courent jusqu'à la sortie.

Enfin, elles sont dehors. La rousse remarque que la boule de lumière vient de la main de sa sauveuse.