L'ours-épic

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Tout à coup, quelque chose atterrit sur son épaule. Elle sursaute. C'est une crotte d'oiseau. Elle grimace de dégoût. Elle arrache une feuille d'un buisson pour essuyer. Il reste encore l'odeur immonde sur son vêtement ! Elle émet un juron en britannique :

- Saloperie d'oiseau !

Elle se dit : "Il faut que je trouve une source d'eau. Je ne peux pas continuer à puer comme de la merde !". En effet, l'odeur d'excrément d'oiseau risque d'attirer des animaux dangereux, ce qui l'inquiète beaucoup. Pendant une heure, elle marche, à la recherche d'eau. Sa gourde se vide petit à petit jusqu'à ne laisser qu'une goutte d'eau. Elle a encore soif. "Il faut que je trouve cette eau." pense-t-elle encore.

Et elle l’a trouvé. Après un quart d'heure encore, elle arrive devant une rivière. Une petite chute d'eau de cinquante centimètres de hauteur ne se situe pas loin d'elle. Des petits poissons noirâtres nagent dans l'eau. Le ciel n'est malheureusement pas dégagé ; ce qui gâche un peu la splendeur de cet endroit. Mais elle se fiche de la beauté du paysage : tout ce qu'elle pense, c'est boire et laver son manteau rouge.

Elle s'accroupit. Elle remplit d'abord sa gourde puis boit l'eau de la rivière dans ses mains. Elle a tellement soif ! Ensuite, elle enlève son manteau pour le laver. Sans ça, elle porte un gilet court de couleur marron sur une chemise blanche à manches courtes. Elle pose son arc à côté d’elle.

Soudain, elle entend un grognement. Elle relève vite sa tête. Une ombre menaçante se dresse sur ses deux pattes. Ses yeux blancs la fixent avec méchanceté. La créature a de grosses pattes velues et griffues. Son dos est couvert d'épines...

Un ours-épic ! Le pire qu'elle craignait s'est réalisé ! Elle se relève et fuit en reprenant sa sacoche et son manteau. Elle ne peut pas se battre contre ce monstre. C'est impossible ! Il faut qu'elle coure le plus vite possible ! Elle parcourt entre les arbres. Loin devant elle, règnent les ténèbres : elle ne voit pas le fond. Mais ça ne la décourage pas pour autant. Poursuivie par l'ours-épic, elle ne décélère pas une seule seconde. Seul son instinct de survie la guide. Le taux d'adrénaline à son maximum, son cœur bat comme un tambour, ses membres sont aussi légers que des plumes et le sang circulant chauffe l'intérieur de son corps.

Elle regarde derrière elle pendant une milliseconde. Bien qu’il soit loin d'elle, il se rapproche d'elle. Elle est très étonnée d'être encore en train de courir. Il n'aurait pu la rattraper ! Il faut dire que l'adrénaline l'a rendu encore plus rapide que d'habitude. Elle arrête de réfléchir : pour l'instant, elle doit courir. Que courir ! Les questions, ce sera pour plus tard.

Tout à coup, elle s'arrête. Une falaise ! Une pente inclinée de soixante degrès descend jusqu'en bas. Au bout de celle-ci, il y a le vide. Elle ne sait même pas qu'elle est la hauteur entre le sommet et le sol! Si elle saute, il y a de grande chance qu'elle meurt ! Coincée, elle s'exprime à voix haute :

- Shit !

Soudain, l'ours-épic arrive. Il lui donne un coup de patte pour l'envoyer vers le vide. Elle atterrit sur la pente. Boum ! Elle glisse. Elle sent le frottement brûlant de la terre sur sa peau. Son cœur tapote, tapote, tapote contre sa poitrine. Elle roule sur le côté. Le monde tourne autour d'elle. Par instinct, elle sort son couteau de chasse pour le planter dans le sol, afin de ralentir sa chute. L'arme blanche trace un trait vertical dans la terre. Elle atteint le bas de la pente.

Elle tombe. Le couteau part avec elle. Le vide. Tout s'enchaîne si rapidement. Le sommet de la colline et le ciel s'éloignent d'elle. Elle crie.

Boum !

Le noir complet.

***

Une lumière astrale apparaît dans son champ de vision. Le sol se déplace sous elle. Non, c'est elle qui se déplace. Non, c'est quelqu'un d'autre qui la déplace ! Ou quelque chose... Elle ouvre ses yeux tout doucement, sonnée. Sa tête est lourde comme une massue. Elle voit des arbres et un ciel noir. Elle referme les yeux. Elle a l'impression que quelqu'un l’a frappé à la tête... Non, elle est tombée ! Tombée d'une falaise ! Comment a-t-elle perdue l’équilibre ? Elle l'ignore : elle a un trou noir.

Quelque chose la tire par la cheville gauche... Avec sa mâchoire. Elle ouvre les yeux pour regarder son transporteur. C'est un quadrupède. Taille moyenne, yeux dorés... "Attends ! C'est un loup !" Son instinct lui dit de ne pas bouger, de faire semblant de faire la morte comme les opossums. Ce qui est ridicule en partie : si les loups la croient morte, ils la mangeront. Mais si elle montre qu'elle est vivante, ils l'égorgeront. Elle balaye son regard tout autour d’elle : elle ne discerne pas d’autres loups. Un loup solitaire ; ce serait donc plus facile pour elle de se défendre, quand il se mettra à l’attaquer.

Au moment où elle repose sa tête pour faire semblant de dormir, le canidé relâche son pied. "On est arrivé ?" s'interroge-t-elle. Elle est bien tentée de rouvrir les yeux pour voir où ils sont mais elle ne doit pas le faire. Elle attend que l’animal s’approche d’elle pour le tuer avec son couteau de chasse... Qui n’est plus sur elle, d’ailleurs. L'animal la contourne pour ensuite la... Lécher. Surprise, elle le dégage et se relève en s'exclamant :

- Va-t'en !

Le canidé s'enfuit. Il disparaît dans les ténèbres de la forêt. Elle s'essuie la joue, écœurée. Berk !

Ça lui paraît bizarre qu'un loup adulte l'ait amené vers une clairière pour ensuite la lécher. Comme un chien ferait à son maître. Mimi était aussi gentil avec elle mais c'était compréhensif : c'était un louveteau sans mère. Mais là...

Elle repousse ces questions de son esprit. Ce n'est pas le moment de s'en poser. Il faut qu'elle sache où elle est ! Elle regarde tout autour d'elle. Elle se trouve au milieu de nulle part ! Comment va-t-elle retrouver son chemin ?! Et si elle ne trouve pas d'abri, elle cuira sous le soleil !

Ah non ! Il y a un gros trou sous le rocher. À croire que cet animal l'avait mis à l'abri. "Mais qu'est-ce que je raconte ?!" se dit-elle en frappant son front, lucide. Elle s'assied sous le rocher pour réfléchir. Elle a toujours sa sacoche autour d'elle mais elle n'a plus son couteau et son manteau, qui sont tombés de la falaise. Le manteau, ce n'est pas grave mais le couteau, si. Il a été offert par Maître Gauvain. Que penserait-il si elle le perdait ? Il la comprendrait sans doute. Pourtant, elle a un nœud dans l'estomac. "Au moins, j'ai toujours mon épée." Ce que Maître Gauvain n'apprécierait sûrement pas !

Elle se triture la tête. "Qu'est-ce qu'il s'est passé avant ma chute ?" Elle a perdu une petite partie de sa mémoire. Pour toujours. Mais ce qui compte, c'est qu'elle se souvient toujours du but de son voyage.

L'assassin de Maître Gauvain.

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