PL : 9

Affinité Nao-Nao : 10/10

C. Il emprunta l'escalier afin de voir la duchesse et en apprendre, peut-être, un peu plus sur cette histoire de frère et soeur.

On ne se préoccupa guère du petit quadrupède montant les marches avec fluidité. En quelques bonds, il fut sur la terrasse supérieure contournant le grand salon, a yant à peine le temps d'apercevoir les hôtes emprunter un couloir, la porte se refermant sur eux. Pumpkin se glissa tout juste dans l'entrebâillement, mais se fit alors aussitôt remarquer par la duchesse.

"Oh, ça alors ! s'exclama-t-elle, ne se penchant pas pour l'attraper, comme il l'imaginait - ce devait être à cause de son ventre.

- Voilà un bien mignon petit chat tout orange, s'amusa le duc Loiry, s'exécutant à sa place. Mais... n'est-il pas celui que nourrissent les jumelles dans le jardin ? murmura-t-il, jetant un bref coup d'oeil à l'entrée.

- Crois-tu... ? poursuivit Dvina, inquiète, passant une main sur son ventre dans un geste spasmodique.

- Hm... (il toussota), allons chérie, tu as besoin de te reposer. Je vais retourner auprès des invités."

Il garda le chat dans ses bras et le ramena dans le salon. L'animal, docile, songeait au précédent échange. Ils appelaient leurs soubrettes "les jumelles", cela ne semblait pas coller. Et qu'avait voulu dire la duchesse, s'arrêtant au milieu de sa phrase ? De qui avaient-ils peur ?

Evidemment, Marine revint les voir. Elle semblait si joyeuse que le duc lui tendit spontanément l'animal. Néanmoins, Pumpkin décida de s'esquiver à cet instant et retourner aux cuisine, là où, peut-être, Mélusine et Maeve discuteraient. Il en apprendrait probablement un peu plus.

"Oh non il s'enfuit !" entendit-il derrière lui avant de passer la porte arrière, la poussant de la tête.

Peu importait. Les jumelles parlaient entre elles dans la cuisine, aussi s'arrêta-t-il à la porte, car elle était fermée et il ne voulait pas qu'elles le repèrent.

"La duchesse mettra bientôt au monde son enfant. Notre longue attente arrive à sa fin...

- Soyons prudentes. Il reste un peu moins de deux mois. Il faut que rien n'arrive à la duchesse.

- Bien sûr. De toute façon, il n'y aura plus qu'une autre fête avant la naissance. Tout ira bien, Mélusine, ne t'inquiète pas.

- Je vais aller chercher de la glace d'Uolang à la réserve.

- D'accord ! Prends aussi des paillettes d'ailes de nuit tant que tu y es."

Percevant les pas de Mélusine venir à la porte, Pumpkin bondit vers le jardin, disparaissant du couloir à l'instant où la jumelle sortait.

Le chat réfléchissait profondément. Cette histoire était décidément bien curieuse.

Un air de violon languissant l'attira vers une tonnelle illuminée de lampions ; un vieil homme était assis sur un banc, jouant seul dans la nuit. Pumpkin, dans les buissons, l'observait en silence. C'était une belle harmonie, mais l'air de cet homme l'attristait. Il l'avait déjà vu à toutes les fêtes du manoir ; ne connaissait toutefois rien de son passé. Il y a tant de monde sur Terre !

Il s'avança dans la lumière et, assis sur l'arrière-train, continua de l'écouter.

Arlo Coldobar leva la tête et lui sourit sans cesser de jouer.

"Voilà bien longtemps que je n'ai eu d'aussi attentif spectateur. Pas depuis ma jeunesse..."

Il soupira.

"Sais-tu, petit chat, j'étais insouciant, bien trop insouciant. Mon père ne m'a laissé que des dettes pour héritage. Dire qu'ici... l'on m'accepte encore... (Il leva la tête, son violon reposé sur les genoux) Je souffre de voir ces murs encore, mais je ne peux m'empêcher de revenir à chaque fois. J'étais grand amoureux de la précédente duchesse, ha ha ! Elle est morte et cela fait quarante-cinq que je viens ici. Ah, cela ne fait pas quarante-cinq ans qu'elle est décédée, hein, non, mais..."

Autre soupir, douloureux.

"Elle s'est mariée et son premier enfant est mort... Je suis venu pour la soutenir, de loin... son mari était à ses côtés, elle ne m'a pas vue. Dès lors, je m'approchais du manoir sans y entrer. Finalement, je n'ai jamais pu lui dire à quel point je l'aimais. Son second enfant a disparu... et elle est morte quelques années après avoir mis au monde son troisième, l'actuelle duchesse Dvina. Quelle tragédie ! Elle n'a vraiment pas eu de chance."

Il s'essuya une larme puis reprit :

"Les domestiques sont vraiment gentilles. Elle me laisse entrer dans le jardin. Je leur offre des bijoux et je peux jouer du violon auprès des invités qui me donnent parfois même un peu d'argent. Oh, je reçois aussi un peu de monnaie de la part des jumelles, chaque mois. Oui, elles sont gentilles de se préoccuper de moi. Ha ha, je parle tant petit chat. Tu es bien patient avec moi !"

Des invités s'approchèrent : la belle Sahara et sa suivante ; son ensemble formé d'un sarrouel et de mocassins dorés avait une grâce supérieure à toutes les robes vues dans le grand salon. Pumpkin alla aussitôt à ses pieds, miaulant. La jeune femme se baissa et lui caressa le poil. L'être de la lune regrettait ne pouvoir communiquer plus facilement à présent, mais il devait bien avouer qu'être un chat avait ses avantages et que de nombreuses personnes se confiaient à lui sans connaître sa véritable nature.

Des éclats de voix provenant du salon parvinrent à ses oreilles aiguisées. Il semblait qu'une dispute y avait éclaté !

A. La soirée étant bien entamée, cela pouvait être normal, surtout les boissons aidant. Néanmoins, il décida d'y retourner afin de voir ce qu'il se passait exactement, prenant la porte arrière.

B. Il n'en fit cas, car à cet instant un bruit de pas, lointains, que lui seul pouvait percevoir, l'intrigua vers la façade ouest du manoir, sous les fenêtres des appartements du duc et de la duchesse.