13. Dannie

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Un, deux, trois, quatre.

Dannie se cambra en avant. Appuyée sur ses poings, elle s’étira le dos. Ses cheveux roux et lisses cascadèrent sur ses épaules. Autour d’elle, un cercle de bougies. Les flammèches brillaient.

Un, deux, trois, quatre.

Elle se tenait au centre de sa salle de danse. Les murs étaient des miroirs, les reflets sa seule compagnie.

Un…

Dannie ferma les yeux. Son thorax se levait et s’abaissait au rythme de ses souffles. Elle se releva, très lentement… Son bras gauche se décolla peu à peu de son tronc, caressa avec grâce l’air qui lui faisait face. Le droit suivit, puis ses jambes, son bassin. Des gestes doux, des gestes nébuleux. Dannie n’imposait rien à ses membres. C’étaient eux qui la soumettaient à leurs mouvements. Elle ne surveillait rien d’autre que sa respiration, sa lente, très lente respiration…

Deux…

Dannie s’abandonna tout entière. Les gestes se murent en pas de danse. Dannie se sentait transportée d’un coin à l’autre du cercle de bougies. Ses jambes accéléraient, bondissaient, s’abaissaient, se redressaient. Ses bras accueillaient leurs commandements, ordonnaient au corps auquel ils étaient rattachés de tournoyer, tournoyer, tournoyer. La vitesse avait remplacé la grâce et la transe, la danse.

Trois…

Dannie rouvrit les yeux. Les reflets s’étaient évaporés, les miroirs avaient noirci… Ils n’affichaient plus qu’un vide noir, insondable. Et pourtant, malgré ses tournoiements, Dannie la vit enfin. La silhouette d’une vieillarde dos à elle. Déguenillée et si perdue dans ce décor de rien. Dans l’ignorance de celle qui l’avait convoqué. Dannie soupira. La femme soupira. Elle ferma les yeux, elle l’imita. Elle dansa ; et bientôt, elle aussi, se mit à danser…

Quatre.

Quand elle rouvrit les yeux, Dannie était dans un vieux manoir, vétuste et triste. Dans le miroir fêlé, face à elle, elle voyait la vieillarde. Elle, était dans une salle entourée de miroir, une salle de danse.

Dannie avait peu de temps. Les bougies n’allaient pas tarder à mourir.

Elle se pencha. Sous le miroir, il y avait une commode. Dans la commode, un dessin d’enfant. Poussiéreux. Un soleil anthropomorphe brillait dans le coin. Des gamins faisaient une ronde autour d’une maison grossière. Ils étaient tristes, la bouche tordue vers le bas. Était-ce à cause de ces mégères qui brandissaient des bâtons autour d’eux ?

Un orphelinat, songea Dannie en reposant le dessin.

Elle ferma le tiroir. Les murs étaient roussis. Une forte odeur de cendres lui parvenait au nez.

Un orphelinat brûlé.

Soudain, le choc. Dannie crut s’être cognée, violemment. Le choc lui arracha un cri étouffé. Quand elle releva la tête, elle était de retour dans sa demeure. Autour, les miroirs avaient recouvré leurs reflets initiaux. Le cœur lourd, Dannie se caressa machinalement le crâne. Elle ne distingua aucune plaie… ni aucune goutte de sang.

Elle sourit.

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