Chapitre 8 : À Paris...

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« Des pigeons voyageurs... C'est bien ça... On pourrait inventer un code... Est-ce qu'à travers des boîtes de métal, reliées par un fil... On s'entendrait peut-être. Mais quelle longueur pour le fil ? Ou bien... Oui ! C'est une idée ! »

Ainsi passa la nuit du jeune Théodore, qui rêvait à des conversations bien mystérieuses avec la fille de la sorcière. Le songe dura jusqu'au matin, où Cathy vint le réveiller. Il était l'heure. Aussitôt, il sauta du lit. Paris ! Mais pas encore... Les règles du temps lui apparurent contre lui. Par quel mystère se faisait-il que la toilette dure si longtemps ? Pourquoi le petit-déjeuner traînait-il autant en longueur ? Était-ce normal que la voiture mette autant de temps à arriver ? POURQUOI LE MONDE TOURNAIT-IL SI LENTEMENT ?

Enfin, le bruit des chevaux et des grandes roues se fit entendre. L'impatience maussade redevint excitation joyeuse. Dame Marie-Belle ne savait trop ce qu'elle préférait de ces deux sentiments sur son fils. Toujours est-il qu'il l'aida à prendre appuie sur le marche-pied en lui offrant sa main. Avec ravissement, elle songea que son éducation n'était pas si mauvaise. C'est avec un égal contentement que l'enfant se dit que la robe de Mère entrait plus facilement qu'il ne l'aurait cru dans cette voiture. Aussi put-il s'y engouffrer et faire claquer lui-même la portière.

- Fouette Cocher ! Faillit-il lancer joyeusement.

Mais le regard de sa mère le rappela à l'ordre. Il préféra donc se tenir le plus calmement possible, pour le moment. L'attelage s'ébranla. Enfin !


Bientôt, il serait à Paris. Bientôt, il retrouverait son père aussi...

L'allégresse s'éteignit un peu. Il est vrai que dans ses rêves, Père était un fier chevalier, tapotant l'épaule de son fils, l'emmenant partout avec lui, pour lui apprendre avec fierté et amour tout ce qu'un homme devait savoir. Mais en réalité, il ne l'avait pas vu depuis quelques années. Trois ans peut-être de guerre. De retour à Paris depuis six semaines, la famille allait enfin être réunie.

-  Après, Père reviendra vivre avec nous, n'est-ce pas Mère ? Demanda-t-il hésitant.

- Naturellement, voyons ! Il est plus que temps ! Claironna-t-elle avec une fausse assurance.

L'accent de doute n'échappa pas à Théodore. Le retour de son père était sûr pourtant. Il ne combattrait plus, du fait d'une blessure. Simple gentilhomme désormais, le roi allait le remercier de ses services et le renvoyer à la campagne... Mais est-ce que cela se passerait bien ? Trois ans de séparation, trois ans à vivre comme bon leur semblait... Comment s'organiserait la nouvelle vie ?

-  Tu crois que Père est gentil ?

Voilà ce que Théo aurait aimé demander. Mais ça ne se faisait pas. C'était un coup à se faire punir. On ne doute jamais de ses parents. On les aime et on s'en occupe lorsqu'ils vieillissent. Qu'importe le caractère. Et puis « gentil », Dame Marie-Belle lui aurait ri au nez. Ce n'est pas de la gentillesse que l'on attend d'un Chevalier ou d'un gentilhomme, mais du courage, de la bienséance et de la force. Pour le reste... Bah ! Qu'importait !

L'arrivée à Paris se fit étrange. Finie la route de terre battue, bonjour les routes pavées.

- Mère, savez-vous qu'en Carmélide les routes pavées font choir les chevaliers ? Pour peu qu'ils tombassent dans une flaque d'eau, alors l'armure rouille et ils ne peuvent plus arquer ! Vous le saviez ?

- Mais où allez-vous donc chercher pareilles âneries ? Soupira Dame Marie-Belle, sentant une migraine naître.

Une seconde fois, le temps se mit à ralentir. Pour sûr, une sorcière se cachait sous ce maléfice. Mais cette fois-ci, Théo n'en parla pas. Somme toute, le trajet s'acheva, il le fallait bien. Cela se fit dans un gros soupir de soulagement. Tout au moins pour la mère de l'enfant. Celui-ci n'arrêtait plus de parler sur tout ce qu'il voyait. Des marchands en tous genres, des filles de joie, des vieux jetant leur pot de chambre par la fenêtre, des voleurs de rues pourchassés...

-  Grand Dieu, occupez-vous en Élise, c'est assez pour moi ! Pria-t-elle en descendant de voiture, alors que Théo s'agitait, se retenant de courir en tous sens.

La servante ne se fit pas prier. Revoir ses maîtres la rendait heureuse. Non pas qu'elle eut été mal traitée... Mais elle n'avait pas plus été choyée. Le retour à la norme la soulageait. Au moins, avec « sa » famille, elle savait sur quel pied danser.

- Petit maître, Monsieur votre Père viendra demain vous chercher, informa Élise dès qu'elle fut seule avec Théo. Il faudra vous tenir convenablement.

Dans la chambre qui lui était accordée pour son séjour, il se sentait à l’étroit. Elle était trop petite pour commencer. Et puis la fenêtre donnait sur des murs de maisons. Ici, pas de jardin, pas de verdure, juste de grandes et belles demeures. Il avait tout le confort souhaitable, mais ces normes n'étaient pas les siennes. Sa chambre immense, la vue sur la tour, l'odeur de la campagne...

-  Dis Élise, chuchota-t-il sur un ton de conspirateur, ça pue drôlement ici non ?

- Oh oui, c'est pas bien aéré. Et puis c'est pas comme chez nous, y a moins d'eau en ville. Y z'ont pas de rivière peut-être, expliqua-t-elle en lui enlevant ses vêtements de voyage.

- Il y a la Seine, objecta l'enfant. Alors elle doit arriver ici en dernier, après qu'on ait tout lavé dedans nous, à la campagne. Parce que ça m'a pas l'air bien prop' ici. Ou peut-être bien qu'y sont trop nombreux. Du coup, l'eau est sale. Moi, je pense qu'elle passe en premier chez nous. Parce qu'elle est bien claire. Ici... Ah ça non... Elle a pas la même couleur, et encore moins la même odeur...

- Dis Élise... Chuchota à nouveau Théo, plus hésitant.

- Oui ? Répondit-elle à l'écoute, tout en le recoiffant.

- As-tu rencontré Père ?

La voix inquiète du petit homme fit comprendre à la bonne dame que la question était d'importance.

- Non, pas encore. Mais on dit de lui que c'est un grand homme...

- Ça, je le sais bien voyons, l'interrompit-il, j'ai regardé tant de fois les photos de père que je le sais !

- Tss ! Répondit-elle en retour, en le faisant taire d'une chiquenaude. Un grand homme, c'est-à-dire au cœur bon. Il est généreux avec les pauvres gens, et toujours d'humeur égale. C'est une bonne chose. Vous avez un bon père.

- Tu crois que je m'entendrais bien avec lui ?

- Pour sûr oui. Vous êtes du même sang. Si ça se trouve, vous vous ressemblez. Ça sera amusant.

- Oui... Tu as sans doute raison.

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