Chapitre 2

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LEA

Oh non ! La pire de toutes les mamans était de retour alors qu'il était déjà quinze heures trente ! Normalement, elle rentrait vers dix-sept heures trente.

Je ne m'étais pas préparée à ce qu'elle rentre si tôt, si bien que j'étais en train de fouiller dans ses affaires. J'adorais cela, mais je n'aurais pas dû m'aventurer dans ce bazar ce jour-ci.

Il fallait que je me dépêche de tout ranger ! Je commençai à remettre les papiers en ordre, lorsqu'une lettre attira mon attention. Ce vieux parchemin était pour Léa (waouh, ils ne m'avaient pas appelé Léonie Martin !), et c'était ma mère, Jessica Martin, qui la récupérait ! Je lui en voulais vraiment de ne rien m'avoir dit.

Mince ! Je l'entendis ouvrir la porte. Je montai les marches quatre à quatre et cachai l'enveloppe sous l'oreiller.

« Léonie ?

— Non, elle n'est pas là. Ici, il n'y a qu'une " Léa ", lui répondis-je pour gagner du temps. »

Décidément, elle n'avait pas encore compris comment je voulais qu'on m'appelle.

« Viens​ voir, Léa. »

Oh ! Elle m'avait l'air super enthousiaste en disant cela. Surtout qu'elle l'avait dit en soupirant...

« J'arrive ! lui dis-je en descendant, un grand sourire plaqué sur mon visage.

— Euh... Hier, j'ai oublié de te dire quelque chose, me confia-t-elle, gênée. Tu sais, l'année prochaine, tu entres en seconde et... J'ai reçu une lettre. Le directeur de cette école veut que... enfin... Oh ! Ce sera plus facile si je te la donne.

Oh non ! Je pensais que c'était le papier vieilli que j'avais monté.

Je vis maman fouiller dans les tiroirs où j'avais fouiné quelques minutes auparavant.

Cela devait effectivement être le papier jaunâtre qu'elle cherchait, car elle me demanda si je n'avais pas vu une vieille enveloppe. Il était hors de question que je lui dise la vérité, si bien que je lui demandai si elle était allée voir dans sa chambre. Bien sûr elle alla vérifier, j'eus​ donc le temps d'aller chercher MA lettre. Je sursautai en l'entendant arriver.

« Ah ! Mais où l'as-tu trouvé ? me demanda-t-elle.

— C'est celle-ci ? lui demandai-je, essayant d'afficher un air naïf.

— Oh oui. Bon, je te laisse la lire. »

Ouh là là ! Le directeur de cette école voulait que j'entre dans une école en Ecosse, appelée " élémentaire " car...

Pour la suite, je ne comprenais rien.

« Qu'est-ce que c'est que ce charabia ? la questionnai-je.

— A vrai dire, je comptais sur toi pour me le dire.

— Eh bien, vois-tu, je ne comprends rien du tout. »

C'est vrai, j'aurais aimé savoir ce que c'étaient ces "éléments". Et puis ;

« Comment se fait-il qu'il m'ait appelé Léa ?

— Encore une question à résoudre, me répondit-elle.

— J'en ai marre de toutes ces énigmes que nous envoie le directeur.

— Connaissant ton caractère, je pen...

— Puis-je savoir quel est mon défaut que tu relèves ?

— Il n'y en a pas qu'un.

— Je veux savoir lesquels.

— J'allais y venir. Mais lesquels veux-tu que je te dise ? Ceux que j'ai relevés depuis le début de la conversation, ou ceux que j'allais dire après le " te connaissant " ?

— Les deux. Sans en épargner un seul. Tu auras aussi le droit de relever des qualités, bien sûr.

— Alors, tu as tout d'abord été impatiente. Ensuite, je pense que tu as été " incontrôlable ", mais j'ai tellement l'habitude... »

" Incontrôlable " était son mot à elle pour dire " pas sage " d'une manière plus précise.

« Pour le " te connaissant ", je te trouve menteuse, tu caches beaucoup de choses à ta mère... continua-t-elle. Donc, je pensais qu'une de tes copines allait aller là-bas, qu'elle t'en avait parlé et que tu avais voulu t'y inscrire.

— Désolée de te décevoir, mais il ne s'est pas passé cela. Et puis, quand aurais-je pu faire ceci ? lui demandai-je.

— Lorsque tu rentres de l'école, je suis encore au travail. Et pour tes qualités, je n'en ai relevé aucune aujourd'hui. »

Comme je l'avais dit, c'était la pire de toutes les mamans.

SOPHIE

Toujours vexée, je donnais un coup de pied dans un petit caillou gris, quand je vis un joli garçon qui devait à peu près avoir mon âge. Il avait de magnifiques cheveux bruns avec un léger reflet blond. Lui, avait de jolis yeux vert émeraude en forme d'amande.

Ce garçon avait l'air vraiment étrange. Etrange parce qu'il agitait très lentement son éventail blanc à pois rouges vers la foule alors qu'il aurait dû l'agiter vers lui. Son éventail ne lui servait donc à rien. Alors, je m'avançai en sa direction​ pour lui expliquer comment se servir de cet objet. Il dut me remarquer car il se tourna vers moi et s'exclama avec un adorable accent anglais :

« Ah ! C'est toi que je cherchais ! »

Ne comprenant pas où il voulait en venir, je lui demandai en bégayant :

« Euh... pou...pour... Quoi ?

— Ah ! Mais n'as-tu donc pas reçu de lettre à propos de ton prochain lycée ?

— Non, lui répondis-je simplement.

— Viens, suis-moi. »

Devais-je vraiment le suivre ? Devais-je lui faire confiance ? Qui était-il ? Et ma sœur ?

« N'aie pas peur, je ne vais pas te manger, m'encouragea-t-il.

— Ma... Je dois m'occuper de ma sœur, essayai-je pour pouvoir partir.

— Ne t'inquiète pas, on s'en charge. Et ne pose pas de questions, nous n'avons pas le temps, ajouta-t-il en me voyant ouvrir la bouche. »

Il ne faisait qu'augmenter le nombre de mes questions. Qui est " on " ? Que vont-ils faire de ma sœur ? De quel " temps " parle-t-il ? Qu'allons-nous faire ?

Il aurait dû me dire " ne t'inquiète pas, elle va bien " ou encore " tu rentreras à l'heure pour t'en occuper ".

Décidée, je m'avançai vers lui, il me tendit la main mais je la refusai gentiment en mettant les miennes derrière mon dos. Il la retira et me fit signe de le suivre. Il nous emmenait derrière les stands du marché.

« Comment t'appelles-tu ?

— Ah ! Désolé, je ne me suis pas présenté. J'ai dix-sept ans et je m'appelle Clarence ce qui veut dire brillant ou claire. Mon nom est Wilson. »

Il avait donc quatre ans de plus que moi. En effet, j'ai sauté mon CE2 et mon CM1. Je me rappelais ce qu'avait dit la proviseure lors de mon passage en CM2 : « Deux classes de suite ? Une première pour notre école ! » Depuis, on m'a appelé Einstein, l'intello ou la sauteuse de classes et mes amies avaient décidé de se détacher de moi car elles voulaient "préserver leur popularité".

« Comment ? Je... Je ne sais pas ce que veut dire mon prénom, moi.

— Sophie signifie sagesse.

— Co...Comment connais-tu mon prénom ?

— Je suis à ta recherche depuis déjà douze jours. Deux fois du lundi au samedi. Je ne travaille pas le dimanche.

— Comment m'as-tu trouvé ?

— Je savais que tu habitais ici. La directrice de ta prochaine école m'a dit que tu logeais au nord de la capitale de ce pays. Cela m'a facilité la tâche. Je t'ai donc cherché à l'aide de cet éventail, me précisa-t-il en levant l'objet.

— Comment ? " La directrice de ma prochaine école " ?

— L'école élémentaire.

— Non, j'avais déjà prévu un lycée, lui mentis-je.

— Impossible.

— Je vais donc obligatoirement dans cette école ? C'est officiel ?

— Je te promets que tu t'y plairas. Mais, tu ne peux pas refuser pour la sécurité de notre école. »

LEA

« Je dois partir, ma poulette. »

Quand ce n'était pas "Léonie", c'était "ma poulette", "mon trésor" ou encore "mon poussin", mais jamais Léa.

« Où pars-tu cette fois-ci ? lui demandai-je en essayant de paraître triste, mais au fond de moi j'étais tellement joyeuse.

— Tu sais très bien que je ne rentre pas du marché à cette heure-ci, normalement, me confirma-t-elle.

— Donc, tu y retourne ? la questionnai-je de plus en plus heureuse.

— Oui, ma puce. Une gentille personne m'a proposé de me remplacer pour une petite demi-heure seulement. Ça passe tellement vite... J'aimerai que tu t'occupes de ton frère quand il rentrera. Je suis aussi venue ici pour préparer son goûter. Mais, vois-tu, je n'ai pas eu le temps. Pourras-tu le faire à ma place ? »

Ah ! J'avais oublié "ma puce" dans la liste des surnoms incorrects qu'elle me donnait.

Sans me laisser le temps de répondre, elle continua :

« Il rentre à seize heures normalement. Il est déjà et quart : je suis en retard. J'y vais. A tout à l'heure ! »

Mon frère, Félix, avait école aujourd'hui, car sa classe devait rattraper une journée grève. Dommage... j'aurais bien voulu jouer avec lui.

« Et qui est cette "gentille personne" ? lui demandai-je juste avant qu'elle sorte.

— Un homme aussi beau que les perroquets rouges et bleus d'une vaste forêt tropicale. »

Cette comparaison voulait dire que rien de plus joli que cet homme existait. Le rouge et le bleu étaient ses couleurs préférées, et le perroquet était son oiseau favori. Elle adorait les oiseaux.

Cela signifiait aussi qu'elle était tombée amoureuse de lui.

Je pense qu'elle avait juste oublié un petit détail. L'autre jour, mes parents s'étaient disputés. Je n'avais pas bien saisi pourquoi, mais ils avaient l'air très en colère. Je leur en ai donc parlé mais ils n'ont pas voulu me dire pourquoi. Je leur ai dit que je ne voulais pas avoir de beaux-parents, et ils ont finis la conversation en pleurant (je ne les avais jamais vus pleurer auparavant, cela devait donc être sérieux) et en me disant : "Va te coucher, je t'aime". Ma mère m'a dit qu'il n'était pas mort, mais je ne l'ai jamais revu.

C'était donc ce détail dont je parlais. Je ne voulais pas qu'une autre personne le remplace. Elle le comprit car je fondis en larmes, mes jambes chancelèrent. Maman ouvrit les bras et nous nous enlacèrent pendant quelques minutes. Une fois calmées, ma mère repris :

« Oh ! Je voulais aussi te dire que j'avais vu Sophie. Elle avait l'air triste que tu ailles dans un autre lycée.

— Tu lui en a parlé ?

— Oui, ma chérie.

— "Ma chérie" ?!!! Appelle moi Léa et pas autrement, d'accord ?! J'en ai marre que tu m'appelle avec ces surnoms bizarres. »

Furieuse, je courus m'enfermer dans ma chambre en claquant la porte, telle une furie.

Je l'entendis me dire qu'elle reviendrait un peu plus tôt. Au moins, là, j'étais prévenue.

Dès qu'elle fut partie, je relis et relis la lettre, mais sans résultat. Je ne comprenais vraiment rien. Ils auraient pu être clairs et ne donner que les informations les plus importantes, et préciser une fois sur place.

Plusieurs questions tournoyaient dans ma tête. Pourquoi un lycée spécial ? Pourquoi élémentaire ? A premier coup d'œil, c'était un nom banal pour une école. Je n'étais même pas sûre qu'un établissement ait eu un nom pareil...

Et enfin, la question la plus importante : pourquoi moi ? Pourquoi pas Sophie, par exemple ?

SOPHIE

Là, je ne comprenais plus rien. Et puis, où était cet établissement ? Je lui posais donc cette question, et il me répondit :

« Oh ! Je devais te donner une lettre. J'espère qu'elle répondra à toutes tes questions. »

Il me tendit un vieux parchemin écrit à la main. Je me mettais donc à le lire.

Le 2 juin 2011, Inverness.

Sophie Dupont,

Mme Agua.

Chère Sophie Dupont,

J'ai le bonheur de vous annoncer que vous êtes d'ores et déjà admise dans une école spéciale et sûre en Ecosse, au sud-ouest de la ville d' Inverness et au nord-est de Fort Augustus. C'est au bord d'un lac, celui du Loch Ness. Cette école est appelée élémentaire car tous les éléments y sont présents : l'eau, la terre, l'air et le feu. Cette école est divisée en quatre grâce à ces éléments. Ces quatre parties sont des foyers. Vous y dormirez avec d'autres personnes du groupe et vous apprendrez à manipuler votre élément. Je vous en dirai plus une fois sur place.

Pour vous, Sophie, j'ai envoyé mon meilleur élève, Clarence Wilson. C'est une personne très brillante. Je pense que vous vous entendrez bien. Clarence fait partie du foyer de l'eau. Il vous aidera à venir jusqu'à nous.

Vous achèterez les fournitures aux vacances de la Toussaint, le temps que vous sachiez dans quel foyer vous êtes, et comment l'école marche. En attendant, achetez des baskets volantes à trois aureus, cinq pecunias et deux cuprums. Prenez aussi votre tenue la plus confortable, un vêtement chaud et une jolie robe. Clarence vous indiquera aussi quels manuels prendre.

Je tenais aussi à vous féliciter, car seulement un nombre restreint d'élève vient dans mon école, et c'est vous qui avez été "choisie".

Je vous souhaite la bienvenue en première année,

Mme Agua, directrice principale.

Elle avait écrit d'une fine et magnifique écriture penchée vers la droite.

« Que sont les...aureus, les pecunias et les cuprums ?

— C'est notre argent.

— Pourquoi "directrice principale" ? voulus-je savoir.

— Il y a quatre directrices : une pour chacun de ces éléments, me répondit-il.

— Et tu crois vraiment que je crois à toutes ses sottises ?

— Tu devrais. Mais je te donnerai des preuves.

— En quelle année es-tu ?

— En troisième.

— Et tu es son meilleur élève ?

— Je ne pense pas. Il y a quatre années. Les élèves de ce niveau sont surement plus... fort.

— C'est Mme Agua qui l'a écrit.

— Tu permets ? »

Je lui répondis d'un signe de tête et il lit la lettre. Il haussa les épaules.

« Je pense qu'elle a quand même un peu exagéré. »

Je haussai à mon tour les épaules.

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