Chapitre 9

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J’arrive dans le sous-sol à toute vitesse, suivi d’Harry. Lucy se tient debout devant une ambulance. Elle ne bouge pas. Je m’approche d’elle et découvre la scène d’horreur.

C’est à gerber.

Harry reste à l’écart, il comprend qu’il est arrivé quelque chose de grave.

- Je suis désolé…

Je prends Lucy dans mes bras, elle est effondrée.

- C’est fini, elle me répond en larmes.

Dans une immense flaque de sang, Garret est en position fœtus à l’intérieur de la carcasse éventrée de Véro.

Il lui a ouvert la cage thoracique et s’est installé confortablement.

Il a les jambes qui dépassent, c’est qu’il est grand maintenant le bonhomme.

C’est symbolique, sa mère doit lui manquer énormément. Il ouvre un œil, émet un « hic » et se rendort aussitôt dans sa couche visqueuse.

- C’est horrible…je suis bloqué à jamais dans ce corps, Lucy est dépitée.

Au moins le petit est indemne.

Ça fait bizarre de voir le corps sans vie de ma Lucy. Les meilleures choses ont une fin.

Elle se retourne et aperçoit Harry.

- Lapin, y’a quelqu’un derrière toi.

- Ah oui, Lucy je te présente Harry, il m’a filé un sérieux coup de main, je te raconterai plus tard.

Il me sourit, je lui tapote l’épaule.

- Encore merci, on faisait une bonne équipe, dommage que je doive te remettre dans ta cellule.

Harry percute. Me fixe.

Il hausse les épaules, s’approche du corps, se baisse, attrape la machette de Véro, se relève brusquement derrière Lucy et lui colle la lame contre sa gorge.

- Non ! Je ne retournerai pas en cellule ! Jamais !

Lucy est surprise.

- Merde, qu’est-ce qu’il fait ?! Il est fou !

Harry me dévisage.

- Quoi ?! Elle a dit quoi ?! Je suis fou ?! Hein ?! C’est ça qu’elle a dit ?!

Merde, il recommence.

-Non Harry ! Non, elle a dit …Euh… Il est doux ! Voilà, il est doux ! Je fais des gros yeux à Lucy.

Elle me regarde un peu affolée, ne comprend rien.

Je la fixe et lui répète.

- Lucy, c’est ça ? Tu lui as dit qu’il était doux ?

- Euh… Oui, tu es doux, elle passe sa joue sur la manche d’Harry, c’est quoi ? De la soie ?

- J’n’en sais rien mais ça gratte. Lapin recule, je ne retourne pas là-bas, pas avant d’avoir réglé son compte à cette enflure de Cooper.

- Cooper est mort, je lui réponds froidement.

- Mort ? Mais… Comment ?

- Une balle dans la tête.

- Et Kermit ?!

- Mort aussi. Euh…Il s’est fait manger.

- Manger ? Harry baisse sa lame, il est sous le choc.

Lucy s’écarte.

Je m’approche d’Harry et lui retire doucement sa machette des mains.

- Allez, c’est terminé.

- Qui est au courant ? Cooper, Kermit, qui est au courant de leurs morts ? Ça s’est passé quand ?

- Ça s’est passé très récemment et personne ne se doute de rien, du moins pour l’instant.

- Ok, bon ça nous laisse un peu de temps pour s’occuper de Penny.

- Penny ? C’est qui cette Penny ? demande Lucy.

Pourquoi j’ai l’impression que ça ne s’arrête jamais.

- Penny, c’est une véritable bombe atomique.

Ah ça va. Je m’attendais au pire, je reprends un peu des couleurs.

- Bon ben, écoute, s’il faut « s’occuper » de Penny alors, qu’est-ce qu’on attend.

- Non Lapin, cette fille est une authentique bombe humaine, elle a servi à Kermit de moyen de pression pour faire chanter le maire.

- Ok, c’était donc ça, son argument pour arriver si vite au sommet.

Je m’assois sur le capot de l’ambulance, je sens que ça va devenir intéressant.

- Bon vas-y, accouche. C’est quoi encore cette histoire.

- J’ai bossé avec Cooper avant qu’il ne fricote avec sa grenouille. C’était un mec bien.

- Oui je m’en doute, mais parle-moi de cette Penny et de la stratégie de Kermit.

- Elle a été crée par une filiale secrète du gouvernement pour rejoindre une élite spéciale « L’équipe ».

- Oui c’est bon, je connais…

- Elle devait servir, comme plusieurs autres filles, dans de petites opérations kamikazes.

- Mouais, pas très rentable leur histoire, le coupe Lucy.

- Oui, mais si elles se faisaient exploser, leurs familles étaient indemnisées et touchaient un gros pactole.

Ça me dégoute.

- Bref, après plusieurs examens, ils ont mesuré l’immense pouvoir de destruction de Penny. Ils ont chié dans leurs frocs et l’ont plongée dans un coma artificiel.

- Ben pourquoi ils ne l’ont pas tuée ?

- C’est devenu une arme de dissuasion. On ne sait jamais…

- Bon ça va, j’ai pigé, « L’équipe » s’est dissoute, Kermit s’est emparé de Penny…

- Et il a menacé le maire de faire sauter la ville s’il ne lui donnait pas les pleins pouvoirs et un budget illimité. Il a été pris au sérieux.

- Mais t’étais au courant toi ? je lui demande.

Harry paraît gêné, il cherche ses mots.

- Oui… Je reconnais que ce n’est pas très respectable mais bon, on avait peu de moyens alors on s’est dit avec Cooper qu’on pourrait acheter du matos, de nouveaux véhicules, une machine à café, bosser dans de bonnes conditions, quoi !

- Tout ça pour une machine à café ?! Lucy est choquée.

- Seulement, avec tout ce financement il a recruté d’anciens agents de « L’équipe », s’énerve Harry.

- Ok, c’est chaud, c’est pas super réglo mais bon au final ça marche, il s’est vanté d’avoir une criminalité inexistante.

- Oui c’est sûr. En ville il n’y a plus de dealers, proxos, caïds et autres petites frappes… Il les a tous embauchés dans la police.

- Hein ?! Je manque de me ramasser la gueule du capot.

- T’as très bien compris. Ils continuent leurs affaires mais en uniforme tant qu’ils font régner le calme dans leurs quartiers. Kermit prend un petit pourcentage en passant et tout le monde est content.

Lucy est impressionnée.

- Chapeau la chaussette, il protège la population et entretient le business.

- Il contrôle l’ordre et le chaos, je rajoute.

Harry regarde le plafond du parking.

- C’est le paradoxe Cooper et Kermit. Le bien et le mal.

- Le Ying et le Yang, je lui réponds.

- Le Ping et le Pong... rajoute Lucy.

Harry n’a pas trop compris cette dernière intervention.

- Bref, je me suis rebellé et ils m’ont interné.

Mouais.

Par expérience, je confirme qu’il a plus sa place dans une cellule capitonnée que dans les rangs de la police.

- Mais qui connaît l’existence de cette Penny ?

- Les quelques membres de « L’équipe » qu’il a recruté. S’ils s’aperçoivent de la mort de Cooper et Kermit, ils vont se précipiter pour lui mettre la main dessus et continuer leurs sales affaires.

- Voir plus. Connaissant les gabarits et leurs mœurs, on peut s’attendre au pire.

Je retire mon insigne, la jette au sol et prends mon air grave et sûr de moi.

- Ecoute, Harry, rien n’est joué, tout peut encore changer. Elle ronfle où la Penny ?

- En centre-ville, au quarante-deux de la quatrième avenue.

Je visualise le quartier dans ma tête.

- Oh mais je connais, c’est pas très loin, c’est juste à côté de l’école primaire.

Harry tousse.

Il se racle la gorge.

- Non Lapin, ce n’est pas à côté. Penny est dans l’école primaire.

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