CHAPITRE 99 : « Hôpital proche de Shanpaï » « Katô Ryôta »

L’infirmière après lui avoir apporté son repas, sort juste de la chambre individuelle où se repose le directeur Katô, quand deux hommes y entrent à leur tour après un bref coup sec sur la porte et sans attendre l’autorisation d’entrer.

Le directeur lève les yeux de son plateau-repas pour voir qui sont ces visiteurs.

- Messieurs ??

L’un des deux hommes semblant être le chef, sort son portefeuille en lui montrant son badge de police.

- Nous aurions quelques questions à vous poser ?
- À quel sujet je vous prie ? Comme vous devez bien vous en douter, je n’ai aucun souvenir de tout ce qui m’est arrivé depuis ma perte de connaissance jusqu’à mon réveil dans cette chambre !! Ce que j’ai appris par la suite m’a pourtant suffisamment interpellé pour tenter en vain de me souvenir de quelque chose.
- Notre visite n’a rien à voir avec l’accident cardiaque qui vous concerne, à ce sujet nous avons déjà tous les témoignages nécessaires venant des personnes y ayant assisté.

Le directeur ne peut s’empêcher de demander avec une curiosité dans le fond bien naturelle.

- Même celui de Fukuda-Kun ??

L’inspecteur sort son carnet en jetant un bref regard de connivence sur son jeune collègue.

- Que savez-vous précisément sur ce garçon ??
- Très peu de choses à vrai dire, juste ce qui y est écrit dans son dossier !!
- Vous pourriez être plus précis ??
- Un élève boursier surdoué qui répondait exactement à nos critères pour intégrer l’école, j’avoue que je n’ai pas été réellement surpris par son physique.
- Comment ça ??
- Beaucoup de ces garçons surdoués ne font que très peu attention à leur aspect physique, trop plongés dans leur monde pour se soucier un tant soit peu du regard des autres et le jeune Fukuda-Kun entre bien dans le moule, croyez-moi. Maintenant j’ai appris dernièrement avec la stupeur que vous pouvez imaginer, que je suis en vie grâce à lui, j’avoue en être encore à ne pas y croire tellement ça me semble impossible !!
- Je vous comprends, pourtant tout ce que vous avez dû entendre s’est bien produit, croyez-le ou non !!
- Vraiment ??
- Vraiment !!

Le policier hésite à en dire plus, il finit par s’y résoudre néanmoins, puisque de toute façon il faudra bien que cet homme connaisse toute la vérité quand il reprendra sa fonction.

Il décide alors de la lui apprendre par petites touches, en lui faisant suivre l’enquête comme lui il l’a menée et en espérant que la lumière se fera par son propre esprit d’analyse, comme elle lui est venue à lui et cela même si l’idée première lui a amené un véritable choc, sûrement infiniment moindre qu’il le sera si ça venait à transpirer en dehors des services officiels de son pays.

- Que je vous explique le cheminement de l’enquête, peut-être arriverez-vous de vous-même à la même conclusion que nos services, conclusion qui a été avalisée après l’interrogatoire mené sur la personne de Fukuda-Kun.
- Avant j’aimerais comprendre le besoin qu’a eu la police à en ouvrir une ??
- Ah !! Parce que vous trouvez normal qu’un étudiant n’ayant qu’une année d’étude en médecine, puisse intervenir sous son entier contrôle sur une opération à cœur ouvert et de plus, sans l’environnement chirurgical adéquat ??
- Heu !!
- C’est un peu comme si vous vous représentiez en plein combat à opérer dans un hôpital militaire de fortune !!
- Vu comme ça…
- Comme vous dites, vu comme ça !! Heureusement que les services hospitaliers ont fait « eux » remonter l’information, sinon nous n’aurions même pas été avertis !!
- Ne vous fâchez pas voyons, vous vouliez m’expliquer votre découverte. À ce rythme nous allons y passer le reste de la journée !!
- Le directeur Katô a raison chef !!

L’homme se retourne, en fronçant les sourcils vers son collègue qui baisse instantanément les yeux.

- Si tu t’y mets toi aussi ! Rendez-vous compte que ce que nous avons appris est suffisamment incroyable pour que je réfléchisse à ce que je peux dire ou pas !
- Notre visite n’avait-elle pas justement pour raison d’en révéler une grande part au directeur de l’école, afin qu’il puisse gérer la suite en toute connaissance de cause ??
- Si bien sûr ! Bien, voilà toute l’histoire ! Nos services ont donc reçu un rapport émanant de cet Hôpital, signalant un cas suffisamment incroyable pour que mes chefs décident d’ouvrir une enquête. Vous aviez entièrement raison tout à l’heure de dire qu’un étudiant de cet âge n’est « normalement » absolument pas compétent pour une telle opération, pourtant après interrogatoire de tous ceux qui y ont été témoins, il nous a bien fallu accepter le fait que le jeune Fukuda ait réalisé l’impossible. Un spécialiste de nos services a pu obtenir tous les rapports médicaux et les différents résultats d’examens qui vous ont été faits ce jour-là dès votre entrée à l’Hôpital, ils ont recherché dans les banques de données pour trouver un, voire des, cas identiques et nous avons déclenché quelque chose de pas banal au sein de nos services d’espionnage, rendez-vous compte que l’acte médical que vous avez subi a été réalisé en tout point conforme avec d’autres datant d’une vingtaine d’années plus tôt, suite à une catastrophe navale où deux paquebots de croisière se sont heurtés de plein front.

Le directeur Katô sursaute.

- Mais c’est impossible voyons ! Le jeune Fukuda n’était pas né il y a vingt ans !

Il réfléchit quelques secondes avant de reprendre.

- Je me souviens de cette catastrophe, si mes souvenirs sont bons il y avait un congrès international ce jour-là à Kyoto et c’est également à ce congrès que le monde a découvert ce jeune garçon de génie qu’était Florian De Bierne, hélas disparu sans explication depuis ! Il a beaucoup aidé pour sauver de nombreux enfants suite à cette catastrophe il me semble ??
- C’est exact !
- Y aurait-il un rapport entre mon opération et celles réalisées par le jeune docteur De Bierne il y a vingt ans ?? Si oui je vous avoue ne pas trop voir lequel, à moins qu’il y ait un lien de parenté avec le jeune Fukuda mais dans ce cas pourquoi ne s’appelle-t-il pas De Bierne ??

Les deux policiers se regardent, visiblement sidérés par l’esprit d’analyse de l’homme allongé sur son lit, surtout après seulement un aussi bref début d’explications.

L’homme revient vers le directeur avec son regard plongeant dans le sien.

- Il pourrait y avoir une explication toute simple pourtant.

Ryôta n’avait pour sa part pas quitté son fil de pensées et tout naturellement en arrive à la conclusion qui semble pour lui la plus crédible.

- Florian De Bierne étant de type caucasien et Fukuda Kun ayant des traits incontestablement asiatiques, je ne vois qu’une possibilité si je veux retenir un lien de filiation.
- Lequel ??
- Tout simplement qu’il porte le nom de sa mère !