RETOUR DE ZURICH

17 minutes de lecture

Après avoir passé un peu plus d’un mois à Zurich où j’avais pu mettre en œuvre les dernières techniques que nous allions utiliser dans nos futures coopérations, j’étais revenu comme convenu sur Paris. Je dois dire que je n’avais pas eu à regretter mon séjour car j’avais pu travailler de façon intensive sans être dérangé par des taches secondaires. Mes hôtes avaient aussi fait tout le nécessaire pour que je puisse profiter de mes week-end pour faire du tourisme. Ils m’avaient ainsi emmené à trois reprises faire du ski.

Je dois dire que mon retour à la mi-février était à marquer d’une pierre blanche car mon appartement était devenu « nickel ». Valérie, se transformant en bonne fée du logis, avait dû passer beaucoup de temps chez moi à laver, nettoyer et ranger. Toutes les chambres avaient été faites à fond, les meubles cirés et la cuisine était devenue quasiment un bloc opératoire. Elle avait, cependant, évité de s’occuper de mon atelier mais elle était passée dans la suite de mes parents car les meubles avaient été dépoussiérés et, surtout, tout ce qui devait être à l’abris avait été rangé dans les armoires ou les tiroirs des commodes ; il faut dire que j’évitais d’y mettre les pieds et, que depuis que j’avais rejoint Paris, cet espace me servait pour entreposer les objets les plus divers soit parce qu’ils ne me plaisaient plus , soit parce qu’ils s’étaient montrés inutiles et encombrant. Elle avait dû aérer toutes les pièces, atelier compris, car il n’y avait plus aucune odeur de solvants ou de renfermé ; elle n’aimait sûrement pas les portes fermées car j’avais retrouvé toutes les portes intérieures ouvertes, entres autres celle de l’atelier et la porte coulissante entre les deux parties de l’appartement ; comme elle devait me le dire plus tard : elle ne supportait pas les portes fermées, elle voulait pouvoir circuler librement d’une pièce à l’autre. Mes plantes vertes étaient en pleine forme et elle en avait rajoutées dans la cuisine, l’atelier et dans l’entrée.

Elle avait passé au peigne fin mon bureau : plus de document, plus de feuilles de papier en vrac sur mon bureau. Tous les envois reçus depuis mon départ avaient été rangés en piles en fonction de leurs origines. Elle avait aussi enregistré tous les messages téléphoniques sur mon agenda, je n’avais plus qu’à rappeler les correspondants.

Elle avait organisé la surface de la table de séjour pour se faire un coin bien à elle, dos tourné à la fenêtre, défini par des guides Dalloz à droite et à gauche de sa place, place occupée en partie par mon Mac qui semblait bien être devenu le sien, vu tous les « post-it » accrochés sur ses bords. A côté de l’ordinateur il y avait des tas de dossiers multicolores, chacun étiqueté de façon claire. Je me suis dit à ce moment-là qu’elle prenait réellement ses aises et que j’aurai, peut-être, à me méfier dans le futur de ses désirs de colonisation de mon espace. Il fallait absolument que nous ayons une discussion sérieuse sur ses envies plus ou moins grandes de squatter ma salle de séjour et, peut-être, d’autres pièces. Je reconnaissais bien dans l’ordre qui régnait dans mon appartement à mon retour, les manies rigoureuses de rangement de Valérie : toutes les choses à leur place et une place pour chaque chose. Pas à dire, elle avait été bien formée par sa mère mais je me disais que c’était trop, vraiment trop ! Peut-être voulait-elle faire bonne impression ? Mais je me demandais si sa chambre, chez elle, était aussi bien rangée ? J’espérais qu’il y régnait un peu de désordre, signe qu’elle pouvait avoir un peu de fantaisie.

J’ai eu, cependant un petit pincement au cœur car, bien que prévenue de mon retour par une petite carte postale envoyée de Zurich, il n’y avait aucun message de sa part dans la cuisine ou dans la salle de séjour pour me faire part de ses intentions pour les jours à venir et je n’ai eu aucune nouvelle le soir même.

A la réflexion, j’avais pris alors conscience qu’elle avait des reproches à me faire et qu’elle devait bouder un peu ; il faut dire que je ne lui avais donné aucun signe de vie durant toute mon absence alors que je profitais d’elle pour surveiller mon appartement et réceptionner mon courrier. Il avait fallu que je lui téléphone le lendemain pour la remercier de ce qu’elle avait fait pour que nous reprenions contact ; j’en avait profité pour l’inviter au « Dôme » à Montparnasse où nous nous étions retrouvés vers 19h30. C’est à cette occasion que j’avais appris par elle qu’elle avait fait connaissance de ma mère. Je dois dire que les bras m’en étaient tombés car c’était rare que maman quitte mon père et, encore plus rare, qu’elle vienne à Paris, vu ses jeunes malades qu’elle ne voulait jamais quitter. Elle était complètement au service des enfants qu’elle soignait.

Nous avions trouvé une table avec deux places face à face dans un renfoncement de la salle. Je sentais qu’elle était tendue et j’attendais avec impatience ses réflexions aigres douces sur le dédain potentiel que j’avais montré envers elle en ne lui donnant aucune nouvelle durant mon stage en Suisse.

Nous venions de commander le repas et, en attendant d’être servis, j’avais commencé à entreprendre Valérie sur le travail de rangement qu’elle avait fait dans mon appartement. Je m’étais rendu compte très rapidement qu’elle répondait assez peu à ce que je lui disais ; elle était préoccupée et finalement elle m’entreprit.

—Mat ! Je dois te dire que j’ai vu ta mère quand tu étais à Zurich. Elle est passée à ton appartement alors que j’étais présent, travaillant sur ton Mac. C’était un mercredi 15 jours après ton départ, si je me souviens bien, puisque j’avais eu cours d’histoire du droit jusqu’ à 15h 30. J’étais rentrée chez toi et j’étais en train de relire mes notes et les mettre aux claires en m’aidant du Mac quand brusquement une femme bien mise, aux yeux noisette comme toi, avec un chignon bien serrée, en tailleur gris clair s’est retrouvée devant moi dans la salle de séjour ; je ne l’avais ni entendue, ni vue rentrer étant absorbée par mon travail. Par contre ses paroles m’ont fait sortir de ma concentration.

Tien ! Il y a quelqu’un. Je croyais que mon fils Mathieu était en Suisse. Aurait-il laissé derrière lui un cœur esseulé ? m’avait-elle dit d’une voix douce tout en souriant.

— Je dois dire que ces paroles ne me rendirent pas heureuse car j’allais être obligée d’assumer une discussion avec ta mère!

Pas à dire ma mère savait surprendre son monde mais qu’est-ce qu’elle venait faire chez moi ? Qu’est-ce qu’elle avait pu dire à Valérie comme raison sur sa venue ?

— Qu’est-ce que tu lui as dit ?

— J’ai un peu bafouillé ; mes premières paroles n’ont pas dû être très claires mais je lui ai fait remarquer que mon cœur se portait merveilleusement bien et que j’étais présent chez toi comme « jardinière intérimaire » pour conserver en bonne santé tes plants vertes et qu’en échange tu m’avais autorisée à venir travailler sur ton ordinateur. Mais elle n’en resta pas là !

Je suis la maman de Mathieu. Il semble que vous vous connaissez bien. Je suis surpris qu’il vous autorise à utiliser son informatique. Aurait-il évolué car, en général, il le conserve pour son usage personnel et il n’est pas prêteur.

— J’ai l’impression que c’était une critique vis à vis de tes comportements envers les personnes de la famille et elle a continué ses investigations.

Cela fait-il longtemps qu’il vous laisse venir chez lui ? Je vois ! vous devez être de son labo et travailler avec lui !

— Non ! Nous nous connaissons que depuis seulement 6 mois. Nous nous sommes connus en courant dans le parc Montsouris juste à côté. Je ne fais pas de sciences. Je suis en première année de droit. Et là, elle alla droit au but !

Seriez-vous sa petite amie ? Son attitude à Noël ne nous permettait pas de nous en rendre compte mais cela ne m’étonne pas de lui, il est très cachotier.

— Je ne lui ai pas exactement répondu mais j’ai dû rougir un peu en poussant un grognement du type « Et puis quoi encore » ?

Je ne m’étais jamais sentie aussi gênée qu’à cet instant. Je la voyais sourire et je n’avais qu’une envie : m’enfuir.

— T’a-t-elle expliqué les causes de sa venue ?

— Oui, car notre conversation ne s’est pas arrêtée là. Elle était souriante quand elle me regardait tout en étant préoccupée. Je me suis demandé à un moment donné si ce n’était pas ton père qui avait un problème de santé. En fait non, elle m’a expliqué qu’elle était venue sur Paris en ambulance avec une fille mère et son enfant de 4 ans, enfant qu’elle avait amené en urgence à l’hôpital Necker pour soumettre son cas à un ancien ami de fac, devenu chef de service. Devant rester au moins jusqu’au jeudi soir pour attendre les résultats de la consultation et avoir les avis du staff du service où il avait été admis, elle avait eu envie de voir dans quel état son artiste de fils (ce sont ses paroles) avait mis son appartement. Je dois dire qu’elle a, peut-être, critiqué autrefois ton refus de faire médecine mais qu’elle allait me parler de ton parcours universitaire et de tes œuvres picturales avec une certaine fierté même si je pense qu’elle aurait préféré te voir t’intéresser plus aux êtres humains en étant médecin.

C’est bien ma mère ! On a une certaine fierté vis à vis de sa progéniture mais on évite de le montrer et on dit tout ce qu’il faut pour que celle-ci se dépasse constamment. Elle l’avait fait avec mon frère ainé pour qu’il devienne médecin et elle l’avait fait avec moi pour me pousser à faire une thèse. Il fallait que ses enfants soient parmi les meilleurs !

— Tu lui as montré l’atelier ?

— Oui, Elle a beaucoup apprécié tes tableaux en devenir. Elle s’est un peu moquée de moi devant le nombre des esquisses me représentant et trainant un peu partout dans l’atelier. Comme elle me l’a fait remarquer de façon un peu ironique, elle ne savait pas qu’une muse pouvait passer ses temps libres à faire du droit. Elle avait d’ailleurs souligné que tu n’avais pas encore décidé ce que tu allais choisir comme technique pour me représenter. Je lui ai fait remarquer que pour le moment tu réfléchissais encore sur la manière de faire mon portrait car tu ne me connaissais pas encore assez bien pour faire une œuvre conforme à ma réalité et ma sensibilité. Elle n’a rien dit mais j’ai eu l’impression qu’elle a failli éclater de rire.

— A-t-elle utilisé la suite parentale ? Si elle l’a fait ce serait bien la première fois qu’elle y passerai quelques jours ?

— Non ! Par contre nous avons pris ce jour là une tasse de thé ensemble. Elle s’est montrée très courtoise tout en étant for amusée de la gêne que je lui montrais en répondant à ses questions ; elle m’a passé sur le grill sans montrer qu’elle le faisait. Quand elle m’a quitté pour rejoindre son hôtel préféré du quartier latin - dont elle a gardé le nom secret - vers 18h 30 je me suis aperçu que je lui avais raconté beaucoup plus de choses sur moi et ma mère que voulues. Elle doit être très bonne quand elle interroge un enfant lors d’une consultation car ses questions ne sont jamais brutales mais toujours très insidieuses. On a toujours envie de lui répondre pour lui faire plaisir. Rassure-toi je n’ai rien dit sur ce qui nous concerne tout les deux et elle ne m’a rien demandé de tel d’ailleurs ; elle semblait avoir envie de mieux me connaître mais, cela, sans aucun lien avec toi. La seule chose qui l’a fait un peu tiquer c’est quand je lui ai dit que je n’avais que 17 ans. D’après ses mimiques elle devait me trouver un peu tendre mais elle a eu cette réflexion : « très jeune mais déjà très armée ». Je préfère te prévenir car la première fois qu’elle te verra dans le futur ce sera toi qui seras sur le grill.

— Elle est retournée à Rennes quand ?

— Dans la journée du dimanche qui suivit car ton père l’a rejointe le vendredi en début d’après-midi, ce qui m’a permis de diner avec tes deux parents le soir. Je n’avais rien demandé mais ils m’ont téléphoné ce jour-là vers 17h pour savoir si j’étais libre et ils m’ont donné rendez-vous à l’Odéon. Nous avons été dans un petit restaurant près du marché Saint Germain. J’ai été très surpris de cette invitation mais au cours de la discussion avec ta mère chez toi, je lui avais parlé du nettoyage que j’avais entrepris et elle avait grandement apprécié que je m’occupe aussi de la suite parentale. Elle semblait soulagée car l’enfant qu’elle suivait allait être hospitalisé à Necker et sa mère avait était autorisé à rester avec lui. Ta mère devait aussi vouloir que ton père me voie. Je pense que tes parents voulaient m’étudier sans le dire car j’ai l’impression que ma présence chez toi les a surpris et qu’ils m’ont pris pour ta petite amie que tu voulais encore cacher, comme s’ils étaient très respectueux de ton indépendance et qu’ils ne voulaient pas te forcer la main.

— Ils vont être déçus !

Moi je ne suis pas contre mais Mat a toujours son air rébarbatif quand on parle de petite amie ; moi j’aimerai bien l’être. J’aimerai bien être peau contre peau dans ses bras. Cela doit être divin d’être embrassée et caressée par lui.

— Et vous avait discuté de quoi.

— Un peu de toi, un peu de mes désirs futurs, à savoir comment je voyais mon intégration dans les métiers possibles du droit. « Être avocat ? être magistrat ? », travailler dans des services juridiques et lesquels ? Ils ont aussi beaucoup parlé de leurs métiers. J’ai l’impression qu’ils étaient contents de parler de ce qu’ils faisaient avec une jeune fille sortant à peine du lycée, j’étais tout ouïe. Ils étaient tout heureux de se retrouver ensemble dans le quartier latin. Ils semblaient avoir en commun beaucoup de références de bonheurs vécus dans ce coin de Paris.

— Tu les as trouvés comment ?

— Très gentils avec moi, très sympathiques et je dois te dire que je ne comprends pas pourquoi tu es si critique avec eux. A un moment donné j’ai défendu ton parcours universitaire et ils m’ont fait une réflexion qui m’a beaucoup surprise. « Certes il réussit très bien dans ce qu’il fait et ses projets sont cohérents mais nous préférions au début qu’il se tourne vers la médecine car il y aurait très bien réussi ; il a une très grande humanité en lui et c’est ce qui aurait rendu encore plus grand sa réussite. Son frère ainé est médecin maintenant mais ce ne sera jamais un grand médecin au sens noble de ce métier car son moteur est l’argent, ce n’est pas l’être humain ».

— Certes, mais je me voyais mal devenir esclave de ma fonction et je serais devenu pire que mes parents, un forçat passant son temps à s’occuper de ses « malades ». J’aurai dû abandonner les arts plastiques !

— Je n’en suis pas sûr car ils te voyaient bien faire des tableaux entre deux consultations de malades ; ils n’ont jamais douté de tes qualités intellectuelles et de ta force de caractère. Ils m’ont soutenu que tu étais apte à mener de front soins aux malades et arts plastiques. Pour eux, tu es une sorte de surdouée qui ne veut pas que les autres le sachent.

— Maintenant que j’y pense, je me demande s’ils ne sont pas venus tous les deux, alors que j’étais à la fac, dans l’après-midi du vendredi voir en détail ce qu’il y avait dans ton atelier car je me souviens maintenant que ton père semblait bien connaître tes travaux. Tu devrais penser à leur en donner quelques-uns.

— Ils le disent maintenant mais ils ne disaient pas cela il y a 7 ans.

Il semble que mes parents aient réussi à mettre Valérie dans leurs poches ; il va falloir que je me méfie d’elle car elle est tombée sous leur charme ; elle risque de devenir une espionne redoutable au service de ma parentèle.

— Changeons de sujet Valérie. Je voulais m’excuser auprès de toi de ne pas t’avoir donné de mes nouvelles lors de mon séjour à Zurich mais j’ai profité au maximum d’être dans un labo bien pourvu en matériels hauts de gamme pour travailler d’arrache pieds car je n’étais absolument pas dérangée par des taches secondaires. De plus, je te faisais complètement confiance et ton silence m’indiquait qu’il n’y avait pas de problème avec mon appartement.

Je n’ai jamais vu un pareil egocentrique ; il ne pense qu’à ses petites affaires, il ne pense pas aux autres. Pour bien faire j’aurais dû lui téléphoner en inventant une catastrophe domestique pour voir un peu comment il aurait réagi ; dommage que je n’y ai pas pensé. Je n’ai vraiment pas de chance ; je suis attiré par lui. Je ne peux que l’aimer et il ne s’aperçoit de rien ; je ne suis pas une femme pour lui, à la rigueur une fille, sa petite sœur.

— Je dois dire que la carte que tu as fini par m’envoyer était très jolie ; tu as eu, quand même, le temps d’aller faire du ski. Les suissesses sont-elles mignonnes ?

C’est bien ce que je pensais ; elle n’avait pas apprécié mon silence. Faisons profile bas. Le plus simple tirons en touche et écrasons-nous.

— Je n’ai été au ski qu’avec des hommes car il y a peu de femme dans les labos et, quand il y en a, elles ont une famille et le week-end est sacré.

— OUAIS...

Ce n’était pas complètement vrai mais ce n’était pas la peine de dire l’exacte vérité. Changeons de sujet, je vais lui parler de son implantation dans la salle de jour.

— Que penses-tu de mon Mac ; est-ce que tu n’as pas eu trop de peine pour l’utiliser ? Est ce qu’il peut t’être utile ?

En même temps que je lui disais cela, je me disais que j’étais un bel hypocrite car c’était le moyen que j’avais trouvé pour ne pas la perdre de vue. En même temps, je m’aperçus qu’elle semblait un peu déconcertée par ma question. Elle semblait avoir peur que je lui reprenne l’autorisation de travailler avec.

Il ne va pas me le reprendre ; il faut que j’obtienne de lui que je puisse continuer à travailler avec son Mac ce qui me permettrait de rester travailler chez lui, cela me permettrais de prendre quelques distances avec maman loin de ses yeux.

— Ton Mac m’est très utile car il me permet de faire des documents claires et faciles à relire après chaque TD ; cela me permet par des ajouts, pris sur le web, d’avoir des dossiers les plus complets possibles sur les grands problèmes récurrents. C’est ainsi que j’ai commencé un dossier sur le divorce. Je dois déjà avoir une cinquantaine de pages sur cet acte juridique. J’espère que tu m’autoriseras encore à venir travailler chez toi ; si je te gêne je peux m’arranger pour transporter mes affaires et ton ordi. dans la partie parentale de l’appartement. Il faudra vérifier que la WIFI passe de l’autre côté car le câble doit arriver du palier directement dans ta partie ; il suffira d’installer un répétiteur de signal.

C’est bien ce que je pensais, VAL avait bien l’intention de squatter mon espace de travail ; je voulais, cependant, ne pas devenir son prisonnier.

— Pas de problème, tu peux venir travailler chez moi. Nous avons déjà cohabité dans la salle de séjours avant mon départ et je dois dire que tu ne m’as pas gêné. Je te demanderai de ne pas empiéter sur ma vie privée ; j’essayerai de ne pas trop téléphoner en étant dans la salle de séjour et je te demanderai la même chose. Je faudra aussi te montrer très discrète si des personnes viennent me voir ; je te présenterai toujours comme m’a petite cousine, sorte de petite sœur de substitution, puisque mes parents n’ont eu que des garçons. Enfin, si jamais je rentre un soir avec une fille, il y a de forte chance qu’elle passera aussi la nuit avec moi ; tu fais tout ce que tu veux mais je te demanderai d’éviter les réflexions oiseuses. Pour éviter de te gêner ainsi que la visiteuse, j’essayerai de te prévenir à l’avance de cette venue. Mais, si j’oublie, car quand je le fais c’est sur un coup de tête en accord avec la fille, essaye de rester naturelle.

— Mat ! sache que si je viens chez toi ce sera pour travailler et je n’ai pas l’intention de t’envahir. Je serai toujours la plus discrète possible et si un jour tu trouves que je te gêne trop par ma présence j’essayerai de trouver une autre solution. Je dois te dire que j’adore travailler dans l’atmosphère chaude de ta salle de séjour que tu sois là ou non.

Cela me permet aussi de travailler sans avoir maman sur le dos à me donner des conseils ; quand je prépare des TD, alors qu’elle est chez nous, elle a toujours tendance à intervenir en me guidant dans les arcanes du Droit. Certes ses réflexions me sont for utiles mais c’est moi qui suis « étudiante » et c’est à moi de réfléchir à ma manière.

Le repas s’est terminé de façon très décontractée car elle m’a décrite les différentes personnes qu’elle rencontrait dans ses cours. J’espère qu’elle n’officialise pas trop à haute voix ses jugements sur le corps professoral ou certains étudiants car ses jugements sont toujours très tranchés. Je lui ai fait, cependant, remarquer qu’elle avait une place très spéciale dans sa fac de droit car elle était la fille de Sofie Malgrange, personne très connue des milieux juridiques parisiens.

Prise par mes obligations universitaires, j’allais peu la voir par la suite. Je la rencontrais parfois en fin d’après-midi alors qu’elle travaillait sur la grande table de séjour mais c’était assez rare car je rentrais toujours assez tard du labo entre 20h30 et 22h, alors que cela faisait longtemps qu’elle était entrée chez elle pour diner. Le week-end ce n’étais pas mieux car elle travaillait à la supérette le samedi et le dimanche matin alors que moi, continuant sur ma lancée j’étais souvent au labo le samedi ; si je m’abstenais d’y aller, je me retranchais dans l’atelier pour peindre ou dessiner. J’essayais de la voir en fin d’après-midi en semaine et le dimanche après-midi en lui proposant d’aller courir mais je dois dire que ce fut souvent que des vœux pieux car elle réservait beaucoup de ses temps de liberté à courir, accompagnée de sa mère, de Gaelle ou d’autres collègues de fac, les musées, les cinémas ou les théâtres.

C’est dans le dernière semaine de février que j’ai fait ma première grosse boulette avec Valérie ; j’étais revenu vers 19h 30 avec Fabienne, une étudiante de l’institut qui m’avait à la bonne. Je dois dire que lorsque j’ai vu qu’elle était encore présente chez moi je me suis senti mal. J’ai eu, cependant la présence d’esprit de présenter Valérie à Fabienne comme étant ma petite cousine de cœur faisant sa 1ère année à la fac de droit. Naturellement, j‘ai présenté Fabienne comme une jeune chercheuse de l’institut, en fait une jeune étudiante, qui devait travailler sur un texte avec moi après un repas rapide.

Valérie n’allait pas dire grand-chose si ce n’est quelques amabilité creuses et s’éclipsa assez rapidement pour ma laisser le champ libre. Cela ne l’empêcha pas de me lancer un regard meurtrier avec ses yeux devenus plus que noir et elle s’arrangea pour me murmurer alors que je poussais Fabienne dans la cuisine et qu’elle ouvrait la porte palière : Tu aurais pu me prévenir ! Je ne digère pas ce qui vient de se passer ! On en reparlera. Tu te fous du monde !

Il y a un fait certain : Val. me fit la tête durant plusieurs jours après m’avoir reproché vertement le lendemain au téléphone d’être revenue chez moi avec « une pouffiasse » racolée à l’université sans la prévenir.

Annotations

Vous aimez lire Zebulon9275 ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0