Prologue

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 Depuis ce matin, mes parents ne tiennent pas en place. Je les vois trimballer à travers toute la maison, des fioles, des herbes et toutes sortes de récipients. Ils ont l’air pressé. C’est la cohue. Ma petite soeur se met à pleurer à cause du vacarme et du stress régnant entre ces quatre murs. Papa accourt vers elle avec son nounours qui traînait sur la table du salon. Elle change tout de suite d’humeur en voyant son doudou.

— Tiens Sacha, regarde c’est monsieur lapin ! Lui dit-il en jouant avec les oreilles de la peluche.

De ses deux petites mains, elle attrape son jouet. De la pulpe de son pouce, il retire la larme qui tente de couler de son oeil. Il pointe son regard sur moi et me fait un signe de la main.

— Blaine, tu peux garder un oeil sur Sacha s’il te plait ? Tu es un grand garçon. Tu peux faire ça ?

Je hoche la tête. Je n’aime pas quand il me parle comme à un enfant de sept ans alors que j’en ai dix. Je ne dis rien et me plie à sa demande. Je m’installe sur la malle où est assise ma soeur. Je ne sais pas vraiment quoi faire à part attendre. Ce n’est pas la première fois qu’il y a autant d’agitation ici, mais cette fois j’ai l’impression que c’est grave. En face de moi, mon père emballe des vêtements dans un sac. C’est nouveau. D’habitude ils ne prennent que des plantes. Je n’aime pas ça.

— Papa ? Tu vas où avec maman ? demande ma soeur qui s’est calmée.

Il prend son sac, ferme le zip et le pose sur la table.

— C’est pour le travail, affirme-t-il, c’est tata qui va vous garder.

Il me fait un clin d’oeil.

Je sais très bien ce que ça veut dire. Il ne veut pas effrayer Sacha. Tout ça est faux, mais je ne comprends rien. Je ne sais pas du tout ce qu’il se passe et j’ai bien l’impression que je n’aurais pas la réponse tout de suite.

— Vous partez combien de temps ? Je demande.

— Je ne sais pas, deux jours, peut-être quatre ou plus.

Ses sourcils se froncent. Je veux savoir pourquoi c’est aussi précipité. On devait aller au parc d’attractions demain. Ça me rend triste, on y va plus. Je suis sûr qu’ils n’auraient pas annulé s’ils n’avaient pas vu, hier, leur ami qui fait peur. C’est un monsieur chauve et aveugle. Mais ses yeux ne sont pas normaux. Ils sont comme visqueux et blanc tout bizarre. Maman me dit toujours qu’il ne faut pas se fier des apparences, mais c’est dur. Il me fait vraiment peur, même s’il ramène toujours des bonbons quand il vient. Je crois qu’il ne m’aime pas beaucoup. Il dit que je suis trop intelligent pour un garçon de mon âge. Cette remarque fait toujours rire papa, mais moi je ne trouve pas ça drôle du tout. Maman dit juste que je suis curieux des belles choses.

Papa reprend Sacha dans ses bras, je n’ai plus à m’occuper d’elle. Je me lève de la malle.

— Blaine, tu peux appeler ta mère pour qu’elle m’aide à changer la caisse de place ? Demande-t-il en caressant les cheveux de ma petite soeur pour éviter une nouvelle crise.

— Elle est où ?

— Dans la salle de bain mon grand.

Je traverse la pièce pour rejoindre ma mère de l’autre côté de la maison. Je pousse la porte déjà entrouverte. Maman est près du lavabo. Avec des gants transparents, elle met un liquide marron sur ses cheveux blonds.

— Qu’est-ce que c’est ?

En entendant ma question, elle sourit.

— Je fais une couleur. Je vais devenir brune, dit-elle empoignant une mèche de cheveux pour la recouvrir du liquide.

— Mais pourquoi tu fais ça ? Je les aime bien tes cheveux.

— J’avais envie de changer.

Je ne comprends pas pourquoi. Je suis habitué à ses cheveux dorés.

— Papa a besoin de toi pour soulever la boîte.

— Dis-lui que j’arrive. Je finis ça.

C’est bizarre, elle va devenir brune. Maman a de si beaux cheveux blonds. Elle a dû prendre une teinture de papa. Il dit souvent qu’il n’aime pas la couleur de ses cheveux, alors, il change souvent.

~

La nuit commence tout doucement à tomber. Le coucher de soleil rase l’horizon derrière cette gigantesque étendue d’eau. Ma tante me tient l'épaule comme pour me retenir. C’est elle qui nous garde, à chaque fois, quand nos parents s’en vont. Papa et maman remplissent le bateau de leurs affaires. L’ami bizarre de mes parents, les a rejoints et d’autres personnes que je ne connais pas sont arrivés en même temps. Ils ont tous l’air de venir d’un autre temps avec leurs habits qui ne recouvrent pas grand chose.

Maman descend du bateau suivi de près par papa. Je n’arrive pas à me faire à l’idée de sa nouvelle coupe. J’ai l’impression d’avoir changé de maman. Ce n’est plus la même. Elle ne semble plus autant rayonnante. Le blond lui allait mieux.

— Ne me regarde pas comme ça mijo, dit-elle en prenant mon menton entre ses doigts.

Elle a un air triste, parce que ça me rend triste. Ma soeur, elle, ne comprend pas vraiment ce qu’il se passe.

Maman me tient toujours le visage d’une de ses mains. Je n’aime pas trop ça. De sa main libre, elle sort de son chandail la cordelette qui retient une pierre qu’elle porte toujours sur elle. Elle est toute violette, c’est joli.

Elle me lâche. Papa se tient derrière elle en lui tenant une épaule. Elle lui sourit, puis retire de son cou le collier.

— C’est pour toi, affirme-t-elle en me la passant au cou, tu la garderas jusqu'à mon retour.

Mon père se déporte vers ma tante qui tient dans ses bras Sacha. Il détache à son tour son collier bleu et argent pour le lui donner. Pourquoi ils font ça ?

Jusqu’a aujourd’hui, maman ne m’avait jamais donné sa pierre, ni papa la sienne a Sacha. C’est bizarre d’habitude ils ne s’en séparent pas. Ils disent toujours qu’elles sont extrêmement précieuses et dangereuses. Je ne sais pas si c’est pour me faire peur, mais moi ça ne fait rien. C’est juste super classe.

— C’est l’heure de partir, annonce l’un des messieurs qui les accompagnent.

Ils montent chacun à l'arrière du bateau et nous font signe de la main une fois les moteurs allumés.

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