Les souvenirs du Baron Maréchal...1-2

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Au cœur de la sombre et lointaine forêt Neitvuori, dans le Nord-ouest de la Finlande, 2 cavaliers avancent au-delà de tous horizons.

Il s'agit d'Hjalmar Siilasvuo et Aaro Pajari, respectivement général et major-général de Finlande.

Ces deux militaires ont reçu un ordre spécial de la part du gouvernement, rencontrer le maréchal Mannerheim et le convaincre de déplacer ses fidèles Jäger sur le front et faire pencher la balance en la faveur des troupes finlandaises.

L'offensive russe du début de la guerre avait été stoppé net par La Défense finlandaise et leurs fortifications.

Malheureusement les précédentes tentatives de convaincre le Maréchal de déplacer ses troupes furent des échecs colossaux.

Celui que l'on appelle le "Baron Maréchal" ne veut rien entendre.

"Qu'est-ce qui lui est passé par la tête ?" Finit par dire Pajari, en donnant un coup de genou à son destrier. "Il a un pet au casque depuis que les Ruskovs ont bombardé son bunker. Ou bien il se retranche dans ce qu'il lui reste de noble avant que les cocos lui brûlent ses affaires !"

"Comment osez-vous parler ainsi du maréchal Mannerheim ?!" S'exclamât Siilavsuo. "Je lui reconnais ses défauts, surtout celui de ne jamais vouloir déléguer... Mais dois-je vous rappeler ce qui vous serez arrivé si votre "noble" avait pris la fuite durant la guerre civile ? Vous seriez au fond d'un trou en Sibérie à croquer les larmes gelées de votre désespoir !"

"Aaaaaah oui, cette fameuse guerre civile, ou votre "Baron" a fui à l'anglaise lorsque la famine a fini par ravager le pays et s'est dédouané des crimes de nos chers amis blancs ! C'est pour cette raison qu'il a perdu les élections de 1919 je vous rappelle ! Le « Baron sanglant » !"

Excédé par son comportement, le général ne prêtait plus attention aux coups bas du major, il était vrai que les agissements du baron lors de la guerre civile sont à relativiser. Pour autant sa maîtrise stratégique du terrain a permis aux gardes blancs de vaincre les gardes rouges**;

"Et il est évidemment pacifiste, tellement pacifiste qu'il a refusé de rejoindre la guerre civile russe pour conserver la neutralité du pays. Grâce à lui les rouges nous roulent dessus depuis près de 2 m..."

Son destrier s'était arrêté net. Devant lui apparaissait enfin le bunker du Baron Maréchal, ensevelie sous la poudreuse, le général s'exclamât:

"Remerciez-le au moins pour ne pas vous avoir donné de mauvaise indication dans ce labyrinthe d'arbre ..."

Après avoir attaché leurs montures, les deux cavaliers toquèrent aux portes du bunker, elles s'ouvrirent lentement, les grincements témoignèrent de la dureté de cet hiver qui n'en finissait plus.

Trois gardes étaient chargés de la surveillance du baron, il s'agissait de deux Jägers finlandais et un ancien des forces cavalières de l'Empire russe. Son profil de géant caucasien ne dupant personne...

Ce dernier se chargea personnellement d'amener les deux cavaliers aux portes du quartier général du Baron, Siilvasuo prit une grande inspiration et toqua à la porte.

"Entrez !"

Cette voix ... si tonitruante c'était bien le baron ...

"Au moins il n'a pas ramené son nègre*** d'Henrichs..." chuchotât de manière audible Paajari

Lorsque la porte s'ouvrit, ils crurent entrer dans une dimension parallèle ; entre la tapisserie sibérienne, les peaux d'ours, et autres blasons, typiquement russe. Un gigantesque tableau de guerre emmuré la pièce, représentant la carte stratégique de la Finlande.

"Ah voici la demoiselle Finlande**** pour nous accueillir !" S'exclamât Pajari.

Face à elle, se trouvait un bureau où, le maréchal rédigeait les multiples lettres d'encouragement et de propagande à l'armée finlandaise, il s'arrêta lorsque Paajari se mit à hausser le ton.

Interrompu dans ses activités par Paajari, il se dévoila aux deux cavaliers, ce grand homme venue d'un autre âge, ses yeux bleus étincelants, sa peau ridée et sa moustache chevron traditionnelle des généraux et des hommes politiques. Et bien évidemment son uniforme de maréchal de Finlande qu'il ne quittait jamais...

"Bien, alors que nous vaut votre visite en cette demeure ?"

Les deux généraux finlandais étaient intrigués, le maréchal avait répondu en français, Mannerheim est un polyglotte en plus d'être excentrique. Heureusement pour les deux cavaliers, Siilasvuo savait parler le français, les études qu'il avait effectuées lui auront au moins servi à quelque chose se dit-il...

"Mon mara... maréchal...rétorquât Siilasvuo Si nous avons fait tout ce chemin c'est pour vous informer ... oui informer ... que l'état-major de Finlande s'inquiète grandement de l'avancée de l'armée rouge au-delà de Ladoga... du lac Ladoga..."

Le Maréchal restât de marbre comme si la nouvelle n'était qu'une banalité parmi tant d'autres. Il se retourna simplement et pointât la carte de la demoiselle Finlande :

"Voici donc leur terrain d'attaque, le lac Ladoga et notre ligne de défense tout autour sont en effet un gigantesque rempart contre l'envahisseur soviétique, jusqu'à présent les rouges ne sont jamais parvenus à briser nos lignes, de quoi est ce que vous me parlez ?" reprit le maréchal

"Nous sommes convaincus que les rouges préparent une offensive depuis l'isthme de carélie, mais cette fois-ci nos renseignements nous ont informés d'un assaut massif de..."

"... Blindés ?"

Le maréchal s'était soudain mis à rétorquer en finlandais, comme pour marquer la fin de son tour.

"Je suis sur que le gouvernement était déjà au courant de cette manœuvre, mais qu'il a préféré ne pas entendre mes conseils je présume ."

"Pourquoi écouterions-nous un baron qui n'est même pas Finlandais ?! S'écrit Paajari, serrant très fort sa poignée pour tenter de cacher la trop imposante, envie de l'insulter."

"Ah ! ça alors vous recommencez . Avec votre manie de nier la réalité ?" Reprit Siilasvuo. "Vous me rappelez le gouvernement qui a refusé de céder la Carélie aux Soviétiques ?! Peut-être n'en serions pas là si la Carélie était Ru..."

"La Carélie donnée aux Russes ?! C'est une plaisanterie .! Cette région est à la Finlande ! Et dans quel monde vivez-vous ? Celui où les nations ont le droit de voler de territoire sans aut..."

" Cela suffit ! Comment voulez vous gagnez une guerre alors que .."

Le maréchal prit une pause marquée par une grande inspiration.

"Je comprends ce que vous essayez de me dire ... ou plus exactement ce que le gouvernement essaie de me dire. Le pays est dans la phase la plus difficile et incertaine de son histoire. Et malgré nos efforts ... non seulement les mauvaises nouvelles fusées, mais en plus nous ne parvenons même pas à nous mettre d'accord sur notre stratégie."

"Si le général Ostermann avait été là, nous aurions pu nous débrouiller autrement ..." rouméguat Paajari, ce dernier était l'un de ses premiers partisans le lendemain de la guerre civile finlandaise

Le jour de la démission d'Hugo Ostermann, le second haut gradé de l'armée finlandaise, quelques heures avant la guerre d'hiver avait été vecu comme une trahison par le major-général*, Il s'agissait d'un coup dur pour Paajari...

"Major," reprit Mannerheim, "Nous savions à quel point la nouvelle de sa démission vous a profondément attristé... je dois vous confier une chose à vous deux..."

Le baron s'essaya sur son bureau, en reculant la chaise, il regarda Paajari droit dans les yeux avant de lui répondre :

"J'allais déposer ma démission de mon titre de général de Finlande."
Le salaud ! Paajari lui aurait cassé la gueule s'il était dans un autre contexte, et pas entouré de gardes. Il se maîtrisa à temps avant de laisser échapper une grimace.

"Alors ... je suppose que, comme Ostermann, vous allez nous sortir que vous étiez incapable d'assurer la défense de la Finlande ?"

"Non."

Le Maréchal avait répondu du tac au tac, il avait pris de court le ton hautain du major-général, ce dernier abasourdi, attendait sa réponse avec impatience.

*Major Général : équivalent de Sergent

**Guerre civile Finlandaise : Après son indépendance de l'Empire russe en 1917, comme pour la Russie, la Finlande s'était divisées en deux, la Finlande blanche des conservateurs et la Finlande rouge des communistes et sociaux-démocrates, la différence majeure étant qu'avant son indépendance, la Finlande ne possédait aucune armée, ni même de garde nationale ou de police.

***Nègre : Nom donné à un auteur anonyme, souvent employé par des personnalités souhaitant écrire leur mémoire mais n'ayant que peu d'expérience en écriture (je précise cela car le mot à une connotation très négative ><)

****Demoiselle Finlande Le Surnom donné à la forme de la Finlande (le col de Mourmansk formant ses cheveux et le sud-ouest son ventre)

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