La guerre est finie : Chapitre 59

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Août 2022

En Septembre 2021, la RF se lança à l'assaut de la capitale auto-proclamée avec seulement deux unités spéciales... Cette opération, mal préparée, fut un fiasco.

Grâce à cela, le MLF devint plus fort que jamais. Sa propagande sur des photos des membres de l'unité BABYLON et W morts au combat brisa l'ascension de la RF. Les exactions montèrent d'un cran, la population était terrifiée.

La RF, au pied du mur était seule. L'armée anglaise fut contrainte de retourner en Grande Bretagne pour maintenir l'ordre devant l’émergence d'un mouvement similaire.

Grâce à l'intervention courageuse d'une combattante de l'unité W, la RF réalisa que les unités se terraient depuis deux mois au sein même de la capitale du régime. Des caméras sur l'hélicoptère filmèrent l'extraction prouvant ainsi à la population que le MLF avait menti. Les rébellions devinrent légions. Les puissants appuis financiers de l'ennemi se détachèrent un à un à la suite de cette humiliation.

Dernier coup de grâce ? La première intervention publique de l'unité W. Les combattantes racontèrent avec précisions l'horreur des prisons-bordels du régime et appuyèrent leur propos grâce à la participation de victimes devant leur vie à cette unité spéciale. Après ces révélations sordides, c'en fut fini du Mouvement de Libération de la France, qui capitula le 21 septembre 2021.

L'état major et le haut commandement rendirent les armes, furent jugés puis emprisonnés. Un débat national fit rage pour la réhabilitation exceptionnelle de la peine de mort face aux crimes de guerre et aux crimes contre l'humanité du MLF.

BABYLON et W devinrent des héros de la Nation. Les émissions s'arrachèrent ces êtres ordinaires qui avaient réalisé des exploits militaires incroyables. Certains devinrent mêmes des symboles de paix, à l'image de Cassandre, Loïc et Henri, représentant la France moderne que la RF voulait promouvoir. Le nom d'Olympe Warenghem fut connu de tous, bien que son visage demeure, à ce jour, toujours un mystère.

Etant parvenu à se débarrasser de toutes traces administratives de leurs actions de guerre, des exactions sur la population et des déportations, le MLF priva beaucoup du devenir de leurs proches disparus pendant la guérilla. Comment se reconstruire dans l'incertitude ? Étaient-ils vivants quelque part et retenus en tant qu'otages par une poignée de fanatiques ? Avaient-ils été abattus en masse à la toute fin, comme la majorité des prisonniers des camps de concentration lors de la seconde guerre mondiale ? Les pires théories tournaient. La RF elle-même, dont les hauts gradés avaient pris la tête de la DGSI ou de certains ministères, n'avait, à l'époque, aucune réponse à leur offrir.

Et la crise sanitaire ? La rudesse de l'hiver eu raison de la létalité et de la contagiosité du virus. Désormais, l'agent pathogène offrait des symptômes proche d'une grippe ou d'un rhume. Rien de plus. La vie offrait une chance à l'Homme de prendre le temps de se renconstruire ensemble, transcendé par l'Histoire qui venait de s'écrire.

La paix serait-elle durable ? À cette période, tous le pensaient.

Extrait de l'Histoire avec un grand H,

édition Hauts de France, février 2030.

— Ma fille la guerre t'as changée, ton regard est différent mais je suis si fière de toi. Maman, papa et Louis seraient tellement tellement fiers. Et ta soeur, elle n'en reviendrait pas c'est certain !

Enfin, le visage entre les mains de sa mamie, Olympe reprenait vie. Chez elle, entourée des seuls membres de sa famille toujours présents, elle se délectait. Chaque larme, chaque contact ravivait son coeur meurtri. Oui, une nouvelle vie, calme et apaisée était possible à leurs côtés. Retrouvailles émouvantes mais silencieuses. Que pouvait-elle leur dire ? Pouvait-elle leur raconter ce qu'elle avait fait ? Les morts, les exécutions, les blessures ? Bien sûr qu'ils s'en doutaient mais les évoquer les rendraient plus réelles encore. Olympe tentait d'avancer. Oublier ? Impossible. Ranger, trier et enfoncer loin, très loin dans sa mémoire. Cette parenthèse faisait partie d'elle. La femme qui se tenait devant ses grands-parents avait été construite par toutes les horreurs commises et vécues, mais désormais, il fallait avancer. Ne s'était-elle pas battue pour cela justement ? Cette normalité ? Cette liberté ? Elle passait le plus clair de son temps libre chez eux. Profiter de chaque seconde, comme si c'était la dernière. Oui, la guerre lui avait fait comprendre que la vie ne tenait à rien. Un fil ? Un cheveu ? Une balle. Une guerre.

Que faire après avoir raccroché ? On lui proposa d'entrer en politique. Hors de question. Son manque de diplomatie et son honnêteté n'amèneraient rien de bon dans cette France en reconstruction. Félix s'était jeté à l'eau et était devenu désormais député des Hauts de France. Blessé de guerre, mutilé mais certainement pas amoindri, il aidait à la reconquête de la confiance des français et y parvenait d'une main de maître, comme il aimait à le dire. Le commandant Plantain était devenu directeur de la sécurité intérieure et lui offrit un poste au sein du bureau d'investigation qui oeuvrait dans l'ombre pour retrouver les membres de la RF s'étant mystérieusement volatilisés avec un nombre d'otages incroyable. Elle avait longuement réfléchi. Une chance de retrouver sa famille. Où étaient-ils ? Que subissaient-ils, s'ils étaient encore en vie ? Mais ici, elle qui s'était crue seule lors de la perte de Louis avait ouvert les yeux, ses grand-parents n'avaient plus qu'elle. Comment les abandonner une nouvelle fois ? Elle déclina et reprit alors son ancien poste. Sage-femme. Baigner dans la vie, quoi de mieux pour oublier la guerre ? Tout rentrait petit à petit dans l'ordre. Tout ? Pas tout à fait. Les cauchemars, mal nécessaire d'un esprit encore torturé, l'étouffaient. Chaque nuit, les visages des ennemis abattus se projetaient sous ses paupières. Criait-elle ? Elle en était persuadée. Les suées, les agitations, les tremblements... On lui proposa de parler avec Brice, le psychologue, Cassandre et Loïc avaient insisté, seulement Olympe n'était pas prête. Fierté d'une femme forte autrefois pionnière qui souhaitait guérir par elle-même... Ses amis la trouvaient ridicule mais ils ne comprenaient pas. Au fond d'elle, une personne pouvait tout comprendre, tout entendre et tout justifier. Pas Brice, non, Guillaume. Comment leur expliquer que lui seul aurait pu finaliser sa reconstruction ?

Pendant cette période d'allégresse d'après conflit, Hugo et Loïc se marièrent entourés de leurs proches. Bien entendu, l'unité CHARLY et l'unité W avaient été conviées. Loïc devenue une star, s'était vu offrir un château en guise de lieu de célébration. Somptueux, délicat et puissant, la demeure privatisée pour l'occasion accorda à cette union un cadre majestueux et inoubliable. Hugo avait insisté pour que les anciens combattants se retrouvent la veille tous ensemble au château. La soirée fut arrosée. Ensemble, tous ensemble. Seuls manquaient Félix indisponible et Guillaume. Peaufinant leur mise en beauté, Yvanka de sa voix douce rompit le silence.

— Tu penses que le capitaine sera là, Olympe ?

Un an de silence. Qu'avait-elle espéré à la fin de la guerre ? Qu'ils se retrouvent et qu'ils se reconstruisent ensemble. Désormais, que voulait-elle ? Le voir pour lui coller son poing dans la figure. Cette distance avait achevé de la briser et il méritait de payer. Tous savaient les sentiments qu'Olympe éprouvait pour le capitaine. Tous l'avaient vue s'effondrer une fois le brancard disparu dans le bloc opératoire. Tous l'avait aidée à affronter du mieux possible ces semaines d'errance et de silence. Puis, le temps fit son travail et balaya les espoirs. La veille, Loïc lui avait avoué qu'il ne savait pas s'il serait présent. Aucune nouvelle. À personne. Qui était-il pour agir ainsi ? Pour qui se prenait-il ? Oui, la douleur avait laissé place, une nouvelle fois, à la colère. Olympe avait cru en quelque chose qui n'existait pas, qui n'avait probablement jamais existé. Dépendre des autres pour vivre : une inepsie. Louis était son socle. Effondré, elle l'avait remplacé par Guillaume. Que faire désormais ? Se reposer sur qui ? Ses grands-parents ? Cassandre ? Non.

Prête en avance, elle quitta ses amies pour saluer les futurs mariés avant la cérémonie. Son coeur abîmé par ces semaines de détresse se nourrissait désormais de tout le bonheur qu'une vie offrait. Cette journée le remplirait d'un amour profond, cadeau involontaire de ses frères et soeurs d'armes présents aujourd'hui. En s'installant dans le parc, elle rencontra Justine et Antoine, inséparables depuis la fin de la guerre. Gaëlle, non loin, se reposait au soleil. Cette dernière, terriblement amaigrie, cernée jusqu'aux lèvres ressemblait à un spectre qui vivait l'absence de sa soeur comme un deuil à surmonter, là où l'ancienne lieutenant avait décidé de vivre la vivre comme l'espoir qu'ils soient encore en vie, quelque part. Un jour, elle saurait. En attendant, elle espérait.

Occupée sur son téléphone à prendre des photos des compositions florales, Olympe ne prêta absolument aucune attention aux messes basses que faisaient ses trois compères. Cassandre lui adressa un violent coup dans le flanc toujours sensible après la grave blessure à laquelle elle avait réchappé.

— Aïe putain !

Toute l'assemblée se tourna dans leur direction. Un sourire, une excuse, puis la musique se lança.

— Ma chérie, regarde qui est là.

Stupeur. Surprise. Son capitaine, juste en face d'elle, à quelques mètres. Un déchirement dans sa poitrine la fit grimacer. Rage terrassée par la surprise, elle interrogea ses amies.

— Vous saviez qu'il était en fauteuil ?

Yvanka, Lola et Cassandre, aussi sidérées qu'elle, secouèrent la tête en rythme. C'était à peine si les combattants avaient su qu'il avait survécu, alors comme en savoir davantage ? Les pensées d'Olympe virevoltaient. L'union de ses amis, Guillaume, Cassandre qui passait son temps à faire des clins d'oeil évocateurs. La stupeur était retombée, mais où était cette foutue rage ? Lui avait-il manqué au point d'accepter un silence d'un an ? La célébration touchait à sa fin. Le couple marié descendit l'allée, les invités tournés vers eux. Ne pas le lâcher. Le fixer. Que souhaitait-elle ? Un regard. Rien d'autre. Il était beau. Comment avait-il pu ne jamais le remarquer ? Ses yeux qui l'avaient jadis dévorée, ses mains qui l'avaient caressée, sa bouche qui l'avait embrassée, son corps qui l'avait réchauffée, aujourd'hui, elle le découvrait pour la première fois. Les secondes défilaient, et lui, esquivait. Puis, toujours sans une attention, il s'éloigna. Ce rejet agita le fauve. Son coeur trembla. Mains mointes, souffle court...

Tous aux abris, me revoilà enfin ! Il était temps.

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