La taupe : Chapitre 52

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— Alors, on daigne ouvrir les yeux Warenghem ?

Parenthèse fermée. Elle vivait.

— Oui, je me suis dit que vous vous étiez suffisamment inquiétés et qu'il était temps d'arrêter mon cinéma.

— Bien ! Humour de merde, rassurant. Je suis content de voir que tu es revenue parmi nous !

Elle sourit. Loïc qui s'élançait sur le lit lui fit ouvrir les yeux. Ces visages, sa famille. De quoi son corps avait besoin ? D'eux, de leurs bras autour d'elle, mais la douleur la ravisa. Les deux hommes l'aidèrent à se mettre assise. Le pire était derrière elle mais ses muscles endolories, engourdis hurlaient de se reposer davantage. Ils quittèrent la chambre et Cassandre installa deux oreillers dans le dos de la jeune femme.

— Je te laisse récupérer mais tu vas devoir me dire ce qu'il y a entre le capitaine et toi ! Je suis en train de fantasmer là dessus depuis notre arrivée dans ce bunker !

Olympe réprima un rire, pour éviter de réveiller la plaie. Oui, cette femme était la perle de son unité. Quelle unité ? La perle de sa vie. Une pépite de joie. Les abysses d'où elle revenait, lourdes, froides et puissantes étaient plaisantes, un temps. Mais tous lui avait manqué. Ses frères d'armes, elle s'était battue pour eux. La voilà revenue d'entre les morts. Prête à vivre. Honorer la mémoire de ceux qui n'avaient pas eu cette chance.

— On a arraché de mes entrailles une barre de fer suite à l'attaque qui a causé la mort de trois de nos coéquipières, et toi tu te fais des films sur ce qui peut bien exister entre ta supérieure et le supérieur de ta supérieure ? Pas de doute, je ne suis pas dans un monde parallèle.

Son amie éclata de rire. Tous ces jours dans l'incertitude, c'était son maximum de patience selon elle. Olympe lui serra la main avec tendresse et lui avoua qu'elle lui avait terriblement manqué. Unique réponse, un clin d'oeil, elle avait fait peur à tout le monde. Après quelques minutes de silence, Solange interrompit l'instant pour déposer un plateau repas sur les genoux de la lieutenant.

— Lasagnes !

Elle n'en revenait pas. Un vrai plat cuisiné fumait devant ses yeux et embaumait la pièce. Où étaient-ils terrés ? Alors la cheffe cuisinier de l'unité W se lança. Olympe avait prouvé l'insonorisation du bunker lors de son intervention. Une grande quantité de nourriture, de l'eau chaude et de l'électricité par un générateur toujours fonctionnel, quelle chance inouïe de tomber sur un endroit pareil ! Un court instant, Olympe se demanda ce que le propriétaire pouvait faire dans ce bunker. Brutalement, les pensées les plus obscures éclatèrent la bulle de douceur qui l'enveloppait depuis son réveil. Tandis qu'elle soufflait sur son plat, Cassandre lui adressa un regard bourré de sous-entendus.

Ma vieille, elle ne va pas te lâcher si facilement.

— Vous avez des nouvelles de l'état major ? Ils pourront nous extraire quand ? J'imagine que vous attendiez que je me réveille pour qu'on puisse bouger.

Ses deux coéquipières se regardèrent et un silence gêné de quelques secondes s'installa. Cassandre se résigna à lui détailler les nouvelles. Le MLF était à leurs trousses. Des patrouilles rôdaient jours et nuits. Le bunker se trouvait à plus de trois mètres sous les débris d'une maison totalement détruite. La seule issue ? La trappe d'aération pratiquement invisible depuis la rue. Impossible d'entrer en contact avec le QG si bas dans le sol et jusqu'à présent, personne n'avait réussi à sortir. Ils étaient à l'abri, mais sans recours possible. Aucun combat, aucun bombardement, aucun signe de renfort dans la ville. Le calme était lourd et intense. Ils étaient seuls.

— C'est comme si l'objectif de Lens était remis à plus tard, dit Solange.

— On pense, enfin le Capitaine Bela pense que le MLF a fait de la propagande nous concernant. Il est persuadé que la RF nous croit morts. On se retrouve donc ici, enfermés, seuls, avec très peu de munitions pour tenter quoique ce soit, et toi en convalescence pendant plusieurs semaines...

Cassandre avait perdu son sourire. Plusieurs semaines ? Combien de temps était-il restée inconsciente ?

— Ne panique pas, adoucit Solange.

— Treize putains de jours... lâcha Cassandre.

Si même la plus optimiste de ses amies se retrouvait dans cet état là, un espoir était-il possible ? La guerre cruelle et étouffante revint rapidement s'installer telle un étau dans sa poitrine. Elle tentait de faire bonne figure, mais la situation était catastrophique. Comment allaient-ils faire pour sortir indemnes de cette situation ? Il fallait qu'elle se remette rapidement sur pied. Pas question de devenir le boulet de l'unité.

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