INTRODUCTION

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Un homme, assis sur un banc dans un jardin, lit un livre sans nom ni raison. Un jeune homme passe sans s’arrêter. Une femme passe dans l’autre sens. Le jeune homme revient, s’arrête, puis s’installe aux côtés de l’homme.

LE JEUNE. Bonjour.

L’HOMME. Bonjour.

LE JEUNE. Vous lisez quoi ?

L’HOMME. Un livre.

Un temps.

LE JEUNE. Ça parle de quoi ?

L’HOMME. De rien.

LE JEUNE. Pourquoi vous le lisez alors ?

L’HOMME. Pour lire.

Un temps.

LE JEUNE. Il fait beau non ?

L’HOMME. Non, pas vraiment.

LE JEUNE. Ouais non c’est vrai.

Un temps.

LE JEUNE. Fait lourd en tout cas.

L’HOMME….

LE JEUNE. Va y avoir de l’orage à tous les coups.

L’HOMME….

LE JEUNE. J’suis breton vous savez. Alors du coup j’suis super fort pour savoir ce genre de choses.

Un temps. La même femme repasse.

LE JEUNE, siffle. Eh beh.

Le jeune se lève.

LE JEUNE. Vous m’excuserez hein.

L’HOMME. A tout de suite.

Le jeune sort du même côté que la femme. Le jeune rentre de l’autre côté. Surpris, le jeune regarde autour de lui, puis regarde l’homme.

LE JEUNE. Vous… Vous avez vu ?

Le jeune ressort puis entre de l’autre côté. Au même moment, la femme entre du côté opposé. Le jeune reste immobile. La femme traverse et s’arrête devant lui.

LA FEMME. Excusez-moi.

Elle sort. Le jeune la suit. Les deux entrent de l’autre côté, traversent, ressortent, puis rentrent de l’autre côté. Le jeune s’arrête devant l’homme, surpris. La femme sort. Le jeune lui court après, sort là où elle est sortie mais rentre seul de l’autre côté. Le jeune s’avance vers l’homme.

LE JEUNE. Vous !

L’homme ne quitte pas son livre des yeux. Le jeune hésite, s’assoit timidement puis regarde autour de lui avant d’observer l’homme et son livre.

LE JEUNE. Mais ! Il est blanc ! Votre livre !

L’HOMME. Bonjour.

LE JEUNE. Quoi bonjour ? Votre livre !

L’HOMME. Eh bien quoi mon livre ?

LE JEUNE. Il est vierge !

L’HOMME. Et alors ?

LE JEUNE. Eh bien il… enfin vous… vous…

Un temps.

L’HOMME. Il fait beau, non ?

LE JEUNE. Bah…

L’HOMME. Enfin il fait lourd.

LE JEUNE. Oui mais/

L’HOMME. Il va y avoir de l’orage à tous les coups.

LE JEUNE. Je/

L’HOMME. Vous savez j’ai rencontré un jeune homme qui était breton il m’a dit qu’il était très fort pour savoir ce genre de choses, après tout il était breton c’est tout à fait normal qu’il soit fort pour savoir ce genre de choses après tout ces gens là sont forts pour savoir ce genre de choses contrairement à moi qui ne suis pas breton je ne suis pas très fort pour savoir ce genre de choses.

LE JEUNE….

L’HOMME. Mais il va y avoir de l’orage, ça c’est sûr.

Un temps. Le jeune se lève regarde autour de lui.

LE JEUNE. Je comprends pas, y’avait un parc ici avant, non ?

L’HOMME. Non. Enfin si. Ou plutôt peut-être. Ça dépend.

LE JEUNE. Ça dépend ?

L’HOMME. Oui, ça dépend.

LE JEUNE. Ça dépend de quoi ?

L’HOMME, discrètement. D’eux, de lui.

LE JEUNE. Eux ? Lui ?

L’HOMME, faisant chut avec son doigt. Oui, eux, lui, chut maintenant, n’allez pas nous mettre dans l’embarras.

LE JEUNE. Je comprends rien du tout de ce que vous êtes en train de raconter.

Un temps.

L’HOMME. Eh bien ?

LE JEUNE. Eh ben quoi ?

L’HOMME. La suite ?

LE JEUNE. La suite ? La suite de quoi ?

Un temps.

L’HOMME, regardant enfin le jeune, perplexe. Vous n’êtes pas d’ici vous.

LE JEUNE. Non. Enfin si. Ou plutôt je ne sais pas. Ça dépend.

L’HOMME. Ça dépend ?

LE JEUNE. Ouais, ça dépend.

L’HOMME. Ça dépend de quoi ?

LE JEUNE. Eh bien, avant, ici, il y avait un parc. Enfin je crois.

L’HOMME. Je ne m’en souviens pas.

LE JEUNE. Moi je m’en souviens. Enfin je crois.

L’HOMME. Et qu’est-ce qui a changé ?

LE JEUNE. Je ne sais pas trop. Mais pas vous en tout cas.

L’HOMME. Moi ?

LE JEUNE. Oui !

L’HOMME, ricanant. Ça m’étonnerait.

La femme passe rapidement.

LE JEUNE. Et elle non plus !

L’HOMME. Vous êtes sûr ?

LE JEUNE. Certain !

L’HOMME. Eh bien demandez-lui alors.

La femme sort, le jeune lui court après et sort derrière elle. Elle entre de l’autre côté, puis traverse. Au moment où le jeune entre après elle, elle est sur le point de ressortir de l’autre côté.

LE JEUNE. Mademoiselle !

Elle sort. Le jeune lui court après, s’apprête à sortir, s’arrête, se tourne de l’autre côté, y court, attends prêt.

Un temps.

L’HOMME. Je pense que vous faites erreur si vous voulez mon avis.

LE JEUNE, sans se détourner de l’entrée. Non je suis sûr de mon coup.

L’HOMME. Je parle du reste.

LE JEUNE. Le reste ?

L’HOMME. Eh bien le parc, le banc, l’homme qui lisait un livre sans nom ni raison. Tout ça n’a jamais réellement existé.

LE JEUNE, se retournant. Mais vous…

L’HOMME. Moi je viens juste d’arriver. Je n’ai vu ni parc ni femme ni livre.

Le jeune s’avance vers l’homme et prend doucement son livre des mains. L’homme ne bouge pas. La femme passe encore plus rapidement. L’homme siffle.

L’HOMME. Eh beh. (se lève) Vous m’excuserez hein ?

L’homme sort en suivant la femme, laissant le jeune seul. Le jeune regarde autour de lui, perdu, puis s’assoit sur le banc, ouvre le livre et le feuillette. La femme entre par là où elle est sortie et vient directement s’installer à ses côtés. Le jeune se remet droit, se grandit un peu.

LA FEMME. Bonjour.

LE JEUNE. Bonjour ! Vous/

LA FEMME. Vous faites quoi ici ?

LE JEUNE. Je euh… Je lis un livre !

LA FEMME. Ah, intéressant. De quoi parle-t-il ?

LE JEUNE.… De rien.

LA FEMME. Merveilleux. Dites-moi je cherche quelqu’un, l’avez-vous vu ?

LE JEUNE. Je n’sais pas, à quoi il ressemble ?

LA FEMME. Il lit un livre.

LE JEUNE. Un livre ?

LA FEMME. Oui un livre. Un livre qui ne parle de rien.

LE JEUNE. Et vous le cherchez pour quoi ?

LA FEMME. J’ai besoin de lui.

LE JEUNE. Eh ben… moi je lis un livre qui ne parle de rien donc…

LA FEMME. Non.

LE JEUNE. Non ?

LA FEMME. Vous n’avez rien à faire ici si je puis me permettre.

LE JEUNE. Bah je/

L’HOMME, entrant du côté opposé de là où la femme est entrée. Ah ! Vous voilà ma chère amie.

LA FEMME. Et où étiez-vous très cher ?

L’HOMME. En train de vous chercher, quoi d’autre ?

LA FEMME. En train de me tromper j’imagine.

L’HOMME. Enfin non jamais je n’oserais.

LA FEMME. Rien du tout cher monsieur, rien du tout ! Je vous ai déjà vu sur scène avec d’autres que moi.

L’HOMME. Comme qui ?

LA FEMME, pointant le jeune. Comme lui.

L’HOMME. Lui ? Jamais !

LA FEMME. Pourquoi a-t-il votre livre alors ?

L’HOMME. J’ai dû l’égarer et il l’a récupéré.

LA FEMME. Cher ami j’ai bien peur que notre collaboration doive s’arrêter là.

L’HOMME. Ma chère non ! Ils sont venus pour nous voir !

LA FEMME. Je m’en moque ! Vous n’avez qu’a jouer avec ce… ce… cet amateur !

LE JEUNE. Attendez, attendez !

L’HOMME. Vous, fermez-la.

LE JEUNE. Je/

LA FEMME. Alors c’est comme ça que vous parlez à vos nouveaux membres, eh bien bravo !

L’HOMME. Mais enfin je parle à mes membres comme je l’entends !

LE JEUNE. J’AI RIEN A FAIRE ICI !

Un temps.

LA FEMME ET L’HOMME. Et alors ?

LE JEUNE. Je peux partir ? S’il vous plaît ?

LA FEMME. Mais enfin partez si vous le voulez.

L’HOMME. Rien ne vous retient ici monsieur le breton, veuillez-vous taire maintenant.

LE JEUNE. Mais alors pourquoi je/

LA FEMME, s’adressant à l’homme. Vous mon ami vous avez intérêt à vous rattraper sévèrement pour cet acte incorrigible.

L’HOMME. Ma chère et tendre, tout ce que vous voudrez.

Les deux commencent à partir doucement, laissant le jeune seul.

LA FEMME. Pourquoi pas une petite pièce ?

L’HOMME, s’arrêtant. Là ? Maintenant ?

LA FEMME, se tournant vers lui. Pourquoi pas ?

L’HOMME. Mais ce n’est pas le programme !

LA FEMME. Et alors ?

L’HOMME, très théâtral. Pour vous ma chère, je plongerai dans les profondeurs des plus terribles enfers. Mais Il ne va vraiment pas être content, mais alors pas du tout… (repartent doucement) Mais soit ! Va pour une pièce ! Une toute petite alors !

LA FEMME. Mon ami je ne demande rien de plus !

L’HOMME. Juste nous deux ou avec d’autres personnages ?

LA FEMME. Comme vous voudrez, un personnage ou mille, je m’en moque bien du moment que nous restons les protagonistes !

L’HOMME. Alors ma mie, donnez les coups de bâton !

Un temps. Le jeune reste seul et perdu au milieu de la scène. Quelqu’un du public l’appelle.

IL. Hep ! (Il grimpe sur la scène) Mais qu’est-ce que vous faites ?

LE JEUNE. Je, euh…

IL. Allez, dépêchez-vous ! La pièce va bientôt commencer !

LE JEUNE. Mais, euh, je/

IL. Je vous ai gardé une place toute chaude venez donc. (Il l’attire vers le public) Là-bas, vous voyez ?

LE JEUNE. Ah oui ! Euh, merci !

Coups de bâtons, les lumières baissent graduellement.

IL. Ça commence ! Installez-vous vite !

Il court en coulisse.

Noir.

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