Chapitre 1

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J’étais parti pour me rendre de Besançon à Lyon, par la Dombes, ce plateau morainique aux mille étangs, grands pourvoyeurs de grenouilles, c’est connu, mais aussi de carpes, brochets, sandres et autres poissons d’eau douce, mais voilà qu’à Villars-les-Dombes, au lieu de poursuivre tout droit, j’oblique par erreur et, au croisement suivant, sans savoir pourquoi, je pars à gauche. Résultat, à la place de Saint-André de Corcy et la bonne route, c’est la petite cité médiévale de Pérouges que je rejoins douze kilomètres plus loin.

D’elle, je me souviens que le nom de la bourgade aurait à voir avec la ville transalpine de Perugia et qu’un arbre de la Liberté, planté en 1792, un tilleul, je crois, fait l’orgueil des habitants. Guère plus.

Il est tard déjà, je suis fatigué de ma journée et n’ai pas le courage de reprendre mon itinéraire de départ. C’est ainsi que je m’arrête devant la seule hôtellerie du village ouverte.

C’est l’arrière-saison. Le personnel temporaire a terminé son contrat et regagné ses pénates. Désencombré des visiteurs estivaux, le petit bourg commence à retrouver son entre-soi.

Cet état me convient tout à fait. Je fuis les foules et recherche, sinon la solitude, du moins le calme et la sérénité.

Lorsque je fais carillonner la porte de l’auberge, un bruit de voix dissonantes m’agresse et, pour un peu, je refermerais l’huis sans autre forme de procès. Je sais que, dans ce cas, il me faudra reprendre ma voiture jusqu’à la ville voisine. Ce n’est qu’à deux kilomètres à peine, mais je n’ai pas ce courage et m’avance dans la salle.

— C’est pourquoi ? me dit une voix féminine agacée, en s’essuyant les mains dans un torchon de cuisine.

— Dîner et dormir, si c’est possible, réponds-je, d’un ton incertain, dans le but d’amadouer mon interlocutrice.

C’est une maîtresse femme, en tenue moyenâgeuse, jupe ample et décolleté avantageux, coiffe en tête et tablier aux hanches. La coutume de l’établissement veut que l’on serve en costume, ai-je lu à l’extérieur. Elle me jauge du regard, des pieds à la tête, avant de questionner :

— Une personne ? Pour une nuit ?

Je subodore qu’il vaut mieux ne pas répondre par un oui trop abrupt à cette dernière interrogation.

— Rien ne me presse. Je ne sais pas encore.

— Bon. Je vais vous donner la huit. C’est dans le Pavillon, à deux pas d’ici. 1er étage, avec baignoire, 99 €. Elle a vue sur la rue des Rondes. Par contre, pour dîner, je vous préviens, le service s’arrête à 22 heures et, en arrière-saison, pas de menu du jour.

— Ne vous en faites pas, je trouverai bien sur la carte quelque chose à me plaire.

— Il ferait beau voir que ce ne soit pas le cas !

Le ton est donné. Je perçois qu’on est plus près du premier degré que du second et me garde de répliquer.

(à suivre)

©Pierre-Alain GASSE, juin 2017.

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