CHAPITRE 39 : Véritable nature

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L’arrivée de Sarina à bord du croiseur d’Atlan se fit manu militari, tant le Commandant savait déjà de quoi la jeune femme était capable. En effet, si la Synthétique avait souhaité s’échapper et éliminer la dizaine de soldats qui lui faisait face, elle l’aurait pu sans la moindre difficulté. Cependant, la survie de la benjamine de la famille Rem n’était pas la seule à peser dans la balance. Au sol, il y avait le Charon et tous ses occupants qui risquaient leur vie si elle ne coopérait pas. Poussant Sarina entre les soldats, le Commandant s’avança vers l’un d’eux, plus gradé que les autres, qui le salua :

— Sergent, contactez la passerelle. Dites-leur de cibler la grotte dans laquelle je me trouvais et de faire feu. ordonna Atlan.

La surprise se lit alors sur le visage de Sarina.

— Non ! s’écria-t-elle. Tu avais dit…
— Je sais ce que j’ai dit. répliqua-t-il. J’ai menti. Sergent, exécutez mes ordres. Quant à toi… ajouta-t-il en se tournant vers Sarina.

Toutefois, le Pisteur ne termina pas sa phrase se contentant de planter un long instrument agrémenté d’une pointe en métal dans le corps de la Synthétique. Celle-ci se mit à avoir des convulsions avant de tomber lourdement au sol.

Atlan, quant à lui, était inexpressif derrière son masque. Il regarda le corps de la jeune femme avant de la pousser du pied pour la remettre sur le dos. Puis, il s’adressa à deux de ses soldats :

— Vous deux, portez-la jusqu’au pont six. Je veux découvrir tout ce qu’elle sait.

* * *

Quand elle s’approcha de sa mécanicienne, Tiana sentit rapidement que quelque chose n’allait pas. Elle semblait totalement perturbée voire même choquée depuis que Sarina avait été enlevée par le Pisteur.

— Qu’est-ce qui se passe, Mei ?
— C’est ce que m’a dit Sarina avant de se livrer...

Mais déjà la jeune mécanicienne fut interrompue par Tooms qui s’était réveillé :

— Boss ? Qu’est-ce qui m’est arrivé ?
— Un coup sur la tête de la part du ravisseur de votre soeur. répondit Alistair, qui s’occupait alors de lui. Vous n’aurez aucune séquelle, ne vous en faites pas.
— J’espère bien. ronchonna le pilote en se relevant brusquement. Alors comme ça, il a Sarina ? Il faut aller la chercher. tonna-t-il.

Le regard du timonier luisait d’une rage non dissimulée. Il s’inquiétait bien entendu, mais ressentait de la colère contre celui qui était sur le point de faire du mal à sa petite soeur.

Soudain, un important tremblement secoua le Charon. Les regards des deux anciens Indépendantistes se croisèrent et chacun d’eux comprit : Atlan venait de commencer à tirer sur l’emplacement de la grotte.

— Merde, il est plus rapide que je le pensais. pensa tout haut Fry. J’espérais vraiment avoir un peu plus de temps.

Sans que leur Capitaine n’ait eu besoin de dire quoi que ce soit, Tooms et Mei prirent le chemin de leurs postes respectifs tandis que Daniels et Al’ étaient auprès des deux autres membres de l’équipage qui mettaient un peu plus de temps à se rétablir. Elle-même en chemin vers la passerelle, l’ancienne militaire songea à Sarina et à ce que lui faisait subir Atlan.

* * *

D’un seul coup, elle se réveilla et remarqua qu’elle était attachée à une chaise métallique particulièrement inconfortable. La jeune femme regarda aux alentours et nota qu’elle était faiblement éclairée par une unique lumière fixée au plafond.

Combien de temps Sarina était-elle restée là ? Elle n'en avait aucune idée tant rien ne laissait imaginer combien de temps avait pu passer. Atlan l'avait rendue inconsciente et on l'avait traînée dans cette pièce. Il fallut quelques minutes à la jeune femme pour s’habituer à la pénombre ambiante et elle commença à discerner les contours des objets de la pièce. Elle remarqua notamment devant elle ce qui ressemblait à une console, reliée à la chaise par de longs câbles. Elle comprit alors avec horreur la fonction de cette pièce : la torture.

Espérant pouvoir se libérer, la Synthétique essaya de bouger. En vain. Elle continua donc son exploration visuelle des lieux et, au fond de la pièce, vit une cage dont les barreaux et le sol étaient couverts de morceaux de chair et de sang séché. Devant ce spectacle, elle tourna la tête, mais c’est alors que l’odeur pestilentielle monta à ses narines. Si bien qu’elle en eut un haut-le-coeur.

De longues minutes passèrent pendant lesquelles elle ne put que rester là, sans rien faire, que retenir le contenu de son estomac. Enfin, une porte s'ouvrit avec fracas, laissant entrer la lumière pendant quelques secondes avant de se refermer aussi brutalement.

— J’espère que tu me pardonneras de t’avoir fait attendre ainsi que l’état de cette pièce. Je leur avais pourtant demandé de faire le ménage. Mais ils ont dû oublier. déclara la voix fielleuse d’Atlan.

Défiant celui qui l'avait enlevée, Sarina détourna le regard et ne répondit rien. Sachant très bien ce qu’il avait l’intention de faire, quel que fût son but final, elle ne comptait en rien lui faciliter la tâche.

— Tu sais, ça pourrait être tellement plus facile si tu acceptais de me répondre.
— Pour que vous me mentiez encore ? Ne comptez pas trop sur ma coopération.

La synthétique se tourna alors vers son ravisseur. La colère se lisait dans son regard d'habitude si doux et compatissant. Mais à ce moment là, il n’était teinté que par la rage.

— Que me veux-tu donc ? Me ramener dans les laboratoires de l'Alliance pour que le projet D.I.M.A. puisse reprendre de plus belle ? Et bien, c'est trop tard, tout est enregistré. L’intégralité de votre plan pour espionner les gens à travers toute la galaxie.

— Ainsi tu es au courant de ça. Les miens ne vont pas être ravis. Mais non, ce n'est pas pour ça que tu es là… annonça-t-il.

Si le Pisteur avait eu un air policé, presque calme jusqu’à présent, les trémolos dans sa voix distordue par son casque indiquait qu’il commençait à perdre son calme. Mais que ce soit de la joie ou de la colère, Sarina avait compris qu’un tel changement dans le comportement du Commandant n’annonçait rien de bon pour elle. Il s'approcha rapidement de la console, laissant sa silhouette se dessiner dans la faible lumière qui vacillait légèrement au-dessus d’eux.

— Tu sais ce que je suis ? demanda-t-il, abruptement.

— Un Pisteur, on sait oui.

— En effet, et notre Ordre est une organisation secrète. Quand il y a un problème d’une extrême gravité qui menace la sécurité de l’Alliance, nous sommes envoyés. Des chasseurs, prêts à tout pour éliminer ceux qui veulent du mal à notre patrie. Et nous n’avons qu’une seule consigne : ne jamais faillir.

La tension s’accumulant, Sarina commença à comprendre : par deux fois, elle lui avait échappé, l’obligeant à fermer le complexe de Terra et potentiellement abandonner le projet D.I.M.A.. Pour Atlan dont le seul dogme était de n’être jamais mis en échec, ces deux échappatoires avaient été comme un véritable affront.

— Vois-tu où je veux en venir !? beugla-t-il. Toi et ces raclures de hors-la-loi, vous m’avez échappé ! Pas une seule fois, mais bien deux ! Vous avez entaché ma réputation !

Une forte respiration sortit de l’intérieur du casque d’Atlan tant sa rage était puissante. Brusquement, il se précipita vers la Synthétique et la gifla. Celle-ci fut surprise par la violence du choc tant que par la capacité d’Atlan à lui porter un tel coup.

Puis, reprenant son calme, il enleva son masque, qu'il posa près de la console.

— Je ne comprends pas, pourtant. continua-t-il, plus posément. Tu as essayé de m'échapper...

Atlan s'approcha alors son visage tout près de Sarina, afin qu'elle puisse le voir. La jeune femme réfréna un cri d’horreur en le découvrant : le visage du Pisteur était séparé en deux moitiés égales. L’une d’elle avait une apparence humaine, celle d’un jeune homme pâle aux cheveux bruns et longs ; sur l’autre partie, on ne voyait que l’armature métallique, les diodes clignotantes et les circuits internes de son crâne de synthétique.

— ... alors qu'après tout, nous sommes similaires en bien des points. termina le Commandant de l’Alliance.

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