Chapitre 10

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Lundi (suite)

Après avoir ouvert la Petite Porte, un souffle d'air froid m'a accueillie et ma frigorifiée sur place. En me retournant je pensais pouvoir encore faire demi-tour, revenir vers Synalco, mais c'était trop tard, Synalco avait disparu ainsi que la Salle des Créations.

Je n'avais plus le choix.

Là où je me trouve, c'est un endroit vide. Pas de tables, pas d'étagères, rien. Je marche droit devant moi tout en frissonnant. Il n'y a plus ce petit souffle d'air frais que j'ai ressenti en entrant, non, tout est figé. Un peu, comme si le temps s'était suspendu, ou plutôt, comme si j'étais en apnée.

Je me fais cette réflexion et soudain, je me rappelle que je suis dans ma propre tête, donc, si je me détends, que je reprends confiance en moi, cet endroit peut-t-il paraitre plus accueillant ?

J'essaie de me concentrer malheureusement rien ne se passe. Au moins, il y a suffisamment de lumière pour que je me déplace sans problèmes, donc je continue d'avancer, mais avant, je me retourne pour vérifier que la porte est toujours là, et elle l'est.

- Et maintenant ? Je fais quoi maintenant ? Je me parle à haute voix pour m'encourager.

Je constate qu'il y a de l'écho, et je continue de parler mais cette fois j'appelle Giacomo :

- Hé oh ! Gio ? Tu es là ?

Seul l'écho me répond timidement. Je tends l'oreille et recommence :

- Giacomo ! GIACOMO !!

J'ai crié cette fois, et toujours aucune réponse. Je m'impatiente un peu, et je reviens sur mes pas.

- Oh non !!

La porte n'est plus là ! La panique me prend et je cours droit devant moi et là, je me rends compte avec horreur que plus j'avance plus le fond de cet endroit recule...

- Ce n'est pas possible, je fais comment pour sortir d'ici moi !!

Je sens que je perds le contrôle et je commence à pleurer. Je tourne sur moi-même, tout est tellement vide, grand, sans limite. Plus de porte, plus de moyen de sortir d'ici. Sortir d'où d'ailleurs, de ma tête, c'est bien entendu, mais de quelle partie de mon esprit exactement ?

Je pleure comme une enfant, et je m'en veux d'être aussi fragile. Je me recroqueville sur moi et je laisse les sanglots monter et me secouer. C'est vraiment fort et j'ai l'impression que je n'arriverai pas à me calmer. Pourquoi est-ce que cela me rend-t-il ainsi ? Je subis l'ambiance morose et sans vie de cet endroit déprimant.

Déprimant oui, c'est le mot. Je renifle et fouille machinalement mes poches. Je retrouve un mouchoir en papier et me mouche. Un peu rassérénée, je me relève.

- Allez ma grande, ne te laisse pas abattre...

Je respire un bon coup et je regarde autour de moi. Soudain, je stoppe net, j'ai entendu quelque chose. Je retiens mon souffle, est-ce que c'est moi qui fais ça ? Ce petit bruit comme un sifflement. Je tends l'oreille et je scrute l'espace qui m'entoure et j'entends une sorte de chuintement.

- Il y a quelqu'un ?

J'ai soudain l'espoir de ne plus être seule et ça me porte littéralement.

- Il y a quelqu'un ? Giacomo c'est toi ?

- Non, ce n'est pas Giacomo. Fait une toute petite voix derrière-moi.

Je me retourne, pour me retrouver face à une jeune femme.

Nous nous dévisageons quelques instants et quand enfin je suis revenue de ma surprise, je tente une approche :

- Bonjour.

- Bonjour.

- Est-ce qu'on se connaît ?

- Oui.

- Es-tu l'un des personnages de mes histoires ?

- Non.

Les réponses sont simples et ce n'est pas plus mal. Je l'observe un peu, elle est plutôt menue, et a l'air fragile. Son visage est inexpressif à ce stade de la conversation, pourtant, elle semble abriter plus que le calme apparent dont elle fait preuve en ce moment même. Je demande encore :

- Tu es là depuis longtemps ?

- Oui.

- Est-ce que tu es seule ici ?

- Oui et non.

- C'est-à-dire ?

- Parfois je vois des gens passer.

Elle a dit sa phrase très doucement, presque dans un murmure. Elle a vraiment l'air timide, d'ailleurs elle a rougit. Encouragée par ce qu'elle vient de me dire, je persévère.

- Est-ce que tu connais un garçon qui s'appelle Giacomo ?

- Oui.

Victoire ! Je souris malgré moi, et m'avance vers elle.

- A la bonne heure ! Dis-moi, l'as-tu vu récemment ?

- Oui. Je l'ai vu il y a un petit moment déjà.

- Tu veux dire aujourd'hui, ou hier ?

Elle secoue la tête et me regarde en écarquillant les yeux et en haussant les sourcils. C'est étrange, elle me rappelle quelqu'un...

- Non, il y plus longtemps que cela.

- Combien de temps alors ?

- Quelques années ... pour toi.

- Mais ... toi tu es là depuis quand alors ?

- Moi ? Depuis toujours. Dit-elle simplement.

Je ne sais plus trop où j'en suis. Elle a dit « quelques années », mais alors, ça coïncide avec la période où j'ai sorti Giacomo de mon histoire, de mon imaginaire.

- Mais, ... est-ce qu'il est repassé dernièrement ?

- Dernièrement, oui.

- Il y a un mois ou deux, ou carrément la semaine dernière ?

J'insiste, sait-on jamais, mais en la voyant secouer la tête négativement, je soupire, frustrée. Je décide de ne pas en rester là et je pose encore une question.

- Où sommes-nous exactement ? C'est plutôt lugubre ici ...

- Oh, lugubre n'est pas vraiment le mot.

- Tu dois t'ennuyer tout de même.

- Non. J'aime le calme qui y règne. C'est comme ça ici, il n'y a pas d'agitation, bien au contraire.

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Tout ce qu'on ne veut pas on le range ici.

- Donc ici, on est dans la « Salle des Archives » ?

- On peut dire ça.

- Mais pourquoi est-ce que l'atmosphère est si pesante ? Tout est gris, déprimant...

- Parce qu'ici est entreposé tout ce qui fait peur, et qui rend triste.

Mon interlocutrice me sourit, et plus je la regarde, plus son visage me semble familier.

- Tu es sur la bonne voie. Giacomo n'a pas disparu, tu sais ? Il est juste ici, et il cherche la sortie.

- Mais comment le retrouver, c'est immense et si tu ne l'as pas vu depuis aussi longtemps, comment pourrai-je le trouver en quelques heures ? Ou minutes ?

- Il y a bien une raison pour laquelle tu as décidé de le classer ici.

- Non, pas particulièrement, enfin, je ne n'en vois aucune.

- Qui est-il ?

- Gio ? Eh bien, c'est le compagnon de Synalco.

- Et... qui est Synalco ?

- Bonne question.

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