Chapitre V

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14 Janvier, 3 ans avant l’Avènement, Lyon, France.

 

    Mahé et Ayhan avaient profité des fêtes de fin d’année pour se reposer ensemble. Ils avaient même fait une ou deux grasses matinées suivies de longues promenades dans les forêts alentours. Mahé avait du mal à se séparer de la nature bien longtemps et finissait toujours par traîner Ayhan sur des chemins escarpés, au milieu des bois enneigés, ou sur les flancs de collines majestueuses.

    Ils se découvraient l’un et l’autre, et s’étonnaient de tant de différences entre eux. Ayhan était un garçon solitaire, un peu fermé au monde extérieur, plein d’une révolte irréfléchie et d’un goût extrême pour l’interdit. Mahé, lui, était l’exact opposé. Il avait besoin d’être entouré, de parler, de découvrir les gens, mais c’était un garçon craintif. En fait, il avait les goûts d’une personne exubérante, mais aucunement ses manières. A vrai dire, il aurait presque été effacé, négligeable, si sa beauté n’avait pas été aussi éclatante.

    C’était peut-être là, finalement, que les deux garçons se ressemblaient vraiment. L’un était invisible par choix, l’autre par timidité. Mais on finissait toujours par les remarquer car leurs traits étaient sans pareil, d’une élégance rare et inestimable.

 

    Le mois de Janvier était bien entamé. Le froid mordant, dans les rues de Lyon, faisait que personne n’osait mettre le nez dehors. La neige avait recouvert les toits et les trottoirs. Pourtant, sous la basilique de Fourvière, Mahé et Ayhan s’étaient installés sur un banc, pelotonnés l’un contre l’autre, observant la ville gigantesque malgré leurs membres gelés.

    Évidemment, Ayhan aurait tout autant apprécié le panorama à l’intérieur d’un café, ou de son appartement, devant un bol de chocolat chaud. Mais Mahé avait besoin de respirer l’air frais, de ne pas se sentir enfermé entre quatre murs et avait, une fois de plus, réussi à entraîner son ami dehors.

    La tête posée sur l’épaule du jeune polynésien, Ayhan repensait à son initiation. Le temps où il recevrait le don d’Ulome lui paraissait tellement loin. Il avait vu la fille, Diane, et le pouvoir qu’elle avait acquis. Une puissance à la fois terrifiante et fascinante. Il ne cessait d’y songer depuis.

    Après l’attaque des Descendants d’Eren, un vent de panique avait soufflé sur le Domaine Occulte. Et s’ils revenaient ? Et s’ils attaquaient à nouveau, encore plus nombreux ? Mais Diane avait rapidement calmé les esprits en assurant qu’elle resterait jour et nuit au Domaine Occulte pour le protéger. Très vite, elle était devenue une espèce de leader dans la communauté, le membre en qui presque tout le monde avait confiance. Peu bavarde en public, elle restait sans cesse en retrait. Désormais, elle était celle qui avait le plus de contacts avec Ulome et représentait son autorité. Raven et Raiden étaient de moins en moins consultés concernant les nouvelles recrues, et de moins en moins présents d’ailleurs.

    — Dis-moi Mahé, qu’est-ce que tu penses du pouvoir de Diane ? L’intéressé sembla surpris par la question. Il redressa la tête d’Ayhan et lui enleva une mèche de cheveux qui tombait dans ses yeux.

    — Je n’en sais rien. C’est un pouvoir puissant, manifestement. Mais, pourquoi me demandes-tu ça ?

    — Disons que… Je suis étonné. Lorsqu’Ulome a transmis les autres dons, jamais il n’y avait eu de manifestations aussi… malfaisantes. » Ayhan parut effrayé par ses propres mots. Il s’empressa de reprendre la parole : « Je veux dire… On ne peut pas nier que l’effet du pouvoir de Diane a quelques aspects plutôt négatifs. Tu ne crois pas ?

    — En fait, ce n’est pas tout à fait vrai. Chaque don possède une part d’ombre. Regarde Raven et ses crises de possession. Et Syrine, incapable d’échapper à ses rêves. Kami, dont les souvenirs se mêlent à ceux des autres si bien que son propre passé est trouble et incertain… Tous ceux qui ont reçu le don d’Ulome connaissent des tourments directement liés à l’initiation.

    — Et toi ?

    — Mon don aussi présente ses désavantages. Il tourna les yeux, dont le bleu profond se mêlait aux éclats pâles de son iris, vers la cité blanchie par l’hiver. Quelques flocons tombaient encore du ciel gris.

    — Qu’est-ce que c’est ? demanda Ayhan.

    — Peu importe. » Mahé semblait chercher quelque chose dans les rues lyonnaises, ses yeux rougis par le froid s’agitaient compulsivement.

    « Si seulement je l’avais eu plus tôt, nous aurions su ce qu’il se passait. Nous les aurions sauvés. » Ces mots semblaient lui avoir échappé, il avait formulé sa pensée sans même s’en rendre compte.

    Il s’écarta un peu d’Ayhan pour lui faire face, le regard d’une intensité voulue et calculée.

    « Tu te souviens, lorsque tu t’es évanoui après ta première rencontre avec Ulome ? Tu as fait ce rêve étrange, un rêve où tu voyais Kami et Syrine dans un camion. Tu m’as dit avoir eu l’impression que tout était réel, que ce n’était pas un simple songe mais quelque chose de bien plus fort. Tu avais raison. C’était mon pouvoir qui s’exprimait dans ton sommeil. Je ne comprends pas vraiment pourquoi tu en as été capable mais, pendant que je te soignais, j’ai senti mon pouvoir s’insinuer en toi et s’activer. Je suis capable de voir à distance, à travers les murs, à travers les frontières. Presque une omniprésence si tu préfères. Cela dit, je n’entends presque pas, ou alors ce ne sont que des chuchotements, des mots qui se perdent dans les flux de mon pouvoir. »

    Ayhan ne savait pas quoi dire. Son ami avait la possibilité de tout savoir, de tout surveiller, de tout connaître de l’intimité des autres. Bien sûr, ce don n’était pas à prendre à la légère. Mais, le connaissant, Mahé n’était pas capable d’en abuser. Cela dit… Il était impossible de mentir à un garçon qui possédait ce genre de pouvoir. Impossible de cacher longtemps le mal qui menaçait de les séparer à jamais, et il était tout à fait envisageable que Mahé s’en soit servi au hasard d’une journée. Avait-il déjà découvert l’état de santé d’Ayhan ?

    Les conséquences de cette révélation paraissaient sans fin aux yeux du jeune homme. Mahé était-il plus impliqué dans les secrets du Domaine Occulte qu’il ne voulait bien l’admettre ? Sa discrétion sembla soudain suspecte. Tout semblait étrange, pas faux… mais déformé en tout cas.

    — C’est ce que tu as dit tout à l’heure. Si tu l’avais eu, quand tu étais encore sur ton île, tu aurais pu savoir que ta famille était menacée ? C’est ce à quoi tu pensais, n’est-ce pas ?

    — Oui, j’aurais pu les sauver, les prévenir. Il ferma les yeux, poussant un long soupir. « Je ne me tiens pas pour responsable. J’y pense, c’est tout.

    — Mais enfin, tu n’aurais rien pu faire à ton âge. Ce genre de don n’était pas à ta portée. Si Ulome ne te l’avait pas transmis, tu ne l’aurais jamais eu.

    — Je n’en sais rien. Et si Ulome se contentait de révéler le potentiel de chacun, d’ouvrir les dons ? J’ai entendu parler de ce genre de pouvoir. On appelle les sorciers qui en sont capables des Révélateurs. Si c’était ça… ça voudrait die que j’étais potentiellement capable d’user de mon pouvoir, même enfant.

    — Tu ne devrais pas y penser. La famille que tu avais pratiquait la magie, ils connaissaient beaucoup de choses. Si le don était en toi à cette époque, il se serait révélé bien avant ta rencontre avec Ulome. » Ayhan pensait ce qu’il disait. Il ne doutait pas un instant de ses paroles, conscient que son pouvoir de télékinésie était, lui, tout à fait inné.

    Ils ne dirent plus un mot. Mahé se contenta de frissonner et de recevoir l’un des baisers les plus passionnés qu’il n’ait jamais reçu. S’il avait été seul à ce moment là, il aurait sûrement pleuré jusqu’à en être complètement épuisé. Il savoura le bien-être qu’Ayhan lui procurait, ce sentiment puissant qui l’envahissait à chaque caresse et qui chassait un peu plus loin ses fantômes et ses regrets.

 

***

 

26 Janvier, 3 ans avant l’Avènement, Poznan, Pologne.

 

    Les premiers temps, Kami et Syrine avaient visité la ville de fond en comble, luttant activement contre le froid qui les envahissait chaque fois qu’ils sortaient de la Maison de France. Mais, l’hiver polonais solidement installé, ils avaient renoncé à sortir. Leurs journées connaissaient une étrange monotonie.

    Syrine travaillaient activement sur ses articles qu’elle envoyait à Lyon, au journal ésotérique qui la publiait depuis longtemps déjà.

    Parfois, la présence lui apparaissait, toujours aussi déstabilisante pour la jeune femme. Elle s’était surprise, plus d’une fois, à convoquer son tourmenteur, en mal de son amour et de ses caresses, et sa détermination avait fondu progressivement. Petit à petit, elle s’était fait une raison et avait accepté le mystérieux fantôme dans sa réalité quotidienne, en évitant inlassablement que quoi que ce soit transparaisse dans son propre comportement.

    Kami, lui, s’isolait dans ses appartements et écrivait ce qu’il appelait ses carnets. Il avait l’intention de raconter sa vie, de son enfance jusqu’à son emménagement à Lyon. Ou peut-être qu’il s’arrêterait avant. Il verrait le moment venu, mais il ne parlerait pas de l’histoire de la Rose Noire. Ce qui lui importait, c’était de se replonger dans son passé. Il le faisait avec bonheur.

    Bien entendu, il se laissait parfois aller à une grande mélancolie, surtout lorsqu’il pensait à ses âmes sœurs disparues, Malia et Salem, ou à l’amour de sa vie, Roman, prisonnier du coma. Mais qu’il soit ou non bouleversé par les réminiscences de son existence en France, cela ne durait tout au plus qu’une journée. Les soirs, les deux apatrides se rendait au salon, et assistait à la représentation de la virtuose et de sa danseuse, ce qui ne manquait pas de dissiper toutes les tortures dont ils pouvaient être victimes.

    La première fois qu’il avait assisté à la soirée, il avait été aussi bouleversé que son amie. Et les autres soirs avaient été tout aussi passionnants. Aucun des morceaux ne ressemblait à un autre. Aucune des danses n’était semblable aux précédentes. L’ambiance ne déplaisait pas au français. Les filles et les garçons qui se prostituaient dans la Maison de France ne lui faisaient ni chaud ni froid. Syrine, elle, avait toujours un peu de mal avec les mœurs locales et se serait empressée de choisir un autre hôtel s’il n’y avait pas eu les deux jeunes femmes en représentation chaque soir.

 

    Ce jour là, février était tout proche, Kami remontait à sa chambre pour se préparer pour la représentation quand il entendit des cris contenus au détour d’un couloir. Il s’approcha doucement, et passa timidement la tête pour voir la scène.

    Là, la belle violoniste pleurait à chaudes larmes, la voix étouffée par la main d’un vieillard que Kami ne pouvait voir que de dos. Les protestations qu’elle émettait étaient incompréhensibles, mais la frustration et la douleur de l’artiste étaient manifestes.

    Face à eux, un autre homme les observait sans rien dire. C’était un bel homme, d’une trentaine d’année, avec de beaux cheveux blonds coupés très courts et de grands yeux verts. Son visage était indéchiffrable. Il avait les poings serrés, les bras le long du corps, et son regard, braqué sur le vieillard, était empreint de mépris et de souffrance. Ce dernier prit la parole, d’une voix sourde et menaçante. Son accent polonais donnait une force particulière à ses propos.

    — Ne vous approchez pas d’elle, je ne vous le répéterai pas. Si votre grand-mère n’avait pas été aussi importante à mes yeux, je vous aurais tué depuis longtemps. Antha m’appartient, et il est hors de question que vous posiez vos mains sur elle sans me payer avant.

    — Vous ne pouvez pas la forcer à se vendre, répondit le plus jeune des deux hommes d’une voix claire et étonnamment assurée.

    — Vous avez raison, mais je peux vous l’interdire. Si vous tentez à nouveau de la voir, vous le regretterez amèrement, croyez-moi. Il relâcha doucement son étreinte sur la dénommée Antha. Elle se précipita sur une canne posée au sol et tendit l’objet au vieil homme. C’était une très belle canne en bois noir avec un pommeau d’argent splendide représentant un lion. Il s’en saisit et la toisa du regard.

    — Sergeï… La jeune femme ne termina pas sa phrase, elle était paralysée par ce que Kami imaginait être des yeux terrifiants. Ses cheveux roux, si clairs qu’on aurait pu croire qu’ils étaient blonds vénitiens, coulaient tout autour de son visage. Elle portait, comme toujours, son impressionnante émeraude, et ses yeux gris viraient légèrement au bleu à cause des larmes qu’elle versait malgré elle.

    — Silence, siffla-t-il. Il est la honte de sa famille. C’est moi qui gère cet endroit à présent, et si sa grand-mère ne m’avait pas fait promettre de le protéger… Je t’interdis de poser les yeux sur lui, sinon toi aussi je te punirai. S’il faut ça pour que tu te souviennes à qui tu appartiens… Soyez certains que, malgré ma promesse, j’agirai pour que mon honneur ne soit pas bafoué. » Il donna un grand coup de canne sur le sol, et la jeune femme s’élança à travers le couloir opposé à Kami. Le vieux lui emboîta le pas, sans un regard pour le dernier protagoniste de la dispute.

    Celui-ci, se croyant seul, s’appuya sur le mur derrière lui et relâcha ses muscles. Il se mit à trembler de façon incontrôlée. C’était un homme vigoureux, avec une charpente solide et des muscles saillants. Une force de la nature brisée par un vieillard manifestement autoritaire.

    Kami s’approcha sans que l’homme ne l’ait vu.

    — Excusez-moi. J’ai vu ce qu’il s’est passé avec le vieil homme et Antha. Je m’appelle Kami. L’homme leva alors les yeux vers le sorcier. Des larmes coulaient doucement sur ses joues rosies.

    — Mon nom est Stefan, réussit-il à articuler avec une quasi-absence d’accent.

    — Antha et vous êtes amoureux, c’est bien cela ? » Le dénommé Stefan acquiesça, incapable de prononcer un mot. Kami lui tendit un mouchoir de soie noire pour qu’il sèche ses larmes. « Mais alors pourquoi le vieil homme vous sépare-t-il ? Antha n’est pas une simple employée, n’est-ce pas ?

    — Sergeï me considère comme un moins que rien parce que… Je suis différent de lui, de ma grand-mère et d’Antha. C’est un élitiste pur, et un ancien nazi qui n’a rien perdu de sa mentalité. Mais ce n’est pas pour ça qu’il est si dur avec elle. C’est que l’argent lui ferait faire n’importe quoi. Antha a réussi à échanger son corps contre son violon, ce qui lui évite de se prostituer au sens propre du terme. La plupart des employés ici sont là par choix, ou en tout cas ils n’ont pas été forcés par Sergeï. Mais ce n’est pas le cas d’Antha et de sa sœur. Alors elle vend son art, elle est fascinante lorsqu’elle joue. Mais c’est un manque à gagner pour Sergeï, car la beauté d’Antha est éclatante et tous les clients la désirent.

    — Il vous empêche de vous aimer dans l’espoir de forcer Antha à se donner aux clients.

    — C’est exact. Et nous n’avons pas les moyens de nous enfuir. Nous devrions emmener sa sœur, et aucun de nous n’a assez d’argent pour s’assumer seul alors pour trois…

    Kami s’installa à côté de Stefan, désolé pour lui de cette situation. Il l’observait en coin. Malgré sa stature impressionnante, l’homme dégageait une délicatesse singulière. Son visage était fin, sa peau immaculée, et ses yeux verts reflétaient une innocence touchante.

    Il se leva soudainement, laissant Kami un peu perplexe.

    — Je ne sais même pas pourquoi je vous raconte tout ça. Pardonnez-moi, je vais retourner à mes appartements.

    — Attendez Stefan, dit le jeune sorcier en se relevant. J’aimerais vous aider. » Stefan leva les yeux, son regard était plein d’un désespoir brûlant. Il soupira, et adressa un sourire fataliste à l’autre homme.

    — Merci Kami, mais personne ne peut nous aider.

 

***

 

21 Février, 3 ans avant l’Avènement, Lyon, France.

 

    Ayhan s’écrasa violemment sur le sol. La lame l’avait percuté si fort que des étoiles multicolores dansaient devant ses yeux. Heureusement que son ennemi n’avait pas frappé avec le tranchant de son épée, sinon le blessé aurait eu le crâne coupé en deux. Raven surplombait de toute sa hauteur le garçon à terre. Sa peau sombre et ses vêtements noirs le rendaient presque invisible dans la nuit. Il leva sa main libre au ciel. Des éclairs crépitèrent au-dessus de lui, mais Ayhan le projeta à l’arrière, usant de toute sa force télékinésique.

    Il réussit enfin à se relever, alors que son initiateur l’assaillait déjà de nouveaux coups d’épée. Leur rapidité était phénoménale. L’un esquivait sans ciller, attendant le bon moment pour riposter, l’autre enchaînant les attaques à une allure surhumaine.

    — Allez Ayhan, réagis ! Tu devrais être capable de me neutraliser à présent !

    — Justement… » Le novice profita d’un flottement dans les assauts de Raven pour propulser une vague d’énergie. La lumière bleutée frappa sa cible au visage, lui faisant perdre l’équilibre. Ayhan en profita pour désarmer son adversaire et envoya, grâce à son don mental, l’énorme épée dans un buisson.

    Il avait perdu sa chaîne durant le combat. La cherchant du regard pendant quelques secondes, il la vit à une dizaine de pas devant lui. C’était une grosse chaîne, longue de plusieurs mètres, qui se terminait par un pieu en argent. Il tendit la main vers elle. Les maillons se soulevèrent doucement, flottants dans l’air, mus par une énergie invisible, mais n’arrivèrent pas jusqu’au sorcier. Raven le foudroya à deux reprises et projeta son énergie sur Ayhan qui tomba sur la terre fraîche et perdit connaissance.

    Raiden s’avança vers Raven, l’enlaçant de ses bras fragiles, et se hissa sur la pointe des pieds pour l’embrasser. Elle regarda son protégé, étendu sur le sol.

    — Il sera bientôt prêt. Que ferons-nous alors ?

    — Que ferons-nous à propos de quoi ma douce ? Tu veux parler de Diane et du Domaine ? » Elle acquiesça, agitant rapidement la tête, comme si elle ne pouvait plus parler. Elle portait une jupe bleue fendue sur le côté droit, permettant de découvrir jusqu’à la peau nue de sa cuisse, et des bottes en cuir qui lui montaient aux genoux. Elle s’était emmitouflée sous un long poncho de tissu gris, dont la doublure lui tenait presque chaud. Elle frissonna quand même. Il restait quelques tas de neige par endroits.

    « J’ignore ce que nous ferons. Je ne peux pas mettre Diane dehors. Ce serait comme renier Ulome. Et avec la menace des Descendants d’Eren…

    — Mais cette menace est en rapport avec Ulome ! C’est lui qu’ils veulent, plus que nous tous réunis. » Raven repoussa doucement la jeune vietnamienne et planta son regard dans le sien.

    — Je ne sais pas. Peut-être nous veulent-ils également ? Rappelle-toi, lorsqu’ils sont apparus pour la première fois, ils voulaient Kami également. Et maintenant qu’ils nous connaissent… Peut-être sommes-nous également en danger.

    — Alors il faut fuir Raven. Je t’en supplie, il le faut !

    — Et laisser tout le monde derrière nous ? Tu perds l’esprit.

    — Je ne sais pas, j’essaie seulement de trouver un moyen de nous sauver. Je ne supporte plus de voir Diane, de sentir son énergie. Et si Kami avait eu raison, s’il avait dit la vérité ?

    — Ne parle pas de ça. » Il avait été sec, pour la première fois depuis une éternité. Ses paroles pour Raiden avait été d’une dureté inqualifiable. C’était pire qu’une gifle pour la jeune femme. Elle baissa la tête, pendant que son compagnon fouillait les buissons à la recherche de son épée. « Excuse-moi mon amour. C’est juste que… Tu sais bien. Ce que nous a dit Kami, à l’époque, ne peut pas être la vérité. Nous n’avons pas pu nous tromper à ce point. Ulome a des défauts, mais il ne puise sûrement pas son pouvoir dans les limbes. A l’époque, tu as fait le choix de ne pas fuir malgré la vision de Kami. Avec le recul, je suis certain que tu as eu raison. Le pouvoir d’Ulome te protégera.

    — Il y a des choses que je ne t’ai pas dites.

    Raven s’interrompit, fixant la jeune femme d’un air interrogateur. « Il y a quelques mois, je suis allée dans le labyrinthe pour parler à Ulome. Je suis descendue dans une pièce que je n’avais jamais vue jusque là. Elle était si profondément cachée dans les dédales… Je n’aurais jamais soupçonné qu’ils étaient si grands. Il y avait une atmosphère étrange, une énergie étouffante. Et Ulome était là. Je n’ai pas eu le temps de voir quoi que ce soit, ni de lui parler. Il m’a jetée violemment dehors. Son pouvoir m’a frappée aussi fort qu’il le pouvait, et depuis nous ne nous sommes pas adressés la parole. » L’homme serra Raiden contre lui, la berçant légèrement.

    — Nous ne devons pas affaiblir le Domaine plus qu’il ne l’est déjà. Nous ne devons pas nous saborder ma chérie. Il y a des choses qu’il ne vaut mieux pas savoir.

    — Mais… Tu as écouté ce que je t’ai dit ? Il posa un doigt sur les lèvres de la magicienne, comme pour sceller ses paroles et ses doutes.

    — Ne pense plus à rien. Nous sommes si bien ensemble. Pendant tant d’années nous ne nous sommes pas approchés. Pendant tant d’années j’ai cru qu’il n’y aurait plus jamais rien entre nous, que ce ne serait pas possible. Quoi qu’il arrive, nos destins seront liés. » Il enfouit son visage dans la chevelure de Raiden. Il adorait ses cheveux. Ils étaient si noirs, si doux, et avaient cette odeur de fleur tropicale qu’elle affectionnait tant. Comment s’appelait-elle déjà, cette fleur ? Il n’arrivait pas à se rappeler le nom. Il n’avait jamais aimé personne d’autre. Depuis qu’il avait dix-sept ans, son cœur appartenait entièrement à la jolie vietnamienne, l’innocente, celle qu’il fallait protéger.

    Le couple resta immobile, dans la nuit, pendant de longues minutes. Ayhan était toujours inconscient, allongé sur le sol, et jusque là personne n’avait prêté la moindre attention à son sort. Raiden se dégagea de l’étreinte de son amant, et rejoignit leur protégé. Il saignait du nez. Encore. Elle tourna les yeux vers Raven.

    — Il prend ses médicaments pourtant. Enfin, c’est ce qu’il me dit en tout cas. Réveille-le ma chérie, je vais ramasser sa chaîne et on le déposera chez lui.

    La sorcière aida le garçon à se relever. Il était encore sonné, mais tenait debout et ne saignait plus. Bonne nouvelle. Elle lui tendit un mouchoir de tissu avec lequel il entreprit de nettoyer l’hémoglobine qui le souillait.

    — Tu t’es bien battu Ayhan. Il ne fait nul doute que, dans très peu de temps, tu seras prêt à recevoir le don. » Elle lui enleva le mouchoir des mains, car il ne frottait pas au bon endroit, et lui nettoya la peau avec douceur. Elle souriait avec la sérénité qu’il la caractérisait parfaitement, avec cette tranquillité qui irradiait tout autour d’elle et qui finissait toujours par apaiser son entourage.

    Subitement, Raven cria. Les deux autres se précipitèrent vers lui, s’arrêtant à un bon mètre de distance. Ils savaient ce qu’il se passait. L’homme se tourna vers eux, les yeux voilés par une brume lumineuse. Ses traits étaient déformés. Sa peau était devenue laiteuse, et ses lèvres étaient retroussées. On aurait dit un cadavre frais. Frais, mais un cadavre quand même.

    — La mort frappera le domaine des sorciers,

Quand les enfants surgiront des ténèbres secrètes.

Et nulle cachette, et nulle retraite,

Ne sauront dissimuler les sacrifices exigés.

    Raven se jeta sur le sol, frappant de son poing nu sur une pierre qui lui entailla la peau. Il semblait lutter, comme posséder par un démon puissant. Ayhan eut un vertige à la vue du sang de son ami, mais Raiden le retint. Le possédé les regarda de nouveau. « La Bête sera bientôt libre ! La Levée du Voile est proche ! Pauvres imbéciles, vous ne savez rien ! » Il partit d’une rire macabre, le roulant dans sa gorge avant de le cracher comme du venin. « Vous ne pourrez pas empêcher l’avènement de la Bête. Et quand la femme combattra le dragon, et que les anges, et que ses fils, viendront l’appuyer dans ce combat, son sang se déversera sur cette planète. La Bête se relèvera, et le faux prophète se révélera. »

 

***

 

24 Février, 3 ans avant l’Avènement, Poznan, Pologne.

 

    Les appartements de Kami semblaient immenses même pour une suite d’hôtel. Certes, la Maison de France était un hôtel très luxueux, mais il n’en restait pas moins que le jeune sorcier disposait d’une chambre splendide, d’un salon majestueux et d’un bureau annexe.

    La décoration était sobre et riche à la fois. Les murs étaient recouverts de tapisseries blanches, les meubles, blancs eux aussi, étaient tous en bois massif et les lustres semblaient être en cristal plutôt qu’en verre. Une épaisse moquette bordeaux ornait le sol, assortie aux rideaux et aux petites lampes d’ambiance, ce qui donnait un aspect chaleureux et rassurant à la suite.

    Lorsqu’il était arrivé à Poznan, Kami avait eu la joie de découvrir, dans sa chambre, un lit à baldaquin. Il s’était imaginé tel un roi, levé au matin par ses sujets, et il s’en était amusé à plusieurs reprises. Tout était parfait à ses yeux. Il adorait la Maison de France. Il adorait cette vie d’hôtel, fastueuse, où rien n’importait sinon ses vacations diurnes et les représentations de la belle Antha.

    Il ne cessait de penser à elle d’ailleurs, et à Stefan aussi qu’il avait eu parfois l’occasion d’apercevoir furtivement à l’occasion des spectacles de sa dulcinée. Cette histoire d’amour le bouleversait, sans savoir vraiment pourquoi. Voyait-il, dans cet amour interdit, des similitudes avec l’amour qui l’avait uni à Salem ? Ou bien était-ce l’étrange beauté des deux jeunes gens qui le poussait à s’abandonner à leur souvenir, à souffrir de leur douleur, à s’investir mentalement dans leurs vies ?

 

    Il était assis dans une bergère dont le tissu pourpre lui procurait une sensation savoureuse au toucher. Il frottait paresseusement sa joue contre le dossier, laissant ses cheveux noirs s’emmêler et se charger d’électricité statique. On frappa à la porte.

    — Vous pouvez entrer, lança-t-il d’une voix forte.

    Stefan apparut dans le salon. Il était vêtu d’un élégant costume bleu dont la coupe épousait parfaitement sa stature forte et virile. Kami frissonna un instant. Il ressentait une telle attirance pour l’homme, une de ces pulsions qui ne s’expliquent pas, qui sont à la fois puissantes et si facilement maîtrisables.

    — Bonsoir Kami.

    — Stefan, je suis heureux que vous ayez répondu à mon invitation. Kami fit signe à l’homme de s’asseoir, tout en se demandant qu’elle âge il pouvait bien avoir. Habillé d’un costume visiblement neuf, et taillé sur mesure, il donnait l’air d’être plus vieux et expérimenté.

    — Votre message disait que vous auriez une bonne surprise pour moi ?

    — En effet. Mon amie, Syrine, la jeune femme que vous avez sûrement remarquée en ma compagnie les soirs, est partie à la rencontre d’Antha il y a quelques minutes. Elle ne devrait pas avoir trop de mal à la faire monter ici.

    — Vous nous organisez une rencontre ?

    — Exactement.

    — Et le vieux Sergeï ? Il ne la lâche pas d’une semelle en temps normal. Votre amie ne pourra pas s’en défaire.

    — Stefan, faites nous confiance. Elle réussira.

    — Je le souhaite, ne serait-ce que pour quelques minutes. Je meurs de ne pas pouvoir la toucher. » Il baissa la tête, en proie à des larmes étouffées. « Pourquoi faites-vous ça Kami ? Sergeï est dangereux, et vous ne connaissez ni Antha ni moi. Avez-vous seulement conscience des risques que vous prenez ? Il vous tuera s’il découvre ce que vous avez fait.

    — Croyez-moi Stefan, je sais quels sont les risques, et je n’ai pas peur de Sergeï. » Il disait la vérité, Kami n’avait pas peur. Mais en voyant la terreur dans les yeux de son interlocuteur, il eut un pincement au cœur : et si le vieillard était plus dangereux que ce qu’il pensait ? Syrine était-elle partie dans la gueule du loup, tout simplement parce que le jeune sorcier avait trouvé une nouvelle lubie ?

    La porte d’entrée s’ouvrit alors que le silence s’installait entre les deux hommes. Syrine surgit, les yeux plissés, détaillant Stefan du regard. Elle portait de belles bottines en cuir opalin, un large pantalon de lin bleu, et un pull-over en laine blanche qui laissait à nue la peau laiteuse de ses épaules. Ses cheveux étaient attachés, par un collier de perles bleues, en une longue queue de cheval.

    — Bonsoir messieurs. » Elle se tourna vers la porte et attendit, comme les deux hommes, qu’Antha apparaisse.

    Le temps semblait s’être suspendu. La virtuose fit enfin son entrée, se déplaçant avec grâce alors que sa longue robe parme virevoltait sous les frottements de ses jambes. Elle portait, comme à son habitude, la fabuleuse émeraude autour de son cou exquis, et un délicieux parfum de vanille accompagnait ses déplacements.

    Stefan l’enlaça, lui baisant les joues, les lèvres, passant nerveusement la main dans ses cheveux. Les amants semblaient aussi fébriles l’un que l’autre. Leurs sentiments emplissaient la pièce, comme un effluve épais et sucré qui tournait la tête à Syrine et Kami.

    Stefan se tourna vers les deux français :

    — Mais comment avez-vous pu la soustraire à Sergeï ?

    — Ce n’est pas ce qui importe Stefan, répondit doucement Syrine. Vous devriez vous isoler à côté, dans la chambre de Kami. Nous n’avons pas toute la nuit, Antha devra être de retour dans peu de temps.

    — Vous avez raison. Merci. Merci à vous deux.

 

    Kami et Syrine se retrouvèrent seuls dans le salon. Le garçon servit un verre de rhum à son amie, indéniablement l’alcool quelle préférait, et une rasade de vodka pour lui-même. La jeune femme semblait inquiète, ses yeux ne cessaient de se porter sur la porte d’entrée pour se reposer finalement sur son verre.

    — Quelque chose cloche Syrine ?

    Elle secoua la tête, ce qui détacha quelques mèches de sa chevelure. Saisissant Amulline, elle murmura :

    — C’est qu’en vérité, je n’ai pas eu besoin de m’occuper de Sergeï. Il était absent lorsque je suis allée chercher Antha. Elle était seule, avec sa sœur, la danseuse, Anna. Alors nous avons pu venir ici sans encombre.

    — Mais Sergeï ne va pas les laisser seules trop longtemps.

    — Anna est restée. Elle lui dira qu’un client voulait avoir un concert privé et qu’Antha a accepté.

    Kami réfléchit un instant, repensant à la conversation qu’il avait surprise quelques temps avant et qui lui avait permis de rencontrer Stefan.

    — Il ne croira jamais qu’Antha est partie avec un client. Il l’a connaît trop pour avaler une histoire pareille. On va droit à la catastrophe.

    — C’est ce que je pense aussi…

    Soudain, une énergie violente et basse frappa Kami. Il se plia en deux sur son siège. Des images l’assaillirent, des bribes de conversations, des rires. Un puissant goût de terre envahit sa bouche. Une autre réalité sembla se superposer à la sienne. Une femme, c’était Francesca, l’ancienne patronne de la Maison, dansait et souriait. C’était une belle femme. Et puis Sergeï, bien moins vieux d’apparence alors que le souvenir datait seulement de quelques années, était fringuant et rayonnant en présence de sa belle. Comme leurs sentiments semblaient puissants. En fait, ils faisaient penser à Antha et Stefan.

    Kami se jeta sur le sol, brisant son verre, et s’entailla la main. La douleur chassa les souvenirs. Les images refluèrent, lui permettant de percevoir à nouveau son entourage.

    — C’est lui. Il arrive ! Syrine se leva et alla à la chambre, sommant les deux amoureux de sortir. A cet instant, la porte d’entrée s’ouvrit avec fracas et Anna fut jetée sur le sol du salon. Derrière elle, Sergeï avançait, appuyé sur sa canne, les yeux lançant des éclairs presque palpables. Une énergie vibrante enveloppa et gifla les deux sorciers. Ils réalisèrent brusquement que, lui aussi, pratiquait les sciences occultes.

    Anna éclata en sanglots.

    — Je suis désolée, je ne voulais pas qu’il sache. Mais il a senti que je mentais. Antha avait fait son apparition et s’était précipitée vers sa sœur. Il n’y avait aucune colère dans son comportement. Elle aida Anna à se relever et toisa leur tortionnaire.

    C’était un vieil homme, ses cheveux ramenés vers l’arrière étaient d’un blanc parfait, presque transparent. Son visage, marqué de rides profondes, avait dû être celui d’un jeune homme rude et déterminé, et sa posture témoignait que rien n’avait changé. Malgré sa canne, son dos était parfaitement droit et ses jambes semblaient tout à fait viables.

    Kami sursauta quand il croisa son regard. Sergeï avait un œil parfaitement blanc, comme s’il n’avait jamais eu qu’un globe lisse et dépourvu d’iris. S’il n’avait pas été saisi par quelques souvenirs du vieillard, le jeune sorcier aurait parié qu’il était né avec un œil bleu unique.

    — Comment avez-vous osé ? susurra Sergeï. Sa voix était acerbe, presque inaudible, et aussi menaçante qu’un sifflement de serpent. Il détailla, de son seul œil valide, chacun des hommes et des femmes qui se tenaient dans la pièce. Anna avait cessé de pleurer. Dans ses prunelles, brûlait maintenant une haine sans limite. Antha restait toujours aussi inexpressive, comme si aucun sentiment ne pouvait la submerger.

    — Combien voulez-vous pour nous les laisser ? Kami avait brisé le silence par cette question, comme s’il avait brisé une vitre à coups de marteau. Tout le monde parut interloqué, sauf Antha qui sembla amusée.

    — Croyez-vous que votre argent pourrait acheter ces trésors, ricana le vieillard. Petit présomptueux ! Je n’ai que faire de votre pauvre richesse ! Il s’avança vers le sorcier, comme s’il s’apprêtait à le frapper.

    — Je ne vous ferai pas d’autre offre, et la décision est à prendre immédiatement vieil homme. Je vous donne un million pour pouvoir emmener Antha, Anna et Stefan. Sergeï sembla déstabilisé. Personne n’osait bouger, c’était comme si le moindre mouvement avait le pouvoir de faire pencher la balance du mauvais côté. Dans l’esprit de Kami, l’argent était bien la seule motivation commune à la majorité des Hommes. Mais n’y avait-il pas des raisons plus profondes aux liens entre Sergeï et les deux jeunes femmes.

    Sans prévenir, Sergeï frappa violemment le visage de Kami avec le pommeau de sa béquille. Le sorcier s’effondra sur le sol, sonné. Le vieillard eut le temps d’ouvrir sa canne, en extirpant une lame qu’il cala sur la poitrine de Syrine sans lui prêter un regard.

    — Imbéciles. Vous ne faites pas le poids, ni vous, ni votre argent. Les filles resteront avec moi, et le bon à rien également. On ne m’enlève pas les plus belles pièces de ma collection, vous m’entendez ?

    Kami ressentit l’énergie de son agresseur pulser sur sa peau. Il était entouré par la magie de Sergeï comme si un étau tentait de le briser. Il gémit doucement. Rien ne pouvait arrêter la pression que le vieillard exerçait sur lui. Sa tête et son cœur menaçaient d’imploser. La force du vieux polonais était immense, comme si sa magie datait de plusieurs siècles et était impossible à contrer.

    Le jeune sorcier sentit son sang couler par sa bouche. Il n’était plus capable de faire appel à sa propre magie. Il était comme un simple mortel aux prises avec un sorcier ancestral. Ses muscles se relâchaient petit à petit, et la pièce s’assombrissait, emportant avec elle les visages de Syrine et de ceux qu’il avait tenté de sauver. Sergeï se baissa vers lui, et lui murmura à l’oreille :

    — Vous avez été sot de croire que mon Amour pour ma progéniture était négociable. Je suis prêt à tout pour les garder près de moi. Vous l’aurez appris en payant cette leçon de votre vie.


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