J'ai accepté implicitement le processus de transformation des têtards en grenouille, essayant de saisir le moment clé du changement, sans y parvenir.

Je n'avais pas encore conscience du concept de : programme, gène, mue,...

J'ai accepté le changement de relation avec mon frère. Il changeait lui aussi. De même, logiquement, je devrais aussi changer.

Indiciblement, mon regard sur les filles et notamment la voisine habitant un peu plus haut, non loin de la petite mare au bout du hameau, attirait mon attention différemment... Elle bombait le torse fiérement en passant devant moi, assis en tailleur, sur le muret en façade.

• Tu as grandit !...me lança t'elle un jour,avec un petit sourire entendu. Mais, je grandissais peu, comparé à mon frère, qui me dominait à présent d'une tête.
• Tu es mignon, mais trop petit !..., disaient les filles au collège.

Cela ne me tracassait pas outre mesure. J'avais confiance en moi et en mon devenir. Je vivais pleinement l'instant présent.

Installé, dans mon nouveau cadre de vie, le temps me poussait en avant, vers mon adolescence.

J'étais désormais rassuré, grâce aux éducateurs sérieux et bienveillants et à l'institution scolaire. Nous étions pris en charge et protégés, quoiqu'il en fut.

J'aurais bientôt une mobylette grâce à l'argent de poche octroyé par la DDASS : cinquante francs par mois, que j'économisais scrupuleusement en vue d'achats utiles, à mon sens.

Je devais ainsi remplacer le vélo demi-course, et avais également acheté un petit poste de télévision N et B pour mettre dans ma chambre.

Je me préparais à passer le BEPC.

Je tentais toujours d'améliorer ma maîtrise du dessin à l'encre de chine, inspiré par les aventures épiques de Conan le barbare, et avais fait le portrait au crayon de ma soeur, qui elle aussi, grandissait.