Lisa est maintenue par deux hommes portant des habits noirs et une cape avec capuche. Elle ne peut pas voir leur visage. Ils avancent dans un couloir sombre, aux murs de pierres délavées, tout juste éclairé par des torches. Les pieds de la prisonnière raclent le sol, une chaussure s'égare.

Ils se stoppent devant une large porte de bois, l'un des gardes l'ouvre tandis que l'autre pousse brutalement la jeune femme qui s'effondre sur le sol dur de la cellule. Avant que Lisa ne se relève, la porte est aussitôt refermée. Elle balaye sa prison du regard. L'endroit est sale et sombre, seuls quelques rayons de la lune s'infiltrent grâce à une lucarne qui est restée ouverte. De l'air frais s'engouffre dans la pièce la faisant frissonner. Ne voyant aucune échappatoire et étant fatiguée par le coup reçu à la tête, Lisa se met dans un coin en se recroquevillant sur elle-même pour se réchauffer. Elle lutte pour ne pas s'endormir, mais ses paupières deviennent de plus en plus lourdes jusqu'à se fermer complètement.

Soudain, un grincement se manifeste. Lisa se réveille en sursaut. De son coin, elle aperçoit un plus ample éclairage provenant de la petite fenêtre. Les soleils venaient tout juste de se lever. En s'aidant du mur, elle se redresse et fait quelques pas, malgré la tête qui lui tourne.

À ce moment-là, l'ouverture s'entrebâille et un cerbère apparaît. Là encore, elle ne peut pas apercevoir la tête de son bourreau, car elle est cachée par un large capuchon. Il l'attrape par le bras et la tire sans ménagement.

Ils passent le couloir, empruntent un escalier en colimaçon et traversent une cour La brusque lumière des soleils accentue la migraine de Lisa, un vertige l'assaille, ses jambes lâchent prise, elle trébuche lamentablement sur un sol poussiéreux. L'homme la relève en tirant fortement sur son bras. Elle n'a pas le temps de réagir, son tortionnaire ne prête aucune attention à ses implorations et la traîne jusqu'à la salle du trône.

Arrivée devant le siège souverain, l'homme fait une révérence, tandis que Lisa s'écroule à ses pieds. - Bonjour ma chérie, lance une voix connue de la jeune femme.
Une main manucurée vient doucement lui relever le menton.

- Maman, souffla Lisa en pleurant.

En face de Lisa se tient une grande femme élancée, d'une cinquantaine d'années. Ses cheveux bruns sont coupés très courts et mettent en valeur un visage doux et des traits tirés par l'excitation du moment. Ses yeux émeraude brillent d'une lueur de vengeance. Elle arpente la salle d'une marche gracieuse, son interminable robe traîne au sol.

- Ma chérie, j'attends cet instant depuis ta naissance. Grâce à toi, l'immortalité et le pouvoir seront miens, explique-t-elle sereinement.
- Depuis ma naissance, répète Lisa en se levant sur des jambes tremblantes. Je ne comprends pas.
- Ta fille adoptive met du temps à comprendre, lance une voix sifflante.

Soudain, une silhouette vêtue de noir lévite au centre de la pièce. Sa robe en dentelle et sa longue chevelure ébène papillonnent autour d'elle. Sa peau est d'une pâleur extrême, presque transparente. Mais ce qui effraie en outre Lisa sont ses pupilles : deux fentes ténébreuses.

La créature se pose délicatement sur plancher.

- Tu ressembles beaucoup à ton ancêtre, révèle-t-elle en approchant une main aux monstrueuses griffes.

Lisa recule de quelques pas, jusqu'à percuter un pilier de marbre.

- Morwën, arrête ! s'exclame la femme en rouge. Tu lui fais peur.
- On a assez perdu de temps. Tue-là.
- Non, je suis sûre que je peux la convaincre de venir de notre côté.
- Ma chère Annabelle, à l'époque, tu avais moins de pitié. Tu n'as pas hésité à assassiner sa mère, ta tendre amie.

Sur ses dures paroles, Lisa tressaille.

- Non ce n'est pas possible... Tu n'as pas... Mon dieu... Non... bégaie-t-elle en contournant la colonne.

Ne pouvant en supporter davantage, Lisa se met en courir maladroitement vers la porte.
Mais sa fuite est subitement stoppée par une intense fumée halée. Sous son regard exorbité, Morwën reprend forme devant elle. Sans perdre une seconde, le monstre la soulève tout en serrant sa gorge d'une de ses mains. Ses pieds, qui ne touchent plus le sol s'agitent. L'air commence à lui manquer, sa vue se trouble.

Brusquement, un cri déchirant et inhumain se fait entendre. Lisa retombe lourdement à terre tout prêt d'une flèche. Dessus est gravé la lettre A.

Lisa est mise debout par deux bras robustes et couverte par une cape en velours beige. Avant même qu'elle puisse émettre un son, elle est guidée vers la sortie avec précipitation. Un garde d'Annabelle se poste devant eux, les empêchant de quitter la pièce. Tout en tenant Lisa par le bras, Sébastien assène un violent coup de poing au visage et un autre au ventre de son ennemie. L'homme se courbe sous la douleur. Ils profitent de cette diversion pour s'échapper en courant.

Tout en traversant la cour en grandes enjambées, la jeune femme manque de tomber à plusieurs reprises. De son œil perçant, Sébastien aperçoit une flèche s'approcher d'eux, à une vitesse fulgurante. Sans perdre plus de temps, il attrape l'humaine et la porte tout en évitant les projectiles.

Lisa s'accroche à son sauveur comme à une bouée de sauvetage. Malgré la pagaille autour d'elle, elle se sent en sécurité, protégée et se laisse aller à la contemplation du regard doré de l'elfe. Un regard vif, intense et réconfortant. En confiance, sa tête se pose délicatement sur l'épaule de son bienfaiteur.

L'immense porte de la forteresse passée, Sébastien siffle à l'aide de ses doigts. Sans tarder, un cheval d'un blanc éclatant apparaît au loin. Devant son maître, il se lève sur ses deux pattes arrières en hennissant. Sébastien le caresse un instant puis aide Lisa à monter et se place derrière elle. D'un coups de talon, l'étalon part au galop et file entre les arbres de la forêt, suivi de près par trois autres elfes, garant de leur tranquillité.