Chapitre 13 - 1318

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Frigorifié, je fais les cent pas dans ma chambre. Je tourne en rond en me frottant les bras pour me réchauffer. Mila a la peau si douce. Ses doigts, ses doigts fins et délicats pianotant sur ma peau, ont éveillé en moi des sensations jusqu'alors inattendues. Sa douceur n'a rien à voir avec ce que j'ai connu auparavant. Son contact ne me brûle pas, ses doigts ne me laissent pas de marques sur la peau. Mila est douce. Lorsqu'elle me touche je me sens différent. J'en suis même à souhaiter qu'elle me caresse à nouveau. Je ne sais plus où j'en suis et je ne veux pas la décevoir.

Je me sens désormais pris au piège avec le sac de Margaux. Que va en penser Mila si elle l'apprend ? Je ne peux plus le rendre. Je m'assois sur mon lit et me prends la tête entre les mains. Je n'avais pas prévu Mila dans mes plans. Elle ne doit jamais savoir que je suis l'auteur du vol. Je dois absolument rattraper la bêtise que je viens de faire pour ne pas la décevoir. Je me lève et enfourne ce qu'il reste des affaires de Margaux dans mon sac à dos. Je choisis tout de même de garder sa clé USB. Elle pourra toujours servir. J'enfile mon blouson que je ferme jusqu'au cou. Je mets mes gants et mon casque en filant vers le garage, le sac à la main.En conduisant, je décide de la marche à suivre. Je tourne au coin de ma rue en prenant garde à ne pas glisser sur la ligne blanche du stop encore verglacée. Je fonce chez Margaux. J'ai désormais tout prévu.

Au fur et à mesure que je me rapproche d'elle, je ralentis. Elle ne doit pas m'entendre arriver. L'effet de surprise est essentiel à la réussite de mon intrusion. Je gare ma moto devant chez ses voisins puis je saisis dans ma poche son trousseau de clefs que je serre fort dans ma main jusqu'à son portail.    

Au moment d'insérer la clef dans la serrure, je suis pris d'une angoisse. J'ai mal au ventre et ma respiration s'accélère. Cette fille me fait peur. Je la hais mais elle m'effraie. Ses petites répliques cinglantes me détruisent. Je n'ose plus entrer. Je relève la visière de mon casque pour prendre une profonde inspiration. Je retire mes gants. Une bouffée d'air froid me saisit. Je tourne la clef et je baisse la poignée. En passant ce portail, je prends la décision de devenir différent. L'inoffensif Baudry disparaît totalement. À partir de maintenant, je ne subirai plus. Je fonce avec assurance à l'intérieur, la tête haute pour mettre à exécution mes intentions.

Pour la première fois, je découvre l'habitation de Margaux derrière la clôture qui la protège. Le bâtiment, plutôt récent est imposant, type maison d'architecte aux formes carrées et asymétriques. Le jardin arboré, à la pelouse verte, est parfaitement entretenu. Je suis le chemin en petits cailloux pour m'approcher quand les aboiements stridents d'un chien m'interpellent. Une minuscule boule de poils me fonce dessus et s'agrippe à mon pantalon en grognant. Je tente dans un premier temps de m'en débarrasser d'un bon coup de pied, mais après deux roulades sur quelques mètres, la bestiole revient à la charge. Ce n'est certainement pas ce cabot insignifiant qui va m'impressionner. Lorsque je m'abaisse à sa portée, il mord la main que je lui tend puis il se calme. Ses petites oreilles m'interrogent. Je retire mon casque et il finit par s'apaiser et remuer la queue.

— Hey, Plume ! l'appelle-je gentiment pour l'amadouer. Viens par ici ! T'as eu peur de moi ? Eh bien, tu as bien raison !

Après lui avoir flatté le flanc et caressé le dos, je le saisis brusquement par le collier. C'est en me relevant, content d'avoir eu le dernier mot, mon casque dans une main et le chien pendu dans l'autre que je découvre Margaux, les bras croisés en train de me dévisager depuis la terrasse. Je ne la reconnais pas de suite. Je l'observe quelques secondes avant de réaliser que c'est bien elle. Sans tous ses artifices, elle a perdu son allure distinguée que j'admirais tant. Je sens le relâchement d'un lendemain de fête trop arrosée. Les traits de son visage ont perdu leur grace et Margaux est quasiment insignifiante, emmitouflée dans son peignoir rose, les cheveux en bataille.

— Salut Margaux ! Comment tu vas depuis hier soir ? lui dis-je avec assurance.

— Lâche mon chien, Baudry !

Margaux semble très en colère contre moi. Elle me défie sans bouger, dans son peignoir rose qui laisse entrevoir ses longues jambes toutes fines. Je ne libère pas le chien pour autant. La pauvre bête se débat et se tord dans tous les sens. Elle suffoque, étranglée par son collier.

— T'es rentrée comment ?

— Mes voisins ont un double, qu'est-ce que tu croyais... Lâche mon chien, maintenant !

Je largue la bestiole qui s'écrase sur le sol et file en courant dans la maison.

— C'est costaud, ces petites bêtes...

— Qu'est-ce que tu veux ?

À la libération de son clébard, Margaux semble soulagée. Elle décroise les bras et met ses mains sur ses hanches, comme pour me barrer le passage. Mais, la voir en face de moi, tellement hautaine et sûre d'elle me donne de la force.

— Je viens pour l'exposé !

— Va te faire voir avec ça ! J'ai d'autres soucis en tête !

Je sors mon sac de derrière mon dos et je l'ouvre pour le vider complètement devant Margaux. Celle-ci comprend directement qu'il s'agit de ses affaires. Elle blêmit et se ronge le poing en constatant les dégâts. Puis elle lève les yeux vers moi, en pinçant ses lèvres.

— Il paraît que tu as perdu ton sac. Je l'ai retrouvé ! Et comme je suis sympa, je te le ramène ! 

— Putain, je le savais que c'était toi, espèce de taré !

Elle traverse le mètre de pelouse qui nous sépare pour me sauter dessus avec une violence inouïe. J'explose de rire en la voyant faire ce qui l'énerve davantage. Elle me griffe le visage et m'assène quelques coups, jusqu'à ce que je me décide à la maîtriser. Je la retourne avec facilité pour passer derrière elle. J'ai plusieurs années de judo à mon actif et pour moi c'est jeu d'enfant.

Instinctivement, je prends appui sur une jambe pour plus de puissance et glisse ma main droite le long de sa gorge pour saisir le revers de son peignoir au niveau de sa clavicule. Puis, avec vitesse et précision, je passe mon autre bras sous le sien et le remonte derrière sa tête. Ces gestes répétés des centaines de fois, sont devenus des réflexes et en un tour de main, je l'ai coincée ! Dès que je recule, Margaux vient appuyer son dos contre mon torse, cherchant à tout prix un moyen d'alléger la pression sur son cou. Elle se retrouve ainsi soumise à mon bon vouloir. En position de force, elle est désormais à ma merci.

Je l'oblige à reculer lentement vers sa maison. Le chien, furieux tel un pitbull à qui l'on prend son os, revient à la charge avec conviction. Je le dégage à nouveau d'un bon coup de pied qui le calme définitivement.

— Laisse-moi ! murmure Margaux en plantant ses ongles dans mon avant-bras.

Je n'ai qu'à forcer légèrement sur le bras que je lui bloque en l'air pour la faire suffoquer avec ma prise d'étranglement.

— Tu vas m'écouter bien attentivement maintenant !

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