Chapitre 9 - 1688

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Margaux est surprise par mon audace, mais rapidement, elle reprend sa bonne vieille habitude : m'ignorer. Pendant que j'essaie de me calmer, elle réussit à convaincre Alban de monter le son de la platine. Elle se déhanche au rythme de la musique qui tape un peu trop fort à mon goût, m'empêchant d'avoir une discussion avec qui que ce soit.

Assis sur le canapé, à côté de Flavien, le genou tremblant, je n'ai pas d'autre alternative que de me retrouver une fois de plus hypnotisé par sa silhouette parfaite. Elle danse bien la garce et nous ne voyons qu'elle au milieu des autres, dans sa petite robe blanche et moulante, qui épouse divinement bien ses courbes.

— Elle va se taper Axel, tu paries ? s'écrie Flavien, pour se faire entendre, sans quitter Margaux des yeux.

J'approuve d'un signe de tête, un sourire en coin s'esquissant sur mon visage. Je partage avec Flavien la même rancœur. J'ai l'impression qu'il tente tant bien que mal de cacher son dépit. Pour preuve, il ne s'intéresse à aucune autre fille présente. Il a pourtant fait l'effort de se saper. Il a troqué son éternel T-shirt contre un polo blanc qui met en valeur son teint hâlé et ses yeux noirs espiègles, provenant de ses origines espagnoles dont il est très fier. Plutôt grand et costaud, il pourrait séduire facilement n'importe qui avec son humour et sa belle gueule. En fait, c'est à lui que j'aimerais ressembler physiquement. Il est toujours décontracté et rien, mis à part Margaux, ne semble le décontenancer.

— Possible ! rétorqué-je en sirotant ma canette de Red Bull.

Cette boisson, chargée en caféine, fait soi-disant monter en pression. Ce n'est peut-être pas une très bonne idée de m'en enfiler autant, mais j'adore le goût et je n'ai pas envie de prendre autre chose. En évitant de la mélanger avec de l'alcool, comme en début de soirée, je me persuade qu'elle va m'aider à atteindre mon objectif : me détendre !

— Non mais c'est vraiment une pute, cette meuf ! C'est son troisième gars en moins de deux semaines, pleurniche Flavien en se rongeant frénétiquement les ongles.

L'ambiance dans la pièce a changé. La fête bat son plein et je m'ennuie à ses côtés. J'ai besoin de bouger, la Red Bull commence à agir et je me sens en forme.

Flavien, qui est connu pour être le bout en train, est simplement mort de jalousie ce soir. C'est décevant de sa part, je préférerais qu'il me fasse rire. Je n'ai pas souvent l'occasion de sortir, ni de faire la fête, alors j'aimerais bouger et danser comme tout le monde. Cependant, je me trouve ridicule et maladroit. La musique ne me parle pas, et c'est une véritable torture de me sentir observé par les autres.

Je me tourne à nouveau vers Margaux pour la surveiller. Je ne peux pas m'empêcher de vérifier ce qu'elle fait. Tandis que mes yeux reviennent automatiquement sur elle, je sens les pupilles de Mila me scruter.

Je ne suis pas à ma place dans cette soirée, je me demande ce que je fais là. Tout le monde s'amuse et moi, je suis là, planté sur un canapé à ne pas savoir quoi faire. Gêné par les oeillades insistantes de Mila, je ne tiens plus. Je me lève d'un coup et décide de proposer à Flavien de prendre l'air.

— Bonne idée ! me répond-il, lui-même agacé par le comportement de plus en plus aguicheur de son ex.

Pour sortir, je choisis délibérément de traverser la piste de danse pour foncer sur Margaux. Cette dernière se trémousse un peu trop près d'Axel en lui faisant ses yeux de biche. Au passage, je la bouscule et lui mets un bon coup d'épaule. Déstabilisée, elle perd légèrement l'équilibre et me fusille du regard. Je lui adresse alors mon plus beau sourire moqueur avant de lui tourner le dos. Je n'ai pas passé la porte qu'une main saisit la mienne.

— Baudry, m'interpelle Mila. Ne pars pas, viens danser !

— Je vais faire un tour...

En refusant l'invitation, c'est Margaux que je ne quitte pas des yeux pendant qu'elle s'agite sur la piste de manière chaloupée. Elle soutient mon regard et me méprise, se sentant protégée par son crush du moment. Elle se conduit en reine de la soirée et ça me rend haineux. Comme toutes les fois où elle m'a rabaissé et humilié. Elle a retrouvé cette attitude hautaine où rien ne peut l'atteindre et ça me met hors de moi. Je ne supporte plus sa vue. Je n'ai qu'une seule envie, une seule. Cette idée germe, se développe, étouffe toute autre pensée raisonnable qui pourrait naître en moi. Je n'ai plus qu'une obsession : la remettre à sa place. L'affaiblir. Lui nuire. Lui faire mal. Qu'elle comprenne ce que ça fait et que plus jamais elle ne reprenne le dessus sur moi ni ne me mette plus bas que terre.

Pour ce qui est de Mila, je dois bien reconnaître qu'elle est déterminée. Elle ne me laisse pas retirer ma main de la sienne. Je lève les yeux au ciel en soupirant. Je n'ai vraiment pas envie de danser. Je me sens ridicule et embarrassé de repousser Mila. J'aimerais bien lui faire plaisir mais je ne sais vraiment pas bouger en musique. Et j'ai tout simplement peur que Margaux se moque de moi une nouvelle fois.

— Allez, Baudry ! continue Mila en essayant de m'amadouer. C'est un slow, tu auras juste à tourner en rond !

D'un côté, Margaux est déjà dans les bras d'Axel, prête à lui offrir sa bouche alors que de l'autre Flavien me fait signe de me dépêcher à le rejoindre pour faire un tour en moto. Au milieu de tout ça, Mila s'agrippe à mon bras sans que je comprenne ce qu'elle attend de moi. Je suis tiraillé entre mon énervement, mon besoin de m'activer et mon amie. Je me résigne finalement à céder à cette dernière et accepte de la suivre.

Je ne sais pas comment la prendre dans mes bras, la proximité de nos deux corps me trouble. Je trouve ça gênant que ma jambe frotte sa jambe, que mon ventre touche son ventre et que ses bras enlacent mon cou. J'éloigne ma tête le plus possible en prenant soin de ne pas la regarder dans les yeux. Je suis crispé, tendu et j'essaie de penser à autre chose pendant que Mila, sur la pointe des pieds, se laisse aller contre moi.

— Alors, pourquoi tu viens plus au judo ?

Je prends sur moi pour ne pas laisser transparaître à quel point la sensation de nos deux corps comprimés, l'un contre l'autre, m'est désagréable. Je n'apprécie pas qu'elle colle sa joue contre ma joue mais je me sens obligé de lui répondre :

— Je te l'ai dit, j'ai arrêté !

— Et pourquoi tu arrêtes ?

Elle murmure ces mots à mon oreille, son souffle chaud caressant délicatement ma peau. C'en est trop, je ne supporte plus, je préfère m'éloigner un peu pour ne plus toucher sa peau et sentir sa chaleur.

— Et pourquoi pas ?

Elle s'esclaffe en appuyant sa tête sur mon épaule. L'espace d'une seconde, je m'immobilise. Son contact me déroute. Mais lorsque le rire de mon amie résonne à mes oreilles, je ne peux résister et je me joins à elle.

— C'est moi qui réponds par des questions, je te signale ! T'as eu peur de moi, avoue ! me lance-t-elle avec ironie.

— Effectivement !

Mila sait trouver les mots qui m'aident à me détendre. J'aime bien quand elle me taquine, ce n'est jamais méchant, juste amusant. Nous rions de bon cœur tous les deux et j'en oublie presque nos corps étroitement serrés jusqu'à la fin de la chanson.

Les lumières qui étaient éteintes se rallument et je me détache de mon amie pour me diriger vers la table où j'ai laissé ma Red Bull. En traversant le garage, je ne peux ignorer les gloussements de Margaux derrière mon dos. J'avale rapidement deux gorgées de ma boisson quand son rire résonne dans le garage. La musique est arrêtée. Je n'entends qu'elle. De plus en plus fort. D'autres rires se mêlent au sien alors je me retourne. Lorsque mon regard finit de balayer la pièce pour s'arrêter sur elle, cette dernière tente de se retenir de pouffer avant de laisser exploser son fou-rire, accompagnée de ses copines.

Mon sang ne fait qu'un tour. Ma mâchoire se serre, ma main se crispe sur mon gobelet, quelques gouttes de Red Bull coulent sur mes doigts. C'en est trop. Je n'en peux plus. Cette conne, je la déteste ! Elle va voir à qui elle a affaire.

D'un pas décidé, les yeux emplis de rage, je me dirige vers elle. À peine suis-je arrivé à sa hauteur qu'elle pointe son doigt manucuré dans ma direction. Les larmes aux yeux, elle s'adresse à ses amies :

— Hey les filles, pas besoin d'éclairage ce soir, Dubois et tous ses spots suffisent !

Je ne trouve rien à lui répondre. Je cherche désespérément, mais rien ne vient. Frustré, je lui balance ma Red Bull au visage. Le liquide coloré dévale le long de sa belle robe blanche. Je sens que tous les yeux sont sur nous. C'en est trop, je n'en peux plus. Sans laisser à Margaux le temps de réagir, je me précipite pour attraper mon casque et mon blouson. Je saisis au passage le sac à main de Margaux laissé au pied d'un fauteuil. Je dois foutre le camp d'ici, le plus vite possible.

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